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Dans le but de tester la capacité des participants à détecter des cyclistes, nous avons élaboré un scénario de conduite bien particulier comme illustré dans la Figure 16 ci-dessous. Par « scénario de conduite », nous faisons référence à un itinéraire dans un environnement routier virtuel pour lequel plusieurs paramètres comme la trajectoire de déplacement de certains objets (e.g., véhicules, cyclistes) peuvent être programmés. La création d’un tel scénario de conduite nous a ainsi permis de proposer des situations comparables pour chaque participant.

Figure 16. Schéma du scénario de conduite et des cinq situations de détection des cyclistes

Dans le scénario proposé, nous avons recréé cinq situations spécifiques dans lesquelles les participants devaient conduire et interagir avec d’autres usagers de la route, notamment des cyclistes, comme illustré dans la Figure 16 ci-dessus. Dans chaque situation, les cyclistes étaient en mouvement et nous avons veillé à ce que leur comportement soit le plus écologique possible (e.g., remontée de file dans le trafic). Notons également que nous avons fait en sorte de minimiser les risques de collisions

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Itinéraire du participant Véhicule du participant Véhicule Piéton Cycliste Feu tricolore Ligne de STOP

entre le participant et les cyclistes afin d’éviter qu’une collision ne modifie l’état émotionnel des participants. C’est également pour cette raison que la situation 5 de « tourne à droite », situation critique étudiée dans de précédentes études (e.g., Räsänen & Summala, 1998; Rogé et al., 2017), fut positionnée à la fin du scénario de conduite. Concernant les piétons, ces derniers étaient positionnés sur les trottoirs. Ils servaient à rendre l’environnement routier plus réaliste, mais aussi à répartir l’attention de l’automobiliste sur l’ensemble de la scène routière.

Enfin, la longueur et la forme générale de l’itinéraire proposé ont été choisies afin de limiter le « mal du simulateur » (ou cybersickness). Ce phénomène entrainerait des nausées pouvant parfois mener à des vomissements. Il serait notamment provoqué par un décalage entre ce qui est perçu visuellement par le participant et ses perceptions vestibulaires. Selon Lo et So (2001), des mouvements trop amples, de même qu’une trop longue durée d’immersion dans ce type d’environnement virtuel, seraient propices à l’émergence de ces sensations. Par conséquent, afin de minimiser le mal du simulateur tout en conservant un environnement urbain réaliste (qui implique de nombreuses intersections), nous avons limité le nombre de virages et proposé un scénario de conduite court (quatre à cinq minutes).

Procédure et mesures

Quarante-cinq personnes ont pris part à cette étude. Après avoir satisfait aux critères d’une vision suffisante pour conduire, ils commençaient par réaliser une phase d’entrainement à la conduite afin de se familiariser aux sensations générées par le simulateur. Une fois cette phase terminée, les participants étaient équipés d’électrodes cardiaques et d’un eye-tracker (voir la section « Oculométrie et détection d’usagers vulnérables » (p.16-17) et l’Annexe 2 pour quelques rappels sur les possibilités offertes par ce type de dispositifs). Ils devaient ensuite se plonger dans un état de repos afin qu’une référence (ou baseline) cardiaque puisse être enregistrée pour chaque participant. Ensuite, les participants étaient aléatoirement exposés à l’un des trois extraits de film utilisés dans la première étude de thèse, ce qui nous permit d’obtenir nos trois conditions expérimentales (i.e., une induction de colère forte, une induction de colère modérée et une condition contrôle). Enfin, suite au visionnage des extraits, les participants devaient réaliser une tâche de détection d’UV sur le parcours de conduite décrit précédemment (voir Figure 16 ci-avant). Comme pour la phase d’entrainement, les participants devaient indiquer le plus rapidement possible les différents UV rencontrés sur leur chemin en faisant des appels de phare et déclarant verbalement les différents d’usagers aperçus. Avant et après l’exposition aux extraits de films ainsi qu’à la fin de la tâche de détection d’UV, les participants devaient compléter des Roues des Émotions en indiquant les intensités émotionnelles maximales ressenties

EXPÉRIMENTATIONS : Deuxième étude de thèse

pendant les extraits de films et la conduite. Un schéma récapitulatif du protocole proposé ci-dessous dans Figure 17 permet également de mieux se représenter le déroulement de l’expérimentation.

Figure 17. Schéma du protocole de la deuxième étude de thèse

Plusieurs types de données ont été collectés dans le cadre de cette étude. Tout d’abord, des enregistrements cardiaques ont été réalisés durant la phase de baseline cardiaque, lors de l’exposition aux extraits de films ainsi que lors de la tâche de détection d’UV. Comme dans la première expérience de thèse, nous avons analysé la fréquence cardiaque et la variabilité de la fréquence cardiaque. Notons toutefois que dans cette étude nous avons étendu le nombre d’indices étudiés en intégrant des métriques issues de l’analyse fréquentielle de la variabilité de la fréquence cardiaque. L’utilisation d’un eye-tracker (Tobii Glasses I), a également permis d’enregistrer la taille de la pupille. L’ensemble de ces mesures cardiaques et oculométriques avait pour principal objectif de nous aider à qualifier l’état émotionnel des participants (cf. Annexe 1 et Annexe 2 pour des compléments sur les mesures cardiaques et pupillaires).

Toujours dans l’optique d’évaluer l’état émotionnel des participants, nous avons mesuré l’intensité des émotions négatives ressenties grâce à la Roue des Émotions. À ce sujet, il est important de souligner que dans le cadre de l’article résultant de cette deuxième étude (présenté ci-après), seule l’intensité de colère ressentie par chaque participant a été analysée. L’analyse de l’intensité des autres émotions négatives grâce à l’Indicateur Global n’a pas été intégrée au papier puisque la publication de l’article relatif à l’élaboration de cet indice (cf. 1re étude de thèse) est toujours en cours. Les analyses relatives à cet Indicateur Global ont cependant été présentées dans une partie « Résultats complémentaires » située après le second article de thèse dans ce manuscrit (p.109-110).

Le dernier ensemble de mesures utilisé permettait d’évaluer les performances de détection des cyclistes. Il s’agissait d’indices, d’une part, renseignant sur le temps nécessaire au participant pour

Extrait de film NEUTRE Extrait de film COLERE MODEREE Extrait de film COLERE FORTE Chronologie (N = 45) cardiaqueBaseline Tâche de détection d’UV Entrainement conduite Calibration eye-tracker

réaliser l’appel de phare après avoir porté son regard sur le cycliste, d’autre part, sur la durée du premier regard porté sur le cycliste. Enfin, nous nous sommes également intéressés à une métrique particulière, l’amplitude des saccades, laquelle nous a permis d’étudier l’exploration visuelle globale des participants au cours de la conduite.

Synthèse et discussion des principaux résultats

Les résultats de cette étude ont encore une fois montré que les extraits de films utilisés donnaient lieu, au niveau subjectif, à deux intensités de colère distinctes ainsi qu’à un état émotionnel « neutre » comme cela fut précédemment observé dans la première étude de thèse. L’analyse des données pupillaires et cardiaques durant l’exposition aux différents extraits de films a également révélé un pattern physiologique comparable à celui mis en évidence dans la première étude de thèse. En effet, nous avons une nouvelle fois pu identifier une dominance du système nerveux parasympathique pour les groupes colère, dominance que nous avons interprétée comme la mise en place de stratégies de reappraisal.

Concernant les résultats obtenus dans la tâche de détection d’UV, l’analyse des données cardiaques et pupillaires ne nous a pas permis d’avancer une interprétation claire du pattern physiologique observé. En effet, la gestion des ressources attentionnelles ou encore l’activité motrice, conjointement à l’émotion induite par les extraits de films, ont pu influencer l’activité physiologique enregistrée au cours de la conduite rendant ainsi l’interprétation du pattern observé assez complexe. Par ailleurs, aucun effet significatif de l’intensité de colère générée par les extraits de films utilisés n’a été observé sur les mesures relatives à la capacité des participants à détecter les cyclistes au cours de la conduite. Seule l’amplitude des saccades, témoignant d’une stratégie particulière d’exploration visuelle, était plus réduite chez les participants ayant été exposés aux extraits étiquetés colère. L’ensemble de ces résultats laisse ainsi penser que l’émotion de colère, préalablement induite par les extraits de films, lesquels ne faisaient pas référence à la sécurité routière, ne permettrait pas d’améliorer significativement la capacité des automobilistes à détecter les cyclistes au cours de la conduite.

EXPÉRIMENTATIONS : Deuxième étude de thèse

Article 2

Lafont, A., Rogé, J., Ndiaye, D., & Boucheix, J.-M. (2018). Driver’s emotional state and detection of vulnerable road users: Towards a better understanding of how emotions affect drivers’ perception using cardiac and ocular metrics. Transportation Research Part F : Traffic Psychology and Behaviour, 55, 141–152. https://doi.org/10.1016/j.trf.2018.02.032

Driver’s emotional state and detection of vulnerable road users: towards a