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Première partie : Famille et relations à l’extérieur

1. La famille comme source de soutien

1.2. Regard des agents de probation et des différents acteurs de l’institution pénale

Concernant la famille comme source de soutien, les agents et les différents acteurs de l’institution pénale portent un regard sur la présence familiale en questionnant à la fois son influence et la nature du lien de confiance entre le contrevenant et ses proches.

1.2.1. Une présence familiale

Pour les agents et les différents acteurs de l’institution pénale, la famille est une source de soutien en ce qu’elle est présente pour le détenu, soit au cours de son séjour en détention, soit lorsqu’il est à l’extérieur des murs.

Dans le premier cas de figure, les agents soulèvent quelques cas, comme celui de Charles où certains membres de la famille sont considérés avoir une influence « significative » et « positive » sur le détenu. En effet, il ressort de nos entrevues que pour son agent, le contrevenant peut se fier et s’en remettre aux conseils de certains de ses proches. L’agente de probation de Charles affirme que le détenu peut compter sur la présence de sa tante même si, selon elle, c’est une des personnes qui l’ont incité à renoncer à sa libération conditionnelle :

« C'est une personne qui est significative pour lui. C'est une personne je pense qui a une influence positive, à qui il peut se confier. Mais finalement elle l’a un peu incité à renoncer pour qu'il retourne dans sa communauté le plus rapidement possible » (Agent de probation de Charles).

De la même manière, dans le cadre des rapports intégrés au dossier, les différents acteurs de l’institution pénale portent un regard évaluateur sur la présence familiale, et ce plus spécifiquement en termes de soutien. Un rapport d’évaluation intégré au dossier carcéral

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d’Émilie indique que la famille de la détenue représente un soutien « indéfectible ». Ainsi, le même rapport indique que la distance géographique qui sépare Émilie de ses proches est d’autant plus difficile à supporter pour la détenue :

« Le rapport d’évaluation indique que la famille d’Émilie est une source indéfectible de soutien et que l’éloignement familial est, dès lors, difficile » (Dossier carcéral d’Émilie).

Dans le deuxième cas de figure, les propos de l’agente de probation de Benoît montrent que le détenu a pu compter, à différents moments de son parcours de vie, sur des membres de sa famille. Alors que pendant de nombreuses années, Benoît n’avait plus aucun contact avec sa famille, en 2016 il est allé rejoindre sa mère et son frère à X. L’agente de probation indique que, selon elle, ce séjour a été positif pour le détenu qui était non seulement heureux de pouvoir compter sur la présence de ses proches mais avait également réussi à décrocher un emploi en tant que boulanger. Dans le cadre de sa sentence actuelle, son agente souligne que le détenu parle beaucoup de sa sœur et a d’ailleurs mentionné, lors de leur dernière entrevue, envisager aller vivre chez elle à sa sortie. L’agente indique que la présence des proches de Benoît permet de briser l’isolement du détenu :

« Il m'avait parlé d'une période passée à X avec sa mère et son frère pas longtemps après sa libération la dernière fois en mars 2016. Donc il décrivait cette période-là de façon très positive. Il disait que ça se passait bien, que c'était très positif pour lui de se retrouver avec ses proches, qu'il avait même réussi avec l'aide de sa mère à se trouver un petit emploi dans une boulangerie » (Agente de probation de Benoît). « Il m'avait parlé d'une sœur qui était très malade du cancer, qui suivrait des traitements de chimiothérapie actuellement, Il m'avait mentionné qu'il aimerait faire vie commune avec elle [sa sœur] à X dans un appartement, que ça lui permettrait d'aider sa sœur à travers cette période-là. Il pensait aussi que ça briserait son isolement car, selon lui, c'était une ressource positive pour lui cette personne-là. C'est une personne qui ne consomme pas, qui a un mode de vie très, qui a pas eu un mode de vie criminel » (Agente de probation de Benoît).

A contrario, certains agents ne perçoivent pas toujours positivement la présence familiale pour les détenus participants à notre recherche. Dans le cas d’Alexandre, son agente de probation constate, au cours de ses rencontres de suivi avec le détenu, que les relations entre ce dernier et ses proches sont changeantes. En effet, selon elle, d’une fois sur l’autre, le contrevenant a encore des contacts avec ses proches ou au contraire n’en a plus. Elle met en

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évidence le « tempérament un peu bouillant » du détenu, pouvant occasionner des conflits avec son entourage :

« Quand je l'ai évalué c'était au beau fixe. Ça allait bien mais là entre temps moi j'ai su que ça allait pu bien mais là qu'est-ce qu'il s'est passé je ne sais pas … As-t‘il dit quelque chose ? Parce qu'il a un tempérament un petit peu bouillant fait que ça se peut qu'il est dit des paroles qui aient froissées son entourage, se serait très possible chez Alexandre » (Agente de probation d’Alexandre).

1.2.2. Un lien de confiance

Il ressort de nos entrevues avec les agents que la confiance entre la personne contrevenante et ses proches en matière de fragilité des liens ou de solidité des liens est une de leurs préoccupations.

Les agents soulèvent certains cas comme celui d’Émilie ou malgré la prison, le lien de confiance entre la détenue et ses proches, en particulier ses parents, a été conservé. L’agent de probation d’Émilie considère que la mère de la contrevenante est une personne de confiance car elle s’occupe du fils de 5 ans de la détenue :

« Sa mère si elle garde son enfant ça doit être une personne de confiance » (Agent de probation d’Émilie).

A contrario, plusieurs agents soulignent les cas où la confiance a été ébranlée voire perdue, soit en raison de la problématique de consommation du détenu, soit compte tenu de la récidive de ce dernier. L’agente de probation de Benoît indique que la problématique de consommation du détenu a bouleversé sa relation avec ses proches. Elle mentionne que souvent les toxicomanes ont recours à la manipulation, aux mensonges, ce qui peut notamment affecter la confiance du contrevenant avec sa famille. Dans cette perspective, elle affirme que si la personne contrevenante veut retrouver la confiance de ses proches, elle va devoir faire ses preuves :

« C'est sûr que la problématique de consommation a dû aussi affecter même s'il en a pas forcément parlé en entrevue. J'ai l'impression que ça a affecté les relations parce que malheureusement avec les toxicomanes y a beaucoup de mensonge, de manipulation, de déception, la personne dit qu'elle va faire des démarches mais finalement elle ne se mobilise pas. Donc je pense que ce qui pourrait faire une différence pour lui c'est d'avoir un intervenant de confiance et aussi resserrer les

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liens familiaux. En même temps il peut pas seulement demander à sa famille de lui faire aveuglément confiance là va falloir qu'il fasse ses preuves comme quoi cette fois-là c'est la bonne. Probablement qu'ils ont entendu ça souvent, qu'il voulait se reprendre en main pis que malheureusement c'est pas ça qui s'est passé donc il va devoir faire ses preuves là auprès d'eux » (Agente de probation de Benoît).

De la même manière, d’autres agents soulèvent les cas, comme celui d’Alexandre où c’est la récidive du détenu qui est à l’origine de la perte de confiance de ses proches à son égard. Son agente mentionne que la première incarcération du contrevenant a été un choc pour ses proches, ses parents et son frère. Alors lorsqu’Alexandre brise certaines de ses conditions de probation, commet un nouveau délit et est de nouveau incarcéré, la confiance de ses proches est particulièrement fragilisée :

« Il finit par perdre la confiance aussi de ses personnes proches comme n'importe quel détenu qui récidive » (Agente de probation d’Alexandre).