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Retour sur les méthodes de biologie moléculaire

Chapitre 5 – Discussion générale

5.2. Retour sur les méthodes de biologie moléculaire

Le but de cette maîtrise étant de comprendre la diversité existant parmi des souches de G. candidum en plus de comprendre leurs comportements variables, il était essentiel d’étudier ce qui définissait en soi chacune des souches, c’est-à-dire leur génome. Ainsi, le séquençage et l’assemblage des génomes partiels, leur comparaison deux à deux et la prédiction ab initio de leurs gènes a permis d’en apprendre davantage sur leur regroupement.

La comparaison deux à deux du contenu génétique des génomes partiels des 11 souches de Geotrichum/Galactomyces spp. a permis de clairement distinguer les 4 espèces préalablement identifiées par caractérisation phénotypique, soit G. candidum, G. geotrichum, G. reessii et G. citri- aurantii. Par ailleurs, le regroupement des souches laitières, c’est-à-dire celles d’espèces G. bryndzae et G. candidum, a mis en lumière la proximité de ces deux espèces. En effet, les faibles pourcentages de similarité entre les souches utilisées comme groupe externe (G. geotrichum, G. reessii et G. citri- aurantii) et les souches d’espèce G. candidum ont clairement démontré qu’il s’agissait d’espèces différentes. Or, les hauts pourcentages de similarité observés entre les souches de G. candidum et la souche de G. bryndzae n’ont pas permis de mener à ces mêmes conclusions. Certains travaux abondent dans le même sens, confirmant ainsi l’hypothèse préalablement émise selon laquelle la

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souche d’espèce G. bryndzae serait potentiellement d’espèce G. candidum. En effet, les travaux de Jacques et al. (117) ont démontré par classification phylogénétique que cette même souche de G. bryndzae (CBS 11176) était relativement rapprochée de l’espèce G. candidum. Les travaux de Groenewald et al. (115) ont pour leur part mis en évidence qu’il y avait moins de 1 % de substitution nucléotidique entre la souche G. bryndzae (CBS 11176) et l’espèce Galactomyces candidus, la forme téléomorphe de G. candidum.

Parmi le regroupement des souches d’origine laitière, une certaine diversité a tout de même été observée au sein de l’espèce G. candidum. En effet, la comparaison deux à deux des génomes partiels a mené à l’identification de trois groupes distincts selon leur degré de similarité au niveau des k-mers partagés (GeoA, GeoB, GeoC). Ce phénomène de regroupement a également été identifié dans le cadre d’analyses MLST réalisées avec les mêmes souches (19), ainsi qu’avec d’autres souches de G. candidum d’origine environnementale ou laitière (23, 117). Or, dans le cas présent, la diversité génétique entre les souches de G. bryndzae et G. candidum n’est pas simplement due à certains gènes (ex : gènes domestiques ou ADNr), mais celle-ci a plutôt été évaluée et exprimée à partir d’une plus grande quantité d’information génétique, soit les génomes partiels des souches. Cela indique ainsi qu’il y a un réel potentiel à exploiter cette diversité génétique, cette dernière pouvant possiblement s’exprimer dans différentes voies métaboliques d’intérêt, notamment celles ayant un impact sur l’affinage des fromages, comme la protéolyse, la lipolyse et la glycolyse.

L’annotation structurale et l’annotation fonctionnelle des gènes à partir des génomes des souches de G. bryndzae et G. candidum a été effectuée dans le but d’identifier des gènes clés qui permettraient de les différencier entre elles, et par le fait même, d’associer ces gènes avec des caractéristiques phénotypiques uniques à chaque souche. Puisque les analyses ont été effectuées sur les génomes partiels des souches, il est évident que pour chacune d’entre elles, une partie des gènes est restée non- identifiée. Par ailleurs, les analyses comparatives et fonctionnelles des génomes de Fungi étant encore à leurs débuts (164), nombreuses sont les difficultés associées au traitement de ces données, notamment en raison de la forte présence d’introns et du phénomène d’épissage chez les cellules eucaryotes (165). Ainsi, l’identification incomplète des gènes des souches de G. bryndzae et G. candidum n’a pas permis de déterminer de manière précise des gènes clés impliqués dans des voies métaboliques d’intérêt qui permettrait de distinguer les souches les unes des autres. De fait, les caractéristiques phénotypiques particulières de chacune des souches n’ont pu être validées par la présence ou l’absence de gènes uniques avec des fonctions précises, bien que certains gènes uniques aient effectivement été identifiés pour chacune des souches. Pour confirmer une telle observation, une vérification par amplification PCR chez les souches en question devra être effectuée (108, 166)

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avant d’établir toute conclusion sur la présence ou l’absence absolue d’un gène chez l’une des souches de G. candidum. Il est évident qu’une prédiction de gènes sur des génomes complets aurait permis d’obtenir davantage d’informations précises sur l’activité des souches. Dans l’optique d’avoir une meilleure représentation des génomes, un séquençage complémentaire de ceux-ci à l’aide d’une technologie différente, par exemple celle de PacBio (159, 167), devrait être effectué. De plus, la réalisation d’une amplification PCR des régions manquantes, c’est-à-dire les séquences génomiques joignant les contigs assemblés (168-171), permettrait de compléter l’assemblage des génomes avec les séquences qui n’auraient pas été séquencées par l’une ou l’autre des technologies (Illumina ou PacBio).

Dans un autre ordre d’idées, il aurait été intéressant de s’attarder davantage aux gènes partagés par toutes les souches de G. bryndzae et G. candidum à l’étude, notamment ceux impliqués dans le métabolisme des acides aminés, des glucides ou des lipides. Même s’ils sont partagés par toutes les souches (similarité à 95 % ou plus), il est possible qu’un certain niveau de polymorphisme existe entre les souches pour des gènes de même fonction, comme cela a déjà été observé pour l’espèce G. candidum en rapport à son ADN ribosomal (113). De la sorte, les regroupements de souches observés en comparant les génomes deux à deux (GeoA, GeoB, GeoC) pourraient possiblement être mis en relation avec le niveau de polymorphisme de gènes d’intérêt en fabrication fromagère, apportant ainsi de nouvelles connaissances pour perfectionner le choix des souches dans le développement de ferments d’affinage.

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