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Secteur pharmaceutique

Dans le document R APPORT DE MISSION (Page 51-58)

Descriptions des entreprises Galderma (Montréal)

Galderma est une entreprise pharmaceutique spécialisée dans la dermatologie. Elle appartient à parts égales à Nestlé et à L’Oréal. L’usine de Montréal se consacre à la production de crèmes, de gels, de lotions, de nettoyants et d’onguents. Une partie de ses produits sert au traitement des pro-blèmes dermatologiques, tels que le psoriasis ou la rosacée, alors que d’autres produits visent le marché de masse pour les soins de la peau.

La force de l’entreprise consiste à favoriser les activités de R&D tout en demeurant focalisé sur son secteur d’activité principal. Ces activités de recherche et développement s’effectuent dans trois centres spécialisés aux États-Unis, en France et au Japon. De plus, un des avantages concur-rentiels de l’entreprise est l’accès privilégié aux connaissances et à l’expertise de L’Oréal dans le domaine des soins de la peau, permettant ainsi un transfert important de connaissances. Au niveau de la concurrence, les principaux compétiteurs de Galderma sont Schering Plough, Johnson &

Johnson, Laroche-Posay, GlaxoSmithKline, Novartis ainsi que les entreprises productrices de pro-duits dermatologiques génériques. Galderma est présente sur tous les continents et utilise diverses stratégies d’expansion de marché. Par exemple, lorsqu’elle a voulu percer le marché japonais, l’entreprise y a implanté un centre de R&D permettant ainsi de procéder à des tests cliniques sur le marché ciblé. Grâce à cette approche, Galderma a été en mesure d’adapter ses produits aux ca-ractéristiques dermatologiques des japonais en plus de développer une meilleure connaissance du marché pour le marketing des produits.

Tong Ren Tang (Beijing)

En affaires depuis 335 ans, Tong Ren Tang est la plus importante entreprise de médicaments tradi-tionnels chinois. Leur marché est principalement concentré en Chine ainsi que dans les différentes communautés chinoises à travers le monde. L’objectif premier de l’entreprise est de percer davan-tage le marché occidental mais les différentes mentalités constituent une barrière importante à la promotion des produits.

Un avantage concurrentiel important de l’entreprise provient du contrôle de ses matières premières puisqu’elle cultive elle-même les plantes et exploite elle-même les sites miniers nécessaires pour alimenter ses besoins pour la production. De plus, le contrôle de son approvisionnement lui permet d’éviter les pénuries de matières premières.

Tong Ren Tang possède plusieurs points de vente au Canada et a d’ailleurs implanté un siège social à Vancouver.

Libang Pharmaceuticals (Xi’an)

Xi’an Libang Pharmaceuticals est une entreprise privée produisant des médicaments génériques.

À l’heure actuelle, une dizaine de produits sont déjà commercialisés, dont des anesthésiants par injection, et des tests cliniques pour un traitement anti-cancer à base de liposomes sont actuelle-ment en cours. À cet effet, l’entreprise collabore avec UBC (University of British Columbia) pour l’avancement du projet. Le traitement anti-cancer de l’entreprise est déjà approuvé par la FDA (Food and Drug Administration aux États-Unis) et l’entreprise poursuit sa démarche d’accrédi-tation pour le reste de sa production. Présentement, le marché de Xi’an Libang Pharmaceuticals se concentre majoritairement en Chine et des démarches sont en cours pour étendre ce marché à l’Amérique du Sud.

Jiaotong University Pharmaceuticals Group (Xi’an)

Fondée en 2002, Jiaotong University Pharmaceuticals Group est associée à l’Université Jiaotong de Xi’an. L’entreprise se spécialise dans le domaine de la médecine traditionnelle (comprimés et capsules), tout en produisant quelques médicaments de composition chimique. Le Groupe ne fait pas de recherche à l’interne et son rôle principal est de développer et commercialiser les travaux de recherches effectués à l’Université Jiaotong de Xi’an. Les ventes annuelles de l’entreprise to-talisent 500 millions de CAD et son marché est principalement concentré en Chine. L’entreprise est également présente en Afrique où elle a notamment commercialisé des traitements contre le paludisme. Ceci constitue un premier pas vers une stratégie d’expansion du marché même si cette approche ne s’intègre que dans une vision stratégique à long terme. Jiaotong University Pharma-ceuticals Group bénéficie de la renommée de l’Université Jiaotong de Xi’an, de la qualité et la renommée de ses produits ainsi que d’une équipe de marketing performante pour distancer ses compétiteurs dans l’industrie pharmaceutique.

Jinling Corporation Limited (Nanjing)

Fondée en 1998, Jinling Corporation Limited est une entreprise pharmaceutique qui œuvre dans la médecine traditionnelle et de composition chimique. Leur offre de produits regroupe trente médi-caments visant principalement le marché chinois. Les médimédi-caments se présentent sous différentes formes telles que des sirops, des injections et des comprimés. À court terme, aucune exportation n’est prévue puisque l’entreprise estime que le marché international est peu réceptif à l’égard des produits de médecine traditionnelle chinoise. Par conséquent, les démarches pour les certifications de GMP (Good Manufacturing Practices) internationales ne sont pas encore entamées. La recher-che et le développement s’effectuent en collaboration avec les universités dans une proportion de 50%.

Secteur pharmaceutique et modèles d’affaires dominants

L’industrie pharmaceutique en Chine est globalement composée de deux types d’entreprises.

D’abord, les entreprises majoritairement financées par l’État, dont les moyens financiers sont très importants et qui sont généralement cotées en bourse. Ensuite, les entreprises privées, disposant généralement d’un capital réduit et dont les installations sont plus rudimentaires. Les entreprises de

ce type sont davantage axées sur l’ingénierie inverse, c’est-à-dire que leurs ingénieurs s’efforcent de découvrir les composantes de certains produits pharmaceutiques déjà existants sur le marché pour ensuite produire et distribuer des produits équivalents. Sachant que la recherche et le dévelop-pement nécessitent des investissements très importants, il est prévisible que les entreprises ayant moins de ressources financières tentent de faire leur place dans l’industrie par des méthodes moins risquées, même si ces pratiques semblent moins traditionnelles d’un point de vue occidental.

Par ailleurs, depuis l’adhésion de la Chine à l’OMC, une tendance se profile de plus en plus pour respecter la propriété intellectuelle, incitant ainsi ces entreprises à envisager un investissement en R&D dans une perspective à court terme. En ce qui concerne les grandes entreprises supportées par l’État, il est fréquent d’observer une collaboration universitaire pour la R&D. Ainsi, les labo-ratoires universitaires peuvent mettre au point de nouveaux produits et ces entreprises se chargent de la transition vers la production industrielle et la commercialisation.

Analyse et comparaison entre la Chine et le Québec

Un des éléments qu’il a été possible de constater lors de la mission en Chine est l’effort fait par les entreprises pour donner une bonne image de leur industrie. En effet, la Chine a souvent été associée dans l’esprit des occidentaux à des images d’insalubrité et de saleté. Afin de rassurer l’Occident quant à la qualité de ses produits, la Chine mise donc sur une campagne d’image beau-coup plus sophistiquée que ce que l’on peut observer au Québec en ce qui a trait à la propreté et au respect des normes de qualité. Ce souci pour l’image débute à l’extérieur de l’entreprise avec une présence importante de verdure, de bâtiments neufs et imposants ainsi que des terrains minutieu-sement entretenus. À l’intérieur de l’entreprise, on retrouve des locaux administratifs spacieux et lumineux. Les visiteurs doivent ensuite se prêter à une mascarade consistant à revêtir des chaus-sons et combinaichaus-sons afin d’éviter toute contamination des produits. Toutefois, les visiteurs ont tôt fait de remarquer que les employés manipulant des produits ont eux-mêmes très peu d’équipement de protection (absence de gants, de lunettes, de couvre-têtes) et que les bâtiments n’ont pas été conçus pour prioriser la qualité de la fabrication. Ces observations permettent donc de faire divers constats. D’abord, davantage d’efforts sont investis dans l’image plutôt que dans le respect des normes internationales. Ensuite, la sécurité des employés n’est pas priorisée. De fait, en visitant les installations de production, il a souvent été possible de constater qu’ils n’étaient munis d’aucune protection les tenant à l’abri des produits dangereux qu’ils pouvaient manipuler. À cet effet, des risques d’erreur de manipulation sont possibles dû à la déficience de l’étiquetage et du rangement des produits.

Tout cela constitue un écart majeur avec l’industrie pharmaceutique québécoise, au sein de la-quelle la sécurité des employés, l’ergonomie et la conception des usines de fabrication sont scru-puleusement étudiées. En effet, les entreprises québécoises peuvent se voir retirer immédiatement leur licence suite à une inspection révélant des risques de contamination du produit. De plus, les retombées de la non-qualité sont très importantes. Dans le cas où un individu subit un préjudice pour avoir utilisé un produit contaminé, l’entreprise peut être poursuivie et y perdre sa réputation.

Or, en Chine, les causes du préjudice ne seraient probablement pas identifiées, les citoyens n’en se-raient pas informés et les poursuites s’avèrent être rarissimes. Par ailleurs, la Chine n’est toujours

pas dotée d’une entité efficace telle que la CSST pour assurer la sécurité des travailleurs, bien que les conditions de travail se soient certainement améliorées depuis les dix dernières années.

En ce qui concerne le travail des employés en Chine, nous avons constaté que ceux-ci sont presque toujours silencieux et isolés, favorisant ainsi la productivité. Bien entendu, nous n’avons rencontré aucune entreprise syndiquée. Cette façon de faire est bien différente des conditions de travail au Québec et ne considère pas la pertinence de l’esprit d’équipe, de l’initiative et du partage des idées.

Au Québec, la plupart des entreprises se veulent plus enclines à écouter les idées et les opinions du personnel, favorisant le travail d’équipe afin d’exploiter le plein potentiel de ses employés. Ceci génère toutefois de nombreux périodes d’improductivité reliées aux conflits interpersonnels, aux discussions pour les consensus et au flânage, phénomènes très peu présents en Chine.

En dernier lieu, signalons que le Québec a entamé depuis plusieurs décennies une réflexion sur l’éthique dans le domaine médical et pharmaceutique, alors que la Chine n’en est pas encore là.

Au Québec, des centres de bioéthiques tels que celui de l’IRCM tracent des balises, où du moins des pistes de réflexion en collaboration avec le gouvernement et les universités. Ceci permet aux entreprises de distinguer ce qui est socialement acceptable en matière de R&D et les oblige à réfléchir à ces questions éthiques. Toutefois, aucune des entreprises pharmaceutiques chinoises rencontrées n’avait entrepris de réflexion en ce sens. Les questions posées à ce sujet ont semblé les surprendre.

Informations aux entreprises songeant à un partenariat en Chine

Les craintes des entreprises occidentales face à l’ascension chinoise sont nombreuses. Plus parti-culièrement dans l’industrie pharmaceutique, elles sont inquiètes par les parts de marché de plus en plus importantes des entreprises de médicaments génériques. Ainsi, Galderma nous mentionnait qu’elle a des craintes face à l’avenir car les compagnies de médicaments génériques ne font pas de R&D, donc ne font pas d’investissements importants. Les investissements massifs en R&D sont donc uniquement faits par les entreprises de médicaments non-génériques. En effet, pour pouvoir réussir à se maintenir sur le marché et faire face à la force de production des entreprises généri-ques, les entreprises non-génériques doivent toujours rester à l’avant-garde des connaissances.

Ainsi, en poursuivant avec l’exemple de Galderma, l’entreprise cherche donc à diminuer ses coûts de production et de gestion au plus bas possible, éventuellement au détriment des employés qué-bécois. La compagnie se trouve dans l’obligation d’agir de la sorte pour être à même de baisser ses prix et de pouvoir investir en R&D sans se placer dans une situation financière difficile. Plusieurs entreprises pharmaceutiques québécoises seraient par conséquent en faveur d’une loi obligeant les entreprises génériques à investir dans la recherche.

En ce qui a trait à la vision du marché occidental pour les industries de médecine traditionnelle chi-noise, la compagnie Jinling Corporation soutient que ce type de médecine est difficilement expor-table. La raison principale de cette assertion repose sur le manque de connaissances scientifiques sur les réels effets des ingrédients composants les produits. En effet, les médicaments traditionnels chinois sont issus de recettes ancestrales: ce sont des recettes conservées de génération en géné-ration qui ont peu à peu évolué au fil des ans. De plus, ce sont les effets combinés des ingrédients qui produisent des bienfaits pour la santé et aucun effort sérieux n’a jamais été fourni pour en

comprendre les mécanismes d’action. La seconde raison qui nuit à l’exportation des médicaments traditionnels est que ceux-ci ne suivent pas l’approche occidentale de la médecine. En effet, ce sont des produits ayant un effet à long terme sur la santé: leur utilisation constitue une hygiène de vie et sont souvent utilisés en guise de prévention. C’est donc une approche de la médecine tout à fait différente de l’optique occidentale qui prône un effet rapide sinon instantané du médicament et qui ne s’inscrit pas dans une démarche globale de vie. Ceci laisse donc croire que les entreprises de médecine traditionnelle chinoise ne représentent pas une menace pour l’industrie pharmaceutique occidentale puisqu’elle s’inscrit dans une ligne de pensée différente. Il est fort peu probable qu’el-les puissent drainer vers ses produits toute la clientèle habituée aux médicaments occidentaux. À la rigueur, elles pourraient faire de la compétition aux entreprises d’homéopathie et de soins natu-rels. Un avantage compétitif des entreprises chinoises face aux entreprises canadiennes du même domaine serait alors le fait qu’elles produisent leurs propres matières premières.

L’intégrité des employés est un autre point qu’il est intéressant d’analyser dans ce rapport. Tel que mentionné par un dirigeant d’entreprise chinoise ayant fait ses études au Canada, le plus grand défi d’un gestionnaire en Chine est de gérer l’intégrité de ses employés et de son industrie car le système de valeurs sociales est différent. Des décennies de communisme ont emmuré les chinois dans un système où ils ne sont pas habitués à penser par eux-mêmes. Pendant plusieurs années, la créativité était synonyme de danger et a donc fait des chinois un peuple enfermé dans ses idées et peu habitué à développer son sens critique. Le juste retour du balancier les amène à penser qu’après des années d’exploitation par les occidentaux, ils sont maintenant en droit de tirer leur propre épingle du jeu. Ceci explique le fait que certaines pratiques pourraient sembler non intègres aux occidentaux.

Le non-respect de la propriété intellectuelle est un exemple de pratiques peu intègres. En effet, avec le foisonnement des entreprises de médicaments génériques, on ne peut nier que les chinois utilisent allègrement l’ingénierie inverse sans aucun respect pour les droits de brevets. L’industrie elle-même ne prend pas les devants pour s’engager dans des lois et règlements pour assurer la propriété intellectuelle. Depuis son adhésion à l’OMC, elle commence à le faire en réponse aux exigences de la communauté internationale. Toutefois, dans les faits, les efforts pour imposer des lois qui créent des restrictions dans leur ascension économique sont modestes.

Dans la suite de sa campagne pour assurer à son industrie une bonne image, le gouvernement chinois joue sur l’ambiguïté des termes. Il se permet d’utiliser un vocabulaire emprunté à des stan-dards occidentaux pour certifier sa production. Toutefois, la signification de ces termes représente un niveau de qualité différent. Par exemple, on retrouve le terme CGMP correspondant au Good Manufacturing Practices in China qui fait clairement référence au standard occidental des GMP.

Or, les critères de qualité associés aux CGMP s’écartent substantiellement des critères occiden-taux et les chinois réussissent ainsi à se donner une crédibilité internationale par un simple jeu de langage. Par contre, il est important de préciser que certaines entreprises chinoises ont réellement atteint un niveau de certification conforme aux standards internationaux. Pour les entreprises cana-diennes qui souhaiteraient faire une association avec une entreprise chinoise, il serait donc impor-tant d’aller vérifier sur place à quoi correspondent les réels critères de qualité. Une première visite des installations pourrait s’avérer insuffisante puisque celle-ci risque de demeurer superficielle.

Pour un visiteur étranger, plusieurs portes sont closes, mais à mesure que l’intérêt et le sérieux de la démarche d’affaire sont établis, les dirigeants sont plus enclins à la transparence. Il faut donc faire preuve de beaucoup de détermination pour obtenir un rendez-vous, une visite, un contrat, etc. Compte tenu de l’engouement actuel des entreprises désirant investir en Chine, les chinois se trouvent maintenant dans une situation où l’offre est supérieure à la demande. Ils connaissent leur valeur sur le marché international des affaires, ils profitent de leurs avantages compétitifs et, à compétences égales, feront affaire avec l’entreprise démontrant l’intérêt le plus soutenu. Après des années d’exploitation par l’Occident, ils sont dorénavant en position d’exiger que les investisseurs se plient à leur façon de faire des affaires et à leurs traditions. On assiste à un redressement de la fierté nationale qui avait été bafouée dans les dernières années.

Dans le document R APPORT DE MISSION (Page 51-58)