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1 Introduction Générale

1.3 Les glaces du milieu interstellaire

Les glaces se forment par accrétion de molécules sur la surface du grain durant les quelques centaines de milliers d’années d’évolution de ces coeurs pré-stellaires [2]. Cette accrétion, très dépendante de la température, se fait très efficacement à basse température [17][34].

La compréhension et modélisation des glaces interstellaires, naturellement ardues en raison de la complexité de la phase solide, doit s’appuyer sur les contraintes que l’on peut mettre sur les propriétés physico-chimiques de ces glaces.

1.3. Les glaces du milieu interstellaire H2O CO2 CO N H3C H3OHXC N 0 20 40 60 80 100 Molécule

FIGURE1.2 – Abondances relatives à H2Odans les glaces interstellaires [16]

Contraintes expérimentales Plusieurs études expérimentales ont été réalisées afin

de pouvoir contraindre la structure des glaces dans les conditions du milieu inter-stellaire. Elles ont en particulier pu déterminer que ces glaces étaient amorphes et de basse densité [18][35] ; il a également été mis en évidence que les glaces sont très poreuses à basse température, et que les pores collapsent vers 60 K pour donner une glace compacte [36]. À des températures encore supérieures de l’ordre de 120 K la glace peut cristalliser en une structure cubique (Ic) [37]. À partir de ces températures, la glace peut également désorber [38]. Il est aussi montré que ces changements dans la structure de la couche de glace induisent un mouvement moléculaire du réseau d’eau et aussi des impuretés, "mélangeant" ainsi le milieu [14]. Au sein de ces glaces, les molécules peuvent aussi diffuser sous l’effet de la simple agitation thermique à la fois dans le volume, sur la surface de la glace ou dans les pores quand il y en a [39][40]. Tous ces résultats laissent à penser que les glaces dans les conditions du milieu in-terstellaire, ont probablement une structure relativement mobile dont la dynamique influence énormément la réactivité, la désorption et la diffusion des molécules qu’elles contiennent.

Contraintes observationnelles Beaucoup d’observations ont été réalisées

concer-nant la composition des glaces interstellaires et elles permettent de donner une idée des abondances moléculaires dans ces glaces[17][34][41]. Ces observations donnent ainsi des concentrations comme on peut les trouver dans la figure 1.2.

H2Oest l’espèce largement dominante dans ces glaces ce qui justifie que leur structure puisse être assimilée à celle de glaces pures avec quelques impuretés diluées. Toutefois, 7

certaines espèces s’y retrouvent en proportion non négligeable comme le montre la figure 1.2.

1.3.1 Modèles de glaces interstellaires

À partir de ces différentes contraintes, différents modèles de glaces ont pu être propo-sés avec des compositions moléculaires à la fois non uniformes et très dépendantes de la température du milieu environnant. Comme le montre la figure 1.3, ces glaces pourraient être constituées de plusieurs couches dépendant de la polarité des mo-lécules. En effet, les molécules polaires, en général moins volatiles se fixeraient plus

FIGURE1.3 – Vue Schématique d’un modèle de grain interstellaire recouvert de deux couches de glace : polaire (composée principalement d’eau) et apolaire (gaz très volatiles)

rapidement que les molécules apolaires. Ainsi, sur le grain, lorsque la couche de glace se forme à des températures très basses (environ 10 K), les molécules polaires conden-seraient en premier lieu en commençant par H2O. Ensuite, dans un second temps, les molécules non polaires se fixeraient sur la première couche pour former cette structure en oignon. Toutefois, ces molécules non polaires, comme la molécule la plus présente dans le milieu interstellaire H2, ne sont que très difficilement visibles en infrarouge ; ainsi leur présence dans les couche de glace est difficile à estimer

péremp-1.3. Les glaces du milieu interstellaire

toirement. Toutefois, différentes expériences permettant de mesurer leur énergie de désorption ont permis de justifier cette structuration en couches et de prévoir que l’abondance de ces molécules est peu importante pour des températures au delà de 50 K [42].

1.3.2 Réactions chimiques dans les glaces du milieu interstellaire

Il est maintenant admis que les glaces du milieu interstellaire servent de catalyseur à beaucoup de réactions astrochimiques. En effet, elles permettraient de mettre les réactifs en présence et également de "solvater" des molécules dans ce milieu, qui ne seraient pas stables en phase gaz. Plusieurs scenarii sont envisagés selon les pro-priétés des milieux dans lesquels elles se forment. La dépendance de la composition des glaces en fonction de la composition moléculaire et des propriétés physiques du milieu est montrée figure 1.4. Trois types d’environnements sont envisagés dans cette

FIGURE1.4 – Représentation schématique de la variation dans la composition des glaces interstellaires dans trois différents environnements. En haut à gauche, un nuage dans lequel l’Hydrogène est majoritairement sous forme atomique. En haut à droite, l’Hydrogène est majoritairement sous forme moléculaire. En bas, le grain est soumis à l’irradiation.

figure. Dans le premier cas de gauche, l’Hydrogène du milieu environnant est ma-joritairement sous forme atomique ; il en résulterait qu’il s’adsorberait relativement facilement sur la surface et diffuserait aisément dans le volume ce qui aurait pour effet d’hydrogéner complètement les molécules présentes dans la couche de glace et donner lieu à la formation de molécules comme le méthanol C H3OHet l’ammo-niac N H3dans les glaces . À l’opposé, le cas de droite montre un nuage dans lequel l’Hydrogène est sous forme moléculaire ; dans ce cas, le dihydrogène pourrait moins aisément se fixer sur la couche de glace et donc diffuserait moins dans la glace. La couche superficielle resterait donc avec des espèces non hydrogénées. Le dernier cas est relatif à un milieu traversé par des photons ultraviolets. Ces photons pourraient induire dans ces glaces une chimie radicalaire plus riche donnant lieu à la formation d’une plus grande variété de molécules. Une fois formées, les molécules désorbe-raient alors comme présenté sur la figure 1.5. Cette figure montre tout spécialement

FIGURE1.5 – Tableau résumant l’effet de la température sur la structure des glaces interstellaires déposées à 10 K [17].

comment désorberaient, en fonction de la température, les différentes couches de glaces à la surface d’un grain, dans une région de formation d’étoiles. En effet, lors de la formation stellaire, la température augmente localement depuis 10 K jusqu’à des températures proches de 150 K, durant la phase pré-stellaire, à savoir durant quelques dizaines de milliers d’années. les molécules les plus volatiles des glaces désorberaient les premières, suivies des molécules polaires. La couche de glace pourrait enfin désor-ber complètement si la température croît au delà de 100 K. Il pourrait alors subsister

1.3. Les glaces du milieu interstellaire

sur le grain quelques matériaux réfractaires, en général des molécules organiques complexes.

1.3.3 Implications dans la chimie prébiotique

L’étude effectuée dans cette thèse vise à étudier l’un des modes de formation des mo-lécules complexes dans les glaces interstellaires. L’un des objectifs assumé de l’étude de la complexification moléculaire dans le milieu interstellaire est la synthèse de matériaux à intérêt pré-biotique, à savoir des acides aminés [43], des sucres, des bases azotées, ou de leurs précurseurs. Plusieurs voies réactionnelles ont été proposées pour la formation de ces matériaux, dont la synthèse de Strecker [44].

Beaucoup d’énigmes subsistent pourtant entre la formation de ces molécules et l’ap-parition subséquente d’une forme de vie. En premier lieu, la vie que nous connaissons est basée sur des molécules chirales, asymétrie dont l’origine est encore mal com-prise. De plus la vie étant définie comme un système capable de s’auto-répliquer [45], beaucoup de recherches se penchent actuellement sur la formation de structures semblables à nos protéines et capables de catalyser la formation de leurs images. Enfin, l’un des problèmes majeurs est la survie de tous ces matériaux moléculaires complexes. En effet, lors de la formation du système stellaire, les glaces peuvent désor-ber, le matériau réfractaire être soumis à des conditions extrêmes qui peuvent à la fois détruire le vivier moléculaire présent [46] mais également être générateur de nouvelles structures moléculaires notamment dans les zones de chocs, avant d’arriver dans un environnement favorable [47].

Partie I

Diffusion de petites molécules dans