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Chapitre 2 : Caractérisation des pratiques des systèmes d’agriculture-élevage des hauts

2 Matériel et méthodes

2.1 Sélections des exploitations et immersion

2.1.1 Sélections d’exploitations d’agriculture-élevage représentatives à dires d’experts

A Madagascar, plus de 90% de la production nationale de lait est fournie par l’ensemble des exploitations d’agriculture-élevage des hauts plateaux (Andriamanalina, 2007). Ces exploitations d’agriculture-élevage sont basées sur l’association de systèmes rizicoles et d’élevage bovin laitiers. Afin de s’assurer de couvrir la diversité de ces systèmes d’agriculture-élevage dans la région du Vakinankaratra, il a été nécessaire de déterminer des critères de sélections avec des experts locaux de compétences diverses (agroéconomiste, agronome, zootechnicien, chargé de développement, acteur de la filière lait) ; il s’agit donc d’une diversité « à dire d’experts ». Lors de la première mission

Chapitre 2

à Madagascar (mai 2009), la détermination de ces critères a été réalisée à l’aide des partenaires et acteurs locaux : Cirad-Scrid, Fifamanor, BVPI, Rova et ONG Tafa. Les principaux critères retenus pour la sélection de ces quatre exploitations d’agriculture-élevage étaient :

 la localisation géographique ;

 l’effectif bovin ;

la proportion relative des surfaces de bas-fond et de colline (tanety) ;

 l’existence de cultures fourragères de contre-saison ;

 la diversification du revenu agricole par des cultures de rente ;

 l’activité off-farm ;

 la pratique des systèmes de culture sous couvert végétal (SCV) ;

 la réceptivité aux enquêtes et à l’accueil de deux étudiants (français et malgache) pendant une semaine d’immersion sur leur exploitation.

Le contexte de crise politique, économique et en particulier de déstructuration de la filière lait (fermeture de Tiko, principale entreprise de transformation laitière) qui prévalait au démarrage du travail de thèse n’a pas permis d’envisager une étude de terrain à plus grande échelle (50-60 exploitations).

Avec l’aide des techniciens de terrain de BVPI et du Fifamanor, une dizaine d’agriculteurs susceptibles de correspondre aux critères de sélection ont été identifiés et visités. A la suite d’un entretien préliminaire avec ces agriculteurs (juin-juillet 2009), quatre exploitations ont finalement été retenues autour de la ville d’Antsirabe (Tableau 1).

Tableau 1 : Principales caractéristiques des quatre exploitations d’agriculture-élevage sélectionnées sur les hauts plateaux de Madagascar Expl. Commune Surface totale cultivée Rapport tanety / bas-fond(1) Taille troupeau bovin Culture fourragère de contre-saison Devenir du lait Diversification du revenu agricole SCV Activités ext.(2)

ha ha/ha UGB O/N O/N Y/N

1 Andranomanelatra 13.6 2.0 34 O transformation porcs, œufs N N*

2 Antsoso 6.9 1.3 7 O vente blé, porcs O O**

3 Manandona 4.8 0.2 12 O vente orge, porcs N N

4 Ambohimiarivo 2.7 1.2 3 N

auto-consommation

porc O N

Expl. : numéro de l’exploitation ; SCV : Système de culture sous couvert végétale ; (1) : rapport des surfaces cultivées de tanety et de bas-fond ; (2) : activité extérieure non agricole de l’exploitant ; * : épouse de l’exploitant institutrice ; ** : exploitant avec activité de boucher et négociant de zébu

2.1.2 Immersion : choix méthodologique de pratique du terrain et l’enquêtes

Description de la méthode

La méthodologie d’enquête adoptée est l’immersion aussi appelée observation-participante. Cette méthode, employée fréquemment en ethnologie, anthropologie ou sociologie, a été définie comme le fait de s’efforcer à vivre comme le groupe social étudié dans « le but de saisir son point de vue et son rapport avec la vie » (Malinowski, 2003). Les principes de la méthodologie d’enquête par immersion furent initialement décrits par l’ethnographe B. Malinowski (1884-1942) (Malinowski, 2003) :

 Se couper de sa société d’origine et parvenir à vivre avec le groupe social étudié ;

Caractérisation des pratiques

 Abandonner ses « opinions fausses » et ses « préjugés » ;

 Adopter « les conditions de vie » et participer au quotidien du groupe social étudié (« travailler avec lui », « regarder comment il cultive ses jardins », « écouter le récit de quelques faits folkloriques », « discuter de ses coutumes ») ;

 Acquérir le « sens des bonnes et des mauvaises manières propres » au groupe ;

 Apprendre le langage du groupe, « véhicule même de la pensée » et « s'en servir comme instrument d'enquête ».

L’intégration au groupe social permise par l’immersion facilite la contextualisation des discours et ainsi le travail d’enquête et son interprétation (Gallenga, 2008).

La durée de l’immersion pour les études sociologique ou ethnographique peut être de quelques mois à plusieurs années. Dans notre cas l’immersion s’est limitée à un mois (juillet-août 2009), soit une semaine vivant au sein de chaque exploitation. Cette courte période n’a pas suffi à l’apprentissage de la langue mais a permis d’accéder rapidement au champ lexical malgache de l’exploitation agricole ce qui a facilité les échanges avec les agriculteurs.

Cas d’études

Durant cette période d’immersion dans les quatre exploitations malgaches, nous avons participé activement aux activités quotidiennes de l’exploitant. Il nous a ainsi été permis par exemple de labourer à l’aide de l’angady (bêche malgache), semer des fourrages de contre-saison, récolter des pommes de terre, préparer un mulch avec des résidus de cultures de maïs, récolter du fourrage, piler le riz, nettoyer des étables de bovin et de porcs, remplir des charrettes de fumier, etc. Cette implication dans les travaux quotidiens a contribué à l’installation d’un climat de confiance avec l’exploitant.

Un questionnaire détaillé a servi de support lors d’un dernier entretien en fin d’immersion afin de compléter les informations recueillies durant la semaine (questionnaire placé en Annexe 1). Ce questionnaire aborde les thèmes suivant : structure familiale, activités culturales, activités d’élevage, activités extérieures et flux monétaires (Tableau 2).

La quantification des éléments (rendement de récoltes, fourrages distribués, fumier épandu, etc) s’est avérée délicate car les exploitants pèsent rarement eux même ces éléments. Les indications de mesures étaient souvent formulées en nombre de charrettes, de brouettes, de sacs, de sobika (panier en osier) ou en kapoaka (équivalent au volume d’une boite de lait concentré). Il a donc été nécessaire de trouver des équivalents ou procéder à des mesures et pesées afin d’avoir le même référentiel.

Un suivi des agriculteurs a été réalisé à l’occasion des diverses missions qui se sont déroulées entre octobre 2009 et février 2011. La surface de chaque parcelle a été estimée à l’aide d’un GPS (Garmin eTrex Vista®) et d’un logiciel de cartographie (ArcMap 9.3), des prélèvements de sols ont été réalisés et des données manquantes ou complémentaires collectées (e.g. culture par parcelle, précédents culturaux, fertilisation par parcelle, âge des parcelles). Un stage a par ailleurs été initié avec un étudiant malgache pour évaluer les rendements en riz et en maïs dans les quatre exploitations de l’étude. Les estimations de rendements fournies par les agriculteurs ont été comparées, quand cela était possible, avec des références bibliographiques locales. Ces références ont constitué les seules données de base lorsqu’aucune estimation ou aucune mesure directe des rendements n’a pu être effectuée. (e.g. GSDM, 2008 ; MAEP, 2012).

Chapitre 2

Tableau 2 : Structure générale du questionnaire utilisé lors des enquêtes par immersion

Thèmes généraux Données recueillies

Caractéristiques générales de l’exploitation et de la famille

- Histoire de la famille depuis l’installation

- Composition de la famille et de la force de travail familiale et permanente Activités culturales - Surface totale de l’exploitation et type du sol (tanety, bas-fond)

- Distribution des cultures (types de cultures, par type de sol, surfaces par cultures) - Productivité agricole (estimation rendements, parties vendues et

autoconsommées)

- Gestion de la main d’œuvre (permanente et extérieure) - Nature et quantité des intrants

- Itinéraires techniques pour les principales cultures Activités d’élevage - Effectifs des bovins par race, sexe, stade physiologique

- Effectifs des autres animaux (volailles et porc)

- Variation des stocks d’animaux (achats et ventes) depuis 12 mois - Temps de travail pour l’activité élevage

- Nature de l’alimentation et quantités distribuées - Production laitière journalière moyenne - Produits laitiers commercialisés (quantité et prix) - Gestion des effluents d’élevages

- Charges non alimentaires liées à l’élevage Activités extérieures - Types d’activité

- Temps consacré à ces activités - Coûts et/ou ressources engendrés - Autres sources de revenus Flux mo

nétaires

- Dépenses pour l’éducation

- Dépenses pour l’alimentation et l’entretien du foyer - Dépenses exceptionnelles depuis un an

- Crédits (montants et modalité de remboursement) - Epargne