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LE SAVOIR DE LA PRATIQUE

Dans le document Les savoirs de la pratique (Page 93-115)

LExisTENCE pRÉCÈdE l'EsSENCE...

MarcWEISSER*

Résumé Leprésentarticles'interroge non pas surlescontenus des savoirsde la pratiquemais,enamont, surleurpossible nature et surleurs rap¬

ports avec les savoirs théoriques. Des conséquences en sonttirées quantàla formationdesenseignants, ens'appuyantsur lecasparti¬

culierde la relation de tutelleétudiantprofesseurdesécoles

-

maîte

formateur. L'hypothèse est celle de l'importance de l'approcheher¬

méneutique,à base de confrontationdespoints devueà proposd'un même sujetd'observation et de pratique. En effet, la complexitédes situations éducatives voue à l'échec toute tentative d'exhaustivité scientifique.Chaque praticien-acteur a dès lors une importante marge demanÀuvres'agissantdel'interprétation qu'ilretientrelati¬

vementàcequ'ilaperçu etfait.

Abstact

In this paper, the writer does notwonderaboutthe contents ofthe knowledgeofpractice,butbeyondthem abouttheir relationship with theoretical knowledge. He draws consequences as forteachertrain¬

ingbyrelyingon thespecialcoseofthetutorialrelationshipbetween training student and supervisor. The assumption is that the best approach ishermeneutic;itisbasedon theconfrontation ofdifferent viewpoints about the same subject

of

observation and practice.

Indeed, thecomplexity

of

theteaching situations dooms anyattempt atscientificexhaustivenessto failure.Everytainingteacherthushas much room for manoeuvre concerning the interpretation he orshe retainsaboutwhatheorshe hasperceivedand done.

95

MarcWeisser,IUFMd'Alsace;GREEF,UniversitédeHaute-Alsace, Mulhouse.

Pages93-102 RECHERCHEctFORMATION N° 27 - 1998

LE

SAVOIR DE LA PRATIQUE

LExisTENCE pRÉCÈdE l'EsSENCE...

MarcWEISSER*

Résumé Leprésentarticles'interroge non pas surlescontenus des savoirsde la pratiquemais,enamont, surleurpossible nature et surleurs rap¬

ports avec les savoirs théoriques. Des conséquences en sonttirées quantàla formationdesenseignants, ens'appuyantsur lecasparti¬

culierde la relation de tutelleétudiantprofesseurdesécoles

-

maîte

formateur. L'hypothèse est celle de l'importance de l'approcheher¬

méneutique,à base de confrontationdespoints devueà proposd'un même sujetd'observation et de pratique. En effet, la complexitédes situations éducatives voue à l'échec toute tentative d'exhaustivité scientifique.Chaque praticien-acteur a dès lors une importante marge demanÀuvres'agissantdel'interprétation qu'ilretientrelati¬

vementàcequ'ilaperçu etfait.

Abstact

In this paper, the writer does notwonderaboutthe contents ofthe knowledgeofpractice,butbeyondthem abouttheir relationship with theoretical knowledge. He draws consequences as forteachertrain¬

ingbyrelyingon thespecialcoseofthetutorialrelationshipbetween training student and supervisor. The assumption is that the best approach ishermeneutic;itisbasedon theconfrontation ofdifferent viewpoints about the same subject

of

observation and practice.

Indeed, thecomplexity

of

theteaching situations dooms anyattempt atscientificexhaustivenessto failure.Everytainingteacherthushas much room for manoeuvre concerning the interpretation he orshe retainsaboutwhatheorshe hasperceivedand done.

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MarcWeisser,IUFMd'Alsace;GREEF,UniversitédeHaute-Alsace, Mulhouse.

Pages93-102 RECHERCHEctFORMATION N° 27 - 1998

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LeSavoirdelaPratique:l'Existenceprécède l'Essence...

S'agissantdel'école,lessavoirsde la pratique pédagogique quotidienne restenten généralméconnusdugrandpublic, quineconsidère quelescontenusenseignés :la majoritédespersonnes estimeque l'apprentissage va desoi etqu'il suffitdemaîtri¬

ser uneconnaissance pourpouvoirl'enseigner.

La questiondecessavoirs

-

efde leur pertinence

-

n'apparaît parconséquentque dans les cas de dysfonctionnement. Mais cela ne signifie pas, bien au contraire, qu'ilsne sontpas mis en

uvre

danslessituationsaudéroulementplussatisfaisant.

Etleproblèmeestvaste! Du faittoutd'abordde leur diversité : ils relèventde tout unensemble taxonomique, qui va desfinalités éducativesaux recettes ettours de main professionnels, en passant par la formation de courants pédagogiques, les didactiquesdesdisciplines, lesméthodesd'enseignement.

Du fait, ensuite, des relations qu'entretiennentces savoirs de la pratique avec les savoirssavants(regroupéssouslevocableSciencesde l'éducation), aveclessavoirs de la formation professionnelle (initiale etcontinuée,dispensée parles IUFMet les MAFPEN). Leursrapportssont-ils de simple présupposition,lespremierscitésn'étant auepureapplicationdesdeuxautres?Ou,à l'inverse,servent-ilsde base detravail, de corpus de départ? Pointent-ils la nécessité, l'urgence de nouvelles recherches théoriques? De la soumission à l'exigenceen passantpar l'heuristique, toutes les nuancesserencontrentsansdoute.

On peutsedemander dans quelledirection s'exerce l'influence:leschercheurschoi¬

sissent-ils des thèmesqui « intéressent » le praticien? L'enseignant danssa classe essaie-t-ildémettreen

uvre

lesdécouvertes les^ilusTecentes?Il semblebien

que

confronté à ungrouped'apprenants, chaque maître dispose d'unvaste espacede liberté, dufaitmêmedunombre élevédesvariables nonmaîtrisées :sonFairequo¬

tidien s'inscrit dans unelogique non déterministe, quinerelèvepas d'unecausalité monofactorielle... et c'estsansdoutetrèsbienainsi! Cetespacedelibertécorres¬

pond au domainedesa responsabilité professionnelle;en classe, leschoix se font entemps réel, il estimpossibled'attendre,de(re-)bâfiruneexpérimentationpourtes¬

ter uneautressolution,nosactes sont irréversibles. Ainsi, l'influencedesrecherches théoriquesnepeuf êfrequ'indirecte.

Cetarticlenecherchepas àdéfinir, à décrire avec précisionlescontenus dessavoirs de la pratique, mais bien plutôtà réfléchird'abordsur leurs modesd'apparition et sur leurs caractéristiquesépistémologiques, pour ébaucherensuite desprincipes de formation àcessavoirs.

Une telleapprocheme sembledevoirêtrelogiquementpremière:detoutes lesacti¬

vités sociales, l'éducation scolaire estcelle qui s'adressele plus à l'intelligencede l'homme, cellequia (par définitionI) leplusconfianceensescapacités àsedépas¬

ser. Elle estégalement la plusdésintéressée,toutenseignantdigne decenom

n'as-RECHERCHE etFORMATION 27 - 1998

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LeSavoirdelaPratique:l'Existenceprécède l'Essence...

S'agissantdel'école,lessavoirsde la pratique pédagogique quotidienne restenten généralméconnusdugrandpublic, quineconsidère quelescontenusenseignés :la majoritédespersonnes estimeque l'apprentissage va desoi etqu'il suffitdemaîtri¬

ser uneconnaissance pourpouvoirl'enseigner.

La questiondecessavoirs

-

efde leur pertinence

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n'apparaît parconséquentque dans les cas de dysfonctionnement. Mais cela ne signifie pas, bien au contraire, qu'ilsne sontpas mis en

uvre

danslessituationsaudéroulementplussatisfaisant.

Etleproblèmeestvaste! Du faittoutd'abordde leur diversité : ils relèventde tout unensemble taxonomique, qui va desfinalités éducativesaux recettes ettours de main professionnels, en passant par la formation de courants pédagogiques, les didactiquesdesdisciplines, lesméthodesd'enseignement.

Du fait, ensuite, des relations qu'entretiennentces savoirs de la pratique avec les savoirssavants(regroupéssouslevocableSciencesde l'éducation), aveclessavoirs de la formation professionnelle (initiale etcontinuée,dispensée parles IUFMet les MAFPEN). Leursrapportssont-ils de simple présupposition,lespremierscitésn'étant auepureapplicationdesdeuxautres?Ou,à l'inverse,servent-ilsde base detravail, de corpus de départ? Pointent-ils la nécessité, l'urgence de nouvelles recherches théoriques? De la soumission à l'exigenceen passantpar l'heuristique, toutes les nuancesserencontrentsansdoute.

On peutsedemander dans quelledirection s'exerce l'influence:leschercheurschoi¬

sissent-ils des thèmesqui « intéressent » le praticien? L'enseignant danssa classe essaie-t-ildémettreen

uvre

lesdécouvertes les^ilusTecentes?Il semblebien

que

confronté à ungrouped'apprenants, chaque maître dispose d'unvaste espacede liberté, dufaitmêmedunombre élevédesvariables nonmaîtrisées :sonFairequo¬

tidien s'inscrit dans unelogique non déterministe, quinerelèvepas d'unecausalité monofactorielle... et c'estsansdoutetrèsbienainsi! Cetespacedelibertécorres¬

pond au domainedesa responsabilité professionnelle;en classe, leschoix se font entemps réel, il estimpossibled'attendre,de(re-)bâfiruneexpérimentationpourtes¬

ter uneautressolution,nosactes sont irréversibles. Ainsi, l'influencedesrecherches théoriquesnepeuf êfrequ'indirecte.

Cetarticlenecherchepas àdéfinir, à décrire avec précisionlescontenus dessavoirs de la pratique, mais bien plutôtà réfléchird'abordsur leurs modesd'apparition et sur leurs caractéristiquesépistémologiques, pour ébaucherensuite desprincipes de formation àcessavoirs.

Une telleapprocheme sembledevoirêtrelogiquementpremière:detoutes lesacti¬

vités sociales, l'éducation scolaire estcelle qui s'adressele plus à l'intelligencede l'homme, cellequia (par définitionI) leplusconfianceensescapacités àsedépas¬

ser. Elle estégalement la plusdésintéressée,toutenseignantdigne decenom

n'as-RECHERCHE etFORMATION 27 - 1998

MarcWEISSER

pirant qu'àune seule chose, devenir finalement inutile à sesélèves... La formation des maîtres etles savoirs professionnels qui ysont produits portent la marquede cetteoriginalité.

NATURE DES SAVOIRS PROFESSIONNELS

Bien souvent, l'inertiedu corpsenseignantestdécriée : c'est quenotrepratiqueest ancréepardessavoirsprofessionnelsauxquelsnoustenons,quisont nôtres. Néan¬

moins, età uneéchelle temporelleun peu plusgrande, les mentalitéschangent, et notre Faire aussi. Devant l'importance de la tâche etl'irréversibilité des situations que je mentionnaisplushaut, il estcrucial de selaisser letempsde la réflexion. Si

l'écoliera ledroitdegâcherl'ouvrage(touteerreur reconnue étantformatrice),l'ap¬

prentietafortiorile« maître»nedoiventpassetromper.

Sedégage de la sorte l'une des premières caractéristiques que nous recherchons, commune à tous les professionnels : alors que lethéoricien chercheà décriredes régularités objectives, généralisables,surl'axeduPourquoi?, lepraticienluise sou¬

cie aupremier chef de l'utilisable,du « convenable»,sur l'axe du Comment?

Deplus, etc'est làuntraitdistinctifpropre,cettefois-ci, au métierd'enseignant, les savoirs de la pratique sont doublementsubjectifs. Si le chercheur en Sciences de l'éducation s'intéresseàun objet d'étude, la relation éducativemesemble être par essence lelieuprivilégiéde la rencontrede deuxsuiets,leMaîtreetl'Elève.Onpasse brusquementau statistiquementprobableau singulièrement actualisé.

« L'homme ne se définit pas par une nature, mais par un élan formatifà travers lequel il se fait être « (Fabre, Bachelard éducateur, PUF, 1995). Le pédagogue chercheà faireprogresser,à amenerà son maximum chacundes individus qui lui sont confiés;leuravenirn'est passtrictementprédictible à travers lacatégoriesocio¬

professionnelledontils sontissus, à travers leur structure familialeou le stade pia¬

gétien atteintà un âge donné; il n'ya pas de causeperdued'avance, mais plutôt desdéfis que notredéontologienous imposede relever.

Les savoirsde la pratique setrouventdoncêtre, à un extrême, toutà faitconcrets, del'ordredutour de main,et,d'un autrecôté,toutà faitidéologiques(ouéthiques si la connotationdu termeprécédent s'avère gênante).

Peut-ondansce casparler encore de savoirs, s'ilestimpossibleàchaquefoisdeles

disjoindre du praticien qui les a élaborés, adoptés? Ils ne sont pas le fruit d'une transmission, mais d'une appropriation etd'uneproduction; ils sont liés à l'acteur professionnel, maisaussià sapersonne. Laformation au métierd'enseignantpren¬

dra non pas l'aspectd'un transfert de connaissances décontextualisées, maiscelui d'uneré-interprétationd'un discours pédagogique,propreàchacundesformés.

RECHERCHEet FORMATION 27 - 1998 95 MarcWEISSER

pirant qu'àune seule chose, devenir finalement inutile à sesélèves... La formation des maîtres etles savoirs professionnels qui ysont produits portent la marquede cetteoriginalité.

NATURE DES SAVOIRS PROFESSIONNELS

Bien souvent, l'inertiedu corpsenseignantestdécriée : c'est quenotrepratiqueest ancréepardessavoirsprofessionnelsauxquelsnoustenons,quisont nôtres. Néan¬

moins, età uneéchelle temporelleun peu plusgrande, les mentalitéschangent, et notre Faire aussi. Devant l'importance de la tâche etl'irréversibilité des situations que je mentionnaisplushaut, il estcrucial de selaisser letempsde la réflexion. Si

l'écoliera ledroitdegâcherl'ouvrage(touteerreur reconnue étantformatrice),l'ap¬

prentietafortiorile« maître»nedoiventpassetromper.

Sedégage de la sorte l'une des premières caractéristiques que nous recherchons, commune à tous les professionnels : alors que lethéoricien chercheà décriredes régularités objectives, généralisables,surl'axeduPourquoi?, lepraticienluise sou¬

cie aupremier chef de l'utilisable,du « convenable»,sur l'axe du Comment?

Deplus, etc'est làuntraitdistinctifpropre,cettefois-ci, au métierd'enseignant, les savoirs de la pratique sont doublementsubjectifs. Si le chercheur en Sciences de l'éducation s'intéresseàun objet d'étude, la relation éducativemesemble être par essence lelieuprivilégiéde la rencontrede deuxsuiets,leMaîtreetl'Elève.Onpasse brusquementau statistiquementprobableau singulièrement actualisé.

« L'homme ne se définit pas par une nature, mais par un élan formatifà travers lequel il se fait être « (Fabre, Bachelard éducateur, PUF, 1995). Le pédagogue chercheà faireprogresser,à amenerà son maximum chacundes individus qui lui sont confiés;leuravenirn'est passtrictementprédictible à travers lacatégoriesocio¬

professionnelledontils sontissus, à travers leur structure familialeou le stade pia¬

gétien atteintà un âge donné; il n'ya pas de causeperdued'avance, mais plutôt desdéfis que notredéontologienous imposede relever.

Les savoirsde la pratique setrouventdoncêtre, à un extrême, toutà faitconcrets, del'ordredutour de main,et,d'un autrecôté,toutà faitidéologiques(ouéthiques si la connotationdu termeprécédent s'avère gênante).

Peut-ondansce casparler encore de savoirs, s'ilestimpossibleàchaquefoisdeles

disjoindre du praticien qui les a élaborés, adoptés? Ils ne sont pas le fruit d'une transmission, mais d'une appropriation etd'uneproduction; ils sont liés à l'acteur professionnel, maisaussià sapersonne. Laformation au métierd'enseignantpren¬

dra non pas l'aspectd'un transfert de connaissances décontextualisées, maiscelui d'uneré-interprétationd'un discours pédagogique,propreàchacundesformés.

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LeSavoir de la Prafique:l'Existenceprécède l'Essence...

Il n'est par conséquent guère surprenant de s'apercevoir que chaque enseignant s'arrogele droitdemodifier,d'aménager,voire de détournercequi aété scientifi¬

quementétabli, pourse constituer progressivementun répertoire de gestes profes¬

sionnelsqui résultentd'influences multiples, aucune n'épuisantà elleseule la com¬

plexité du sujet-apprenant (sans parler de celle du groupe-classe dans son ensemble).

L'exhaustivité à laquelle tend l'approche scientifique, à travers la neutralisation de certainesvariables,cède laplace àunsentimentd'incomplétudeensituation depra¬

tique réelle. L'enseignantn'est pas un scientifiquemais un décideur, etj'irai même plus loin, un « décideur flou », qui constamment parie, sur le probableou sur le moins probable. S'instaure alors dans la classe un jeupédagogique, signe de la libertédesacteursduprocessusd'apprentissage.Etlesélèves nesont pasdupes; ils sontplutôt complicesdestentativesdu maîtrepourpeser surlasituation,pourforcer la décision; ilsdeviennent partieprenanted'une communauté éducative, ils savent qu'ilssontlàpour construire à leur tourdessavoirsdéjàmaîtriséspard'autres, que lemaîtrereprésente(voirWeisser, Pourunepédagogiedel'ouverture, PUF, 1997).

De cepointdevue,l'école n'est ni une usine, niunclub sportif; satâchen'est pas d'êtreplus rentablequ'une autre, d'être meilleure que sesvoisines, devaincreses semblables. Maisà l'inverse,deseconsacrer à chacun deses élèvesen respectant ses différences,pour l'aiderà sedépassersans cesse.Ainsi, la profession d'ensei¬

gnantneréclamepas lesmêmesméthodesdeformation et de management queles ouvriers ou les cadres, les connaissances mises en

uvre

ne répondant pas aux mêmes buts.

On quittelecôtépositivistede larecette,dela ficelle,pourallerversuneapproche nondéterministe, à based'interactions maître-élève à chaque fois renégociées dans la relation didactique. Les savoirs de la pratique doivent garder de ce fait une grandeflexibilité, sousl'égide d'unesorte de« méta-savoir »qui diraitque l'ap¬

prentissagepasseparladiscussion, laconfrontation bref,pardeséchangesdemes¬

sagessignifiants,qui donnentun sensaux connaissances produites. Cedébat,cette tractation visentà concilierd'unepartcequiestsocialement reconnu etd'autrepart cequiestpsychologiquement possibleici efmaintenant.

La mise en

uvre

decessavoirss'effectueà travers lesdeuxgestes professionnels essentielsquesontlapréparation pédagogiqueetlaconduite de laclasse. Cesdeux formes successives du travail de l'enseignant figurent les lieux où se nouent les apports de la recherche théorique ef de la formafion. Elles se traduisent en un savoir-organiser/planifier/prévoireten unsavoir-agir-et-faire-agir,savoir-réagir.

RECHERCHEet FORMATION 27 - 1998

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LeSavoir de la Prafique:l'Existenceprécède l'Essence...

Il n'est par conséquent guère surprenant de s'apercevoir que chaque enseignant s'arrogele droitdemodifier,d'aménager,voire de détournercequi aété scientifi¬

quementétabli, pourse constituer progressivementun répertoire de gestes profes¬

sionnelsqui résultentd'influences multiples, aucune n'épuisantà elleseule la com¬

plexité du sujet-apprenant (sans parler de celle du groupe-classe dans son ensemble).

L'exhaustivité à laquelle tend l'approche scientifique, à travers la neutralisation de certainesvariables,cède laplace àunsentimentd'incomplétudeensituation depra¬

tique réelle. L'enseignantn'est pas un scientifiquemais un décideur, etj'irai même plus loin, un « décideur flou », qui constamment parie, sur le probableou sur le moins probable. S'instaure alors dans la classe un jeupédagogique, signe de la libertédesacteursduprocessusd'apprentissage.Etlesélèves nesont pasdupes; ils sontplutôt complicesdestentativesdu maîtrepourpeser surlasituation,pourforcer la décision; ilsdeviennent partieprenanted'une communauté éducative, ils savent qu'ilssontlàpour construire à leur tourdessavoirsdéjàmaîtriséspard'autres, que lemaîtrereprésente(voirWeisser, Pourunepédagogiedel'ouverture, PUF, 1997).

De cepointdevue,l'école n'est ni une usine, niunclub sportif; satâchen'est pas d'êtreplus rentablequ'une autre, d'être meilleure que sesvoisines, devaincreses semblables. Maisà l'inverse,deseconsacrer à chacun deses élèvesen respectant ses différences,pour l'aiderà sedépassersans cesse.Ainsi, la profession d'ensei¬

gnantneréclamepas lesmêmesméthodesdeformation et de management queles ouvriers ou les cadres, les connaissances mises en

uvre

ne répondant pas aux mêmes buts.

On quittelecôtépositivistede larecette,dela ficelle,pourallerversuneapproche nondéterministe, à based'interactions maître-élève à chaque fois renégociées dans la relation didactique. Les savoirs de la pratique doivent garder de ce fait une grandeflexibilité, sousl'égide d'unesorte de« méta-savoir »qui diraitque l'ap¬

prentissagepasseparladiscussion, laconfrontation bref,pardeséchangesdemes¬

sagessignifiants,qui donnentun sensaux connaissances produites. Cedébat,cette tractation visentà concilierd'unepartcequiestsocialement reconnu etd'autrepart cequiestpsychologiquement possibleici efmaintenant.

La mise en

uvre

decessavoirss'effectueà travers lesdeuxgestes professionnels essentielsquesontlapréparation pédagogiqueetlaconduite de laclasse. Cesdeux formes successives du travail de l'enseignant figurent les lieux où se nouent les apports de la recherche théorique ef de la formafion. Elles se traduisent en un savoir-organiser/planifier/prévoireten unsavoir-agir-et-faire-agir,savoir-réagir.

RECHERCHEet FORMATION 27 - 1998

Dans le document Les savoirs de la pratique (Page 93-115)