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Sécrétion et réabsorption tubulaire des drogues et xénobiotiques

CHAPITRE 1 : INTRODUCTION

2. Le tubule proximal

2.5. Sécrétion et réabsorption tubulaire des drogues et xénobiotiques

Le rein et le foie ont des fonctions complémentaires dans l’élimination des drogues et xénobiotiques. Le métabolisme se déroule principalement dans le foie où la substance originale est transformée en métabolites plus polaires et plus hydrophiles qui sont pris en charge par le rein pour leur élimination.

Filtration glomérulaire

La grande majorité des drogues et xénobiotiques possèdent un poids moléculaire bien inférieur (environs 30 kDa) à la limite de la barrière de la filtration glomérulaire. Cependant, beaucoup de ces substances se lient aux protéines présentes dans le sérum (95% de furosémide et 98 % des anti-inflammatoires non stéroïdiens s’associent à l’albumine), et par conséquent la fraction filtrée est réduite aux molécules non liées. Les médicaments peuvent s’associer à différentes protéines sériques, la plus importante est l’albumine liant préférentiellement les composés

acides, suivie par l’α1-glycoprotéine acide pour les composés basiques

[Kragh-Hansen U., 1981; Routledge P.A., 1986]. Dans la majorité des cas, l’élimination rénale des drogues et xénobiotiques dépend de la sécrétion tubulaire active.

Réabsorption tubulaire

Les acides et les bases faibles sont en général réabsorbés par diffusion passive au travers de l’épithélium tubulaire.

Un certain nombre de drogues et xénobiotiques sont réabsorbés par des mécanismes facilités. En effet, certains anions organiques sont transportés à la membrane apicale du tubule proximal par un système de co-transport couplé au sodium (par exemple les vitamines comme l’acide ascorbique, la biotine). Peu de connaissances existent sur la réabsorption facilitée des cations organiques.

Plusieurs médicaments ressemblant aux peptides comme les antibiotiques β

-lactames (ceftibuten, cyclacilline) sont des substrats des transporteurs de peptides localisés à la membrane de la bordure en brosse et absorbés par les cellules proximales. Les transporteurs de peptides servent d’intermédiaire à un co-transport électrogénique de di- et tri-peptides couplé aux protons, lequel fonctionne grâce au gradient de proton et à la différence de potentiel de membrane négative [Daniel H. et al., 1997].

Des substances hautement hydrophiles insolubles dans les lipides comme les aminoglycosides cationiques et/ou peut-être le cadmium sont réabsorbées par endocytose médiée par récepteur [De Broe M.E. et al., 1984; Foulkes E.C., 1990; Templeton D.M., 1990].

Sécrétion tubulaire rénale des drogues et xénobiotiques

La plupart des xénobiotiques ioniques sont sécrétés par deux mécanismes de transport, l’un réservé à la sécrétion des anions organiques (« acides organiques »), et l’autre à celle des cations organiques (« bases organiques »). La première étape de la sécrétion, le transport au travers de la membrane basolatérale, de chacun des deux mécanismes généraux est effectuée par différents sous-systèmes susceptibles de correspondre à différentes molécules de transport pour lesquelles des substrats de structure moléculaire plutôt non-spécifique peuvent posséder des affinités variables [Moller J.V. et al., 1982; Ullrich K.J., 1994]. Plusieurs isoformes de ses transporteurs ont été identifiées et sont membres de la famille des transporteurs des ions organiques, comprenant les transporteurs d’anions organiques (OAT) et les transporteurs de cations organiques (OCT) [Burckhardt G. et al., 2000; Inui K.I. et al., 2000; Sekine T. et al., 2000].

L’étude des mécanismes de sécrétion des ions organiques provient essentiellement des investigations sur quelques substances transportées qui sont

considérées comme représentatives d’autres ions organiques sécrétés. Pour les anions organiques, le substrat classique est le para-aminohippurate ; tandis que pour les cations organiques, les substrats classiques sont le tétraéthylammonium

et la N1-méthylnicotinamide.

Ces deux systèmes de transport classiques sont exclusivement localisés dans le tubule proximal. La sécrétion n’est pas uniforme tout au long du tubule proximal et peut être différente entre les néphrons superficiels et juxtamédullaires. Comme le nombre de molécules transportées est limité, la sécrétion est saturable et sujette à la compétition entre les substrats.

Les systèmes de transport des ions organiques ont été caractérisés aux deux cotés de la membrane du tubule proximal (Fig. 15 et Fig. 16, pour plus de détails voir Annexe 1 pages : 157-163) [Pritchard J.B. et al., 1993].

Figure 15. Schéma des processus de transport associés à la sécrétion des anions

organiques (OAs) par les cellules tubulaires proximales rénales [Wright S.H. et al., 2004]. Les cercles correspondent aux transporteurs. Les flèches indiquent la direction du transport net de substrat pendant la phase active de sécrétion. Les lignes solides correspondent aux voies principales de transport des OAs, la ligne en pointillé à la voie secondaire, la ligne en tiret représente la diffusion.

1. Na+/K+-ATPase; 2. NaDC-3; 3, 4, 5. OAT1, OAT2 et OAT3; 6. MRP2; 7. URAT1; 8. OAT4; 9. Oatp1, OAT-K1/K2; 10. OATV1, NTP1; 11. Échangeur OA/OA physiologique. Description des transporteurs voir Annexe 1 § A.1. (pages 157-160).

Figure 16. Schéma des processus de transport associés à la sécrétion des cations organiques (OCs) par les cellules tubulaires proximales rénales [Wright S.H. et al., 2004]. Les cercles correspondent aux transporteurs. Les flèches indiquent la direction du transport net de substrat pendant la phase active de sécrétion. Les lignes solides correspondent aux voies principales de transport des OCs, la ligne en pointillé à la voie secondaire, la ligne en tiret représente la diffusion.

1. Na+/K+-ATPase; 2, 3, 4. OCT1, OCT2 et OCT3, 5. MDR1; 6. NHE3; 7. Echangeur OC/H+; 8. OCTN1; 9. OCTN2; 10. Voie électrogénique de réabsorption de la choline. Description des transporteurs voir Annexe 1 § A.2. (pages 160-163).

En plus de ces systèmes de transport sécrétoire classique, d’autres mécanismes de transport sont impliqués dans l’excrétion rénale des xénobiotiques [Roch-Ramel F., 1998].

Au niveau de la membrane basolatérale, l’échangeur oxalate/sulfate (SAT1) et le système de transport sodium-dicarboxylate (NaDC-3) ont été identifiés [Karniski L.P. et al., 1998; Ullrich K.J., 1994; Wang H. et al., 2000].

D’autres transporteurs ont été clonés et identifiés à la bordure en brosse ; cependant, leur fonction dans le rein reste encore à définir. Parmi ceux-ci, les protéines associées à la résistance aux médicaments (MRP) et le transporteur multi-médicaments/P-glycoprotéine (MDR/Pgp) sont des transporteurs actifs primaires dépendant de l’ATP, respectivement pour les anions organiques et les cations organiques [Borst P. et al., 2000; Klein I. et al., 1999]. Ils stimulent l’efflux actif de la cellule vers la lumière, d’une variété d’ions organiques. Un autre transporteur, OATP1, permet le transport apical des conjugués stéroïdiens et de la sulfobromophtaléine [Lu R. et al., 1996]. Les transporteurs OAT-K1 et OAT-K2

favorisent le transport du méthotrexate et du folate [Masuda S. et al., 1999b; Masuda S. et al., 1999a]. L’OCTN1 et l’OCTN2 sont des transporteurs multispécifiques des cations organiques [Wu X. et al., 1999; Yabuuchi H. et al., 1999].

Le rein est un organe particulièrement sensible aux atteintes toxiques pour plusieurs raisons. Le flux sanguin rénal (25% du débit cardiaque) est plus important en comparaison avec la majorité des autres tissus, la quantité de drogues délivrées au rein est donc plus élevée (50 fois). Le rein présente la plus grande surface endothéliale par gramme de tissu et possède la plus haute pression hydrostatique capillaire favorisant la retenue des antigènes circulants et la formation de complexes immuns. Le rein possède également une haute activité métabolique ainsi que de multiples systèmes enzymatiques. Le transport tubulaire et les autres processus rénaux métaboliques nécessitent une quantité considérable d’oxygène et sont sensibles à l’action des inhibiteurs métaboliques. Il est à noter que le segment S3 du tubule proximal possède la plus grande proportion d’oxygène délivré/oxygène consommé par rapport à toutes les autres entités fonctionnelles de l’organisme [Brezis M. et al., 1984]. Le rein est le seul endroit où les drogues fortement liées aux protéines se dissocient, traversent la cellule tubulaire et s’accumulent dans l’épithélium tubulaire et/ou atteignent la lumière tubulaire. Une grande quantité d’enzymes épithéliaux tubulaires impliquées dans les systèmes de transport tubulaire peuvent être bloquées, étant donné notamment la très haute concentration en solutés dans le liquide tubulaire pouvant atteindre des taux de concentrations de l’urine/plasma dépassant 1000 dans certains cas.

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