• Aucun résultat trouvé

Analyse des données

3.2. Relation entre l'évaluation diagnostique et le rendement de la production écrite :

L'échec de l'apprentissage de la langue française préoccupe, actuellement, l'institution et en l'occurrence les praticiens, parce qu'ils sont confrontés quotidiennement à un tas de difficultés pédagogiques. Certes, les théories pédagogiques ont une autorité scientifique, mais il y a des spécificités culturelles et linguistiques qui échappent au caractère générale de celles-ci. C'est le cas de notre pays, qui comme les autres pays arabo - musulmans et en voie de développement, accuse un retard civilisationnel qui lui fait adopter une attitude passive à l'égard de l'évolution de la théorisation pédagogique universelle. Certes la nouvelle approche méthodologique «L'approche par compétences» a un caractère systémique qui écarte toute parcellisation et par conséquent lui confère une certaine efficacité pédagogique. Mais l'efficacité de la théorie en tant que telle n'empêche pas l'existence de difficultés pratiques qui remet en cause son applicabilité, notamment en ce qui concerne ses présupposés. Ceux-ci concernent trois points :

a/ autonomie pédagogique. b/ rapport avec le savoir.

c/ la dimension cognitivo - linguistique.

Concernant le premier point, la société algérienne n'a pas encore rendu ses individus autonomes. C'est la mentalité du groupe qui y règne encore. En dépit de toutes les apparences de modernisation, elle est une société traditionnelle. L'autonomie pédagogique résulte nécessairement de l'autonomie sociologique. Un individu assisté ne peut accéder à cette autonomie pédagogique qui est une valeur fondamentale de cette nouvelle méthodologie. Si l'élève ne compte plus sur son enseignant pour acquérir le savoir, il compte sur l'Internet pour l'obtenir sans le moindre effort pour l'assimiler au sens piagétien . C'est une consommation superficielle pour des raisons purement institutionnelles.

Quant au deuxième point, notons que le rapport de la société algérienne avec le savoir est négatif parce que ce n'est pas un but mais un tremplin : la seule finalité est l'obtention d'un diplôme pour accéder au marché du travail. Ce qui motive l'élève, c'est seulement la note. On utilise n'importe quel moyen pour être admis. Si l'admission est acquise, le savoir ne compte plus. La recherche scientifique, en Algérie, est un exemple illustratif de notre pauvreté

intellectuelle, excepté quelques cas isolés. Tous les grands chercheurs algériens sont à l'étranger. Faute d'environnement scientifique favorable, ils ont quitté ou quittent le pays. On a beau avoir le génie d'Einstein, ce qui compte, c'est avoir un bel appartement ou une belle maison, une belle voiture et un salaire consistant. Le savoir est réduit à sa valeur marchande. En dépit des efforts de l'Etat, qui sont louables, la recherche scientifique demeure balbutiante. Certes, c'est une affaire politique, mais les blocages et les entraves sont aussi d'ordre sociologique. Notre société algérienne n'a de considération pour le savoir que comme une promotion sociale. La nouvelle méthodologie « L'approche par compétences » est fondée sur un rapport positif avec le savoir parce que c'est l'apprenant qui doit reconstruire les cheminements qui conduisent aux acquisitions des connaissances. Le savoir établi n'est pas donné mais redécouvert par l'apprenant. Le triptyque ( savoir, savoir faire, savoir être), qui est le leitmotiv de la nouvelle méthodologie, est valorisé en lui-même, indépendamment du contexte institutionnel dans lequel il se concrétise, puisque celui-ci est nécessaire à sa concrétisation mais ne réduit pas son essence. Certes la compétence finale doit être manifeste dans un comportement donné, mais le processus qui y conduit est fondamental, et l'évaluation, dans ce contexte, n'est q'un moyen pour vérifier l'installation ou non de cette compétence. Le savoir n'est pas évalué dans un but purement institutionnel. On évalue pour que le savoir soit maîtrisé. Bien sûr, cette compétence une fois maîtrisée a des effets pratiques sur l'apprenant et son environnement immédiatement et ultérieurement ( Le processus de sa formation). Mais la compétence en tant que telle est visée pour elle-même en dehors de toute considération utilitaire. C'est ce qu'on a appelé la pédagogie de la maîtrise. Par rapport à cette finalité envisagée par les promoteurs de cette nouvelle démarche, la société algérienne est, sociologiquement, diamétralement opposée à celle-ci. Ses problèmes sociologiques fondamentaux n'ont pas été véritablement dépassés parce qu'une modernisation de façade s'opère au sein d'une tradition séculaire qui dure et perdure. La tradition ne fait que changer de forme: elle s'habille de modernité. Malek Chebel disait dans un article intitulé « Les stratégies matrimoniales en Algérie » publié dans un des numéros de la revue inexistante actuellement « Parcours Maghrébin » : «L'université, le bureau, l'usine fonctionnent comme des pourvoyeurs de maris ». Je me rappelle qu'en lisant cette phrase, j'ai souligné le verbe « fonctionnent ». Bref, le problème ne concerne pas seulement l'Algérie, il touche tout le monde arabe.

Celui-ci est régi par la même culture au sens sociologique. Dans le journal El Watan du jeudi 08 Mai 2008, dans la chronique de Ameziane Ferhani figure cette information dans la

réflexion du journaliste : « D'après vous, combien faut il de temps pour lire cette chronique ?. La question vaut son pesant de science depuis que l'on sait que la moyenne de lecture dans le monde arabe est de 6 minutes par an, selon de récentes statistiques de l'Unesco et de l'Alesco, rapportées fin avril à Alger par le représentant de l'Union du Maghreb Arabe.

Bref, le livre en nos contrées se porte aussi bien que la dite union, pourtant tant espérée » . Le troisième point concerne directement notre recherche, il doit être au centre des préoccupations des chercheurs en éducation, des responsables politiques et des praticiens. L'institution ( Ministère de l'Education Nationale ) oublie de prendre en compte que l'apprenant algérien vit dans un milieu linguistiquement et culturellement différent de celui du pays de Molière. Même quand l'enseignement était dispensé en français, cette donnée existait puisqu'on ne pouvait pas se détacher totalement de la société dans laquelle on vit. L'enseignement, actuellement, est dispensé en arabe, sauf quelques disciplines au niveau de l'université. Cette nouvelle donnée exige une reconsidération de l'enseignement de la langur française en Algérie. Celle-ci doit se faire sur les plans didactique et pédagogique. Mais nous constatons une résistance de la part de l'institution à reconsidérer cette question en fonction de la dite donnée. On s'entête à vouloir enseigner le français comme on l'enseignait auparavant. Cet entêtement découle d'une idéologisation d'une donnée linguistique. La réalité linguistique actuelle et ultérieure nous incite à abandonner cette résistance injustifiée et traiter la question dans une perspective purement scientifique. Cette dernière nous révèle la non maîtrise de la structure sémantique de la langue française qui empêche le passage linguistique de la structure propre à la langue arabe à celle de la langue française. Ce blocage engendre tous les problèmes relatifs au dysfonctionnement sémantique dont nous avons analysé les différents aspects en analysant les données recueillies.

Conclusion :

Les décideurs, les chercheurs et les praticiens n'ont aucune emprise sur les deux premiers points qui concernent la sociologie de la société algérienne. C'est une question qui ne relève ni d'une décision politique, ni d'une recherche scientifique, ni d'une pratique pédagogique : un coup d'état sociologique est une chimère. Mais une intervention sur le troisième point est possible et souhaitable parce qu'elle pourrait changer l'état de l'enseignement de la langue française en opérant un déblocage linguistique qui profite à l'apprenant en premier lieu, au praticien au second lieu et au système scolaire en dernier lieu, c'est-à-dire à l'Etat.

Conclusion