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Proposition de méthodologie d'évaluation et analyse des besoins

II. M ÉTHODOLOGIE ET CONSTRUCTION DU CORPUS

5. Constitution du corpus d'étude

5.1 Proposition de méthodologie d'évaluation et analyse des besoins

Il n'est à présent plus possible d'évaluer les compétences de l'apprenant selon la norme des compétences culturelles du natif, que ce soit des compétences linguistiques ou culturelles. Comme nous l'avons vu, la notion de « compétences culturelles » recoupe de nombreux aspects, dont certains appartiennent à la catégories des attitudes et des comportements : comment alors évaluer 39 http://www.cahiers-pedagogiques.com/La-litterature-dans-les-bourrasques-des-pratiques-numeriques

une compétence, d'une part si vaste, et d'autre part qui repose entre autre sur des aspects qui sont liés à la construction identitaire de l'apprenant ? Les auteurs du guide pour Développer et évaluer la

compétence en communication interculturelle invitent à réfléchir sur l'évaluation de ces

compétences dans le cadre d'ateliers réalisés à partir d'une approche interculturelle. Les auteurs s'appuient au préalable sur une définition des trois dimensions de la CCI (Compétence de Communication Interculturelle) : les savoirs, les savoir-faire et les savoir-être, et proposent une méthodologie d'évaluation pour chacune de ces dimensions. L'évaluation des savoirs reposait jusqu'à présent sur des tests de type questionnaire à choix multiple grâce auxquels il s'agissait de mesurer l'acquisition des faits culturels. La démarche interculturelle entraîne en revanche la prise en compte de trois dimensions nouvelles : les connaissances liées à la mémoire collective, à la diversité des modes de vie et aux contextes socioculturels des sociétés cibles. Les savoir-faire étaient quant à eux évalués à partir des aspects linguistiques de la compétence de communication ; dans une démarche interculturelle, il convient de prendre également en compte « […] la manière dont [les apprenants] s'ajustent aux environnements sociaux et culturels » (Lazar et al.., 2007 : 29), « […] le tout n'est pas seulement de savoir fonctionner dans une langue, mais de savoir interagir, s'adapter, intégrer, interpréter et négocier dans divers contextes culturels » (Lazar et al.., 2007 : 29). Les savoir-être étaient peu pris en considération dans l'évaluation d'une compétence interculturelle; l'apprenant doit à présent chercher à passer de la prise de « conscience culturelle » à la « conscientisation critique » des autres cultures, reconstruisant sa propre identité et ses valeurs pour devenir un intermédiaire interculturel (Lazar et al.., 2007 : 30).

Les auteurs conseillent ainsi pour l'évaluation de cette compétence plurielle de limiter le recours aux tests et de s'appuyer plutôt sur des sources de données diverses tels que des journaux de bord, des enquêtes, des rapports d'auto-évaluation, des productions écrites, etc. L'objectif n'étant pas de dresser un bilan final et de certifier par une note le niveau de performance acquis par l'apprenant, mais, dans le domaine interculturel, l'évaluation relève davantage d'appréciations, d'instruments d'auto-évaluation, d'observation des progrès et de la participation de chacun, etc. (Lazar et al.., 2007 : 38).

Pendant toute la durée des ateliers, un journal d'observation a donc été tenu dans lequel étaient notés le déroulement de chacun des ateliers, les commentaires des participants et des intervenants, les thématiques interculturelles qui ont émergé ainsi que les réactions et les ressentis des groupes. Ce journal constitue donc une des sources de recueil de données pour ce travail, ainsi que des enregistrements, des questionnaires, deux entretiens, enfin, les productions des étudiants sous forme

de « portfolio » rassemblant une sélection de tâches (Lazar et al.., 2007 : 32), ont constitué nos données de recherche. Ce corpus, pluriel mais non disparate, permettra, comme l'indiquent les auteurs du guide d'évaluation, de convoquer plusieurs types de données afin de mieux saisir les apports des deux ateliers et la progression des étudiants en matière de communication interculturelle. L'objectif est donc commun, et des critères qui seront décrits ci-dessous ont été définis pour choisir au mieux ces sources (notamment en ce qui concerne les productions des apprenants) et renforcer l'objectivité de notre méthode. Par ailleurs, ce corpus nous semble correspondre à ce que Martine Abdallah-Pretceille (2011) appelle « le baroque culturel « , c'est-à- dire une juxtaposition d'éléments divers et variés, une « […] invitation à sortir du piège identitaire » grâce aux diverses sources convoquées.

Nous n'avons pas pu procéder à une analyse des besoins des étudiants concernant le domaine culturel et interculturel, puisqu'il aurait fallu prendre du temps sur les heures de cours en plus des deux séances d'ateliers et de l'heure supplémentaire que les étudiants ont passé à remplir les questionnaires. Mathilde Anquetil, dans son travail sur la communication interculturelle des étudiants en mobilité, évoque les compétences et les besoins de ces étudiants qui sont au nombre de cinq : linguistiques, académiques, personnels et socioculturels, culturels et interculturels. Elle indique que faute de médiation, les approches culturelles restent de l'ordre du domaine touristique. Le passage de l'implicite qui reste obscur aux yeux de l'étranger à une démarche de questionnement n'est pas organisé systématiquement à l'université, selon l'auteur (2006 : 80). Dans le cas de contacts interculturels, même si certains étudiants témoignent de progrès dans leurs compétences interculturelles à la fin de leur séjour d'études à l'étranger (savoirs et savoir-faire dans le rapport à l'altérité, complexification réflexive du processus identitaire), la prise en compte des conflits et la mise en œuvre d'opérations de médiation restent peu explorées (2006 : 81) : « […] il y a ici un

besoin manifeste d'aller et retour entre expérience et lieu d'élaboration du vécu afin de fournir à

l'étudiant des instruments conceptuels pour intégrer l'altérité dans le rapport aux autres. » (2006 : 81-82).

Comment nos deux ateliers permettent-ils d'élaborer un procédé d'accompagnement, « d'aller et retour » réflexif dans l'expérience interculturelle des étudiants en mobilité, et dans quelle mesure les données recueillies à travers la diversité des sources présentées favorisent-elles une évaluation des compétences interculturelles de ces étudiants ? Nous présentons ici en détails notre méthodologie du recueil des données.