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d. Le risque de cancer lié à l'ADN contaminant

Cet ADN peut provenir des cultures cellulaires, mais aussi des techniques de l’ADN recombinant que nous verrons plus loin.

Pour comprendre l'importance de cette contamination, nous devonsd'abord considérer les gènes normaux qui interviennent dans le contrôle ou le développement des tumeurs.

Proto-oncogènes etanti-oncogènes

Notre génome comporte des séquences nécessaires à la synthèse des protéines. Les protéines entrent dans la constitution de notre organisme et assurent le fonctionnement métabolique (enzymes), mais certaines d'entre elles n'interviennent qu'à certains moments particuliers pour contrôler la multiplication cellulaire, la différenciation cellulaire et le développement. Curieusement, les gènes nécessaires à la synthèse de ces protéines de contrôle ont été retrouvés, quoique modifiés, chez des rétrovirus responsables de tumeurs chez certains animaux. Ces séquences au pouvoir tumorigène ont été nommées « oncogènes viraux » (v-onc en abrégé), et les gènes humains qui leur ressemblent sont

appelés oncogènes cellulaires (c-onc) ou proto-oncogènes[215], puisqu'ils ne sont pas cancérigènes en temps normal. Ces gènes de contrôle ne fonctionnent donc qu'à certains moments et doivent rester en sommeil le reste du temps, car leur réactivation les transforme en véritables oncogènes pouvant entraîner la cancérisation des cellules qui les contiennent.

Prenons deux exemples de ces gènes rétroviraux.

L'un des plus répandus est le proto-oncogène c-myc, découvert pour la première fois chez des patients atteints du lymphome de Burkitt et impliqué dans de nombreux cas de cancers humains. Le gène « myc » intervient dans le contrôle du cycle cellulaire : il est actif quand la cellule se divise, mais ne s'exprime pas quand la cellule est au repos. La protéine c-myc codée par ce gène doit être capable de se combiner à l’ADN pour induire sa réplication préalable à la division cellulaire[216]

L'oncogène c-fos, homologue du v-fos de virus de sarcomes murins, intervient dans le développement de l'os et la physiologie osseuse. Serait-ce lui qui aurait été réactivé par le SV40 dans le développement des ostéosarcomes ?

À l'inverse, notre génome comporte des gènes qui s'opposent par leur action au développement des tumeurs[217] : ce sont les gènes suppresseurs de tumeurs ou anti-oncogènes. Tels sont les gènes p53 et pRB dont nous avons vu le rôle dans le contrôle du cycle cellulaire. À l'inverse des précédents, ces gènes ne doivent pas être inactivés.

Risque lié à l'insertion d'ADN

Cet ADN est potentiellement oncogène (= cancérigène) parce qu'il peut contenir des séquences codant pour des protéines transformantes, mais aussi parce qu'il peut s'intégrer dans

l'ADN de nos propres cellules. L'intégration d'un ADN étranger est possible parce que la structure générale de la molécule d'ADN est universelle, ce qui fait que des fragments d'ADN de toute origine peuvent être assemblés. C'est d'ailleurs sur cette constatation que repose la technique de l’ADN recombinant (génie génétique).

Si une séquence d'ADN vient s'insérer à proximité ou à l'intérieur d'un gène, elle en dérègle le fonctionnement avec le risque d'« éteindre » un gène qui doit rester actif ou de « réveiller » un gène qui doit rester dormant. On comprend aisément ce qui se passera si l'insertion se fait à proximité ou dans les proto-oncogènes ou les anti-oncogènes.

La conséquence néfaste de ces insertions est connue depuis longtemps. Elle a été décrite en 1973[218], à propos de deux couples de vrais jumeaux, dans lesquels l'un des jumeaux était leucémique et pas l'autre. Il a été découvert des séquences d'ADN supplémentaires dans les globules blancs des leucémiques, qui n'ont pas été retrouvées chez leur jumeau respectif non atteint. De toute évidence, puisqu'il s'agissait de jumeaux issus d'un même œuf (monozygotes), ces séquences avaient été acquises après la fécondation, donc au cours de la vie des individus.

Un cas particulier concerne les rétrovirus. Lorsqu'ils infectent une cellule, leur patrimoine génétique, constitué d'ARN, est converti en ADN par la transcriptase inverse puis inséré dans l'ADN de la cellule. Or, cette intégration peut se faire en de multiples sites et, semble-t-il, pas au hasard : ils s'intégrent préférentiellement au niveau de certains proto-oncogènes dont ils peuvent activer le caractère tumorigène.

Or, des rétrovirus et des particules apparentées aux rétrovirus sont fréquemment rencontrés dans les cellules de lignée continue CHO (issues d'ovaire de hamster de Chine) utilisées pour fabriquer le vaccin GenHevac B®. On a de même décelé, dans des vaccins contre la rougeole, les oreillons et la fièvre jaune, une activité de transcriptase inverse indiquant une contamination probable par des rétrovirus provenant des cellules d'embryon de poulet (virus de la leucose aviaire par exemple[219]).

Le choix d'une dose limite de contamination

Lors de la réunion des experts de l'OMS en 1986 statuant sur les risques de l'utilisation des cultures cellulaires pour fabriquer des produits biologiques, il fut admis que la contamination ne devrait pas dépasser 100 picogrammes par dose. Dix ans plus tard, cette dose limite a été fixée à 10 nanogrammes[220], soit une augmentation d'un facteur 100.

C'est en apparence une quantité très faible, mais qui représente néanmoins la totalité de l'ADN de 1500 cellules humaines.

Les impuretés d'ADN présentes dans les vaccins sont rarement indiquées. Toutefois, une étude très complète relative aux vaccins contre l'hépatite B nous indique que les vaccins GenHevac B® Pasteur, Engerix B® et HBVax DNA®

contiennent respectivement jusqu'à 1,5 et 30 picogrammes

dADN[221], Une quantité aussi faible que 1 picogramme (pg),

c'est-à-dire un mïlliardième de milligramme (10-12g) est-elle pour autant sans danger ? Un calcul rapide va nous montrer qu'il n'en est rien.

La masse molaire moyenne d'une paire de nudéotides constitutifs de l'ADN (que l’on appelle communément une paire de bases puisque ce sont les seuls éléments variables), est d'environ 600 g soit 6 x 1014 pg. Cette masse correspond à un nombre de paires de bases égal au nombre d’Avogadro (6,023 x 1023). Un pg d'ADN correspond donc à un milliard de paires de bases (6,02323 : 6.1014 ≈ 109). Que dire de la dose admise comme limite de contamination : 10 nanogrammes soit 10 000 pg ! N'oublions pas que pour les vaccins préparés sur lignées cellulaires continues, cet ADN provient de cellules cancéreuses.

III. CONNAÎTRE LES RISQUES - RISQUES CONCERNANT TYPIQUEMENT LA SANTÉ

PUBLIQUE

 

Tous les risques que nous venons d'envisager s'appliquent aux individus ; ils ont, bien entendu, un impact sur la santé publique. Mais il en est d'autres qui concernent globalement la santé publique : le déplacement de l'âge des maladies infantiles et la modification de l'équilibre écologique des éléments pathogènes.

A. Déplacement de l'âge des maladies infan les

Depuis 2008, on assiste à une recrudescence importante de la rougeole, mais aussi de la coqueluche, dans plusieurs pays européens dont la France. Cette résurgence est une conséquence de l'extension de la vaccination. En effet, quand la couverture vaccinale n'était que de 50 % par exemple, les sujets vaccinés étant normalement protégés ne contractaient pas la rougeole, mais le virus sauvage continuait de circuler parmi les non-vaccinés. Certes, dans un premier temps, le nombre de cas de rougeole a diminué (c'est ce que les immunologistes appellent la lune de miel), mais les deux populations, vaccinée et non vaccinée, étant mélangées dans la vie de tous les jours, les vaccinés qui avaient échappé à la maladie se trouvaient en contact avec des porteurs du virus, ce qui constituait pour eux un rappel naturel dont ils n'avaient pas conscience. La couverture vaccinale s'étendant maintenant à près de 90 %, le virus sauvage circule beaucoup moins et les rappels naturels ne se font plus. Résultat : l'immunité vaccinale s'étant évanouie après quinze ou vingt ans, et en l'absence de rappels naturels, la rougeole se déclare maintenant chez les adultes et, parmi ces adultes, chez des femmes en âge de procréer qui ne transmettent plus de protection à leurs nourrissons, lesquels se trouvent exposés à la rougeole à l'âge de quelques mois.

Or, une étude britannique, rapportée dans le Quotidien du médecin[222], montre que la létalité (pourcentage de décès parmi