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II) Le développement des cellules T dans le thymus 1) Le thymus

3) La sélection positive et le choix du lignage CD4 ou CD

Après le stade DN4, les thymocytes en développement expriment progressivement les corécepteurs CD4 et CD8. Ils deviennent des thymocytes doubles positifs (DP). Lors de la transition entre les stades DN4 et DP, les enzymes RAG1 et RAG2 sont à nouveau exprimés et les deux allèles α peuvent potentiellement être réarrangés (Hardardottir et al., 1995). Les mécanismes d’exclusion alléliques sont en effet moins forts sur le locus α. L’arrêt des mécanismes de réarrangement n’a lieu qu’après l’étape de sélection positive dans le cortex thymique.

La chaîne α s’associe à la chaîne β déjà présente pour former le complexe TCRαβ:CD3. A ce stade, le TCR exprimé par le thymocyte interagit avec les complexes CMH:peptide (pCMH) du soi présent à la surface des cTEC. Si l’interaction est suffisamment forte, le thymocyte reçoit un signal de survie et poursuit son développement. Il exprime alors le récepteur aux chimiokines CCR7 dont les ligands CCL19 et CCL21 sont produits par les mTEC. Le thymocyte rejoint alors la médulla pour y subir la seconde étape de sélection, la sélection négative. Cette étape de développement sera traitée plus loin. Si le TCR exprimé par le thymocyte est non fonctionnel pour une quelconque raison, la cellule ne reçoit pas de signal de survie et meurt par négligence. On estime que 80 à 90% des thymocytes ne passent pas le stade de la sélection positive et meurent par négligence au stade DP.

La sélection positive permet de sélectionner les thymocytes exprimant un TCR fonctionnel mais elle permet également de déterminer le lignage CD4 ou CD8 du futur lymphocyte T (Singer et al., 2008). Au stade DP, les deux corécepteurs sont exprimés à la surface des cellules. Le corécepteur a notamment pour fonction de stabiliser l’interaction entre le TCR et les complexes pCMH de classe I (CMH-I) pour le corécepteur CD8 et de classe II (CMH-II) pour le corécepteur CD4. Le modèle actuel postule que le choix du lignage est dépendant de la durée et de l’intensité de l’interaction TCR/pCMH

dans le cortex thymique. Plus clairement, lors de l’interaction TCR/pCMH, le niveau d’expression du CD8 diminue. Si le TCR du thymocyte CD4+ CD8low interagit avec un

complexe pCMH-II, l’interaction est stabilisée par le CD4 et le thymocyte reçoit un signal long qui induit l’activation du facteur de transcription ThPOK qui est nécessaire et suffisant à induire le choix du lignage CD4 (He et al., 2010). Le thymocyte deviendra alors SP CD4. Inversement, si le TCR du thymocyte CD4+ CD8low interagit avec un

complexe pCMH-I, l’interaction est peu stable du fait de l’expression faible du CD8 et le thymocyte reçoit un signal court. Le thymocyte exprime alors Runx3 qui va réprimer l’expression de ThPOK entrainant une suppression de l’expression du CD4. Le niveau d’expression du CD8 est alors augmenté et le thymocyte commence à exprimer des gènes spécifiques des cellules T CD8 comme ceux codant pour les molécules cytotoxiques. Le thymocyte deviendra alors SP CD8.

Il est important de noter que le peptide associé au CMH en interaction avec le TCR n’est pas nécessairement le peptide dont le TCR est spécifique ni même un peptide structuralement proche. Les travaux du groupe de Bevan ont montré que, dans des cultures de thymus in vitro, la sélection positive de thymocytes exprimant un TCR spécifique d’un peptide de l’ovalbumine (OVA) restreint par le CMH-I (OT-I) peut être induite par différents variants du peptide (Hogquist et al., 1994). Ces peptides sont reconnus par le TCR OT-I avec une affinité variable. Ainsi, des peptides agonistes partiels d’un TCR peuvent induire la sélection positive des thymocytes exprimant ce TCR. Les travaux du groupe de Kappler et Marrack ont montré que l’expression d’un seul et unique complexe pCMH, constitué du CMH-II I-Ab lié covalemment au peptide Ea, permet

la génération d’un répertoire T CD4 périphérique divers en termes d’usage des segments Vβ du TCR (Ignatowicz et al., 1996). Plus encore, ces cellules ont une spécificité antigénique différente du peptide utilisé lors de la sélection positive mais restreinte au CMH I-Ab. Ces résultats suggèrent qu’un seul peptide est capable d’induire la sélection

positive de plusieurs TCR ayant des spécificités différentes. Ces résultats ont ensuite été confirmés par d’autres groupes (Miyazaki et al., 1996).

En 2009, les travaux du groupe de Connolly ont mis en évidence le même phénomène pour le développement du répertoire T CD8 (Wang et al., 2009). En utilisant une construction codant pour le CMH-I Kb lié covalemment au peptide SIINFLEKL dérivé de

l’ovalbumine chez une souris déficiente en CMH-I, les auteurs ont montré que le répertoire T CD8 périphérique était divers en termes d’usage Vβ. Ce répertoire est capable de reconnaitre spécifiquement une grande variété de peptides dans le contexte du CMH-I Kb. Finalement, différents peptides partageant quelques similarités structurales peuvent sélectionner positivement un même TCR spécifique d’un antigène partageant les mêmes similarités structurales (Ebert et al., 2009; Lo et al., 2009).

En conclusion, l’ensemble de ces travaux suggèrent qu’un même complexe pCMH est capable de sélectionner positivement un répertoire T CD4 et CD8 divers spécifique d’antigènes différents de celui utilisé lors de la sélection. Cependant, bien qu’un seul complexe pCMH soit capable de sélectionner un répertoire T relativement divers, in vivo, la génération d’un répertoire T pleinement divers nécessite la présentation d’un répertoire de peptide suffisamment divers (Goldrath and Bevan, 1999; Starr et al., 2003).