• Aucun résultat trouvé

5.1 Croissance démographique et sécurité alimentaire à Madagascar

Madagascar, présente l'un des plus forts taux annuel de croissance démographique avec un taux moyen de 3,0% entre 1990 et 2010 (World Bank, 2012). Ainsi la population malgache est passée de près de 11,3 millions en 1990 à 20,7 millions en 2010 (Annexe 9). Il s’agit d’une population à majorité rurale, jeune et qui vit en grande majorité sous le seuil de pauvreté défini par la FAO (Tableau 4). Comme dans de nombreux pays en développement, le pourcentage de population rurale est très important (70%) mais tend à diminuer progressivement (Annexe 9).

Tableau 4 : Fiche synthétique des principales caractéristiques de Madagascar (Sources : FAO, 2012 et World Bank, 2012)

Madagascar

Surface du pays 587 040 km² dont 70% de surface agricole

Population totale 20 714 000 habitants en 2010 dont 70% de population rurale

Densité moyenne 36 personnes/km²

Croissance démographique 2,9% de croissance démographique annuelle en 2010

Age de la population 43% de la population entre 0 et 14 ans 54% de la population entre 15 et 64 ans

Pauvreté 81% de la population sous le seuil de 1,25$/jour/personne 93% de la population sous le seuil de 2,00$/jour/personne

Alimentation environ 2120 kcal/personne/jour d’apports énergétiques alimentaires en moyenne (en 2006-2008)

environ 1700 kcal/personne/jour de besoin énergétique alimentaire minimum (en 2006 2008)

en moyenne 50 g protéines/personne/jour dont 11,4 g d’origine animale

Entre 2000 et 2008, 25 à 28% de la population malgache était considérée comme sous-alimentée. A Madagascar la production alimentaire par personne a baissé globalement de 22, 23 et 20% pour la nourriture de base, le riz et les tubercules, respectivement (Annexe 10). De même l’accès aux denrées alimentaire (riz, lait et viande) pour la population malgache tend à diminuer, avec une baisse de 45 et 36 % pour les offres en lait et viande observée depuis 1980 (Annexe 10).

Introduction générale

Madagascar est un des rares pays d’Afrique dont la totalité du sol est décrit comme étant un sol fortement dégradée (Banwart, 2011 ; Annexe 11). Stoorgovel et Smaling (1990) ont calculé pour 2000 une perte annuelle d’éléments nutritifs d’environ 22 kg N/ha, 12 kg P2O5/ha et 3 kg K2O/ha pour l’ensemble de Madagascar.

5.2 Contexte géographique et physique des hauts plateaux malgaches

Les hauts plateaux malgaches représentent 11% de la surface totale du pays et environ 37% de la population. Sur les 64 869 km² de hauts plateaux, près de 93% sont compris entre 1200 et 1800 m d’altitude (Braun et al., 1997). Les principaux sols présents dans la zone des hauts plateaux sont les ferralsols (65%), lithosols (18%) et les cambisols (10%) (Braun et al., 1997).

Figure 8 : Carte des Hautes Terres Centrales de Madagascar et de la région du Vakinankaratra

La région du Vakinankaratra, au cœur des Hautes Terres Centrales de Madagascar, a une superficie d’environ 16 599 km², elle est densément peuplée (Annexe 12) et est subdivisée en districts (Figure 8). La densité moyenne du Vakinankaratra est de 103 personnes/km² et la plupart de la population de la région est concentrée dans la ville de Antsirabe, environ 225 965 habitants (INSTAT, 2012). La région du Vakinankaratra est caractérisée par un climat tropical d’altitude, avec des « étés » (mi-octobre à mi-avril) chauds et humide et des « hivers » (mi-avril à mi-(mi-octobre) froids et secs (Figure 9). Dans la classification bioclimatique, la zone du Vakinankaratra appartient à l’étage « subhumide avec des saisons sèches pouvant être atténuées par les brouillards » (Annexe 13).

Chapitre 1

Figure 9 : Données climatiques (précipitations et températures moyennes) de la région du Vakinankaratra (moyennes des données climatiques collectées entre 2008 et 2010 par la station météorologique du Cirad-Scrid – Fofifa)

Les hauts plateaux malgaches ont été décrits comme un hotspot en ce qui concerne la dégradation des sols. Ils sont exposés à de forts niveaux d’érosion hydrique, de dégradation physique et de dégradation chimique (Nyssen et al., 2009). Les ferralsols, majoritaires sur les hauts plateaux, ont été classifiés comme ayant une érodabilité élevée (Braun et al., 1997). L’érosion par ruissellement a été quantifiée à proximité d’Antsirabe, en moyenne à 8-10 t MS de sol/ha/an (Douzet et al., 2008).

5.3 Agriculture familiale agriculture-élevage des Hautes Terres Centrales : riz et élevage

bovin

Les exploitations familiales d’agriculture-élevage des hauts plateaux malgaches sont essentiellement basées sur une association riz et élevage bovin laitier. Le paysage agricole de la région distingue les zones de colline (tanety) et les zones de bas-fond ; les cultures et l’utilisation des terres varient selon le paysage (Figure 10).

5.3.1 Riz et autoconsommation

La culture du riz est la plus importante : culturellement à base de l’alimentation malgache (Rakoto Ramiarantsoa, 1995), elle assure à elle seule la majorité des apports énergétiques journaliers de la population et elle représente en moyenne 64% de la surface cultivée nationale (FAO, 2005). Le riz est au premier rang des produits agricoles et alimentaires du pays ; il représente près de 30 % des biomasses agricoles produites et 32 % du poids économique total des productions agricoles. Il est traditionnellement consommé matin, midi et soir ; en 2007, près de 420 g/personne/jour étaient consommés en moyenne. Il couvre alors plus de 48% des apports en calories journaliers de la population malgache (FAO, 2012). Dans les zones rurales (zones de production du riz), les apports énergétiques fournis par le riz peuvent dépasser les 70% des apports énergétiques journaliers (FAO, 2005). En moyenne 10% du riz consommé provient d’importations entre 2000 et 2009 (FAO, 2012). La majeure partie du riz malgache provient de rizicultures irriguées de bas-fonds (Figure 10). En contre saison, des fourrages tempérés, des cultures de rentes (Solanum tuberosum, Triticum aestivum, Hordeum vulgare) ou des cultures maraîchères peuvent être mises en place dans les bas-fonds (Figure 10).

Introduction générale

Figure 10 : Organisation du paysage agricole (toposéquence) de la région des hauts plateaux de Madagascar 5.3.2 Elevage bovins laitiers et élevage zébu

La région du Vakinankaratra, située au cœur du « Triangle Laitier » de Madagascar, pourvoit 90 % de la production nationale de lait (Andriamanalina, 2007). Le lait est la quatrième production agricole de Madagascar en termes de quantité, derrière le riz, la viande de zébu et le manioc. Cette production laitière, environ 555 000 tonnes de lait/an en 2009 (FAOSTAT, 2012), est assurée par de nombreuses exploitations familiales d’agriculture-élevage ayant généralement moins de cinq vaches laitières. L’élevage laitier couvre un large panel de systèmes plus ou moins intensifiés, allant d’élevages d’animaux à dominance zébu, peu productifs, nourris essentiellement au pâturage à des élevages d’animaux de race européenne améliorée (Holstein, Pie Rouge Norvégienne), à fort potentiel de production laitière et complémentés (concentrés, drèches). De nombreuses plantes fourragères sont mises en culture pour l’alimentation des bovins laitiers : fourrages pérennes (e.g. Pennisetum purpureum Schumach. Cv. Kizozi, Brachiaria spp.) cultivés sur les tanety et/ou des fourrages tempérés (e.g. Avena sativa L., Lolium multiflorum Lam.) semés sur les bas-fond en hiver. Par ailleurs, les résidus de cultures (e.g. paille de riz, paille d’orge, paille de blé, rafle de maïs) et la végétation spontanée ou mauvaises herbes (bozaka) sont fortement sollicités pour l’élevage bovin (alimentation et litière).

Chapitre 1

L’élevage de zébus, tout comme le riz, occupe une place essentielle dans la culture et l’économie malgache. En effet, en plus de constituer une force de traction essentielle aux activités agricoles, il est un signe de richesse extérieure. Le zébu malgache joue un rôle important dans les cérémonies traditionnelles (e.g. retournement des morts, mariages). Enfin, la viande de zébu est au rang de seconde production agricole de Madagascar, bien que la consommation en viande de la population reste faible ; en moyenne 20 g viande bovine/personne/jour soit 48% de la quantité de viande consommée quotidiennement (FAO, 2012). Les zébus sont essentiellement nourris de pâtures de bozaka dans les zones de tanety (Figure 10) et de résidus de cultures sur l’exploitation. Sur les tanety, les bozaka sont principalement composés de Heteropogon contortus, Aristida multicaulis, Imperata cylindrica (Rakoto Ramiarantsoa, 1995).

5.3.3 Problématique générale pour les exploitations d’agriculture-élevage des hauts plateaux de Madagascar

Dans les exploitations d’agriculture-élevage malgaches, il existe une forte pression sur les ressources végétales venant s’ajouter à celle s’exerçant sur les terres agricoles. En effet, ces exploitations sont des systèmes où l’animal a une place très importante : source principale de revenu pour l’élevage laitier, force de traction et rôle social pour l’élevage de zébus. Afin d’assurer l’alimentation de l’élevage bovin, la majorité de la biomasse végétale disponible (fourrages, résidus de cultures, bozaka) est exportée des parcelles vers l’animal. Cette pression sur les ressources végétales, et en particulier sur les résidus de cultures, a fortement limité l’adoption des systèmes SCV dans le Vakinankaratra. De plus, dans ces systèmes d’agriculture-élevage où l’autosuffisance en riz est primordiale, la pression sur les bas-fonds est accrue par des cultures successives, riz/fourrages tempérés ou riz/cultures de rente. Les retours de biomasses végétales sur les parcelles sont rares et les apports de matière organique et d’éléments nutritifs sont principalement effectués via le fumier ou les engrais minéraux. Selon la disponibilité en fertilisants, ces apports peuvent être ciblés par les agriculteurs, c’est-à-dire appliqués préférentiellement sur certaines cultures ou parcelles. Ces pratiques (exportation des biomasses végétale, double culture sur bas-fond, fertilisation ciblée) et les différentes utilisations des terres (e.g. cultures annuelles, pérennes, jachères ; Figure 10) peuvent contribuer à accentuer l’hétérogénéité de la fertilité des sols au sein des exploitations. De plus, les ventes des produits agricoles (grains et produit animaux) qui ouvrent le cycle des éléments nutritif (i.e. induisent des sorties d’éléments nutritifs du système, éléments nutritifs qui ne seront donc pas recyclés au sein du système ; Figure 4) peuvent entraîner des bilans déficitaires en éléments nutritifs à l’échelle de l’exploitation si ces exportations ne sont pas compensées par des entrées d’éléments nutritifs en provenance du milieu extérieur (e.g. achats d’engrais, fixation par les légumineuse). L’utilisation des ressources peut alors être de type « minière », entraînant une aggravation de la dégradation des sols (épuisement des sols) au sein de l’exploitation. Cette diminution de la fertilité des sols peut induire une forte baisse de la productivité agricole et ainsi une aggravation de l’insécurité alimentaire.