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Personne rencontrée :

Bruce Purdy, Acting Chief, Microenterprise Development Branch

En 1992, la Small Business Administration a mis en place un programme de micro-prêts destiné aux petites et moyennes entreprises qui rencontrent des difficultés d’accès au crédit. Sont considérées comme PME aux États-Unis, les entreprises de moins de 500 salariés. Mais ce programme prête à des entreprises de 5 salariés en moyenne. En 2004, 2 400 prêts ont été réalisés pour un montant global de 32,9 millions de dollars (soit 21 000 prêts pour 250 millions de dollars depuis 1992), faisant de ce dispositif le plus important des programmes fédéraux de micro-prêts. Le montant des crédits peut aller jusqu’à 35 000 dollars. En moyenne, la taille des prêts est inférieure à 12 000 dollars.

La SBA ne prête pas directement aux entreprises. Elle capitalise des intermédiaires non profit –appelés « SBA intermediaries »- qui doivent faire état d’une expérience d’un an minimum en matière de micro- crédit et d’assistance technique aux PME. Ces intermédiaires peuvent recevoir jusqu’à 750 000 dollars sur dix ans de la SBA. Ils prêtent à leur tour aux entreprises pour une période de six ans maximum, à un taux base de 2% la première année, c'est-à-dire en deçà du taux de base bancaire. Selon le montant du prêt, l’emprunteur paiera effectivement entre 10,75% et 12,25% d’intérêt.

Jusqu’au quart de la somme versée à l’intermédiaire peut servir à financer une assistance technique avant et après le prêt, considérant que les faillites de PME s’expliquent au moins autant par un manque de savoir faire que par un manque de capital. Cette assistance porte sur l’élaboration du business plan, le management et le marketing, ainsi que sur tous les problèmes que peut rencontrer l’entreprise au fil de son existence.

L’intermédiaire de la SBA doit constituer une réserve (appelée Loan Loss Reserve Fund), équivalente à 15% du montant du prêt consenti à l’entreprise. Le but est de se prémunir contre les pertes et s’assurer que la SBA sera remboursé. En treize ans d’existence, celle-ci n’a connu que 1% de pertes sur les prêts octroyés aux intermédiaires.

Initié avec 25 intermédiaires, le programme en comporte 170 aujourd'hui (sur les 600 micro-prêteurs que comptent les Etats-Unis). Certains de ces intermédiaires ont une couverture territoriale large (tout l’État en Arizona, par exemple), d’autres très restreinte (un quartier). Quand un nouvel intermédiaire se propose, la SBA donne la priorité aux zones non couvertes.

L’intermédiaire peut prêter à n’importe quelle PME, mais la SBA encourage les entreprises détenues par les minorités, les femmes et les vétérans. Certaines organisations sont d’ailleurs spécialisées de fait dans les prêts à ces groupes. D’autres ont une spécialisation territoriale, en particulier dans les zones pauvres et/ou de concentration des minorités. Si elles ne peuvent prêter exclusivement à un groupe défini par ses origines ethno-raciales, la plupart des intermédiaires ont néanmoins pour mission explicite de servir les personnes à faibles revenus. Les statistiques montrent que 44% des bénéficiaires sont de femmes, 25% des Noirs et 19% des Hispaniques. Ajoutons que 40% des entreprises concernées sont localisées en milieu rural.

La SBA estime que 60 000 emplois ont été créés grâce à ce programme, pour un coût moyen de 3 500 dollars par emploi. En dépit de ces résultats flatteurs, le président Bush a proposé d’éliminer ce programme dans le budget 2006, affirmant qu’il fait double emploi avec d’autres programmes de la SBA.

ACCION

Personne rencontrée :

Florence Juillard, Loan Consultant

ACCION a été fondé au Venezuela, dans les années 70, par des bénévoles américains. L’organisation internationale est implantée aux USA depuis 1991, où elle se répartit entre huit agences locales. Celle de New York est la plus grosse organisation de micro-crédit des États-Unis. En quinze ans, ACCION New York a prêté 44 millions de dollars à l'occasion de 7 000 prêts. Pour la seule année 2004, 1 091 prêts ont été consentis, pour 10,3 millions de dollars, traduisant le succès de la formule.

ACCION New York est une organisation non-profit localisée à Manhattan après l’avoir été longtemps à Brooklyn. Elle y possède encore des bureaux, de même que dans d’autres parties défavorisées de New York (Bronx et Harlem). La majorité des demandes proviennent des quartiers pauvres et concernent des projets de petite dimension (le prêt moyen était 9 415 dollars en 2004).

Si la plupart des emprunteurs ont de faibles revenus, ce n’est pas un critère d’éligibilité impératif. Des entreprises plus importantes qui éprouvent des difficultés à accéder au crédit et qui sont localisées dans des quartiers plus riches peuvent également être aidées. Reste que 40% des clients sont des femmes et 95% appartiennent à des minorités d’origine diverses (hispaniques dans deux cas sur trois). Presque tous les conseillers d’ACCION parlent espagnol et certains le français, puisque 11% des clients sont Africains. Tous travaillent sur un secteur géographique précis (sauf un conseiller qui ne travaille qu’avec les Africains).

Jusqu'à une période récente, ACCION ne prêtait qu’aux entreprises. Elle consent aujourd'hui des prêts personnels (Personal Development Loans) à des personnes qui n’ont pas accès aux banques classiques. Mais sa mission première reste le développement économique. Elle travaille typiquement avec des petits commerçants, des entrepreneurs à domicile, des vendeurs de rue, des chauffeurs de taxi, des artistes, etc. Plusieurs types de produits leur sont proposés, s’échelonnant de 500 à 50 000 dollars : des prêts à la création d’entreprise (Start Up Loans), à condition que 50% du projet soit auto- financé ; des prêts aux entreprises existantes (Business Loans) ; des prêts pour l’achat, la réparation et l’assurance des taxis ; des prêts pour l’achat d’une voiture (Vehicule Purchase).

Les critères d’éligibilité varient selon le type de prêt. ACCION s’efforce de traiter chaque cas dans sa singularité. Une exigence est imposée à tous les demandeurs : évaluer leur historique de crédit. Mais le résultat n’est jamais disqualifiant. « On ne donne jamais l’impression que la porte est barrée à tout jamais », explique la personne rencontrée. ACCION propose d’ailleurs des prêts de 500 à 1 000 dollars pour aider ses clients à commencer un historique de crédit, beaucoup étant des immigrants qui ne sont pas en mesure de faire état d’un passé en la matière. Pour ACCION, l’enjeu est d’établir des liens de

confiance avec des entrepreneurs souvent hors normes, situés aux frontières de l’économie illégale et qui peuvent reconnaître, au cours d’un entretien, ne pas payer leurs impôts ou ne pas placer leur argent à la banque. ACCION s’efforce de les faire entrer dans l’économie légale, mais affiche une grande souplesse, se refusant à imposer des contraintes qui rendraient la relation impossible.

Dans 90% des cas, ACCION exige une caution en contrepartie du prêt. Elle demande aussi la présence d’une autre source de revenu (le travail de l’époux, une épargne…), ainsi qu’une expérience d’entrepreneur ou de salarié dans le secteur d’activité visé. La caution peut être formée dans le cadre de prêts groupés (peer lending), qui concernent surtout des personnes venues d’Afrique dont l’installation est récente. Il s’agit de groupes de 3 à 5 personnes, dont l’une doit être en mesure de payer la totalité de la mensualité cumulée des membres du groupe. Le taux de défaillance est identique aux autres formes de prêt (environ 5%). Ces prêts groupés ne représentent toutefois qu’une faible part de l’ensemble des prêts octroyés par ACCION.

Selon la nature de l’activité, ACCION demande un business plan plus ou moins formalisé. Pour les aider à l’élaborer, les demandeurs sont parfois mis en relation avec le Small Business Development Center (les guichets locaux de la SBA), où des consultants fournissent une assistance technique gratuite. De son côté, ACCION propose des ateliers de formation, également gratuits et ouverts y compris à des personnes qui n’ont pas l’intention d’emprunter. Ces ateliers portent notamment sur l’historique de crédit. Pour les prêts inférieurs à 20 000 dollars, une société d’avocats propose des conseils juridiques gratuits. Par ailleurs, huit volontaires d’Americorps (un programme fédéral d’étudiants bénévoles) travaillent en permanence au sein d’ACCION.

Les principaux critères d’évaluation du succès des prêts sont le remboursement de ceux-ci et la possibilité de se refinancer auprès d’une banque ordinaire. ACCION développe des relations avec des agences bancaires au niveau des quartiers, susceptibles de lui adresser des clients quand elles ne peuvent pas répondre positivement à leurs demandes de prêts. Plusieurs micro-prêts d’ACCION sont souvent nécessaires avant que l’emprunteur retrouve crédit auprès d’une banque traditionnelle. Quand elle sent que la situation du client le permet, ACCION l’oriente vers une des banques de son réseau. Des étudiants de Columbia ont réalisé une étude d’impact auprès de 400 clients d’ACCION montrant que les revenus des emprunteurs augmentent globalement (de façon substantielle dans 50% des cas), qu’ils ont été « empowered », c'est-à-dire qu’ils ont tendance à se prendre en main, à participer à la vie du quartier, à en fréquenter les associations. « Même si leur revenu n’a pas augmenté, les gens sont très heureux de travailler à leur compte, précise la représentante d’ACCION. Ils se sentent empowered, ils sentent qu’ils ont la maîtrise de leur vie. Tous nos clients disent cela ».

En 2004, l’agence new-yorkaise d’ACCION estime qu’elle a contribué à préserver ou créer près de 2 000 emplois dans des quartiers où l’emploi est rare. Mais la création d’emplois n’est qu’un aspect relativement mineur de l’évaluation des résultats, la logique qui prévaut étant celle de l’auto-emploi

(self-employment). La pratique d’ACCION se situe donc à un niveau très individuel, mais cela ne l’empêche pas de participer à des dispositifs de revitalisation des quartiers pauvres, comme le Bronx

Overall Economic Development ou à l’Empowerment Zone de Harlem.

En tant qu’organisation non-profit, ACCION ne couvre que 63% de ses besoins financiers. Elle ne facture ses prestations que 25 dollars et ses prêts sont d’un montant modeste, avec de faibles taux d’intérêt et beaucoup de temps passé avec chaque client. Même si les défaillances sont relativement peu élevées en matière de remboursement, l’équilibre financier d’ACCION dépend donc des prêts des banques et de l’argent des fondations.