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Chapitre 4. Résultats : Obstacles à l’autonomisation économique des femmes victimes de violence

4.1. Caractéristiques personnelles ou l’historique de la femme

Les caractéristiques personnelles ont été abordées par les intervenantes rencontrées comme un obstacle majeur à l’employabilité de la femme car elles jugent que la réinsertion des femmes victimes de violence conjugale passe aussi par la prise en compte de certains aspects tels que la scolarisation et la violence vécue dans la famille d’origine.

Même si le niveau de scolarisation varie d’une femme à l’autre, les participantes soulignent la prédominance des femmes moins scolarisées parmi les victimes de violence conjugale. Cet état de fait pose un véritable défi d’insertion car le niveau d’instruction pourrait déterminer la nature du travail que la personne pourrait faire. Il ressort que les

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femmes ayant peu d’éducation pourraient être vulnérables sur le marché de l’emploi étant donné que les employeurs, au Québec, recrutent généralement les personnes ayant complété leur secondaire cinq. Par conséquent, les femmes qui n’ont pas atteint ce stade d’étude, pourraient être vulnérables même si elles arrivent à s’insérer en emploi car elles auraient une certaine méconnaissance de leurs droits, ce qui pourrait porter atteinte à leur épanouissement en milieu de travail ou les conduire dans une situation illégale. Les intervenantes ont affirmé:

« […] Au Québec, si tu n’as pas ton secondaire cinq, tu n’iras pas loin, tu seras vulnérable sur le plan du travail et d’autant plus je pense que ça fait en sorte que les femmes ne connaissent pas leurs droits au niveau du travail et vont être dans les emplois qui vont être plus ou moins légal » MH1.

«[…] ce sont des femmes qui ont peu de scolarisation, donc on les dirige et souvent elles ont vu leur mère vivre de la violence conjugale ». EMP3

En plus de la faible scolarisation, les répondantes ont également évoqué le fait que certaines femmes victimes ont été témoins de violence conjugale à l’enfance. Cette exposition à la violence pourrait avoir des répercussions sur les victimes à l’âge adulte constituant un obstacle à leur insertion dans la vie active. Hormis la famille, certaines femmes peuvent avoir été témoins ou victimes de violence ou d’intimidation dans les contextes scolaires ou professionnels. Les répondantes ont dit :

« Le lien qui peut aller dans un sens comme dans l’autre c’est à dire qu’il peut avoir des femmes qui ont rencontré des difficultés de violence dans leur vie mais aussi il y en a qui rencontrent au moment présent aussi. Il y a des gens qui vont vouloir prendre leur autonomie, c’est-à-dire vouloir être indépendantes financièrement et puis retourner sur le marché de travail et il y a des gens qui sont sur le marché de travail déjà qui vivent des pressions, à la maison, qui viennent de leurs partenaires, de leurs partenaires proches finalement. Il va y avoir aussi des liens qui partent de plus loin encore ça peut remonter même à l’enfance. Donc, dans l’enfance, ils ont été témoins des situations de violence et tout ça et victimes d’intimidation à l’école et aussi avoir en emploi rencontré des situations d’abus ». EMP1.

«C’est énorme. Et puis le fait que, on a fait une étude dernièrement mais je n’ai pas la source non plus, qui disait que 50% des gens qui vivait de la violence au niveau adulte en avait vécu au niveau familial dans l’enfance. Et puis, le fait d’avoir vécu la violence dans l’enfance fait en sorte que l’école est arrêtée très tôt » MH1

Les interviewées trouvent également que, dans certaines familles, la violence conjugale est léguée de mère en fille d’où l’héritage de la violence conjugale. Cette situation pourrait amener certaines femmes à quitter très tôt le domicile parental et à se retrouver rapidement dans une situation de violence car leur perception est altérée par leur vécu et elles auraient des difficultés à reconnaître une relation saine. Les intervenantes ont évoqué :

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« Donc l’autonomisation des femmes, ça commence avec les jeunes filles dès l’école primaire et puis c’est l’image à projeter à nos enfants, c’est le message qu’on transmet aussi qui est important. Et on sait que malheureusement, ce n’est pas du tout la faute des femmes, loin de là. Donc on sait très bien que dans certains milieux, malheureusement il y a un héritage familial de violence. Et moi j’en ai vu dans la clientèle. La femme qui est ici est victime de violence. Ses filles le sont, sa mère l’était, sa grand-mère l’était. Eh! Ce n’est pas de la science-fiction. C’est de la clientèle que j’ai reçue». EMP3

Pour aller plus loin avec l’historique des femmes, certaines pourraient être confrontées, en amont, à des difficultés dans leur cheminement d’insertion en emploi puisqu’elles n’étaient pas actives sur le marché du travail pendant de longues années ou qu’elles travaillaient dans des secteurs moins valorisants. Ainsi, cette situation met en relief le manque d’expérience de certaines femmes et le découragement lié à des emplois moins rémunérés, comme obstacle à leur employabilité. Les intervenantes ont répondu :

« Par exemple, il se trouve que souvent elle n’a aucune expérience sur le marché du travail ou presque pas ou du moins les expériences de travail vont être tellement bénignes qu’il est mieux de rester sur l’aide sociale ». MH1

« En fait, ça peut être parce qu’elles manquent d’expérience, la précarité d’emploi, l’absence prolongée du marché du travail, la faible scolarité, des problèmes personnels, Le fait de ne pas pouvoir demander de l’aide auprès de certaines ressources, de ne pas se sentir prêtes à intégrer le marché de travail puis à laisser la situation. » EMP2

Par conséquent, au-delà des caractéristiques personnelles, les répondantes ont évoqué d’autres difficultés en lien avec l’autonomisation économique des femmes telle que la violence conjugale. La section suivante donnera plus de détails sur cet obstacle.