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Convergence en moyenne d’ordre p

Dans le document Chapitre 1 Dénombrer et sommer (Page 174-179)

Théorèmes limites

Remarque 6.10. Il est toutefois possible d’obtenir la convergence presque sûre à partir de la convergence en probabilité, à condition d’avoir unebonne vitessede convergence

6.1.2 Convergence en moyenne d’ordre p

X

i=1

P(|Yni −Y| ≥ε)<+∞.

En effet la convergence vers0deεinous assure de l’existence d’uni0 =i0(ε)tel que pour tout i ≥ i0, εi < ε. Pour i≥ i0, on a donc {|Yni −Y| ≥ε} ⊂ {|Yni−Y| ≥εi} et cette inclusion d’évènements nous permet de majorer le terme général de la série ci-dessus par

i2 à partir du rang i0. Ainsi la suite (Yni) converge presque complètement vers Y donc aussi presque sûrement.

6.1.2 Convergence en moyenne d’ordre p

Nous introduisons maintenant un nouveau mode de convergence, utile notamment dans les problèmes d’interversion limite espérance.

6.1. Convergences de suites de v.a.

Définition 6.12. Soit p ≥ 1 un réel et (Yn)n≥1 une suite de v.a. ayant un moment absolu d’ordre p fini. On dit que cette suite converge en moyenne d’ordre p (ou au sens Lp) vers la v.a. Y si lim n→+∞E |Yn−Y|p = 0. (6.19) Notation : Yn −−−−→Lp n→+∞ Y.

Remarque 6.13. Si Yn converge vers Y en moyenne d’ordre p, Y a nécessairement un moment absolu d’ordre p fini. Pour le voir, on utilise la convexité de la fonction

ϕ : R+R+, x 7→ xp, pour p ≥ 1. Ceci signifie que la « corde » entre deux points de son graphe est « au dessus » de l’arc de courbe correspondant, ou encore que « l’image du barycentre » est majorée par « le barycentre des images », voir la figure 6.1. Cette convexité implique notamment que pour tous a, b≥0, ϕ a+2b1

2ϕ(a) + 12ϕ(b), ce qui s’écrit encore ∀a, b≥0, (a+b)p ≤2p1(ap+bp). (6.20) a a+b 2 b ap bp 1 2ap+1 2bp (a+2b)p x y y= x p

Fig. 6.1 – Convexité de x7→xp et inégalité a+2bp1

2(ap+bp)

Par croissance de ϕ, inégalité triangulaire et (6.20) appliquée avec a = |Yn(ω)| et

b =|Y(ω)−Yn(ω)|, on voit que pour toutω ∈Ω,

|Y(ω)|p ≤ |Yn(ω)|+|Y(ω)−Yn(ω)|p ≤2p1|Yn(ω)|p + 2p1|Y(ω)−Yn(ω)|p.

Par croissance de l’espérance, on en déduit :

E|Y|p ≤2p1E|Yn|p+ 2p1E|Y −Yn|p.

Ce majorant est fini car E|Yn|p est fini par hypothèse etE|Y −Yn|p tend vers0donc est fini au moins pour n assez grand.

Proposition 6.14. La convergence en moyenne d’ordre p implique la convergence en probabilité.

Preuve. C’est une conséquence immédiate de l’inégalité de Markov avec moment, cf. proposition 4.36, puisque

∀ε >0, P |Yn−Y| ≥εE |YnY| p

εp .

Remarque 6.15. Par contre, il n’y a aucune implication entre convergence p.s. et convergence en moyenne d’ordre p. Pour voir que la convergence Lp n’implique pas la convergence p.s., le contre exemple déjà vu à la remarque 6.9 fait l’affaire car on vérifie (exercice) que la suite Yn de cet exemple converge au sens Lp vers 0 (pour tout p≥1). Voici maintenant un contre exemple montrant que la convergence p.s. n’implique pas la convergenceLp. On prendU de loi uniforme sur[0,1]et on poseYn:=n21[0,1/n](U). On voit facilement que

Pω ∈Ω; lim

n→+∞Yn(ω) = 0 =P U ∈]0,1] = 1,

d’où la convergence presque-sûre deYn vers la v.a. constante 0. D’autre part,Ynest une v.a. discrète ne prenant que les valeurs0 ou n2 et on a immédiatement E|Yn|p =n2p−1. Le fait que ce moment absolu d’ordre p tende vers +∞ avec n interdit la convergence Lp de la suite(Yn). Pour s’en convaincre, supposons queYn converge vers Y au sens Lp. AlorsE|Y|p doit être fini et par l’inégalité de convexité (6.20), on obtient

E|Yn|p ≤2p1E|Y|p + 2p1E|Yn−Y|p,

ce qui est impossible puisque le premier membre tend vers l’infini avec n tandis que le second membre reste borné.

Il y a une hiérarchie entre les convergences Lp pour diverses valeurs de p et c’est la même que celle établie à la proposition 4.35 pour l’existence des moments absolus d’ordrep.

Proposition 6.16 (hiérarchie des convergences Lp). Si 1 ≤ p < r < +∞ et si Yn Lr −−−−→ n→+∞ Y, alors Yn Lp −−−−→ n→+∞ Y.

Preuve. PosonsZn :=|Yn−Y|. Il s’agit de montrer que la convergence vers 0deE(Zr n) implique celle de E(Znp) vers 0. Fixons ε arbitraire dans ]0,1[. On commence par le découpage E(Znp) = Z +∞ 0 P(Znp > t) dt= Z 1 0 P(Znp > t) dt+ Z +∞ 1 P(Znp > t) dt. (6.21)

6.1. Convergences de suites de v.a.

Pour tout réel x ≥ 1, on a xp ≤ xr puisque p < r. On en déduit que l’inclusion d’évènements {Znp > t} ⊂ {Znr > t}est vraie pour tout t≥1, d’où

Z +∞ 1 P(Znp > t) dt ≤ Z +∞ 1 P(Znr > t) dt ≤E(Znr). (6.22) Comme ce dernier majorant tend vers 0 quand n tend vers +∞, on peut trouver un entier n1 =n1(ε)tel que

∀n ≥n1,

Z +∞

1

P(Znp > t)< ε. (6.23) Rappelant que ε <1, on a d’autre part

Z 1 0 P(Znp > t) dt = Z ε 0 P(Znp > t) dt+ Z 1 ε P(Znp > t) dt ≤ Z ε 0 dt+ Z 1 ε P(Znp > t) dt = ε+ Z 1 ε P(Zn> t1/p) dt ≤ ε+ (1−ε)P(Zn > ε1/p), d’où finalement ∀n∈N, Z 1 0 P(Znp > t) dt ≤ε+P(Zn> ε1/p). (6.24) Par la proposition 6.14, la convergence deZn vers 0 au sensLr implique sa convergence en probabilité5. Par conséquent P(Zn > ε1/p) converge vers 0 quand n tend vers +∞, ce qui nous assure de l’existence d’un entier n2 =n2(ε)tel que

∀n ≥n2, Z 1 0 P(Znp > t) dt≤2ε. (6.25) On déduit de (6.21), (6.23) et (6.25) que ∀n ≥n0 := max(n1, n2), E(Znp)<3ε.

Commeεétait arbitraire dans ]0,1[,E(Zp

n)tend bien vers0quand n tend vers+∞. Remarque 6.17. La démonstration classique de la proposition6.16est plus rapide que celle présentée ci-dessus puisqu’elle est une conséquence immédiate de l’inégalité

(E|X|p)1/p≤(E|X|r)1/r, ∀1≤p < r < +∞.

On pourra éventuellement voir cette inégalité en exercice. La preuve proposée ci-dessus, certes moins élégante, a néanmoins l’avantage de donner comme sous-produit le résultat suivant qui a son intérêt propre.

5Remarquer que E(Zr

n) = E|Zn−0|r et donc que la convergence Lr de Zn vers 0 équivaut à la convergence vers 0 de E(Zr

n). Cette simplification est particulière à la limite 0, on n’a bien sûr pas équivalence en général entre convergence deZn versZ au sensLret convergence deE|Zn|rversE|Z|r.

Proposition 6.18. Si la suite de variables aléatoires Yn est bornée par une constante positive c (ou plus largement si pour tout n, P(|Yn| ≤c) = 1) et converge en probabilité versY, alorsYn converge au sensLp versY, pour tout p≥1. En particulier pourp= 1, on en déduit l’interversion limite espérance : limn→+∞EYn=EY.

L’argument de la preuve est essentiellement le même que ci-dessus,modulo quelques adaptations mineures que l’on vous laisse le soin de rédiger en exercice.

Nous allons maintenant établir le célèbre théorème de convergence dominée qui est très utile pour l’interversion limite espérance.

Théorème 6.19 (convergence dominée). On suppose que les variables aléatoires réelles Yn (n≥1), Y et Z définies sur le même espace probabilisé (Ω,F, P) vérifient

a) Yn converge presque-sûrement vers Y quand n tend vers +∞; b) pour tout n ≥1, |Yn| ≤Z p.s. ;

c) Z est intégrable. Dans ces conditions,

1. les Yn et Y sont intégrables ;

2. Yn converge vers Y au sens L1, i.e. E|Yn−Y| →0; 3. on a l’interversion limite espérance : limn→+∞EYn=EY.

Preuve. En utilisant a), b) et le lemme6.2, on vérifie facilement l’existence d’un évène-mentΩ0 ∈F de probabilité 1 tel que

∀ω∈Ω0,∀n≥1, |Yn(ω)| ≤Z(ω) et|Y(ω)| ≤Z(ω).

On en déduit que pour tout t ≥0, P(|Yn| > t) = P({|Yn| > t} ∩Ω0)≤ P(Z > t) et de même avec Y à la place de Yn. En intégrant sur R+ relativement àt, on obtient grâce à c) les inégalités

E|Yn| ≤EZ <+∞, E|Y| ≤EZ <+∞,

qui établissent l’intégrabilité desYn et de Y.

Une fois établie cette intégrabilité et donc l’existence de EYn et EY, on remarque que l’interversion limite espérance est une conséquence immédiate de la convergenceL1

en raison de l’inégalité :

|EYn−EY|=|E(Yn−Y)| ≤E|Yn−Y|.

Il nous reste alors à prouver la convergenceL1, autrement dit, en posantZn:=|Yn−Y|, la convergence vers 0de EZn.

Pour cela on utilise comme dans la preuve de la proposition6.16un découpage en 3 de l’intégrale définissantEZn en écrivant pourε >0arbitraire et b =b(ε)convenablement choisi, R+∞

0 = Rε

0 +Rb

ε +R+∞

b . Voyons d’abord le choix de b. Par inégalité triangulaire,

Zn ≤ 2Z, ce qui nous donne pour tout t > 0, P(Zn > t) ≤ P(2Z > t). La variable aléatoireZ étant intégrable par hypothèse c), il en est de même pour2Z ce qui implique

6.1. Convergences de suites de v.a.

la convergence dans R+ de l’intégrale de Riemann généralisée R0+P(2Z > t) dt. On peut donc choisir b assez grand (et supérieur à ε) pour que Rb+P(2Z > t) dt < ε. On a alors ∀n∈N, Z +∞ b P(Zn> t) dt≤ Z +∞ b P(2Z > t) dt < ε. (6.26) Ensuite on contrôle l’intégrale Rb

0 P(Zn> t) dt en écrivant Z b 0 P(Zn > t) dt≤ Z ε 0 dt+ Z b ε P(Zn> t) dt≤ε+ (b−ε)P(Zn > ε)≤ε+bP(Zn > ε).

Par l’hypothèse a), Znconverge presque-sûrement vers 0, donc converge aussi en proba-bilité vers 0. On peut donc trouver un entier n0 = n0(ε) tel que bP(Zn > ε) < ε pour tout6 n ≥n0. On a alors

∀n≥n0,

Z b

0

P(Zn> t) dt <2ε. (6.27) En recollant les morceaux à partir de (6.26) et (6.27), on obtient

∀n≥n0, EZn = Z b 0 P(Zn > t) dt+ Z +∞ b P(Zn> t) dt <3ε.

Comme ε > 0 était arbitraire, ceci établit la convergence vers 0 de EZn et achève la preuve.

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