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Chapitre 5. Résultats de la recherche : Contribution des pratiques d’intervention à

5.1. Nature des services d’aide

5.1.1. Services d’aide en violence conjugale

Ici, nous allons aborder les services offerts, leurs retombées et les difficultés auxquelles ces organismes sont confrontés.

Les maisons d’hébergement offrent des services d’aide aux femmes victimes de violence conjugale. Les participantes sont toutes convaincues que ces maisons joueraient un rôle majeur dans la protection des femmes et leurs enfants contre leurs agresseurs. S’inscrivant dans le cadre de la relation d’aide, ces maisons d’hébergement œuvrent pour que les victimes puissent être accompagnées dans la confidentialité. Dans ce contexte, elles mettent l’accent sur les forces et la dévictimisation des victimes en vue de leur reprise de pouvoir sur leur vie. De même, elles organisent des séances d’information pour que les victimes connaissent leurs

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droits et devoirs. Au cours de ces sessions d’information, le rôle de certains acteurs et institutions leur est expliqué. En outre, cet accompagnement des maisons d’hébergement rentre dans le cadre du processus d’autonomisation des victimes. Ces maisons leur servent également de source d’énergie pour que les victimes soient les vraies actrices de leur vie. L’accompagnement des maisons d’hébergement ne se limite pas aux éléments cités plus haut. Elles servent aussi de lieu d’hébergement pour les victimes et en même temps, elles leur donnent de la nourriture. Cependant, les services sont généralement offerts dans un court délai de trois à six mois. Des répondantes ont évoqué :

« Plusieurs cas, nous on ne travaille pas toujours sur la question d’autonomisation. On travaille sur la femme, sur ses forces, sur sa dévictimisation, ses droits sur les ressources, sur les lois qui les protègent, sur le rôle de policier, sur le rôle de la justice, ses droits comment elle peut être protégée et qui peut avoir son autonomie financière dans ce sens-là » MH3.

« Non, nous, on ne fait aucune démarche, c’est elle qui fait les démarches, on est juste là comme l’énergie, ben, tu es capable, si tu ne comprends pas comment tu penses qu’on peut faire ça autrement, ces genres de choses. Mettons, qu’est-ce qu’elle peut faire avec ses enfants? quelles sont les ressources qui existent? de quoi tu as besoin? Vers où tu peux aller? Essaie d’appeler là, qu’est- ce qui disent, qu’est-ce que…, ce genre de chose, la pousser toujours à questionner les options qui sont là pour trouver la meilleure qui correspond le mieux à son besoin » MH2.

« Le logement et la nourriture sont offerts. Là, c’est à court délai, ce n’est pas long, c’est trois mois, des fois six mois » MH2.

Malgré le court délai d’hébergement, la plupart reprennent du pouvoir sur leur vie selon cinq participantes. Cette reprise de pouvoir leur permettrait de se fixer un objectif clair et de rester motivées dans le processus en vue de leur autonomisation économique. Si tel était l’une des visées des maisons d’hébergement, pour les interviewées, les conditions de succès à l’autonomisation seraient donc énormes. Elles trouvent qu’il faudrait agir dans la collégialité afin d’avoir des interventions efficaces. À cette condition, il faudrait ajouter le respect des victimes et de leurs décisions. Les interventions devraient s’inscrire dans le cadre du rythme des victimes et de leurs besoins. Ainsi, la prise en compte des intérêts de celles-ci les aiderait à se sentir mieux et pourrait être également une source de motivation dans le processus d’autonomisation. Il serait bon également de considérer la volonté et la détermination des victimes à être autonomes ou à se maintenir en emploi. Enfin, le soutien entre les femmes hébergées pourrait être déterminant à leur autonomisation économique. Deux participantes soulignent :

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« Je pense que c’est toujours parler en équipe comme équipe de travail pour être sûr qu’on ne se trompe pas, respecter la femme aussi parce qu’on ne peut pas la forcer non plus, on ne peut pas forcer le rythme de la femme et ses besoins. Je pense que ça, c’est une des choses ». (…) « Ça, c’est la base de l’autonomisation, n’importe quelle autonomie » MH4.

« Il y a une femme qui est revenue, elle a deux enfants, elle, elle avait été…, son conjoint, ça ne vaut rien, et elle, elle est canadienne, puis elle vivait de la violence conjugale, elle était en congé maternité parental parce qu’elle avait eu son deuxième enfant. Et puis, ça n’allait pas. Il y avait le problème de la garde qu’il fallait régler et puis elle n’était pas apte à retourner travailler. Elle a pris le temps. C’est une réussite parce que le temps qu’elle était en hébergement, elle a bénéficié quand même des conseils des personnes qui étaient là et surtout des expériences d’autres femmes pour aller voir son employeur » MH2.

La plupart des participantes ont évoqué les difficultés auxquelles les maisons d’hébergement sont confrontées dans l’intervention auprès des femmes victimes de violence conjugale. Elles ont peu de budget pour faire face à la forte demande d’hébergement et elles considèrent faire partie des organismes sous-financés par le gouvernement, ce qui est aussi reconnu par les intervenantes rencontrées dans le secteur d’employabilité. Même si elles ne disposent pas de suffisamment de places pour héberger toutes les femmes, elles s’évertuent à mettre quelque chose en œuvre pour répondre aux besoins des victimes et de leurs enfants, afin d’assurer leur sécurité, ce qui poserait les jalons du processus d’autonomisation des victimes. Une participante a affirmé :

« Les maisons d’hébergement-là, tu les vois sortir des lits quand il n’y a plus de place pour essayer et puis aller chercher un petit lit pour un bébé naissant qui était là avec sa maman. Ils font des miracles avec un rien, les maisons d’hébergement, c’est les sous-financées du système, c’est vraiment épouvantable » EMP 4.

Pour mieux aider les femmes victimes, selon deux intervenantes, les organismes d’aide en violence conjugale ont fait dernièrement des innovations en termes d’organisation et de gestion. En effet, d’anciennes victimes se sont impliquées directement ou indirectement à la gestion de ces organismes. Dans certaines structures, certaines sont membres du conseil d’administration tandis que, dans d’autres, elles sont habilitées de passer de temps en temps pour rendre visite aux intervenantes et aux nouvelles femmes victimes de violence conjugale. Dans les deux situations, leurs avis sont considérés pour l’amélioration des services afin de répondre efficacement aux besoins de nouvelles femmes victimes de violence conjugale. Ces innovations témoignent de la contribution des organismes d’aide en violence conjugale en ce qui concerne l’autonomisation des femmes victimes. Ainsi, l’expertise de ces organismes

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d’aide en violence serait incontournable dans l’amélioration d’abord du bien-être général des victimes ainsi que, ultimement, leur employabilité. Deux répondantes ont affirmé :

« (…) j’ai encadré une femme qui est venue récemment nous voir parce qu’on a changé notre façon de faire en maison. Avant les femmes hébergées ne pouvaient pas revenir, là maintenant elles peuvent revenir nous voir. Elles peuvent revenir si elles ont des problèmes de violence mais juste passer prendre un café, nous voir, elles ne le pouvaient pas à cause de la confidentialité. Maintenant elles peuvent revenir » MH2.

« Oh! j’y pense. On a certaines femmes qui maintenant font partie de notre conseil d’administration qui sont arrivées ici comme clientes, si je peux me permettre, elles ont été hébergées, nous les avons adoptées et elles nous ont adoptées aussi réciproquement. Tu sais notre conseil d’administration est un modèle qui est quand même participatif, un modèle de gestion participative plus, plus. On va essayer dès fois de faire des modifications internes sur le fonctionnement de la maison, on va consulter ces ex hébergées là. Vous autres, quand vous étiez à la maison, qu’est-ce que vous auriez aimé qu’on fasse telle chose? Y-a-t-il des choses qu’on n’avait pas améliorées? » MH1.

À ces innovations, les quatre répondantes, des services d’aide en violence conjugale, ont évoqué quelques conditions de succès dans l’accompagnement des femmes victimes. Elles seraient fières d’elles-mêmes si elles arrivaient à diminuer les conséquences de la violence conjugale vécues par les victimes. Pour cela, elles cherchent toutes les aides nécessaires pour qu’elles soient autonomes. Elles les aident pour qu’elles puissent obtenir des suivis psychologiques ou médicaux, des logements et bien autres. Une fois que toutes ces aides deviennent un acquis, les femmes peuvent travailler sur leur employabilité en se trouvant un emploi ou en retournant aux études. Une participante a affirmé :

« J’ai une femme dans la tête, elle est arrivée à la maison d’hébergement plusieurs fois. Toujours elle partait, le jour suivant elle revient. Finalement la dernière fois, elle est restée déjà quatre mois, je pense, sûrement plus que ça, mais la madame est arrivée dans une situation avec des conséquences graves psychologiques ».(…) « on a pu l’accompagner mais en respectant son rythme mais aussi un peu pousser pour avoir de l’aide aussi au niveau psychologique, au niveau de l’hôpital, au niveau clinique, et tout. On l’a accompagnée beaucoup. Cette femme est en train, actuellement, de faire une formation, c’est une femme qui a déjà son appartement mais c’était long pour qu’elle s’en sorte » MH4

Par ailleurs, les services d’aide en violence ne seraient pas les seuls à intervenir auprès des femmes victimes de violence conjugale. La prochaine sous-section mettra en exergue les services d’aide en employabilité.

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