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Un regard sur le Surréalisme

Dans le document Marier la source et la blessure (Page 63-73)

À travers les époques, les modes d’expression se sont développés sous l’influence d’une personne ou d’un groupe de personnes. L’essai de nouvelles techniques, la dé- couverte de matériaux ou la prise de position face à des évènements importants ont fait apparaître soit des écoles soit des mouvements artistiques dans les domaines de la peinture, de la musique et de la littérature. Qu’il s’agisse de l’Impressionnisme, du Fauvisme, du Cubisme littéraire ou du Dadaïsme, les créateurs ont su infléchir cette évolution à leur manière.

En réaction au style des Parnassiens, musiciens, peintres et écrivains cultivent un art s’inspirant davantage de leurs préoccupations personnelles. En poésie, signalons l’influence du Symbolisme, lequel connut un essor entre les années 1880 et 1890. Dé- sormais, les textes empreints d’une plus grande liberté attestent l’émancipation du langage.

Ainsi, les poètes délaissent les descriptions ciselées, introduisent des rythmes variés tout en privilégiant dorénavant le vers libre. Considéré comme un mouvement par les uns et comme une école par d’autres, le Symbolisme laisse sa marque jusqu’au XX e siècle. Le manifeste de Jean Moréas publié dans Le Figaro du mois de septembre 1886 présente davantage l’état d’esprit de ces poètes et la revendication d’une plus grande indépendance.

Nerval, Baudelaire, puis Mallarmé, Rimbaud, Apollinaire suscitent la curiosité par leur approche singulière inscrite dans cette « grandiose et dramatique odyssée de la cons- cience poétique » (Carrouges). À leur manière, ils engendrent un style percutant. À cet égard, cette lignée de poètes indignés concoure à l’avènement du Surréalisme vers les années 1920. Il n’est pas inutile de s’arrêter sur ce dernier, lequel a définitivement marqué l’écriture poétique.

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Initié par André Breton, ce mouvement auquel s’est joint Aragon, Thédore Fraenckel1

et Philippe Soupeault, regroupe des peintres et des écrivains opposés aux diktats de la bourgeoisie et de ses institutions. Tous s’insurgent contre cette société entichée du positivisme, du discours de la philosophie et des lettres classiques. La suprématie des conventions établies en système que ce soit la justice, l’armée, la religion ou l’éducation heurte leurs valeurs et les met en rage. D'ores et déjà la communauté ar- tistique réunie autour de Breton éprouve le sentiment urgent, qu'il traduit par le besoin de : « changer les bases par trop chancelantes et vermoulues du vieux monde ». Bre- ton dit que : « l’attitude réaliste, inspirée du positivisme de Saint Thomas à Anatole France m'a bien l'air hostile à tout essor intellectuel et moral2 ».

[...] comment veut-on que nous manifestions quelque tendresse, que même nous usions de tolérance à l’égard d’un appareil de conservation sociale, quel qu’il soit. Ce serait le seul délire vraiment inacceptable de notre part. Tout est à faire, tous les moyens doivent être bons à employer pour ruiner les idées de famille, de patrie, de religion3.

Ces créateurs refusent de vivre sous l’emprise de cette société responsable du dé- clenchement de la guerre 1914-1918. L’horreur des années d’après-guerre nourrit leur ressentiment. Ils constatent que le drame perdure. Frappés par une vague de déses- poir profond, ils dénoncent avec vigueur les conditions sociales qui prévalent. Les va- leurs de la civilisation fortement chamboulées par la guerre, il est important pour eux d'engager un débat sur la destinée de l’homme. Breton exprime sa détresse en ces mots : « Absolument incapable de prendre mon parti du sort qui m’est fait […] je me garde d’adapter mon existence aux conditions dérisoires de toute existence4 ».

À son idée, l’être possède les ressources propres qui fassent en sorte que les condi- tions de vie en société soient aussi un lieu d’accomplissement pour chacun. La mobili- sation des forces prodigieuses pour s’élever au-dessus de cette existence navrante

1 Note : Franckel, le plus proche des amis de Breton dans l'enfance et l'adolescence. Il fit

lui aussi des études de médecine. Valéry appellent Breton, Aragon et Soupeault les trois mousquetaires. Franckel étant considéré comme d'Artagnan.

2 André Breton, Manifestes du surréalisme, Paris, J.-Jacques Pauvert, 1962, p.18 3 André Breton, op.cit., Manifestes du surréalisme, p.159

4 Michel Carrouges, André Breton et les données fondamentales du surréalisme, Breton,

57 domine la pensée de Breton, chantre d'une redéfinition de l'homme. Il refuse catégori- quement de vivre encore sous le règne de la logique et il s’active à secouer cette so- ciété léthargique. Son engagement imprègne totalement sa démarche de création. Sans relâche, il affirme sa volonté de changer la vie. Conscient du chaos inextricable, il veut poser le fondement d’une autre existence : « Tant va la croyance à la vie, à ce que la vie a de plus précaire, la vie réelle s’entend, qu’à la fin cette croyance se perd5 ».

Dans un esprit de dissension, cette association libre d’artistes remet en question les finalités de leur mode d’expression. Partageant un fort sentiment de nihilisme, ils se regroupent autour de la revue Littérature en 1919. L'année suivante, plusieurs d'entre eux adhèrent au Dadaïsme instauré par Tristan Tzara. Mais, ayant de moins en moins d'affinités avec l'approche négativiste de cette école qui se dote d'une structure légère, mais qui a « pour objectif la dictature de l’esprit », ils s'en écartent. Ils estiment que l'approche préconisée ne permet pas d'atteindre leurs aspirations, ni d'opérer un véri- table changement sur le plan social. Cependant, en dépit de son insuccès populaire et des critiques sévères des intellectuels de ce temps à son égard, le Dadaïsme présente une parenté avec le Surréalisme dont il fut un des éléments pivots.

Le contexte historique et social provoque un climat de perturbation profonde. Breton, théoricien et animateur du surréalisme, ravit et captive les esprits. Ses réflexions cin- glantes tout comme son discours remuent les idées courantes. Il s’ensuit des discus- sions houleuses dans les milieux artistiques et sociaux en maintes occasions. Bientôt, un nouveau type de conscience s’instaure. Toute cette effervescence donne lieu à une approche inédite de l’art, une redéfinition de son statut. Désormais, l’expression poé- tique et plastique n’a pas pour finalité de divertir ou d’égayer les salons, mais bien de témoigner d’une expérience personnelle. S’affranchissant des principes de la théorie esthétique dominante, les créateurs font éclater les normes fixées. Ils révolutionnent la vie intellectuelle et artistique. Michel Carrouges résume ainsi la conviction de Breton :

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« Il ne pouvait plus être question, [pour lui,] d'orner les murs ou la mémoire. Dès lors, qu'elle ne peut affronter victorieusement la mort et le néant, l'esthétique n'est rien6 »

Breton prend connaissance de la pensée de Sigmund Freud sur le subconscient à partir des écrits des psychiatres Régis et Hesnard7. Séduit par ses travaux sur le moi

et le surmoi, Breton s’intéresse au sommeil paradoxal caractérisé par le rêve. Il lui ap- paraît que ce lieu de l’imagination première permet d’accéder au réel d’une autre ma- nière. S'appuyant sur cette théorie, il recherche une conception nouvelle de l'homme. C'est dire combien son propos est plus global que ses préoccupations sur le plan artis- tique.

Voilà le point de vue qu’il partage avec ses camarades préoccupés comme lui de con- naître les profondeurs de l’esprit. Ils investiguent les méandres de la conscience noc- turne, réservoir de fantasmagorie. La force suggestive de cet état psychique de même que la découverte de nouveaux rapports entre l’imaginaire et le réel les fascinent. Il leur apparaît que les messages du subconscient donnent accès à la pensée refoulée au fond de l’être. Breton affirme, dans La Préface du numéro 1 de La Révolution sur-

réaliste, que : « […] le rêve seul laisse à l’homme tous ses droits à la liberté8 ». Plu-

sieurs poètes, Aragon, Soupeault, Éluard, Leiris, Desnos, publient le récit de leurs rêves sans toutefois se prêter à une interprétation.

Celui qui rêve éveillé, qui cherche à remonter aux sources de l’imagination, c’està-dire à la pleine possession de lui-même ne peut quitter ce monde-ci, couper les amarres, puisque justement il ne dort pas. Il écarte alors ce monde ordonné d’objets, de lieux communs, et introduit cette distance, condition de toute œuvre réflexive ou poétique9.

Pour Breton, le chemin du rêve éveillé fournit la matière sensible pour saisir authenti- quement le réel. La voix intérieure inconsciente investit alors d’autres lieux que celui

6 Michel Carrouges, op.cit., André Breton et les données fondamentales du surréalisme,

p.13

7 À cette époque, les écrits de Freud sont inédits en français. En reconnaissance de son

apport à sa réflexion, Breton dédicace le Manifeste et Nadja à Hesnard.

8 Cité dans Georges Mounin, op.cit., Avez-vous lu Char ?, p. 70

9 Marie-Louise Gouhier, cité dans Alquié Ferdinand, Entretiens dirigés, Le surréalisme,

59 englué par le quotidien. Toujours en quête de révélations ou de signes prémonitoires, lui et ses proches, s’orientent vers la métaphysique, les sciences occultes et l’hypnose. Cependant, des réactions impulsives et des incidents inquiétants tels des tentatives de suicide, lors d’expériences avec ou sans la prise de drogues ou d’alcool, les incitent à abandonner ces pratiques insolites pour éviter que la situation ne s'ag- grave.

Dans un état de début de sommeil, en janvier 1919, Breton entend un message qui lui semble d’abord énigmatique : « Il y a un homme coupé en deux par la fenêtre ». L’explication rationnelle élude aisément cette vision d’un homme déambulant sous la fenêtre. Au demeurant, le mystère s’évanouit emportant avec lui la charge fictive sug- gérée. Suite à ce rêve, il se penche sur divers procédés d’écriture. Sans doute, les œuvres de Lautréamont et de Baudelaire constituaient déjà des lieux d’expérimentation et de contestation. Voilà que l’on prend conscience de l’effet stimu- lant de l’écriture automatique, une des étapes sensibles du parcours surréaliste. Utili- sée comme moyen de thérapie en psychiatrie à la fin du 19e siècle, la technique s’avère être aussi une voie d’accès à l’imaginaire. Pour Breton, la prospection de cet espace se révèle être « un mode supérieur de révélation de l’univers et de l’homme par l’homme ».

Certes, une technique d’écriture confère une certaine aisance à l’auteur, mais elle n’assure pas forcément la valeur du texte. Artifices ou constructions syntaxiques sur- prenantes émanant de rêves ou de délires n’engendrent pas forcément l’émotion. Or, Breton s’applique à retrouver cette naïveté propre à l’enfant qui utilise grandement ses perceptions pour développer sa compréhension des choses et des évènements. Cette manière d’appréhender la réalité fait une large place à la dimension émotionnelle. Breton estime que la connaissance acquise par la voie du raisonnement est limitative alors que « la connaissance émotionnelle provoque chez l’homme une sensation si profondément bienfaisante […] que cet état de grâce, tous ceux qui ont souci de défi- nir la véritable condition humaine, confusément, aspirent à le retrouver10 ». Sa convic-

10 André Breton, op.cit., Le message automatique, Cité par Georges Mounin, Avez-vous lu

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tion l’incite à sonder la pensée subjective débarrassée de toute tâche d’objectivité. À l’instar de Bachelard, il voit que : « Toujours renaît le jeune enfant sous le vieil homme, l’alchimiste sous l’ingénieur11 ».

La rencontre entre le monde intérieur et extérieur revigore l’imagination. Encore faut-il « ne pas permettre que [celle-ci] soit réduite en esclavage, même si on encourt le risque de la folie, même s’il y va de ce qu’on appelle le bonheur12». Breton a longue-

ment médité sur le travail de Pierre Reverdy. Lorsqu'en 1924, il y a contestation de l'attribution du Prix du nouveau Monde à celui-ci, Breton, Aragon et Soupeault clament qu'il est incontestablement le « plus grand poète vivant de son temps ». Breton dans un entretien avec André Parinaud affirme : « […] j'aimais et j'aime encore ŕ oui d'amour ŕ cette poésie pratiquée à larges coupes dans ce qui nimbe la vie de tous les jours, ce halo d'appréhensions et d'indices qui flotte autour de nos impressions et de nos actes. Il était merveilleux13 ».

Sur le rêve, Reverdy écrit :

Ce que j’appelle rêve d’ailleurs, ce n’est pas cette inconscience totale ou par- tielle, cette sorte de coma que l’on a coutume de désigner par ce terme et où semblerait devoir se dissoudre, par moments, la pensée. J’entends au con- traire l’état où la conscience est portée à son plus haut degré de perception. L’imagination, libre de tout contrôle restrictif, l’extension sans limites conve- nues de la pensée, la libération de l’être au-delà de son corps – indéfendable – la seule existence vraiment noble de l’homme, l’effusion la plus désintéres- sée de sa sensibilité14.

Les tenants du Surréalisme conçoivent que vie, société, art et culture forment un tout. Ils aspirent à ce que l’être assume pleinement sa liberté. Le pouvoir de création est intimement lié à un processus d’éveil de sa conscience où la réalité et le rêve co- existent harmonieusement. Selon Breton la poésie est la manifestation d'une protesta- tion. Lors d'un discours au congrès des écrivains en 1935, il proclame :

11 Gaston Bachelard, cité dans Ferdinand Alquié, Entretiens dirigés, Le surréalisme, p.179 12 André Breton, cité dans Ferdinand Alquié, Entretiens dirigés, Le surréalisme, p.181 13 André Breton, Entretiens, Entretien avec André Parinaud, Paris, Gallimard, 1952, p. 41 14 Pierre Reverdy, Self-Defence et autres écrits sur l'art et la poésie (1917-1926) Le Rê-

61 De notre place, nous soutenons qu'il appartient au poète, à l'artiste, d'appro- fondir le problème humain sous toutes ses formes, que c'est précisément la démarche illimitée de son esprit en ce sens qui a une valeur potentielle de changement du monde, qu'une telle démarche [...] ne peut que venir renforcer la nécessité du changement économique de ce monde15.

Vue sous un autre angle, en dehors des préceptes de tout système, l’activité créatrice croît avec le processus de déréalisation c’est-à-dire une coupure, une distance avec le réel objectif laisse la possibilité de l'imaginer autrement. Ce nouveau réel est considé- ré comme étant le surréel. La coupure ainsi faite avec la fonction habituelle de si- gnifier sous-tend l'authenticité et l'originalité. À propos du surréel, Breton croit : « à la résolution future de ces deux états, en apparence si contradictoires, que sont le rêve et la réalité. en une sorte de surréalité, si l’on peut ainsi dire16 ».

L’expression artistique révèle la destinée de l’être et les désirs de son inconscient : « L'entretien de la pensée avec la poésie vise à évoquer l'être de la parole, pour que les mortels apprennent de nouveau à trouver séjour dans la parole17 ». Loin de toute forme de contrôle et de censure, le poète investit l'espace de la rêverie ac- tive, cette « conscience du bien-être » (Bachelard) où s’engendre « l’écriture poé- tique par ce double mouvement celui des mots et du langage et celui de sa cons- cience18».

Breton, personnalité forte et complexe, disait du travail des poètes : « Les manipula- tions auxquelles ils se livrent ont pour but premier de retenir l’éternité dans l’instant19».

Il rappelle aussi dans le Second Manifeste :

Le problème de l'action sociale n'est, je tiens à y revenir, et j'y insiste qu'une des formes d'un problème plus général que le surréalisme s'est mis en devoir de soulever et qui est celui de l'expression humaine sous toutes ses formes. Qui dit expression, dit pour commencer le langage20.

15 André. Breton, op.cit., Manifestes du surréalisme, p. 285 16 Ibid., p. 27

17 Heidegger Martin, Acheminement vers la parole, Paris, Gallimard, Tel, 2006, p. 42 18 Jean-Noël Pontbriand, Écrire en atelier ou ailleurs, Québec, éd. Du Noroît, Prise de pa-

role, éd. du blé, p. 39

19 André Breton op.cit., Avez-vous lu Char ?, cité par Georges Mounin. p.97 20 Ibid., p.183

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Le langage poétique s’en inspire désormais. L’espoir d’une vie exaltante donne la clé permettant de libérer l’imagination que Bachelard définit « comme une faculté spéci- fique. À elle appartient cette fonction de l’irréel qui est psychiquement aussi utile que la fonction du réel21 ».

[La poésie] son rôle est de se porter sans cesse en avant, d'explorer en tous sens le champ des possibilités, de se manifester ŕ quoi qu'il advienne ŕ comme puissance émancipatrice et annonciatrice. Par delà les convulsions qui saisissent les régimes et les sociétés, il faut pour cela qu'elle garde le con- tact avec le fond primitif de l'être humain ŕ angoisse, espoir,énergie créatrice ŕ qui s'avère le seul réservoir inépuisable de ressources22.

Tout au long de son évolution, le mouvement surréaliste a été le théâtre de question- nements et de débats importants. Sur le plan de l'écriture poétique, l'exploration de chemins inusités a pu le faire dévier de sa trajectoire initiale. Toute théorie naissante est confrontée à ce risque. L'engouement pour une nouvelle approche ou une tech- nique apporte généralement une grande satisfaction, mais a souvent pour effet de ralentir, voire de freiner le processus de création parce qu'elle se fige en un dogme. Mounin, en ce qui a trait au Surréalisme, en parle en ces termes : « Le danger des formules surréalistes était d'endormir la vigilance poétique de leurs esclaves, de les faire sombrer dans la sécurité d'une technique23 ». L’approche désormais mise de

l’avant consiste à laisser apparaitre la substance émotionnelle du créateur. Néan- moins, s’y complaire se révèle être risquée puisqu’elle peut l’entraîner dans une habi- tude et l’écarter de la vigueur créatrice. Quoiqu’on en dise, le Surréalisme, défini comme la « dictée de la pensée, en l’absence de tout contrôle exercé par la raison en dehors de toute préoccupation esthétique ou morale » ou encore, selon Hugnet dans

La Petite anthologie, comme : « un système viable de la connaissance, une recherche

continue de la pensée et de ses sources » ce mouvement a insufflé un vent de renou- veau sur l’écriture poétique.

21 Gaston Bachelard, L'intuition de l'instant, Paris, Stock, 1992, p.141

22 André Breton, Entretiens, op.cit., Interview de René Balance (Haïti-Journal, Haïti, 12 -13

déc. 1945) Paris, Gallimard, p. 233

63 Mahmoud Darwich dans son propos sur la pensée et l'écriture conçoit que : « le sur- réalisme est plus important par l'influence qu'il a exercée que par sa propre production poétique24». C’est un mouvement majeur qui a progressé. À tous égards, l’esprit de

liberté et la mise au jour des ressources de l’inconscient ont revivifié le mouvement artistique de plusieurs cultures. Bien qu'il ne fut pas un « mode de révélation de l'uni- vers et de l'homme par l'homme visant à changer la vie » (Breton), son apport à la poésie moderne est indéniable. Il a manifestement contribué à ce que la poésie, un

des destins de la parole (Bachelard), soit vue plus globalement. En 1953, Breton fait la

réflexion suivante dans Du surréalisme en ses œuvres vives :

Il s'agissait de rien de moins que de retrouver le secret d'un langage dont les éléments cessassent de se comporter en épaves à la surface d'une mer morte. Il importait pour cela de les soustraire à leur usage de plus en plus strictement utilitaire, ce qui était le seul moyen de les émanciper et de leur rendre tout leur pouvoir25.

L’attention portée à l’élargissement de la conscience et aux révélations de l’inconscient, la reconnaissance de la valeur de l’intuition poétique, la libération de l’esprit du poète piégé dans les cadres formels, l’abandon progressif des règles proso- diques et de la ponctuation sont autant d’éléments ayant favorisé l’émergence d'un

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