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4. L'interculturel : un des objectifs phare du Conseil de l'Europe

4.1 Les prérogatives du Conseil de l'Europe

Le Conseil de l'Europe a intégré depuis une dizaine d'années la notion d'interculturalité dans le CECRL : apprendre une langue, c'est également s'ouvrir sur la culture véhiculée par cette langue. Dans une Europe plurilingue et pluriculturelle, le Conseil de l'Europe associe l'interculturel au plurilinguisme : cette politique pose comme principe le bi-plurilinguisme et l'interculturel, et introduit la « compétence plurilingue et pluriculturelle » (Coste, Moore, Zarate, 2009), refusant la domination d'une langue/culture hégémonique. En 2001, les contours de cette politique sont rappelés dans le CECRL, la compétence plurilingue et pluriculturelle est définie comme : « […] une compétence à communiquer langagièrement et à interagir culturellement d'un acteur social qui possède, à des degrés divers, la maîtrise de plusieurs langues et l'expérience de plusieurs cultures » (CECRL, 2001 : 129) , encore plus récemment, le Portfolio européen des langues14(2011) consiste à promouvoir les expériences langagières et interculturelles de l'apprenant, acquises dans le cadre de l'institution scolaire ou non. Nous reviendrons sur cette démarche à travers la notion de biographie langagière, proposée par Diana-Lee Simon. Par ailleurs, l'éducation à l'interculturel intervient

également dans une campagne plus vaste de promotion des langues et de la citoyenneté européenne contre le racisme, la xénophobie, l'antisémitisme et l'intolérance (Byram & Zarate, 1996 : 5). Ainsi, le Conseil de l'Europe a édité dans cet objectif une brochure intitulée Les jeunes confrontés à la

différence avec de nombreuses propositions d'activités ciblant l'échange interculturel (Byram &

Zarate, 1996) dont nous reparlerons.

Le CECRL définit ainsi la compétence interculturelle: « […] dans une approche interculturelle, un objectif essentiel de l'enseignement des langues est de favoriser le développement harmonieux de la personnalité de l’apprenant et de son identité en réponse à l’expérience enrichissante de l’altérité en matière de langue et de culture » (CECRL, 2001 : 9). Le CECRL parle également de « prise de conscience interculturelle », définie comme une relation réciproque de connaissance et de compréhension des relations entre « le monde d'où l'on vient » et « le monde de la communauté-cible » (CECRL, 2001 : 83). On voit ici apparaître le processus de l'intégration dont parlait Carmel Camilleri : un mouvement entre la reconnaissance de sa culture propre et l'ouverture aux autres cultures. Cette prise de conscience s'accompagne d'une construction d'aptitudes, savoir-faire et capacités divers qui sont décrits dans la suite du texte :

« Les aptitudes et les savoir-faire interculturels comprennent :

- la capacité d'établir une relation entre la culture d'origine et la culture étrangère ; - la sensibilisation à la notion de culture et la capacité de reconnaître et d'utiliser des stratégies variées pour établir le contact avec des gens d'une autre culture ;

- la capacité à jouer le rôle d'intermédiaire culturel entre sa propre culture et la culture étrangère pour gérer efficacement des situations de malentendus et de conflits culturels ; - la capacité à aller au-delà des relations superficielles stéréotypées. » (Conseil de l'Europe, 2001: 84)

Dans le Guide pour l'élaboration des politiques linguistiques éducatives en Europe, les auteurs approfondissent cette question et définissent ainsi la compétence interculturelle15 :

« Ensemble de savoirs, savoir-faire et savoir-être et d'attitudes permettant à des degrés divers, de reconnaître, de comprendre, d'interpréter ou d'accepter d'autres modes de vie 15 Cette compétence ne peut être séparée de la compétence plurilingue définie comme : « la capacité d'acquérir

successivement et d'utiliser diverses compétences en plusieurs langues, à des degrés de maîtrise divers et pour des fonctions différentes. » (Beacco & Byram, 2007 : 126).

et de pensée que ceux de sa culture d'origine. Elle est le fondement d'une compréhension entre les humains qui ne se réduit pas au langage. » (Beacco & Byram, 2007 : 125)

Les auteurs de Développer et évaluer la compétence en communication interculturelle définissent cette compétence de manière générale, en s'appuyant sur de nombreuses théories de chercheurs : il s'agit de la « […] capacité à communiquer efficacement dans des situations interculturelles et à établir des relations appropriées dans des contextes culturels divers. » (Lazar et al.., 2007 : 10).

Cette définition se place donc plutôt dans le cadre de compétences de communication. Compte tenu de la pluralité des objectifs ciblés, nous parlerons pour la suite de ce travail de compétences interculturelles au pluriel. Une interrogation est alors soulevée : comment évaluer des compétences si diverses, et qui, de plus, sont, pour certaines, de l'ordre de l'attitude et des savoir-être ? Dans le cadre d'un module intitulé « Mobilité et communication interculturelle » qui cherchait une reconnaissance des compétences culturelles des étudiants par l'octroi de crédits ECTS, Mathilde Anquetil (2006) propose un référentiel pour la reconnaissance des compétences interculturelles qu'elle regroupe en trois catégories :

- les savoirs, l'objectif étant « […] d'acquérir un système de références culturelles de base, permettant l'interprétation des faits culturels et de la communication interculturelle, sur une base consciente et objectivée »,

- les savoir-faire, qui comprennent trois opérations majeures : l'interprétation, l'interaction et la médiation,

- les compétences méthodologiques pour la démarche interculturelle, qui comprennent une méthodologie d'apprentissage (auto-analyse, expérimentation de stratégies etc.), un ensemble de compétences relationnelles et méta-communicatives (apprendre à pratiquer la négociation de sens dans la communication), enfin une catégorie de compétences méta-culturelles (par exemple : passer de l'évidence partagée à l'intérieur de la communauté à une démarche active de sens par confrontation aux autres), (Anquetil, 2006 : 103-106).

Ce référentiel se présente comme une « boîte à outils » où puiser pour adapter sa démarche pédagogique en fonction des compétences visées, qui sont très larges. Il nous donne des pistes afin de fixer des objectifs aux deux ateliers en terme de compétences interculturelles.