• Aucun résultat trouvé

V) Le diabète de type

1) Facteurs de prédisposition

a) Facteurs génétiques

- Le CMH-II

Le premier locus de susceptibilité au diabète de type 1 est associé aux gènes codant pour le CMH-II (Tsai and Santamaria, 2013). Chez l’Homme, plusieurs allèles codant pour les molécules de CMH-II DQ et DR ont été associés à la pathologie. 90% des enfants développant un Dt1 sont porteur d’au moins un allèle de CMH-II associé à une susceptibilité au Dt1. En particulier, les individus exprimant la combinaison d’allèles HLA-DR3/DR4-DQ8 est associée à un risque de 5% de développer le Dt1 avant l’âge de 15 ans (Todd et al., 1987). L’analyse de la séquence de l’allèle DQ8 comparée aux autres allèles DQ révèle la présence d’une mutation non synonyme qui entraîne la substitution de l’acide aspartique situé à la position β57 (β57Asp) par une alanine. Alors que la présence de β57Asp confère un effet protecteur, son absence est associée à une susceptibilité accrue au Dt1. Chez la souris, l’allèle I-Ag7 du CMH-II est l’équivalent de

l’allèle DQ8 chez l’Homme (Wicker et al., 1995). Les propriétés de cet allèle murin seront détaillées plus loin. Un autre gène codant pour un CMH-II semble également présenter des polymorphismes associés à une susceptibilité au Dt1. Ainsi, alors que l’allèle DP3 est un facteur de susceptibilité au Dt1, l’allèle DP4 montre un effet protecteur.

Le second locus est associé à des polymorphismes du promoteur de l’insuline (Bell et al., 1984). Les allèles du gène de l’insuline sont classés en trois catégories en fonction du nombre de répétition d’un microsatellite de 15 paires de bases situé dans la région promotrice. Ainsi, les allèles de classe I qui présentent le moins de répétitions du microsatellite sont des allèles de susceptibilité (Bennett et al., 1995). Inversement, les allèles de classe III qui présentent le plus de répétitions sont des allèles protecteurs. Cet effet s’explique par les différences de niveau d’expression de l’insuline entre les différents allèles. Les individus porteurs d’allèles de classe III produisent environ 20% d’insuline en plus que ceux porteurs d’allèles de classe I, dans le pancréas et dans le thymus (Pugliese et al., 1997; Vafiadis et al., 1997). Ainsi, la surexpression thymique de l’insuline pourrait augmenter la tolérance centrale vis-à-vis de l’insuline et ainsi empêcher le développement d’une réponse T spécifique de l’insuline considéré comme l’antigène majeur du Dt1.

- CTLA4

Le gène codant pour la molécule immunomodulatrice CTLA4 est associé à un locus de susceptibilité au Dt1 (Nisticò et al., 1996; Ueda et al., 2003). Comme décrit précédemment, cette molécule est impliquée dans les mécanismes de tolérance périphérique passive et dominante (Tivol et al., 1995; Waterhouse et al., 1995). Ainsi, le polymorphisme A49G qui correspond à la substitution d’une adénine par une guanosine en position 49 de l’exon 1 du gène de CTLA4 est associé à une susceptibilité au Dt1. Plusieurs études indépendantes ont confirmé l’association de ce polymorphisme avec le Dt1 (Donner et al., 1997; Marron et al., 1997; Nisticò et al., 1996). La déficience en CTLA4 est associée à des désordres lymphoproliphératifs. Le polymorphisme A49G entraîne une diminution du niveau d’expression de CTLA4 en surface de cellules et à une diminution des fonctions immunosuppressives dépendantes de CTLA4 (Anjos et al., 2002; Kouki et al., 2000).

Le gène de la tyrosine phosphatase non récepteur 22 (PTPN22) est associé à un locus de susceptibilité au Dt1 (Bottini et al., 2004). Ce gène code pour la tyrosine phosphatase lymphoïde (Lyp) exprimée par les cellules T dont la fonction est d’inhiber le signal activateur induit par l’engagement du TCR et de la molécule de costimulation CD28 (Hill et al., 2002). La mutation non synonyme C1858T est associée à une susceptibilité accrue au Dt1 (Bottini et al., 2004). Cette mutation entraîne un gain de fonction de Lyp induisant une diminution de la sécrétion d’IL-2, une cytokine importante pour le développement et la fonction des Treg, et une diminution de la signalisation calcique dans les cellules T après activation (Vang et al., 2005). L’association de ce polymorphisme a été confirmée par des études indépendantes plus tardivement (Douroudis et al., 2008; Fedetz et al., 2006; Smyth et al., 2004).

- IL-2Rα (CD25)

Le gène codant pour la chaîne α du récepteur à l’IL-2 CD25 est associé à un locus de susceptibilité au Dt1 (Vella et al., 2005). CD25 est un récepteur particulièrement important dans le développement et la fonction des Treg. Deux polymorphismes ont été identifiés (Lowe et al., 2007; Qu et al., 2007). Des polymorphismes ont également été associés à une plus faible production de la forme soluble de IL-2Rα ce qui corrèle avec le fait que la stimulation de cellules mononuclées de patients diabétiques induit une production plus faible de la forme soluble de IL-2Rα comparativement aux individus contrôles (Lowe et al., 2007; Maier et al., 2009).

De nombreux autres gènes codant pour des molécules impliqués dans la réponse immunitaire sont associés à des loci de susceptibilité au Dt1. Ainsi, des gènes codant pour des récepteurs de reconnaissance des motifs moléculaires associés à des pathogènes IFIH1, TLR7 et 8, ou des gènes impliqués dans la fonction des cellules T effectrices (CCR5, IL-12RA, IL-2) et régulatrices (IL-10) (Qu et al., 2008; Smyth et al., 2006; Smyth et al., 2008; Todd, 2010). De fait, la plupart des loci de susceptibilité au Dt1 sont associés à des gènes impliqués dans la réponse immunitaire. Ceci montre bien l’implication des mécanismes de régulation, d’activation et des fonctions du système

immunitaire dans le développement du DT1.

b) Facteurs environnementaux

Bien que la composante génétique soit fondamentale, l’augmentation drastique de l’incidence de Dt1 au cours des dernières décennies notamment dans les pays industrialisés suggère une influence majeure de l’environnement sur le développement du Dt1.

Par exemple, l’introduction précoce de lait de vache dans l’alimentation des nourrissons est associée à un risque accru de Dt1 (Clemens, 2011; Nielsen et al., 2014). En effet, le lait de vache contient de nombreux allergènes dont certains pourraient initier une réponse autoimmune par mimétisme moléculaire avec une protéine des îlots de Langerhans. De même, la consommation de gluten et la présence de nitrates dans l’alimentation des enfants sont associées à un risque de Dt1.

De plus, différentes infections virales ont été associées au Dt1. Ainsi, l’infection par le virus Coxsackie B4 peut induire une réponse immunitaire autospécifique diabétogène (Jaïdane et al., 2009). Un mimétisme moléculaire a été identifié entre une protéine virale et une protéine des îlots de Langerhans (Vreugdenhil et al., 1998). De plus, l’infection par le virus Coxsakie B4 entraîne la production de la protéine de capside du virus dans les îlots de Langerhans (Jaïdane et al., 2009). Ainsi, les cellules spécifiques de cette protéine de capside pourraient induire la lyse des cellules des îlots entrainant un Dt1. Le virus de la rubéole a lui aussi été associé au développement de Dt1. En 1989, Strachan formule l’hypothèse de l’hygiène selon laquelle la diminution de la taille des familles et l’augmentation des standards de propreté induiraient des désordres immunitaires responsables d’une plus grande sensibilité aux infections et aux pathologies autoimmunes (Strachan, 1989). Cette hypothèse est confirmée chez la souris non-obèse diabétique chez qui la consommation de probiotiques et la présence de microbes chez des individus jeunes réduit l’incidence de Dt1 (Calcinaro et al., 2005; Wen et al., 2008). Inversement, les souris NOD n’ayant pas de flore commensale développent un Dt1 plus précoce que les souris ayant une flore commensale (Wen et al., 2008).

Les infections peuvent également avoir un rôle protecteur contre le développement du Dt1. Ainsi, la théorie de l’hygiène postule qu’en l’absence d’infection, le système immunitaire ne serait pas correctement régulé ce qui favoriserait le développement de désordres immunitaires dont des maladies autoimmunes. Cette théorie part du constat qu’il existe une corrélation inverse entre l’incidence de pathologies infectieuses et le développement de maladies autoimmunes (Bach, 2002). Ainsi, dans les pays ayant des standards sanitaires élevés, l’incidence de pathologies autoimmunes est plus élevée (Dunne and Cooke, 2005). Notamment, la prévalence de Dt1 est moins élevée dans les régions équatoriales qu’en Europe du Nord et en Amérique du Nord (Zaccone et al., 2006). De plus, des études ont montré qu’il existait une corrélation inverse entre la prévalence de Dt1 et d’infections par des entérovirus (Viskari et al., 2005; Viskari et al., 2004). Chez la souris NOD, les infections virales peuvent inhiber le développement du Dt1 en induisant l’expansion de Treg producteurs de TGFβ (Filippi et al., 2009; Oldstone, 1988). Ce mécanisme serait dépendant de la production par les pDC de TGFβ et d’IFN de type I induite par la stimulation de PRR (Diana et al., 2011).