• Aucun résultat trouvé

Recontextualiser les récits de vie et les questionnaires grâce à des sources complémentaires sources complémentaires

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 105-110)

PARTIE PRÉAMBULE : Penser les trajectoires de résilience à partir des récits de vie. Enjeux éthiques

3- Recontextualiser les récits de vie et les questionnaires grâce à des sources complémentaires sources complémentaires

___________________________________________________________________________

J’ai réalisé en tout 93 entretiens sur les trois territoires : 40 en Martinique dont 35 étaient exploitables (Carte 19 et annexe 3), 44 en Guadeloupe dont 35 exploitables dans leur totalité (Carte 20 et annexe 4). J’ai également récolté 49 questionnaires dans le cadre du programme C3AF : Changement Climatique et Conséquences sur les Antilles Françaises en 2017 en Guadeloupe. Enfin, en Haïti, j’ai réalisé 9 entretiens (2016 et 2017) et récolté 175 questionnaires dont 164 exploitables (Carte 17 et Carte 18 et annexe 2).

Carte 19 : Carte de localisation des entretiens réalisés en Martinique en 2016 (Réalisation : F. Benitez, ArcGIS)

Carte 20 : Carte de localisation des entretiens réalisés en Guadeloupe en 2017 (Réalisation : F. Benitez, ArcGIS )

Ces données ont été complétées grâce à d’autres outils méthodologiques et d’autres sources.

3-1- Les carnets de terrain

Ils sont remplis de tout, de rien, de citations prises au hasard, de descriptions de lieux m’inspirant, de cartes de visite récupérées, de prises de rendez-vous, de numéros de téléphone griffonnés tellement vite que, parfois, il n’y a même pas le nom correspondant. J’y notais par exemple les indications plus qu’hasardeuses sur des lieux d’habitation46 des personnes interrogées, qui étaient supposés me servir d’indices pour trouver leur logement au milieu de champs de canne ou tout au fond du haut d’un morne :

46 Le terme est employé ici comme synonyme du mot « maison » contrairement à habitation (en italique) que l’on pourra retrouver dans ce mémoire qui désignait, aux Antilles et en Guyane, une exploitation sucrière de canne à sucre.

106

« Sortir de Vieux-Fort. Prendre à droite au manguier. Remonter la côte qui est toute à droite de la patte d’oie. Passer la résidence « Les hibiscus ». Lorsque je vois deux vaches attachées au bord de la route, prendre le petit chemin étroit en terre. Faire 400 mètres et c’est la maison aux volets bleus avec un champ de canne à côté » (extrait d’un de mes carnets de terrain).

Mes carnets de terrain m’ont servi de façon très inégale. J’entends par là qu’à certains moments, je les ai énormément remplis, notamment lors de semaines où j’avais beaucoup d’entretiens ou de rendez-vous. Ils me servaient à d’autres moment de livre de synthèse pour consigner tout ce que j’avais pu voir ou rencontrer. Je les utilisais aussi parfois comme pense-bête : « penser à reprendre la phrase de Jacqueline sur le Vaudou dans l’enregistrement pour entretien suivant » (extrait d’un de mes carnets de thèse).

Pour la rédaction de cette thèse, j’ai relu ces carnets, et j’aime aujourd’hui voir le chemin parcouru entre les premières idées proposées, les « pistes à suivre », et mes résultats de fin de thèse, certains commentaires me faisant encore sourire.

3-2- Le travail d’archives

Pour mieux appréhender les récits des personnes enquêtées et contextualiser l’analyse des témoignages récoltés, un travail d’archives sur les catastrophes passées était nécessaire ; il s’est déroulé en plusieurs phases. Tout d’abord, en première année, j’ai effectué des recherches aux archives de la Bibliothèque Nationale de France (BNF), à Paris. J’y ai surtout étudié la presse locale : Le France-Antilles de Martinique et de Guadeloupe et le Nouvelliste pour Haïti. J’ai également travaillé sur la presse nationale et internationale : le Monde, Time magazine, Le courrier International, Géo magazine, etc.

Un long travail de recherche a été nécessaire pour les catastrophes du début du XXème siècle, notamment l’éruption de la Montagne Pelée de 1902, et le cyclone de 1928 en Guadeloupe.

Les articles de presse étaient recensés sur des bobines numérisées, qu’il a fallu commander au préalable. Pour certaines catastrophes plus récentes, comme le séisme haïtien de 2010, j’ai pu effectuer les recherches directement sur internet et m’appuyer sur des sources plus diversifiées (films amateurs, photographies amateurs ou professionnelles, reportages, documentaires, etc.).

Dans un deuxième temps, lors de mes terrains, je me suis rendue aux archives départementales de Martinique et de Guadeloupe. J’ai pu découvrir des documents spécifiques à chaque île et inaccessibles dans les archives nationales comme celles de la BNF.

J’ai notamment trouvé un fond d’archives photographiques du cyclone de 1928 en Guadeloupe. Je suis également allée dans différents musées, comme le musée régional d’histoire et d'ethnographie de Martinique et le musée des volcans à Morne-Rouge, qui possédaient eux aussi d’importants fonds d’archives. J’y ai découvert de nombreux documents sur les catastrophes naturelles passées dans l’île, notamment un fond d’archives photographiques et scientifiques datant de l’éruption de 1902.

Enfin, une fois mes terrains terminés, je suis retournée à la BNF pour compléter mes résultats par des recherches complémentaires ciblées.

3-3- La littérature grise

J’ai essentiellement travaillé sur des rapports de préfecture, de ministères, mais aussi d’organismes tels que la DEAL47, l’ADEME48, ou encore d’ONG telles que la PIRAC49, la Croix-Rouge internationale ou Coopi50. J’ai lu l’intégralité des plans de prévention des risques naturels (PPRN) et les plans de mise en sûreté face aux risques majeurs (PPMS), les DICRIM (document d'information communal sur les risques majeurs) et les plans communaux de sauvegarde (PCS) existant dans les mairies de Guadeloupe et Martinique.

L’ensemble de ces informations m’a permis d’acquérir une bonne connaissance des terrains et d’avoir une vision générale des dispositifs de prévention et de gestion existant (ou non) sur chaque île. J’ai ainsi pu les mettre en regard avec les questionnaires et les entretiens, en particulier pour analyser les connaissances (ou l’absence de connaissance) des risques, et les comportements préventifs des habitants.

47 DEAL : Direction de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement.

48 ADEME : Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie.

49 PIRAC : Plateforme d’Intervention Régionale Amériques Caraïbes.

50 Il s’agit d’une organisation non gouvernementale italienne créée en 1965 visant « à briser le cycle des pauvretés et à accompagner les populations touchées par des guerres, des crises socio-économiques ou des catastrophes naturelles vers un redressement et un développement pérenne, grâce au professionnalisme des opérateurs locaux et internationaux et au partenariat avec des entités publiques, privées, et de la société civile » (Source : site internet www.coopi.org/fr).

108

3-4- L’observation participante et non participante

J’ai également mené des observations participantes, en visitant les sites de catastrophes naturelles avec des groupes de touristes : visite de la ville de Saint-Pierre et de la Montagne Pelée, excursion au sommet de la Soufrière, visite de la commune de Terre-de-Haut aux Saintes (île touchée par le séisme de 2004), de la savane des esclaves et de la Pagerie aux Trois-Îlets en Martinique, de l’Habitation Clément et du centre de Découverte des Sciences de la Terre, également en Martinique, des distilleries au sein des deux DROM (Clément, Trois Rivières et Saint-James pour la Martinique et Damoiseau et Bielle en Guadeloupe). Ces visites ont été importantes parce qu’elles m’ont permis de rencontrer des gens qui ont pu, ensuite, me mettre en relation avec des habitants de l’île, ou qui m’ont transmis de nombreux éléments sur l’histoire de mes terrains d’étude. Je donne ici deux exemples. J’ai eu la chance de rencontrer Sylvie Sainte-Agathe, guide conférencière, au musée régional d’histoire et d'ethnographie de Martinique qui m’a donné accès à un très grand nombre d’archives du musée. Elle m’a aussi permis de rencontrer une guide conférencière de la ville de Saint-Pierre, Noémie P., grâce à qui j’ai pu découvrir en détail l’histoire de la ville de Saint-Pierre depuis sa création. L’ensemble de ces documents et témoignages m’ont permis de retracer la trajectoire de résilience territoriale de la ville depuis la catastrophe du 8 mai 1902 jusqu’à nos jours. Si je n’avais pas eu ces informations trouvées au sein de ces archives, je n’aurais jamais pu réaliser la première partie de cette thèse. Ces visites, combinées aux entretiens avec les guides professionnels de ces sites, m’ont enfin permis de mieux appréhender la mise en récit officielle des catastrophes passées et de les confronter, plus tard, aux récits individuels.

J’ai également participé en Guadeloupe à plusieurs activités de l’association de la maison des Aînés de Basse-Terre. Souhaitant rencontrer des personnes ayant vécu la crise de la Soufrière en 1976, j’ai contacté différentes associations de retraités situées aux abords du volcan. J’ai ainsi pu rencontrer Mme Édouard, responsable de la maison des aînés de Basse-Terre, qui m’a autorisée à prendre part aux différentes activités de l’association. Je suis donc allée chaque semaine aux ateliers « chorale » et « Majong-belote », afin d’y rencontrer les participants.

Grâce à ces échanges, j’ai pu établir une première relation de confiance qui a conduit les Basse-Terriens à me raconter leurs expériences des catastrophes passées. Au fur et à mesure de nos échanges, certains me conseillaient de rencontrer telle ou telle personne ayant vécu ou

participé activement aux évacuations consécutives de la crise de la Soufrière de 1976. Ces conseils et suggestions m’ont été précieux, et m’ont permis d’élargir le panel de personnes interrogées ayant vécu une ou plusieurs catastrophes dans leur vie.

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 105-110)