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3.3 Résultats expérimentaux sur un ensemble de centres G

3.3.3 Saturation d’un ensemble de centres G

Dans cette sous-section nous étudions le phénomène de saturation d’un ensemble de centres G. Nous montrons d’abord une augmentation sous-linéaire du signal de PL avec la puissance d’excitation (section 3.3.3.1) que nous expliquons ensuite par la saturation d’un ensemble étendu de systèmes à deux niveaux identiques (section 3.3.3.2). L’interprétation fournit un ajustement qui s’ajuste quantitativement à la courbe expérimentale.

3.3.3.1 Résultat expérimental

Nous avons mesuré la variation de l’intensité de PL provenant d’un ensemble de centres G avec la puissance d’excitation. Cette étude est réalisée à 10 K, l’excitation provient du laser He-Ne continu (à 632, 8 nm). Le résultat de cette étude est présenté figure 3.11. On remarque qu’à faible puissance d’excitation (P . 20 kW · cm−2) l’in-tensité de PL IPLaugmente linéairement avec la puissance d’excitation P tandis qu’à plus haute puissance (P & 20 kW · cm−2) IPL varie de manière sous linéaire avec

P.

Comme nous allons le présenter en section 3.3.6 le signal de PL d’un ensemble de centres G diminue fortement avec la température. Il était donc nécessaire de nous assurer que la dépendance sous linéaire observée pour les puissances P & 20 kW · cm−2 n’était pas due à un échauffement local entrainant une diminution du signal de PL. Pour nous assurer de cela nous avons exploité le fait que la raie à zéro

phonon (ZPL) se décale vers les basses énergies et s’élargit lorsque la température augmente. Comme nous n’avons constaté ni décalage en énergie de la ZPL, ni élar-gissement de cette dernière lors de nos mesures nous pouvons en conclure que les effet de saturation mis en évidence figure 3.11 sont bien dus aux centres G (et pas à des effets thermiques). Nous proposons une interprétation quantitative ci-dessous.

1.0 0.8 0.6 0.4 0.2 0.0 Intensité de PL (U.A.) 100 80 60 40 20 0 Puissance d'excitation (kW/cm²)

Figure 3.11 – Intensité de photoluminescence (PL) d’un ensemble de centres G en fonction de la puissance d’excitation (à 10 K et excitation à 632, 8 nm). Les données expérimentales sont représentées par des disques rouges. L’ajustement en accord avec l’équation (3.6) pour Psat = 35 kW · cm−2 (dans le cadre de l’excitation par un faisceau gaussien d’un ensemble étendu de systèmes à deux niveaux identiques : voir 3.3.3.2) est représenté par une ligne bleue. La ligne pointillée verte représente une dépendance linéaire avec la puissance d’excitation : IPL = I0PsatP/ ln 2 (valable à faible puissance d’excitation).

3.3.3.2 Interprétation Le cadre

Dans cette partie nous nous plaçons dans le cadre de la figure 3.12 déjà présenté pour les nanotubes de carbone dans la section 2.1.3.4. Le processus de PL des centres G est schématisé via un système à trois niveaux ; le principe est le suivant :

— Un photon incident d’énergie ~ ωexc provenant d’un laser excitateur peut-être absorbé via la transition 0 → 2. Le taux d’absorption est noté Γa.

— Le système se désexcite non radiativement (sans émettre de photons) vers l’état 1. Le taux de désexcitation est noté Γ0

nr. On supposera que cette désex-citation est rapide de sorte que l’on ait Γ0

nr  Γa; on a montré en section 2.1.3.4 que dans ce cas le système est équivalent à un système à deux niveaux : 0 et 1. Le système est alors dans l’état 1.

ma-nières. (i) Via un processus de recombinaison non radiatif ; on note Γnr le taux de tous les processus non radiatifs. (ii) Via une recombinaison radiative ; il y a alors l’émission d’un photon qui constitue le signal de photoluminescence. Le taux de ce seul processus radiatif est noté Γr.

Etat fondamental Photon incident

Photon émis

Figure 3.12 – Représentation du processus de photoluminescence d’un centre G via un système à trois niveaux. Les différentes transitions sont représentées par des flèches avec leur taux associé. Dans le cas où Γ0

nra, ce système est équivalent à un système à deux niveaux : 1 et 2.

Ci-dessous nous commençons par rappeler la formule classique de la saturation IPL= f(P ) d’un unique système à deux niveaux. Puis nous appliquons cette formule à un ensemble de systèmes à deux niveaux

Saturation d’un système à deux niveaux.

Dans le cadre défini au paragraphe précédent nous avons montré en section 2.1.3.4 (équation (2.37)) que l’intensité de photoluminescence d’un unique émetteur pouvait se mettre sous la forme suivante :

IPL= αηΦ Γa

1 + Γa Γs

(3.3) Où α est un coefficient de proportionnalité, η est l’efficacité de collection du signal de PL par l’objectif, Φ = Γr

Γrnr est le rendement radiatif et Γs = Γr+ Γnr est le taux de saturation. Parmi les grandeurs de l’équation (3.3) seule Γa dépend de la puissance d’excitation (et lui est proportionnelle). On peut donc ré-écrire (3.3) sous la forme suivante :

IPLP

1 + P Psat

(3.4) Où Psat est la puissance de saturation de cet unique système à deux niveaux. Cette formule bien connue des spectroscopistes montre que la saturation d’un unique sys-tème à deux niveaux est caractérisée par une valeur seuil dans l’intensité de PL qui est proportionnelle à Psat. Cependant ce n’est pas le type de comportement que nous

avons observé (voir figure 3.11). Comme nous allons le voir ci-dessous, cette diffé-rence de comportement est due au fait que nous étudions des ensembles de centres G. Nous avons donc à faire à un ensemble de systèmes à deux niveaux, et non à un unique système à deux niveaux.

Saturation d’un ensemble étendu de systèmes à deux niveaux identiques

De manière qualitative il n’est pas étonnant que notre étude expérimentale consistant à augmenter la puissance d’excitation ne montre pas l’existence d’une valeur seuil dans l’intensité de photoluminescence. En effet l’échantillon étudié ici consiste en un ensemble de centres G répartis uniformément à la surface. Ainsi en considérant un spot gaussien à la surface de l’échantillon de la forme P (r) = P0e−r2/w2

où w est le "waist" du spot gaussien (qui caractérise la largeur du faisceau) on voit qu’en fonction de la valeur de P0 il est possible que la zone centrale (celle proche du centre du spot en r ' 0) soit à saturation (c’est-à-dire que P > Psat) tandis que la zone périphérique infiniment étendue va être dans le domaine linéaire (c’est-à-dire que

P < Psat). Explicitons cela au regard de la figure 3.13 :

— en partant d’une excitation peu intense P0 = 0, 5Psat (figure 3.13 (a)) tous les centres G situés sous le spot laser sont dans le domaine linéaire. Ainsi tant que P0 < Psat l’intensité de PL augmente de manière linéaire.

— lorsque l’on augmente la puissance d’excitation jusqu’à arriver à P0 = 1Psat

(figure 3.13 (b)) les centres G situés très proches du centre du spot com-mencent à être à saturation. L’intensité de PL va donc commencer à rentrer dans sa zone de dépendance sous linéaire.

— en augmentant encore la puissance d’excitation jusqu’à à P0 = 1, 5Psat (figure 3.13 (c)) de nombreux centres G proches du centre du spot sont à saturation. Cependant, tous les centres G situés en dehors de cette zone continuent à contribuer de manière linéaire à l’intensité de PL. En augmentant la puissance P0 l’intensité de PL va donc augmenter de manière sous linéaire sans jamais atteindre de valeur seuil.

Évidemment, dans la description qualitative faite ci-dessus, il faut garder conscience que pour un centre G unique, le domaine de variation linéaire de IP L avec la puis-sance d’excitation se situe plutôt dans la zone P . 0, 2Psatque dans la zone P . Psat. Ainsi, pour un ensemble de centres G, la variation sous-linéaire de IP L avec la puis-sance d’excitation commence dès 0, 2Psat (et pas brusquement à Psat comme un lecteur non avisé pourrait le croire).

(b) P0 = Psat

(a) P0 = 0,5 Psat (c) P0 = 1,5 Psat

w w w 1.0 0.8 0.6 0.4 0.2 0.0 Psat Psat Psat Psat Psat Psat

Figure 3.13 – Allure spatiale d’un spot gaussien de la forme P (r) = P0e−r2/w2

pour différentes valeurs de P0. L’échelle de couleur est prise telle que les points apparaissent blancs s’ils sont soumis à une puissance supérieure à Psat. Le waist w est représenté par une double flèche bleue.

Cette explication qualitative étant donnée, nous pouvons facilement comprendre la description quantitative de ce phénomène. Pour cela nous considérons une densité n uniforme de centres G infiniment étendue. Nous supposons que chacun de ces centres G peut être assimilé à un même système à deux niveaux ; en particulier nous supposons qu’ils présentent tous la même puissance de saturation Psat. Enfin on suppose un spot gaussien à la surface de l’échantillon de la forme P (r) = P0e−r2/w2 où w est le "waist" du spot gaussien et P0est la puissance au centre du spot. À partir de l’équation (3.4) appliquée sur une couronne circulaire comprise entre r et r + dr nous pouvons exprimer l’intensité de PL provenant de cette couronne circulaire :

dIPLP(r) 1 + P (r) Psat n2πrdrP0e −r2/w2 1 + P0e−r2/w2 Psat 2πrdr (3.5)

Puisque la surface de la couronne circulaire est de 2πrdr (au premier ordre en dr) et que la densité de

centres G supposée uniforme est n. Figure 3.14 – En rougele spot gaussien ; en noir la couronne circulaire. Ainsi, pour avoir la contribution à l’intensité de PL de tous les centres G, il suffit d’intégrer l’équation (3.5) sur toute la surface du spot, c’est-à-dire entre r = 0 et

r = +∞. Le calcul de l’intégrale se révèle être analytique et tous calculs faits on obtient : IPL = I0ln 1 + P Psat/ln 2 ! (3.6) Où l’on a posé P = P0/ln 2 qui représente la puissance moyenne du spot (et qui est celle que l’on mesure expérimentalement avec un wattmètre optique).

Cette évolution est bien linéaire pour P  Psat tandis qu’elle est sous linéaire dès que P & 0.2Psat. Sur la figure 3.11 l’ajustement des données expérimentales par l’équation (3.6) se révèle être très bon pour une puissance de saturation évaluée à Psat = 35 ± 7 kW · cm−2.

Finalement cette interprétation quantitative montre que la puissance de saturation d’un unique centre G peut être estimée via l’étude en puissance de l’intensité de PL d’un ensemble de centres G. Une telle méthode pour estimer la puissance de satura-tion est spécifique aux défauts ponctuels pour lesquels la puissance de saturasatura-tion est identique quel que soit le défaut. Cela est une hypothèse déterminante dans notre raisonnement qui n’est pas vérifiée dans d’autres nanostructures comme des boîtes quantiques ou des nanocristaux ; dès lors que cette hypothèse n’est pas vérifiée une telle étude n’est pas réalisable.