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Séries doubles

Dans le document Chapitre 1 Dénombrer et sommer (Page 35-41)

Preuve. Si M := P

i∈Iui < +∞, nécessairement tous les ui sont finis et la famille (ui)i∈I est sommable (prop 1.77). Il n’y a alors rien à démontrer puisqu’on est dans le champ d’application du théorème 1.85. La démonstration générale par les suprema que l’on présente maintenant englobe ce cas et a l’avantage d’éviter de discuter suivant la finitude ou non des ui ou desS. Notons

M := sup

Kfini⊂I

SK et M0 := sup Bfini⊂A

SIB.

Avec ces notations, l’égalité (1.28) s’écrit M = M0. Nous allons montrer que M ≤ M0

puis que M0 ≤M. Pour la première inégalité, il suffit de remarquer que pour toutB fini inclus dans A,

SIB = sup Lfini⊂IB

SL, (1.29)

d’où en majorant SL par M, SIB ≤ M, puis en prenant le supremum pour tout B fini inclus dans A, M0 ≤ M. Dans l’autre sens, soit K une partie finie quelconque de I. Il existe une partie finie B de A telle que IB = ∪α∈BIα recouvre K. D’après (1.29) on a alors SK ≤ SIB. En majorant SIB par M0, on voit que pour tout K fini inclus dans I,

SK ≤M0. En prenant le supremum sur K, on obtient M ≤M0.

Théorème 1.88. Soit(ui)iI une famille d’éléments de l’espace vectoriel normé complet

E. On suppose que I =∪α∈AIα, lesIα étant non vides et deux à deux disjoints. On pose TIα :=P

i∈Iαkuik. La famille (ui)i∈I est normalement sommable dans E si et seulement si P

α∈ATIα <+∞. Elle vérifie alors la formule de sommation par paquets (1.28). Preuve. La sommabilité dans R+ de (kuik)iI équivaut à P

α∈ATIα < +∞ d’après le théorème 1.87 et la proposition 1.77. Si (ui)i∈I est normalement sommable dans E (cf. corollaire 1.82) elle est sommable. Elle vérifie donc la formule de sommation par paquets par le théorème 1.85.

1.6 Séries doubles

Nous examinons maintenant le cas particulier des familles (ui)i∈I indexées par un produit cartésien I = I0 × I00. On parle dans ce cas de « série double ». Nous nous limiterons au cas oùI =N2, mais il est facile d’adapter les énoncés ci-dessous àI =I0×I00

avec I0 et I00 dénombrables, une fois fixées des bijections N → I et N → I00. L’indice i

est désormais un couple d’entiers,i= (k, l)∈N2. Pour des raisons typographiques, nous écrirons {uk,l; (k, l)∈N2}de préférence à (uk,l)(k,l)N2.

Définition 1.89 (série double). Soit(uk,l)k,l∈N une suite double d’éléments de l’espace vectoriel normé E. On dit que la série double de terme général uk,l est convergente (resp. normalement convergente) si la famille {uk,l; (k, l) ∈ N2} est sommable (resp. normalement sommable). La somme S de cette famille est alors appelée somme de la série double et notée

S= X

(k,l)∈N2

uk,l = X k,l∈N

Dans tout ce qui suit, nous donnerons les énoncés relatifs aux séries doubles à termes réels ou complexes en nous contentant d’indiquer sous forme de remarques ou de com-mentaires les modifications à apporter pour la généralisation aux espaces vectoriels nor-més. Pour E =R ouC, la sommabilité normale s’appelle sommabilité absolue et équi-vaut à la sommabilité. Il importe de bien comprendre que contrairement au cas des séries simples, la définition1.89 n’autorise pas l’existence d’une série double à termes dans R ou C qui soit convergente sans l’être absolument. Il peut arriver que pour une certaine bijection f :NN2, la série simpleP+∞

j=0uf(j) soit convergente sans l’être absolument, mais dans ce cas la série double P

k,luk,l est divergente (cf. th. 1.80 et th. 1.72). Voici un premier critère de convergence pour les séries doubles.

Proposition 1.90. Pour que la série double de terme général réel ou complexe uk,l (k, l∈N) soit convergente, il faut et il suffit que la suite des sommes finies

Tn := X k+l≤n

|uk,l|, n ∈N,

soit bornée. On a le même énoncé avec Tn0 := X

max(k,l)≤n

|uk,l|, n∈N.

Attention à bien noter l’indexation de la somme Tn par la condition k +l ≤ n et non pask+l =n. Cet énoncé se généralise aux séries à termes dans E espace vectoriel normécomplet en remplaçant « convergente » par « normalement convergente » et|uk,l| par kuk,lk.

Preuve. Vérifions d’abord que la condition est nécessaire en supposant que la série double de terme général uk,l est convergente. Alors la famille {uk,l; (k, l)∈N2} est absolument sommable. On a alors d’après la proposition 1.77 b) :

M := sup

Kfini⊂N2 X

(k,l)∈K

|uk,l|<+∞. (1.30) Comme Tn est la somme des termes indexés par le sous-ensemble fini de N2, Dn := {(k, l)∈N2; k+l ≤n}, on a Tn ≤M pour tout n donc la suite(Tn)nN est bornée. Le même argument vaut pour (Tn0)en remplaçant Dn par Cn:={0, . . . , n}2.

Réciproquement, supposons que la suite (Tn)nN soit bornée par un réel positif M1. Soit K une partie finie quelconque deN2. Il existe alors un entier n tel queDn recouvre

K : il suffit de choisir pour celan = max{k+l; (k, l)∈K}. Alors X

(k,l)∈K

|uk,l| ≤ X

(k,l)∈Dn

|uk,l|=Tn≤M1

et comme l’ensemble fini K est quelconque, ceci montre que (1.30) est vérifiée avec

M ≤ M1. La sommabilité absolue de {uk,l; (k, l) ∈ N2} en découle par la proposition

1.6. Séries doubles

Le théorème suivant fournit à la fois un critère de convergence des série doubles et une méthode de calcul de la somme.

Théorème 1.91 (d’interversion des sommations). 1. Si les vk,l sont des éléments de R+, les égalités

X (k,l)∈N2 vk,l = +∞ X k=0 (+∞ X l=0 vk,l ) = +∞ X l=0 (+∞ X k=0 vk,l ) (1.31)

sont toujours vérifiées dans R+.

2. Si les uk,l sont réels ou complexes, la série double de terme général uk,l converge si et seulement si l’une des deux conditions suivantes est réalisée :

a) +∞ X k=0 (+∞ X l=0 |uk,l| ) <+∞ ou b) +∞ X l=0 (+∞ X k=0 |uk,l| ) <+∞. (1.32) Dans ce cas, pour tout k∈N, la série simple P+∞

l=0 uk,l est absolument convergente et il en va de même en échangeant les rôles de k et l. On a de plus la formule d’interversion des sommations :

X (k,l)∈N2 uk,l = +∞ X k=0 (+∞ X l=0 uk,l ) = +∞ X l=0 (+∞ X k=0 uk,l ) . (1.33)

Ce théorème s’étend au cas où lesuk,l sont dansE espace vectoriel normé complet en remplaçant|uk,l|parkuk,lk, la convergence de la série double par sa convergence normale et la convergence absolue des séries simples par leur convergence normale.

Preuve. Le cas des termes positifs est une application immédiate du théorème 1.87 en considérant les deux décompositions suivantes de N2 :

a)N2 = ∪

k∈N {k} ×N

b)N2 = ∪

l∈N N× {l}

. (1.34)

Dans le cas des termes réels ou complexes, la condition (1.32 a) utilisée avec la dé-composition (1.34 a) équivaut à la sommabilité absolue de {uk,l; (k, l) ∈ N2} par le théorème 1.88. Il en va de même pour (1.32 b) utilisée avec la décomposition (1.34 b).

La sommabilité absolue de {uk,l; (k, l)∈N2} implique chacune des conditions (1.32

a) et (1.32b) par le théorème1.88. La première des deux implique la convergence absolue de toutes les séries P+∞

l=0 uk,l, la deuxième celle des séries P+∞

k=0uk,l.

Enfin lorsque {uk,l; (k, l) ∈ N2} est sommable, on obtient (1.33) en appliquant la formule de sommation par paquets (th.1.85) aux décompositions (1.34a) et (1.34b).

Une application classique de la théorie des séries doubles est le produit de deux séries absolument convergentes.

Théorème 1.92 (produit de deux séries). Soient P+∞

k=0uk et P+∞

l=0 vl deux séries à termes réels ou complexes, absolument convergentes. Alors la série double de terme général ukvl est convergente et on a

X (k,l)∈N2 ukvl = (+∞ X k=0 uk ) (+∞ X l=0 vl ) = +∞ X n=0 ( X k+l=n ukvl ) . (1.35)

La série simple de terme général wn = P

k+l=nukvl est absolument convergente. On l’appelle série produit de P+∞

k=0uk et P+∞

l=0 vl.

Preuve. Commençons par vérifier la convergence de la série double. Posons

Un := n X k=0 uk, U := +∞ X k=0 uk, Unabs := n X k=0 |uk| Uabs := +∞ X k=0 |uk|

et définissons de même Vn, V, Vnabs etVabs en remplaçantuk par vl. Le produit

UnabsVnabs = X

(k,l)∈{0,...,n}2

|uk||vl|

est exactement la sommeTn0 de la proposition1.90. Comme il est borné par la constante

UabsVabs indépendante den, la proposition1.90nous assure de la convergence de la série double de terme général ukvl.

En appliquant la formule de sommation par paquets à cette série avec le découpage N2 =∪kN({k} ×N), on obtient : X (k,l)∈N2 ukvl = +∞ X k=0 (+∞ X l=0 ukvl ) ,

où chacune des séries simplesP+∞

l=0 ukvlest absolument convergente. Dans une telle série, on peut mettre en facteur la « constante » uk, d’où

X (k,l)∈N2 ukvl= +∞ X k=0 uk (+∞ X l=0 vl ) .

Dans la série indexée park, on peut mettre en facteur la « constante »P+l=0vl , d’où X (k,l)∈N2 ukvl = (+∞ X l=0 vl )+∞ X k=0 uk,

ce qui achève la vérification de la première égalité dans (1.35).

La deuxième égalité dans (1.35) résulte de l’application du théorème de somma-tion par paquets à la famille sommable {ukvl; (k, l) ∈ N2} avec le découpage N2 =

1.6. Séries doubles

nN{(k, l) ∈ N2; k+l = n}. Le même découpage utilisé avec le théorème 1.88 nous fournit la convergence de la série à termes positifs

wabsn := X k+l=n

|ukvl|.

Cette dernière convergence entraîne par comparaison, la convergence absolue de la série de terme général wn, puisque |wn| ≤wabs

Chapitre 2

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