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IV. Méthode de recueil de données et d’analyse

2. Un regard micro-sociologique

La description historique et sociologique du mouvement sportif des personnes dites « handicapées » en Guadeloupe a nécessité un croisement de données de terrain. Pour ce faire, nous avons fait le choix d’avoir recours à une méthode sociologique qualitative. Nous nous y sommes inscrit à la fois en ce qui concerne la méthode d’enquête (entretiens, observations, archives personnelles et administratives) et dans la forme d’exposition des résultats de la recherche (histoires de vie, monographies associatives, analyse de contenu).

« Une méthode, guide pour la route, éclaire mais ne décide pas la route. Assurer la

pertinence d’une méthode, c’est l’ajuster aux questions posées et aux informations accessibles » (Combessie, op.cit. : 9). La question de la méthode utilisée s’est présentée à

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nous face à l’absence de données sur notre objet de recherche à laquelle nous étions confronté. Cela a eu pour conséquence de nous placer dans une situation de découverte et d’exploration et de procéder à une délimitation du terrain par étape. Pour réaliser notre recherche, notre travail s’est effectué en deux temps. Tout d’abord, nous avons effectué une enquête préliminaire qui avait pour objet de repérer et de baliser l’ensemble des pratiques sportives destinées aux personnes handicapées et des structures qui les organisent. Cette phase devait servir à tracer le cadre général de notre terrain en créant un recensement détaillé de ces structures. Elle devait aussi permettre de produire une frise historique capable de retracer le déroulement de cette structuration. Pour ce faire, nous avons donc effectué une enquête auprès de différentes instances institutionnelles capables de regrouper ces informations telles que la Direction Départementale de la Jeunesse et des Sports. Toutefois, de cette première investigation, nous n’avons pas pu obtenir un recensement exhaustif des organisations spécifiques au mouvement sportif des personnes dites « handicapées ». En effet, parmi celles dont nous avions obtenu les coordonnées, nous avons constaté que certaines associations recensées n’existaient plus, étaient en sommeil ou alors n’avaient jamais vraiment existé, tandis que d’autres n’étaient pas référencées faute de s’être déclarées en tant que telles. Finalement, nous avons dû effectuer nous-même un travail de vérification auprès des organisations recensées, puis nous avons complété cette liste par une enquête de terrain (recherche sur internet, recueil de témoignages) d’autres organisations non mentionnées.

A la fin de cette première enquête, nous avons produit une liste des organisations associatives qui ont proposé une offre sportive spécifique aux personnes atteintes de déficiences motrices depuis 1980, année de la première activité « handisport » recensée. Ce tableau se divise en trois colonnes selon que cette activité s’est développée au sein d’une association non sportive, d’une association spécifique Handisport ou d’une section créée dans un club ordinaire. Suite à ce travail de recensement, un exercice de périodisation a été effectué

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afin d’avoir une représentation linéaire de la structuration du mouvement sportif spécifique (création des associations et des sections; événements sportifs spécifiques; etc.).

Parallèlement, un certain nombre d’entretiens ont été menés avec des professionnels et/ou des institutionnels du secteur de la prise en charge du handicap en Guadeloupe. Ces derniers furent contactés lors de notre phase d’exploration. N’ayant que très peu de données sur la prise en charge du handicap en Guadeloupe, ces acteurs ont pu apporter leurs témoignages de l’histoire institutionnelle du handicap en Guadeloupe, ainsi qu’une certaine quantité d’archives administratives (données statistiques, rapports, enquêtes). Les données obtenues ont été utilisées dans notre travail pour définir l’espace socio-culturel dans lequel notre terrain évolue. Certains de ces acteurs ont été par la suite des « passeurs » nous facilitant l’entrée en relation avec certains responsables associatifs38.

38 Ces institutionnels ont été interviewés individuellement mais aussi collectivement. En effet, notre enquête s’inscrit dans un programme de recherche entamé par le laboratoire ACTES (Université des Antilles et de la Guyane) qui s’intéresse au développement de la prise en charge du handicap en Guadeloupe. Cette étude encore en cours comptabilise à ce jour 10 entretiens individuels et 5 entretiens collectifs.

Section handisport

Pigeon d’argent Création CRUHG Moule Handisport Section handinatation Dauphins du Moule 1994 Section handisport KAHMA 1982 Tournée de Basket en fauteuil Création KAHMA Création SKN 1984 1981 1978 1986 Foyer autonome SKN Section handisport SKN 1990 1992 1988 1996 2002 2000 1998 2006 2004 2008 2010 Handigua Les Dynamiques Karukera Handisport

Section handisport ACAPI Section handisurf PSC

Ligue handisport de la Guadeloupe

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Cette phase de délimitation du terrain de recherche a permis d’orienter notre stratégie de recueil de données. Les sources écrites (journaux, archives associatives, archives administratives) n’ayant pu être clairement repérées, la source la plus importante d’informations s’avérait être les acteurs de ce mouvement sportif spécifique. Les sources orales ont donc été choisies pour pouvoir décrire cette structuration à travers le recueil de témoignage. Ainsi, c’est comme si le terrain se découvrait par le terrain. La réalité n’était plus dans les archives administratives (comme elle est habituellement dans une enquête historique) mais dans la rencontre avec les acteurs. Les sources orales ont permis de mettre à jour des réalités passées sous silence par les documents d’archives.

De cette manière, nous avons choisi de « privilégier l’expérience des acteurs en reconstruisant autour d’eux le contexte qui lui donne sens et forme » (Revel, 1997 : 23). Selon l’auteur, l’intérêt porté aux acteurs favorise l’émergence d’une « micro-histoire » (Ibid.) grâce à l’analyse de l’expérience des individus à travers les traces, les discours voire les indices que les acteurs ont laissés. « C’est une histoire qui avance comme la paléontologie. Par regroupements, par interprétations successives, mais sans en avoir la maturité. » (Liotard, 1999 : 404).

Ainsi, cette enquête s’est construite par étape. L’absence de données d’archives mais aussi de productions scientifiques dans notre domaine, nous a conduit à utiliser essentiellement les sources orales comme moyens de réponse aux questions qui se posaient à nous. Outre la description historiographique du parcours de vie de ces différents acteurs, nous avons cherché à appréhender le sens qu’ils donnent à l’action collective mais aussi à la pratique sportive, en bref les stratégies collectives et les logiques de pratiques qu’ils justifient ou auxquelles ils donnent sens.

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