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CHAPITRE 1 : INTRODUCTION

3. Marqueurs urinaires d’atteinte tubulaire proximale

3.2. Atteinte fonctionnelle

Protéinurie

Dans des conditions normales, la barrière de filtration glomérulaire empêche le passage de protéines de haut poids moléculaire du plasma vers la lumière du néphron. Dans certains états pathologiques, la sélectivité de la barrière de filtration se modifie, permettant aux protéines de haut poids moléculaire d’apparaître dans les urines. Par contre, dans les conditions normales, une quantité limitée de protéines de faible poids moléculaire est filtrée et réabsorbée par les cellules tubulaires proximales. Lorsque la capacité de réabsorption de l’épithélium tubulaire proximal est perturbée, plusieurs protéines de faible poids moléculaire échappent à la réabsorption et sont détectées dans les urines. Par conséquent, la différence entre la protéinurie glomérulaire et la protéinurie tubulaire se base sur la quantité et la nature des protéines mesurées dans les urines (Fig. 17) [Peterson P.A. et al., 1969]. De

plus, la filtration d’une quantité anormale et/ou le type de protéines influencent la progression des maladies rénales en induisant secondairement des altérations aux cellules de l’épithélium tubulaire et aux structures interstitielles [Bernard A. et al., 1991b; Nath K.A., 1992].

Tableau 5 : Localisation d’enzymes dans le néphron chez le rat

Enzyme Localisation cellulaire

Localisation

dans le néphron Référence

Fructose-1,6-biphosphatase Tubule proximal [Burch H.B. et al., 1978] Pyruvate kinase Tubule distal [Schmid H. et al., 1980] Lactate déshydrogénase Tout le néphron [Burch H.B. et al., 1974]

Aldose réductase

Cytosol

Anse fine et tubules collecteurs de la médullaire et des régions papillaires

[Sands J.M. et al., 1989]

Phosphatase alcaline Tout le néphron [Schmidt U. et al., 1971] 5’-nucléotidase Tout le néphron [Cole B.R. et al., 1982] Nucléotide pyrophosphatase Tubule proximal [Le Hir M. et al., 1986]

γ-glutamyltransférase

Bordure en brosse

Tubule proximal [Heinle H. et al., 1977] Succinate déshydrogénase Tout le néphron [Schmid H., 1984] Citrate synthase Mitochondrie Tout le néphron [Le Hir M. et al., 1982] N-acétyl-β-D-glucosaminidase Tout le néphron [Guder W.G. et al., 1984]

Phosphatase acide

Lysosome

Tout le néphron, excepté l’anse large

ascendante de Henlé de la

médullaire

[Olbricht C.J. et al., 1984]

Protéinurie de haut poids moléculaire

Un marqueur précoce de l’atteinte glomérulaire est l’apparition dans les urines de protéines plasmatiques de poids moléculaire supérieur à 50 kD dont l’albumine (69 kD), la transferrine (77 kD) et les immunoglobulines (146 kD).

Figure 17. Trois types de protéinurie[Finn W.F. et al., 2003].

L’albumine est quantitativement la protéine urinaire majeure provenant du plasma. La concentration moyenne de l’albumine dans les urines normales est au moins 5 fois supérieure à celle des autres protéines de haut poids moléculaire et au moins 50 fois supérieure à celle de la plupart des autres protéines de faible poids moléculaire. Etant donné sa taille moléculaire et sa forte charge négative, l’albumine est efficacement retenue par la barrière de filtration glomérulaire. La petite quantité d’albumine qui échappe néanmoins au filtre glomérulaire est réabsorbée par le tubule proximal avec une efficience présumée de 99 %. Une albuminurie élevée peut donc refléter soit une augmentation de la filtration glomérulaire, soit une déficience du transport tubulaire de l’albumine filtrée.

La transferrine est une protéine transporteuse de fer dont la concentration urinaire est 15 fois plus faible que celle de l’albumine. La détection de transferrine dans les urines est le témoin précoce d’une implication glomérulaire dans certaines néphropathies, et est souvent associée avec l’albuminurie.

Les immunoglobulines excrétées dans les urines sont composées

préférentiellement des IgG, IgA et des chaînes légères d’immunoglobulines. La présence des IgG dans les urines indique une densité augmentée des pores larges dans la barrière de filtration glomérulaire, permettant le passage de toutes les protéines en fonction de leur taille et de leur charge. L’excrétion urinaire d’IgG reflète

donc la sélectivité de la taille du filtre glomérulaire, signant la nature glomérulaire de la protéinurie [Tencer J. et al., 1998].

Protéines de faible poids moléculaire

La protéinurie tubulaire est composée de protéines de faible poids moléculaire. Plusieurs protéines de faible poids moléculaire apparaissent normalement dans les urines et ont été mesurées en tant que marqueurs biologiques

potentiels de l’atteinte tubulaire [Bernard A.M. et al., 1982] dont notamment : la β2

-microglobuline, la protéine de liaison au rétinol (RBP, retinol binding protein) et l’α1

-microglobuline [Bernard A. et al., 1979].

La β2-microglobuline est une protéine globulaire de faible poids moléculaire (11,8 kD) synthétisée par quasi toutes les cellules nucléées et localisées à leur

surface membranaire. Etant donné son poids moléculaire et son petit rayon, la β2

-microglobuline est facilement filtrée par le glomérule. Dans des conditions normales,

approximativement 99,9% de la β2-microglobuline filtrée sont réabsorbées par les

cellules épithéliales du tubule proximal et finalement catabolisée. L’excrétion urinaire

de β2-microglobuline est considérablement augmentée lors d’atteinte tubulaire

proximale. Cependant, lorsque le pH urinaire est inférieur à 5,5, la β2-microglobuline

est dégradée ; la protéine de liaison au rétinol et l’α1-microglobuline sont plus stables

comme marqueurs urinaires [Bernard A.M. et al., 1987].

La protéine de liaison au rétinol, également appelée α2-microglobuline, est une protéine de faible poids moléculaire (21,4 kD) synthétisée dans le réticulum endoplasmique des cellules parenchymateuses du foie où elle se lie au rétinol. En effet, la fonction de la protéine de liaison au rétinol est de transporter la vitamine A, sous sa forme alcoolique (rétinol), du foie vers les tissus épithéliaux. Dans le plasma, la protéine de liaison au rétinol se lie à la transthyrétine (ou préalbumine). Une fois le rétinol délivré au tissu cible approprié, la protéine de liaison au rétinol change de conformation, perd son affinité pour la transthyrétine, est ensuite rapidement éliminée du plasma par la filtration glomérulaire et finalement réabsorbée et catabolisée par les cellules tubulaires proximales. La réabsorption de la protéine de liaison au rétinol implique la mégaline [Marino M. et al., 2001].

L’α1-microglobuline (protéine HC , 26-30 kD) est une protéine glycosylée, associée à la nouvelle famille de petites protéines sécrétoires, comprenant la

protéine de liaison au rétinol. L’α1-microglobuline est principalement synthétisée

dans le foie et est présente dans le plasma sous une forme libre ou liée à différentes protéines de haut poids moléculaire comme l’immunoglobuline A ou l’albumine. Bien que la moitié de la quantité présente dans le plasma soit complexée à l’immunoglobuline A, la forme libre est facilement filtrée au travers de la membrane glomérulaire. Cette forme libre est utilisée comme indicateur de dysfonction tubulaire [Ekstrom B. et al., 1975; Grubb A., 1992; Weber M.H. et al., 1992].

Autres protéines

La Protéine 1, également appelée protéine des cellules de Clara, est une α -microprotéine (environ 20 kD). L’excrétion urinaire de protéine 1 augmente chez les patients présentant un dysfonctionnement tubulaire proximal [Bernard A. et al., 1991a].

Les amylases (EC 3.2.1.1) sont des enzymes de faible poids moléculaire et

excrétées en grandes quantités dans les protéinuries tubulaires. Les amylases sériques sont principalement synthétisées par les glandes salivaires et le pancréas. Ces deux iso-enzymes possèdent la même taille moléculaire (29Å) mais des charges nettes différentes dans le plasma ; le rapport urinaire de l’amylase salivaire sur l’amymase pancréatique peut devenir utile pour explorer les changements des charges négatives de la membrane basale glomérulaire [Recio F. et al., 1994]

Le lysozyme (EC 3.2.1.17) ou muramidase est une enzyme qui catalyse l’hydrolyse de la couche de peptidoglycan de la paroi cellulaire des bactéries. Il provient des cellules phagocytaires et est activement sécrété par les monocytes et les macrophages. L’excrétion urinaire de lysozyme augmente lors d’infections des voies urinaires, de lésions tubulaires proximales et d’une synthèse excessive de lysozyme endogène qui dépasse largement la capacité d’absorption du tubule proximal.

La cystatine C est une protéine basique non-glycosylée avec pratiquement le

même poids moléculaire (13,3 kD) que la β2-microglobuline. Toutes les cellules

nucléées produisent un taux stable de cystatine qui n’est pas influencé par l’inflammation. Les concentrations plasmatiques de cystatine changent avec l’âge en parallèle avec les modifications du taux de filtration glomérulaire. La cystatine C est présente dans les urines lors de dysfonctionnements tubulaires. La cystatine C est considérée par certains comme un marqueur endogène de la fonction rénale plus fiable que la créatinine.

La glycoprotéine de Tamm-Horsfall (80 kD) est la plus abondante protéine d’origine rénale présente dans les urines normales et le constituant majeur des débris urinaires [TAMM I. et al., 1950]. La protéine de Tamm-Horsfall est localisée à la membrane des cellules épithéliales de la branche ascendante large de l’anse de Henlé. L’excrétion urinaire de cette protéine peut augmenter suite à une atteinte de la partie distale du tubule, mais peut être anormale lorsque la masse rénale est réduite [Thornley C. et al., 1985].

4. Cellules de rein d’opossum : modèle d’étude du

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