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CONTEXTE SCIENTIFIQUE ET ETAT DE L’ART

CHAPITRE 2 2 Processus et modèles existants

2.1 Revue bibliographique des processus de dissipation et de transfert des pesticides

Nous cherchons à identifier les processus susceptibles d’être dominants dans le devenir des pesticides dans la plupart des contextes. Notre ambition est en effet de modéliser l’évolution des concentrations en pesticides dans l’eau de ruissellement à l’échelle du bassin versant en intégrant un minimum de processus. C’est pour cela que nous brossons dans ce chapitre un tableau des principaux processus communément admis par la communauté scientifique sans entrer dans le détail des processus jugés mineurs, ou encore mal connus, ou associés à un contexte particulier. L’enjeu de ce paragraphe est de définir l’approche de modélisation adéquate pour notre contexte d’étude, détaillé dans le chapitre précédent, compte tenu de notre critère de simplicité

de la modélisation.

2.1.1 Le devenir des pesticides dans les sols : processus à l’échelle de la parcelle

Le sol est le compartiment central dans le transfert des pesticides. « Leur comportement (dans le sol) va conditionner la manifestation de leur caractère polluant » (Barriuso et al., 1996). L’ensemble des voies de transport des produits phytosanitaires (volatilisation, percolation, ruissellement, drainage) part ou transite par le sol (Voltz et Louchart, 2001). En considérant un volume de sol dans la zone non saturée, en surface, les intrants possibles sont : (i) les molécules appliquées lors du traitement ; (ii) les molécules véhiculées par le ruissellement et/ou érosion provenant de volumes de sol amont ; (iii) les molécules véhiculées par écoulement hypodermique provenant des volumes de sol amont ; (iv) les molécules véhiculées par dérive de pulvérisation lors du traitement de volumes de sol voisins (Grébil et al., 2001). On s’intéresse au devenir des pesticides dans ce volume de sol. L’interception des produits par les plantes concerne une faible partie des produits phytosanitaires et dépend du type d’application (foliaire ou au sol). Le lavage foliaire dépend du volume de pluie (Carluer, 1998).

La disparition de la substance mère dans ce volume de sol est nommée

dissipation. Elle fait référence à deux mécanismes : la dégradation de la substance mère en métabolites au sein du volume de sol (Grébil et al., 2001), et la dispersion, qui est le transfert de la substance mère vers d’autres compartiments de l’environnement (eau, air, couches profondes, nappe). Voltz et Louchart (2001) introduisent un troisième mécanisme de rétention, pour la dissipation vue à court terme. A court terme en effet la rétention peut-être vue comme une perte de matière au sein du volume de sol. A long

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terme, la rétention étant réversible, elle ne peut plus être comptée comme un mécanisme de dissipation. Puisque dans notre contexte d’étude nous raisonnons à l’échelle de temps courte de l’événement pluvieux, la rétention est donc vue comme une perte de matière au sein du volume de sol entre deux événements pluvieux. La rétention ne joue donc qu’au niveau de la définition des états initiaux et non parmi les processus en jeu à l’échelle de l’événement pluvieux.

La dégradation et le transfert interagissent au sens où la disponibilité au transfert d’une molécule est fonction du stock de molécule dans le sol, lui-même fonction de l’intensité des processus de dégradation (et de rétention à court terme), et de transfert. Ces intensités sont reliées à des paramètres mesurables sur le terrain que sont : (i) les propriétés physico-chimiques des sols, (ii) les propriétés physico-chimiques des molécules, (iii) l’humidité, (iv) la température dans le sol. (Barrusio et al., 1996).

Nous présentons dans un premier temps les processus de dégradation et de rétention à court terme.

2.1.1.1 Dégradation

Il existe plusieurs processus de dégradation : (i) abiotique (photolyse, hydrolyse, oxydo-réduction, (ii) biologique (métabolisme des plantes et des micro-organismes) (Barrusion et al., 1996, Carluer, 1998).

La dégradation biologique fait intervenir des enzymes issues de micro- organismes tels des bactéries et des champignons. La dégradation d’une molécule demande l’intervention d’une succession de souches de micro-organismes, chacun étant un maillon de la chaîne de dégradation. Cette dégradation est lente et nécessite une source de carbone (énergie) fournie par la matière organique : c’est le cométabolisme. Certains micro-organismes sont en revanche capables d’utiliser le pesticide comme source d’énergie et de carbone : la dégradation est alors rapide et complète (Grébil et al., 2001). La dégradation par voie biologique est généralement majoritaire dans les sols (Barrusio et al., 1996, Louchart et al., 2004), au niveau de la zone racinaire (Carluer, 1998). La biodégradation est reliée à l’humidité et à la température du sol (Barrusio et al., 1996). Louchart et al. (2000 et 2004) identifient l’humidité du sol comme un facteur prépondérant dans la dynamique de dégradation dans la zone non saturée du sol (dégradation par voie biologique) mais la prépondérance des conditions climatiques face aux propriétés physico-chimiques des molécules concerne surtout le contexte méditerranéen.

La dégradation abiotique (photolyse, hydrolyse, oxydoréduction, etc.) peut intervenir au niveau de la solution du sol (hydrolyse acide ou basique) mais la plupart des processus sont catalysés au niveau des grains du sol (argiles, matière organique) (Grébil et al., 2001). Cette dégradation mène à des métabolites souvent plus stables que la molécule mère et qui peuvent être aussi toxiques.

La persistance d’un polluant est habituellement paramétrée par sa durée de demi vie DT50 (quelques jours à quelques mois pour les pesticides) et sa dynamique est généralement ajustée à une cinétique d’ordre 1. Ce paramètre est fortement influencé par l’humidité et la température du sol (Barrusio et al., 1996). Mais la signification de ce paramètre DT50 reste floue. Pour Carluer (1998), il englobe la volatilisation (transfert), le prélèvement par les plantes (rétention) et la photolyse (dégradation).

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2.1.1.2 Rétention

La rétention est un processus réversible ou non (formation de résidus non extractibles) qui fait intervenir : (i) l’adsorption par les végétaux, (ii) la précipitation/solubilisation, (iii) l’adsorption/désorption qui semble être admise comme la voie prépondérante de rétention, et (iv) Barrusio et al. (1996) ajoutent la rétention par réaction de coordination. La rétention (au sens adsorption/désorption surtout) et la dégradation interagissent (Carluer, 1998) : les processus de dégradation changent s’il y a adsorption. En effet, une molécule dissoute est plutôt dégradée par voie biologique alors que la dégradation abiotique est catalysée au niveau des grains du sol. La rétention a en fait deux effets antagonistes sur la pollution. Ce qui n’est pas retenu est disponible pour la transformation et le transport (Barrusio et al., 1996). Donc la rétention diminue les risques de dispersion des polluants et limite ainsi la pollution des autres compartiments de l’environnement. Mais elle diminue aussi l’extractabilité des produits (Barrusio et al., 1996), ce qui favorise la pollution en relargant à long terme des molécules qui n’auront pas pu être dégradées pendant leur phase de rétention. Ainsi, plusieurs observations, sur colonnes de sol et in situ, font état de remobilisation de pesticides plusieurs années après traitement (Novak et al., 1998).

La rétention s’organise en trois temps avec adsorption rapide de quelques heures suivie d’une phase d’adsorption lente d’environ deux semaines (diffusion du polluant dans la microporosité), et une diminution de la désorbabilité du produit avec le temps (interactions plus fortes, résidus liés) (Barrusio et al., 1996). La notion de « résidus liés » a été définie en 1975 par l’U.S. Environmental Protection Agency (Grébil et al., 2001) : « résidus de pesticides non extractibles par les solvants organiques, non identifiables chimiquement et qui restent dans le sol, après extraction exhaustive, au sein des fractions (acides fulviques, acides humiques et humine) » (voir Schiavon et al., 1995 pour plus de détails sur les résidus liés).

L’adsorption – désorption est donc le phénomène principal dans la rétention

à court terme, traités comme des processus linéaires et réversibles dans la plupart des modèles de transfert de polluants. L’adsorption joue un rôle majeur dans la disponibilité des solutés à l’échelle d’un événement, tandis qu’à l’échelle de la saison

c’est la dégradation qui domine. A l’échelle de temps courte de l’événement pluvieux les processus de désorption à cinétique rapide semblent suffisants pour décrire les processus de mobilisation au champ. L’approche avec équilibre local et les modèles de sorption idéaux (isothermes linéaires et réversibles) peuvent être considérés comme suffisant (Zhang et al., 1997) pour la modélisation des processus de désorption à cinétique rapide.

La rétention est paramétrée par le Kd, coefficient de partage liquide-solide (ou Koc, coefficient de partage normalisé en fonction de la teneur en carbone organique des sols) des molécules en considérant classiquement une dynamique linéaire réversible. Mais la littérature propose une grande diversité de valeurs de Koc pour une même molécule, en fonction de la méthode de mesure utilisée, et son utilisation, en modélisation notamment, est donc délicate. A ce sujet, Wauchope et al. (2002) proposent une critique des mesures et méthodes d’estimation de ce paramètre, de leurs limites et de leurs représentativités et proposent des règles d’utilisation de ces valeurs pour décrire le comportement de la molécule dans un modèle. De plus, Louchart et al. (2000 et 2004) avancent que considérer une valeur constante du Kd et une dynamique linéaire réversible mènent à surestimer la rétention. Ils proposent d’utiliser une valeur de Kd fonction du temps (Kd=f(t)) avec f une relation empirique calée à partir des mesures de terrain. La teneur en matière organique solide du sol est un paramètre important dans la rétention des molécules non ionisées (Johnson et Sims, 1993).

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La dégradation dans un volume de sol, en surface, ainsi que la rétention, vu comme une perte de matière au sein du volume de sol à court terme, déterminent le stock de molécules de pesticides susceptible d’être transféré vers les autres compartiments de l’environnement.

Ces deux processus définissent donc l’état initial du stock de pesticides, au début d’un événement pluvieux. L’adsorption joue un rôle majeur dans la disponibilité des molécules à l’échelle d’un événement, tandis qu’à l’échelle de la saison c’est la dégradation qui domine.

Au début d’un événement pluvieux, la disponibilité au transfert d’une molécule vers les différents compartiments de l’environnement (dissipation) est fonction du stock de molécules dans le sol, déterminé entre deux événements pluvieux par les processus de dégradation (et de rétention à court terme) présentés. La dissipation d’une molécule au cours d’un événement pluvieux peut concerner trois compartiments via trois vecteurs : les eaux superficielles par le vecteur eau et par l’érosion, les eaux souterraines par le vecteur eau et l’atmosphère par le vecteur air.

2.1.1.3 Transfert par le vecteur eau

La dispersion est le transport des molécules mères vers d’autres compartiments que le sol : air, eau souterraine, eau superficielle. Une molécule se répartit dans le sol entre les trois phases solide, liquide et gazeuse en fonction de coefficients de distribution qui déterminent la nature des phénomènes de transport et des voies de transfert.

L’eau est le principal vecteur du transport de pesticides (Grébil et al., 2001, Carluer, 1998) et revêt différentes formes : ruissellement, lixiviation, lessivage, evapotranspiration des végétaux (Barrusio et al., 1996).

Le transport par l’eau des substances peut se faire soit sous forme dissoute, soit sous forme adsorbée à des MES, les proportions relatives de transport sous forme dissoute et sous forme adsorbée dépendant de deux facteurs : (i) le Kd, coefficient de partage sol/eau de la molécule, (ii) la charge en matières en suspension (MES) de l’eau d’écoulement (Voltz et Louchart, 2001). Ainsi, même pour des Kd élevés, si la teneur en MES de l’eau d’écoulement est réduite (écoulements de subsurface par exemple) le transport s’effectue essentiellement sous forme dissoute (Leonard, 1990).

Ruissellement de surface

Le ruissellement de surface entraîne les pesticides en solution. L’entraînement de molécules associées à la phase solide par transport particulaire ou érosion est développé plus loin. Le ruissellement prend naissance dans la couche fine supérieure du sol, que nous appelons couche d’interaction. L’épaisseur de la couche d’interaction sol/ruissellement est estimée par Leonard (1990) à 1 cm (le premier cm) et c’est l’option retenue dans la plupart des modèles. Le ruissellement de surface peut se faire par

saturation (la nappe affleure), mais dans notre contexte d’étude c’est essentiellement un ruissellement Hortonien, ou ruissellement par dépassement de la capacité d’infiltration, qui détermine la partition entre le ruissellement de surface et l’infiltration.

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D’après Lecomte (1999), on peut relier la capacité d’infiltration à deux facteurs mesurables : l’état de surface du sol (développement d’une croûte de battance, lié au précédent hydrique) qui influence l’épaisseur de la couche d’interaction, et le microrelief (la capacité d’infiltration varie entre creux et bosses). D’après Domange (2005), l’intensité de la pluie pourrait également jouer sur cette capacité d’infiltration.

La capacité d’infiltration est donc très variable dans le temps et dans l’espace. La dégradation de l’état structural du sol est responsable d’une diminution de la capacité d’infiltration (Lecomte, 1999).

L’état de surface d’une parcelle se dégrade dans le temps notamment sous l’effet de la pluie et peut aboutir à la formation d’une croûte de battance. La teneur initiale en eau du sol a un effet complexe sur la formation de croûte et on trouve deux exemples contradictoires dans la littérature : (i) une forte teneur en eau initiale réduit la formation de croûte, le ruissellement en nappe et l’érosion (Le Bisonnais et Singer, 1993), (ii) elle rend le démarrage du ruissellement précoce. En fait l’effet de la teneur en eau initiale du sol dépend des propriétés du sol. Les conséquences du travail du sol sont différentes sur l’état de surface du sol pour les parcelles de vigne par rapport aux parcelles de grande culture. L’absence de travail du sol sur une parcelle de vigne favorise le tassement du sol de part le grand nombre de passages d’engins viticoles sur l’année et favorise le ruissellement (Thiollet-Scholtus, 2004). Un travail du sol en profondeur de la parcelle viticole permet donc d’augmenter la capacité d’infiltration (Louchard et al., 2001) tandis qu’en grandes cultures, c’est la réduction du travail du sol qui favorise son augmentation (Barriuso et al., 1991).

Les processus de mobilisation des molécules par ruissellement sont : (i) l’entraînement par les particules (MES) (Schiavon et al., 1995, Grébil et al., 2001, Léonard 1990), (ii) la désorption et la diffusion depuis les pores, (iii) la dissolution

(Léonard, 1990, Ahuja 1986).

Les facteurs influençant la mobilisation sont : les propriétés physico-chimiques du produit (Kd, Koc, DT50), l’état hydrique du sol, les propriétés physiques du sol, le couvert végétal, la pluviométrie et la pente (Grébil et al., 2001). Mais il est difficile d’évaluer l’importance respective de ces différents facteurs (Lecomte, 1999). D’après Schiavon et al. (1995) et Lecomte (1999), les propriétés physico-chimiques du produit ne suffisent pas à rendre compte de la mobilité des produits phytosanitaires en conditions naturelles. Le processus de dissolution a été très peu étudié jusqu’à présent mais il ne semble pas être un processus majeur (Domange, 2005) et nous le négligeons donc. Il apparaît alors peu pertinent de vouloir estimer un taux de départ de pesticides depuis un volume de sol vers une lame d’eau ruisselante via la solubilité de la molécule dans l’eau.

Lixiviation et lessivage (percolation)

La lixiviation et le lessivage correspondent au transport hydrodynamique dans la zone non saturée du sol vers la nappe. Les substances sont entraînées dans le sol par

infiltration des eaux de pluie, en solution pour la lixiviation et associées à la phase solide pour le lessivage. Ces transferts sont dus à des phénomènes élémentaires de transport : diffusion, convection et dispersion. Ils sont classiquement modélisés par l’équation de Richards qui s’applique au domaine de l’écoulement en milieux non saturés homogènes. Mais le milieu réel n’est pas homogène et les espaces interagrégats (macropores) sont le lieu d’un écoulement préférentiel. Ces chemins préférentiels induisent un transport rapide du soluté, qui ne subit alors quasiment aucun processus de diffusion, dégradation ou adsorption, situation critique en ce qui concerne la pollution

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de la nappe puisque l’adsorption et la dégradation sont réduites dans les couches profondes du sol (Grébil et al., 2001).

Le transport hydrodynamique dans la zone non saturée du sol est régit par la pluviométrie et les caractéristiques structurales du sol. Notons que les caractéristiques structurales du sol varient dans le temps et tendent à une porosité de plus en plus fine, et donc à un flux d’écoulement préférentiel de plus en plus faible, c’est-à-dire des quantités de résidus exportés de plus en plus faible (Grébil et al., 2001), depuis l’application jusqu’au prochain travail du sol. La durée de demi vie (DT50) et le coefficient d’adsorption des polluants (Koc) sont utilisés pour définir le caractère polluant potentiel d’une molécule. Mais la durée de demi vie DT50 est difficile à interpréter et sa valeur est très variable dans la littérature car elle intègre divers processus comme la volatilisation, la photolyse, et le prélèvement par les plantes (Carluer, 1998).

Comme nous étudions le transfert vers les eaux de surface par ruissellement,

nous ne considérons pas les processus associés à la lixiviation et le lessivage dans la suite de l’étude. Il ne faut cependant pas perdre de vue qu’une partie de l’eau et des molécules qu’elle entraîne, infiltrée au niveau d’une parcelle et stoppée dans sa migration vers la nappe par une barrière (couche d’argile, semelle de labour), peut revenir à la surface et contribuer ainsi au ruissellement de surface en aval du point d’infiltration : c’est l’exfiltration d’un ruissellement hypodermique.

2.1.1.4 Transfert par transport particulaire (érosion)

Le transfert particulaire est le corollaire du transfert par l’eau et correspond au détachement de particules de sol par les gouttes de pluie (splash) et/ou les forces de cisaillement du ruissellement, et à leur mise en suspension, saltation, charriage. Lorsque la compétence du ruissellement n’est plus suffisante pour maintenir les particules en mouvement, elles sédimentent (Lecomte, 1999). Il existe deux formes d’érosion : l’érosion diffuse (en nappe), peu visible et difficile à mesurer, mais responsable du déplacement de volumes importants de terre, et l’érosion linéaire ou érosion de versant, intervenant lors d’épisodes de fortes intensité (des rigoles parallèles se creusent sur les fortes pentes, suivant les motifs agraires) (Lecomte, 1999). L’érosion diffuse fait appel à l’énergie de la pluie (carré de l’intensité de la pluie), tandis que l’érosion linéaire fait appel à l’énergie des flux concentrés (Cerdan, 2001). Différentes formes d’érosion linéaire existent et les formes les plus prévisibles sont celles liées à la topographie, les autres étant très variables dans le temps à l’échelle de la saison culturale (Cerdan, 2001). Les formes concentrées de l’érosion ont été les plus étudiées, cependant l’érosion en nappe peut-être plus problématique du point de vue de la qualité de l’eau (Le Bissonais et al., 1998). Les facteurs de l’érosion sont : la texture du sol (les sols limoneux sont sensibles à la battance), l’intensité de la pluie, l’état de surface du sol, l’humidité du sol, la pente et le couvert végétal. L’état de surface est l’un des facteurs les plus importants pour l’estimation du risque d’érosion (Le Bissonais et al., 1998).

2.1.1.5 Transfert par le vecteur air (volatilisation)

La volatilisation correspond à la diffusion des molécules phytosanitaires vers l’atmosphère. La volatilisation peut-être une voie importante de dispersion pour certaines molécules mais sa modélisation reste complexe (Grébil et al., 2001). On peut consulter à ce sujet Jauny (2000) et Cooper (1990). Cette voie de dispersion a longtemps été négligée mais depuis quelques années les recherches sur ce thème ont repris, suite à la confirmation de la contamination des eaux de pluie par certaines molécules actives (Grébil et al., 2001, Bidleman,1999).

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Il existe trois processus de contamination de l’air : (i) la dérive lors du traitement (spray-drift), (ii) l’érosion éolienne des sols traités, et (iii) le transfert gazeux et l’entraînement à la vapeur d’eau (Briand et al., 2001). Les facteurs de transfert par volatilisation sont : (i) les propriétés des composés (pression de vapeur, constante de Henry), (ii) les propriétés du sol, (iii) le couvert végétal, (iv) les pratiques agricoles (travail du sol, doses appliquées,...), et (v) les conditions climatiques lors de l’application (température, humidité) (Briand et al., 2001).

A l’échelle de la parcelle et de l’événement pluvieux, la dynamique de l’eau est dominée par l’infiltration et le ruissellement (propriétés du sol) (Zehe et al., 2001) et les processus d’évapotranspiration sont négligeables pour cette courte durée (Chahinian, 2004). La volatilisation est donc généralement négligée pendant un événement pluvieux, d’autant plus s’il est court (quelques minutes à quelques heures à Rouffach). Nous l’associons donc a posteriori aux processus de dégradation et de rétention entre les événements pluvieux pour la définition du stock de pesticides.

Concernant le transfert des pesticides via le ruissellement de surface, les processus dominants dans la mobilisation des pesticides à la parcelle sont encore mal connus. Cependant, on peut avancer que les propriétés physico-chimiques du produit ne suffisent pas à rendre compte de la mobilité des produits phytosanitaires en conditions naturelles et que la dissolution est un processus négligeable de mobilisation des molécules.

Comme nous étudions le transfert vers les eaux de surface par ruissellement, nous ne considérons pas les processus associés à la lixiviation et le lessivage dans la suite de l’étude. La présence de barrières à l’écoulement vers la nappe (couche d’argile, semelle de labour) peut cependant créer un ruissellement hypodermique (sous la surface du sol) qui peut contribuer au ruissellement de surface en aval du point d’infiltration à la faveur d’une