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Les représentations de la poésie et les habitudes culturelles des étudiants

III. A NALYSE ET PERSPECTIVES DE RECHERCHE

3. Analyse de l'atelier poésie

3.1 Analyse des questionnaires

3.1.1 Les représentations de la poésie et les habitudes culturelles des étudiants

La carte heuristique que nous présentons en annexe 560 donne plusieurs informations sur les

représentations des étudiants à propos de la poésie : ces représentations sont majoritairement positives (en vert sur la carte), souvent très détaillées, et l'aspect négatif (signalé en rouge) le plus évoqué est l'idée de complexité de la poésie. En effet, selon les enquêtés, ce genre demande de décrypter un sens mystérieux, souvent soumis par ailleurs à des interprétations divergentes : « tout

le monde l'interprète différemment, ce qui pour certains, est la vertue de la poésie, quant à moi, ça me dérange un peu. » Dans le même ordre d'idée, d'autres étudiants évoquent un genre élitiste, qui

exige un niveau intellectuel élevé, ou bien encore une « distance » liée au fait qu'ils n'ont pas beaucoup de contacts avec la poésie61. Nous pensons que ce type de représentations (complexité,

élitisme) s'approche du stéréotype : les deux séances de l'atelier sauront-elles confronter les étudiants à une autre image de la poésie ? Il faudra également s'appuyer sur les habitudes culturelles des étudiants concernant ce genre littéraire pour répondre à cette question. Dans les questionnaires, 59 Cf annexe 3.

60 Nous avons préféré présenter les résultats à travers une mindmap (ou carte heuristique) puisque les réponses à cette question étaient très détaillées et très diverses, et puisque, enfin, les étudiants ont été nombreux à répondre aux questionnaires : ce support rend la lecture des résultats plus aisée et plus claire. Par ailleurs, la mindmap permet de signaler les aspects négatifs ou positifs rencontrés dans les réponses des enquêtés, ce que permet moins facilement un diagramme.

les enquêtés évoquent également à plusieurs reprises une « forme d'art », de manière neutre, sans que transparaisse de jugement. Les représentations positives de la poésie sont liées aux potentialités du genre poétique pour exprimer des opinions ou des sentiments ou encore pour représenter le monde (un des enquêtés parle d'ailleurs de « poésie de la vie ») : « c'est une forme trop personnel

de communication qui permettre le lecteur connaître le cœur du auteur », « la poésie est un miroir où nous pouvons voir notre intimité », « pour moi la poésie est l'expression de la vie, des sentiments. C'est une façon de montrer et de décrire sans images la réalité ». L'ouverture d'esprit et

la nouveauté dans la démarche de compréhension du monde sont également évoquées par les étudiants, ainsi que la création à partir des mots : « après un cours de poésie en Cégep62, j'apprécie

beaucoup mieux l'art qu'on peut trouver dans les poèmes et comment il faut tellement bien maîtriser la langue pour créer des poèmes intéressants qui jouent avec la subtilité et l’ambiguïté des mots ».

Peu d'étudiants parlent des formes traditionnelles de la poésie, un seul évoque les métaphores, un autre explique que la forme poétique ne convient pas en prose. La poésie en prose n'a pas pu être abordée lors de l'atelier.

Une des représentations qui nous intéresse particulièrement dans le cadre des théories sur le rapport à la lecture et à l'écriture est l'image liée aux pratiques scolaires des apprenants. En effet, l'institution scolaire joue un rôle très important dans les relations et les représentations du sujet par rapport à l'écrit : elle constitue un des médiateurs (avec la famille) des attitudes envers les textes. Il convient donc de prendre en compte le rôle de l'école dans la construction de ce rapport (Guernier & Barré-De Miniac, 2015 : 7). A la lecture des enquêtes, nous remarquons donc que, parfois, les représentations de la poésie sont conditionnées par les activités réalisées à l'école par les étudiants, ces représentations peuvent être négatives : « avant de cette exercice je n'avais pas aimer. Le

dernier fois que j'avais fait le poésie c'était à l'école alors c'était bien de le revisté et d'avoir eu l'opportunité d'apprendre des nouveaux chose », mais positives également, avec un changement de

point de vue grâce aux pratiques scolaires (cf propos sur le Cégep ci-dessus). L'école joue donc un rôle essentiel dans la construction des représentations des apprenants, nous faisons ici l'hypothèse qu'elle joue également un rôle dans leur déconstruction/reconstruction. L'atelier poésie prend alors tout son sens, et c'est dans le dialogue entre représentations des étudiants et évaluation de l'atelier que nous pourrons envisager ses apports ainsi que ses limites.

Les habitudes culturelles des étudiants à propos de la poésie sont variées, ainsi, 60 % des enquêtés indiquent qu'ils n'ont pas l'habitude de lire de la poésie, alors que 40 % décrivent des habitudes de lecture liées aux études ou à un cadre privé. Les types de poèmes qu'ils évoquent alors

sont très nombreux : « j'aime les imagistes et les poèmes free verse contemporains, surtout

canadien et américain, mais j'adore aussi les poésie romantiques (Baudelaire surtout!) », « j'aime la poésie plus classique, mais aussi les thèmes de liberté, égalité », « les poésies d'amour », « la poésie qui est un peu mélancolique, tristesse. La poésie où l'écrivain décrit le monde et les problèmes de ce monde », « poésie des amis qui écrivent, poésies courtes et plutôt nostalgiques, abstraites/absurdes ». Peu d'enquêtés mentionnent d'auteurs, seules Akiko Yosano, Maya Angelou

et Ellen Hopkins sont évoquées, avec Baudelaire. Les étudiants qui lisent de la poésie ont donc des pratiques très diverses et qui ne se recoupent pas. En ce qui concerne les habitudes d'écriture, les réponses sont plutôt affirmatives : 65 % des étudiants disent avoir déjà écrit de la poésie avant l'atelier, trois étudiants évoquent des pratiques scolaires. Il aurait été intéressant de connaître le cadre plus spécifique de l'écriture de poésie afin de saisir de manière approfondie les habitudes culturelles des étudiants. De manière générale, nous pouvons conclure que les étudiants ont en général déjà eu un contact avec la poésie (nous pouvons alors faire l'hypothèse que ces pratiques sont sans doute liées aux milieux cultivés auxquels appartiennent probablement les étudiants) que ce soit dans l'acte de lire ou d'écrire : ils n'aborderont donc pas l'atelier sans un contexte social, scolaire, personnel autour de la poésie63. Nous pouvons aussi constater que ces contacts n'ont pas

empêché l'apparition de stéréotypes, voire les ont peut-être renforcés : quel dispositif mettre alors en place pour tenter de renouveler l'approche de ce genre à l'école et de développer un regard réflexif sur ses propres représentations ?