• Aucun résultat trouvé

4.2 Variabilité des mécanismes d’écoulement des eaux souterraines

4.2.1 Transferts rapides en réponse à un événement pluvieux

4.2.1.2 Remobilisation d’eau ancienne stockée dans la zone non saturée

Sur une source (R06) et un forage (F1) étudiés, les pics de crue sont corrélés à des augmentations de la conductivité électrique (figure4.12 et4.14). Une augmentation de la minéralisation totale de l’eau est liée à l’arrivée ou à l’augmentation de la proportion d’une masse d’eau fortement minéralisée. Différentes hypothèses peuvent être émises sur l’origine de la masse d’eau :

- une eau de surface anthropisée. L’eau de surface, habituellement considérée comme peu mi- néralisée peut contenir un élément modifiant la conductivité électrique naturelle, par exemple du sel de route et ainsi être caractérisée par une forte conductivité électrique,

- une eau stockée dans l’épikarst remobilisée lors d’événements pluvieux, par mélange ou effet

piston : la forte minéralisation de cette eau est soit liée à un long temps de résidence soit le

résultat de la forte pCO2 dans l’épikarst.

Afin de déterminer l’origine de la masse d’eau plus fortement minéralisée, la variation de la composition géochimique des eaux souterraines lors d’un pic de crue est étudiée sur le forage F1 puis sur la source R06.

Origine de la masse d’eau fortement minéralisée au niveau du forage F1

Durant le pic de crue RE2, la teneur en tritium est corrélée au débit (figure4.12). Depuis 40 ans, le contenu en tritium des pluies au niveau du site du CEA de Valduc diminue (figure 4.13), ainsi l’augmentation en tritium lors des pics de crue dans les eaux souterraines souligne une remobilisation d’eau ancienne stockée dans l’aquifère. Les augmentations de la conductivité électrique sont corrélées à des diminutions du pH, excepté durant la période hivernale (dé- cembre à février) (figure 4.12). L’épikarst correspond à la zone apicale de la zone d’infiltration et se caractérise par une pression partielle en CO2 souvent importante qui peut varier saison- nièrement, la pCO2est plus forte durant les périodes estivales en raison des activités végétales et bactériennes plus importantes. Une remobilisation d’eau stockée dans l’épikarst, transférée à la zone saturée peut induire une diminution du pH de l’eau souterraine de la zone saturée. Lors du pic de crue RE2, le rapport Ca/Mg et la teneur en tritium ne sont pas parfaitement corrélés. L’étude géochimique des carottes de roche du forage F1 ne démontre pas la présence de dolomites. Ainsi, la variation du rapport Ca/Mg est la manifestation d’un processus à l’origine d’une augmentation de magnésium dans les eaux souterraines, qu’il est difficile de définir sans information supplémentaire, il peut s’agir par exemple d’échanges ioniques sur des feuilles d’argiles ou d’une réaction chimique dans le sol.

Ainsi, au niveau de ce forage, on peut supposer que lors d’un événement pluvieux, l’eau est transmise au milieu souterrain rapidement par des conduits (temps de réponse faible). Cette arrivée d’eau induit dans l’épikarst un mélange entre les eaux de recharge et des eaux an- ciennes stockées, concentrées en tritium et avec une forte pCO2. Cette hypothèse va dans le

Figure 4.12: Chroniques pluviométriques, de conductivité électrique (CE), pH (a) et de teneur en tritium et du rapport Ca2+/Mg2+ des eaux souterraines lors du pic de crue RE2 (b) au niveau du forage F1.

Figure 4.13: Rejets atmosphériques en tritium par le centre de Valduc depuis 1963 (Source Seiva, 2008).

même sens que les résultats obtenus lors de l’étude des paramètres hydrodynamiques par trai- tement du signal qui démontre la présence d’un épikarst fonctionnel à partir de la méthode du corrélogramme croisé coulissant.

Origine de la masse d’eau fortement minéralisée au niveau du source R06

Lors du pic de crue RE2 (figure 4.14), la conductivité électrique augmente et est corrélée aux concentrations en Ca2+, Mg2+ et 3H mettant en évidence la remobilisation d’eau ancienne à temps de résidence élevé. Durant le pic de crue, les concentrations en Na+et Cl-augmentent et le pH diminue, ce couplage soutient l’hypothèse que l’eau “ancienne” provient de l’épikarst. En effet, au sein de l’épikarst, la pCO2 est forte en comparaison au reste de l’aquifère en raison d’activités végétales et bactériennes importantes. Les ions Na+ et Cl- apportés par la pluie sont concentrés par évaporation dans les premiers mètres de l’aquifère. De plus, l’absence de variation de la signature isotopique en isotopes stables, δ18O, δ2H et δ13C soutient l’hypothèse d’un déplacement d’eau “ancienne”. La signature isotopique en δ13C est proche de -14 ‰, cette valeur est caractéristique d’une eau chargée en CO2du sol en équilibre avec la calcite en système

fermé, ce qui appuie l’hypothèse d’une remobilisation d’eau stockée dans l’épikarst.

Lors de ce pic de crue, la température de l’eau diminue mettant en évidence un transfert rapide d’eau depuis la surface. Ce mécanisme n’est pas mis en évidence par les autres traceurs géochimiques. Ceci démontre la présence d’un mélange entre eau de recharge et eau “ancienne” dans l’épikarst avant le transit vers la zone saturée par les conduits ou des fractures ouvertes.

Figure 4.14: Chroniques pluviométriques, de conductivité électrique, de concentration en élé- ments majeurs, en tritium et en 13C sur la source R06 lors du pic de crue RE2.

Au niveau de certains forages et sources, lors de pics de crue, une remobilisation d’eau stockée au sein de la zone non saturée et déplacée rapidement a pu être mise en évidence par des augmentations de la conductivité électrique, de la concentration en éléments majeurs et par la signature en tritium. L’évolution des traceurs suggère que cette eau est stockée dans la zone non saturée, dans une zone proche de la surface où la pCO2 est forte, probablement dans l’épikarst.

La remobilisation de cette eau peut se faire soit par effet piston (une eau de surface pousse de l’eau ancienne stockée) ou par mélange au sein de l’épikarst entre l’eau de recharge et l’eau stockée.

4.2.1.3 Mise en évidence de plusieurs masses d’eau, transférées depuis la surface ou