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Reconnaître le postulant : moyens d’enquête

PARTIE I « Purger le palais » : le pouvoir de dire sa compétence

Chapitre 3 Reconnaître le postulant : moyens d’enquête

Reconnaître le postulant : moyens d’enquête

La recherche se heurte à un problème de taille qui ne pourra jamais être complètement résolu. La source ne dit pas ce qui était évident pour les commissaires eux-mêmes, soit le caractère irrégulier des postulations qu’ils poursuivaient. Alors que les manipulations les plus raffinées échappent à la consignation, appartenant aux plus rusés des praticiens qui ont su se soustraire à l’autorité de la communauté, les formes qui apparaissent les plus banales, parce que récurrentes, résistent de même à une explication parfaitement intelligible. Cela étant, il est possible de s’en approcher, parfois au plus près. Si le détail et l’appréciation des preuves appartiennent au silence des délibérations, la commission a développé un dispositif de surveillance, d’identification et de contrôle qui trace les formes qu’a pu revêtir la postulation irrégulière et les silhouettes de ceux qui ont pu s’y livrer.

Les décisions statuant sur le sort des postulants et de leur procureur prête-nom demeurent généralement silencieuses quant à la manière de conduire les enquêtes. Le Recueil de règlements sur le fait de la postulation, publié en 1685, appelle une vigilance constante de la part des commissaires sans pour autant leur dicter de marche à suivre. L’arrêt du 6 mai 1670 prévoit des pouvoirs accrus en matière de surveillance, de saisie et d’examen des registres de procureurs soupçonnés d’avoir prêté leur nom, mais à l’exemple des règlements en matière disciplinaire dont l’observation est bien souvent inexacte, il importe de vérifier leur mise en œuvre. Pour accéder à l’enquête et en souligner la progression, il n’est d’autre choix que de plonger dans l’ensemble des délibérations des registres. Les deux premières parties de ce chapitre mettront en scène la capacité des commissaires à reconnaître le postulant au moyen des dispositions de l’arrêt de mai 1670. L’idée n’est pas de savoir si les postulants sont coupables, ou non, d’avoir postulé, mais de comprendre comment la communauté a eu accès à l’information, comment elle l’a traitée ou vérifiée et ce qu’elle en a fait. En d’autres mots, comment la communauté s’est-elle approprié les moyens d’enquête ? Enfin, pour conclure, quel portrait du postulant les diverses enquêtes ont-elles dessiné ? Si tant est qu’il soit possible de le saisir, le postulant ne peut être dissocié de son processus d’identification, lequel va de pair avec la capacité des commissaires à le reconnaître.

Atteindre le postulant et ses papiers

La mise en accusation la plus fréquente s’appuie sur la suspicion que le postulant détient des papiers prouvant qu’il instruit lui-même une affaire à l’aide du ministère d’un procureur. Le postulant est désigné comme tel, car il est soupçonné de postuler, de poser les gestes réservés au procureur : « A esté arresté soubs le bon plaisir de la cour qu’il y a preuve par les pièces saisies sur ledit Durant et dont il s’est trouvé saisi que ledit Durant a postulé et fait la fonction de procureur aux affaires pour la communauté des brodeurs et autres que ledit Sauvage a favorisé laditte postulation et presté son ministere audit Durant dans lesdites affaires1». Pour mettre au jour les gestes des postulants copiés sur ceux des procureurs et en saisir les témoignages écrits, condition nécessaire à toute instruction éventuelle, la commission établit un système de surveillance aux ramifications parfois inattendues.

La naissance du soupçon

Le traitement de l’information acheminée vers la commission dessine une première manifestation du contrôle qu’entend exercer la communauté sur son privilège. Dès le début du XVIe siècle, les règlements encourageaient les procureurs à dénoncer ceux des leurs qui se rendaient coupables de prêter leur ministère aux solliciteurs2. Dans le même esprit, la préface du Recueil de 1685 exhorte les commissaires de la Chambre de la postulation à dénoncer leurs confrères : « Bannissez de vos cœurs les sentimens de compassion pour vos Confreres qui se trouveront convaincus, puisque ce sont les seuls autheurs 3 ». Les procédures engagées contre les postulants et leurs procureurs « adhérents 4» reposent donc d’abord sur la dénonciation et le soupçon. Or, les circuits qu’ils empruntent restent le plus souvent

1 AN X5b 17, 18 août 1685.

2 BnF, F-21746, Extrait d’un arrest de la Cour, contenant Reglement pour les Avocats et Procureurs d’icelle,

18 décembre 1537, dans Recueil sur le fait de la postulation, 1685, p. 5-10 : « Enjoint pareillement ladite Cour à tous les Procureurs de leur Communauté, en vertu du serment qu’ils ont fait à leurs receptions en ladite Cour, & sur peine d’estre reputez infracteurs d’iceluy, & d’amende arbitraire, faire sembleables revelations & denonciations à ladite Cour, ou à ses Commissaires qui seront par elle deputez ». p. 8 pour la citation. Annexe A

3 BnF, F-21746, Recueil sur le fait de la postulation, 1685, p. 4, Annexe A.

4 Formule utilisée par les commissaires eux-mêmes pour désigner les procureurs qui prêtent leur nom : AN, X5b

17, 13 septembre 1670 : « l’on pouvoit espérer toutte justice contre les postulants et procureurs adhérans » ; 29 novembre 1670 : « s’appliqueront de trouver bon que la recherche des postulants et leur adhérant soit continuée ».

méconnus ; simplement mentionnés, mémoires et plaintes ne laissent échapper aucun détail de leur contenu. D’autres indices relatifs à la surveillance comblent cependant ces lacunes.

Plaintes et dénonciations

Une affaire débute généralement par une dénonciation selon laquelle un particulier postule : « Sur ce qui a esté représenté par M. Percheron ancien commissaire qu’il luy a esté mis entre les mains un advertissement que les nommés Delamarche cy-devant procureur en la cour et Aleaume postulent journellement et font plusieurs affaires qu’il est nécessaire d’y pourvoir 5». En l’absence de registres de délibérations de la communauté, il est difficile de savoir si les dénonciations transitent d’abord par la communauté avant d’être acheminées à la Chambre de la postulation, comme le suggère une délibération du 15 mai 1671 où le commissaire a été averti qu’ « il y a des plaintes en la communauté » contre « le nommé Gontier soliciteur postulant auquel M. Marquis procureur preste son nom ». Non seulement le circuit est obscur, les plaignants n’ont le plus souvent pas de visage :

« M. Legrand [commissaire] a dit qu’il avoit esté informé qu’un nommé Bailly postuloit soubs la facilité que luy en donnoit Monsieur Leprieur procureur 6». « Sur ce que M. Delachy [commissaire] a représenté qu’il a esté adverty qu’il y a plusieurs papiers chez le nommé Caron postulant qui demeure rue Saint Martin 7».

« Sur ce que M. Borton[commisaire] a remonstré, avoir appris que les nommés Belot, Cherny et Lemesle font la postulation 8».

La dénonciation demeure néanmoins le plus souvent rapportée sans l’ombre d’un intermédiaire : « Delachy a représenté à la compagnie qu’un nommé Chappelle postule ouvertement, que c’est M. Mauger qui signe pour luy9 ». À l’occasion, enfin, le soupçon naît de mémoires remis à la commission sans que les auteurs ne soient dévoilés : à l’un des commissaires « a été donné memoire contenant que le nommé Bouzeray faict des affaires au pallais et fait la postulation10». Le réquisitoire attribué à Pierre Delachy en 1670 où il était

5 AN, X5b 17, 12 août 1684. 6 AN, X5b 17, 22 avril 1671. 7 AN, X5b 17, 15 mai 1671. 8 AN, X5b 17, 26 mars 1672. 9 AN, X5b 17, 16 décembre 1671.

10 AN, X5b 17, 7 août 1697. Autres exemples : AN, X5b 17, 30 mars 1697, le commissaire Baudin « a recu deux

proposé « de nommer tel nombre de Procureurs qu’il sera jugé à propos, pour recevoir les memoires & plaintes contre lesdits Postulans & Procureurs 11» a donc été suivi d’effets, mais dans le plus grand silence.

Il est toutefois un type de plaignant qui brise l’anonymat et qu’il est aisé de reconnaître : le procureur. Si le rôle de dénonciateur dévolu aux commissaires est attendu, il surprend lorsqu’il est endossé par des procureurs non députés à la charge de commissaire : « Sur ce que monsieur Loyseau procureur [non commissaire] est venu à la compagnie dire qu’il a dans sa maison un coffre appartenant à un clerc qui a demeuré chez lui et qui en est sorty depuis peu dans lequel coffre il asseure la compagnye qu’il y a des papiers de postulation qui sont signez de M. Lejongleur procureur 12 ». La dénonciation entre confrères assure ainsi à la compagnie une surveillance accrue qu’elle ne pourrait elle-même mener. Non seulement les procureurs se prêtent au jeu, l’un d’entre eux va jusqu’à proposer son aide à la commission : « Sur ce que M. Creuset procureur est venu à la compagnie dire qu’un nommé Bretry postule ouvertement, sayt sa demeure et que s’y la compagnie veult commettre quelqu’un de messieurs pour aller faire saisir et enlever les papiers dud. Bretry qu’il les accompagnera13 ». Les procureurs se saisissent avec aisance de la nouvelle structure si bien qu’au-delà de la dénonciation il n’est pas étonnant de lire des formes d’instrumentalisation des procédures de la commission par volonté de gagner du temps : « ayant ensuite apporté lesd. pieces à la compagnie où elles ont été examinées, on n’y a trouvez aulcune marque de postulation, et au contraire on a reconnu que cette saisye ne s’est faite que pour retarder la taxe des despens »14. L’espace de dénonciation récemment ouvert et assuré par une commission stable encourage certains procureurs à y participer de leur plein gré.

a dit qu’il luy a esté mis es mains un memoire concernant le nommé Royer procureur de la massonerie qui fait la postulation ».

11 BnF, 4-LF49-52, Extrait des registres de la Communauté des Advocats & Procureurs de la Cour, du 23

Janvier 1670. p. 5. Annexe C-7.

12 AN, X5b 17, 27 novembre 1674. Autre exemple du 18 août 1676 : « M. Dorigniere, procureur, est venu à la

compagnie dire qu’un nommé Beauregard postule ouvertement ».

13 AN, X5b 17, 18 juin 1675. 14 AN, X5b 17, 8 octobre 1675.

À la suite d’une dénonciation, la commission délibère sur la pertinence de procéder à une saisie ou d’« informer plus amplement 15». Avant de « faire saisir et enlever les papiers » de la postulation d’un « nommé Darras clerc de M. Bertrand procureur », il est « arresté que Messieurs Jullien et Contet [commissaires] s’informeront s’y Darras postule, et où peuvent estre lesd. papiers de sa postulation16 ». De la même façon, il faut s’employer « à convaincre lesd. Cousin, Couppy et Ravé du fait de la postulation 17» avant de décider de lancer une saisie. Quand la décision de faire saisir les papiers du postulant l’emporte, deux ou trois commissaires sont nommés avec un huissier du Parlement pour effectuer la saisie. Le succès de celle-ci repose cependant sur l’information dont disposent les commissaires relativement aux domiciles des suspects. Tandis que les commissaires bénéficient des listes de 400 procureurs contenant noms et adresses de leurs confrères, ils doivent faire « leur possible pour descouvrir la demeure 18» des postulants. Face à ce déficit d’information s’impose rapidement le recours à des hommes de main :

Sur ce que Pallu a représenté qu’il seroit necessaire de faire saisir les papiers du nommé Guillerin postulant, et les faire enlever pour empescher sa postulation, mais qu’il ne sayt sa demeure et que tous messieurs de la compagnie ont dit ne la point scavoir.

A esté arresté que l’on fera suivre Guillerin pour apprendre sa demeure et que lorsque l’on la saura l’on fera saisir et enlever les papiers, […]19.

Dès 1672, les nécessaires filatures commandent « d’avoir 2 ou 3 hommes pour suivre ceux qui sont accusés de postulation, à l’effet d’apprendre les demeures affin que l’on puisse facilement faire saisir et enlever les papiers de la postulation, ausquels hommes on donnera quelque argent lors que l’on fera les saisies par leur moyen20 ». Vraisemblablement motivé par l’exigence d’efficacité, l’ordre est suivi puisque le concours de mouchards au

15 AN, X5b 17, 29 mars 1678 : « Sur l’advis donné par M. Drouart de la postulation du nommé Ouallet sous le

nom de [blanc]. A esté arresté que Drouart prendra soin de s’en informer plus amplement ».

16 AN, X5b 17, 30 avril 1672.

17 AN, X5b 17, 22 avril 1671. Autre exemple du 29 juillet 1672 : « Sur ce que M. Delabarre a representé qu’il a

esté adverty qu’un nommé Lahoussage qui demeure proche notre-dame postule, et qu’il seroit à propos de s’en informer particulièrement pour y donner ordre si cela est véritable ».

18 AN, X5b 17, 19 août 1671. Le 5 mars 1675, avertie qu’un nommé Potot postule rue du Roy de Sicile, la

compagnie charge le commissaire Nezan de s’informer « qui est Potot et du lieu où sont ses papiers ». Une semaine plus tard, Nezan « s’est enquis du nommé Potot » et « a appris qu’il demeure en la rue du roi de Sicille en la maison ou pend pour enseigne les deux anges et postule ».

19 AN, X5b 17, 12 décembre 1671. 20 AN, X5b 17, 15 juillet 1672.

fonctionnement de la commission est attesté quelques années plus tard lors d’une contestation qui s’élève au sujet de la rémunération de l’un d’entre eux :

Sur ce que Delachy a remonstré que l’homme qu’il envoye ordinairement dans les maisons des postulants pour descouvrir les lieux où ils renferment les papiers ne veult plus y aller s’y l’on ne le paye de ses peynes.

Arresté que lors que le particulier aura esté deux fois chercher les postulants qui luy seront indiquez on luy donnera une pièce de trente sols et que quand il aura trouvé un postulant sur lequel il y aura des papiers enlevez on luy donnera un escus21.

Une délibération de 1692 confirme que les mouchards assurent toujours leurs services auprès de la commission22. Ce travail est essentiel, car il permet de reconnaître les cachettes les plus insolites :

Sur le rapport de M. Delafouasse le j. de la postulation de Scoliege sur l’advis qui a esté donné que led. Scoliege continuoit la postulation et qu’il y avoit une porte soub la tapisserye comme si s’estoit une separation d’entrée d’une chambre en une autre dans laquelle il mettoit tous ses papiers.

A esté arresté que led. Lafouasse, M. Borderel et Leclerc se transporteront lundy six heures du matin en la maison dud. Scoliege se feront assister de quatre ou six archers23.

Enfin, les commissaires ne sont pas déchargés de tout travail ingrat puisqu’ils doivent assurer eux-mêmes la surveillance au palais à des postes bien précis.

L’établissement d’un dispositif de surveillance

Si les commissaires ne dressent jamais la liste des torts qu’ils recherchent, le dispositif de surveillance qu’ils établissent lève le voile sur les modes de reconnaissance du postulant.

Au palais

Il n’est pas un hasard de voir le soupçon naître au palais tant les occasions d’y échanger les pièces sont nombreuses. La circulation des pièces entre les mains des postulants, indice

21 AN, X5b 17, 30 avril 1675. Cinq mois plus tard, l’un des commissaires « sera pryé de donner un escus au

mouchard », AN, X5b 17, 23 septembre 1675.

22AN, X5b 17, 19 mars 1692. Roger Lambert se plaint « qu’il y a longtemps qu’il agist pour descouvrir les

postulants sans avoir receu despuis les vingt livres qui luy ont esté donnés par Mons. Bataillon ».

éventuel d’une clientèle personnelle, exige la nomination de commissaires à un poste de surveillance spécifique, la « fenêtre », que Charles Bataillard décrit comme « une baie ouverte dans un des murs de la grand’salle où les clercs et les procureurs retiraient les arrêts 24 ». Des commissaires sont commis « pour voir à la fenestre » et « y arrester les arrests que les postulans voudront retirer 25». La position stratégique que représente la fenêtre dans la capture des postulants se confirme : « Sur ce qui a esté représenté par M. Besnard l’un des commissaires commis à la fenestre des arrests qu’il a arresté deux arrests cottés de M. Chastillon le jeune […] entre les mains d’un solliciteur26 ». Un autre poste de surveillance est installé au greffe du contrôle des dépens : « […] M. Boisseau, Laurens […] nommez pour veiller au greffe du controlle des despens et à la fenestre ». La surveillance au palais donne encore l’occasion d’observer une forme bien particulière de la reconnaissance des postulants : la dissimulation vestimentaire.

Pour comprendre la portée d’une série de délibérations qui émaillent les registres de la Chambre dès 1671 relativement au port des toques par les clercs, il faut remonter à un arrêt du 1er avril 1659 intervenu pour mettre fin à plusieurs irrégularités commises par les clercs de procureurs au greffe des présentations27. Aux manquements observés répondent des indications précises sur l’ordre à suivre ; à l’observation stricte des horaires et de la tenue des cahiers succède une matière qui s’invitera dans les registres de la postulation :

Et par ce que plusieurs désordres surviennent journellement par l’introduction & tollerance des clercs postulans & solliciteurs, qui abusent du nom des procureurs dont les principaux clercs de leurs estudes ne sont pas cognus.

La Cour ordonne qu’à l’advenir les principaux clercs des procureurs seront obligez d’estre vestus modestement & dans le Palais porteront Tocques avec l’habit & manteau noir, sans pouvoir porter de rubans de couleurs.

Deffenses à tous clercs et commis aux greffes civil et criminel de reconnoistre pour l’expedition des affaires qui leurs seront commises, autres que les

24 BATAILLARD, Histoire des procureurs…, op. cit., t. 1, p. 37-38. 25AN, X5b 17, 28 février 1680.

26 AN, X5b 17, 6 avril 1680. Suite et fin : « A esté arresté que M. De Bury et M. Thieriat [commissaires] se

transporteront présentement en l’estude dud. Chastillon le jeune pour scavoir si sur ses registres d’assignations, produits et conclus il est fait mention du nom des parties mentionnées es d’arrests ».

27 BnF, F-23669 (588), Extrait des registres de Parlement (1er avril 1659) : « Ce jour sur la plainte faite par les

Procureurs de Communauté en présence des Gens du Roy, de ce que dans le Greffe des Presentations, il se commet plusieurs abbus et malversations par des clercs ; qui n’ont aucun serment à justice, au prejudice des arrests et reiglemens, et de ce qui s’est de tout temps observé ».

Procureurs ou leurs principaux clercs, ausquels pourront estre deslivrées les expéditions, qui le doivent etre pour l’instruction des affaires.

Et afin qu’il ne puisse y avoir aucune fraude, deffence sont faites à tous procureurs de signer pour aucuns solliciteurs & postulans, à peine d’interdiction & aux solliciteurs à peine de prison.

Deffences au controlleur & commis à la Fenestre de deslivrer aucuns Arrests executoires de despens & d’autres actes à autres qu’aux Procureurs & leurs principaux clercs, portans Tocques ; à peine d’en respondre en leur propre & privé nom, des dommages & interests des parties, & de vingt quatre livres parisis d’amande.

Voilà que se dessine la manière dont les solliciteurs ou postulants peuvent opérer. Il leur suffirait de porter une toque pour se confondre avec le clerc de procureur qui exerce la principale charge de l’étude. Cette toque distingue donc le principal clerc qui a droit de mener une série d’actes pour son procureur du reste des clercs de l’étude. Or, les principaux clercs ne veulent pas porter leur toque. Pour en connaître l’explication, il faut nous reporter à un autre arrêt prononcé le 19 août 1661 :

La Cour par son arrêt du premier Avril 1659 entre autres choses auroit ordonné qu’à l’advenir les principaux Clercs des Procureurs seroient obligez d’estre vestus modestement, & dans le Palais porteroient Tocques, avec habits & manteaux noirs, sans pouvoir porter rubans de couleurs ; defenses aux Solliciteurs ou autres gens d’affaires de la pouvoir porter, & ausdits Clercs de le souffrir, ains d’en faire plainte au Parquet : L’execution dudit Arrest est retardée, sur ce que les Officiers de la Bazoche pretendans qu’à eux privativement aux autres principaux Clercs, appartient de porter Tocques de velours, pour marque de la jurisdiction qu’ils ont sur tous les autres Clercs, lesquels ne doivent porter que tocques de camelot, & au contraire lesdits Clercs pretendent leur estre loisible de porter Tocques de velours ou camelot, sans aucune distinction; ce qui pourroit causer grand désordre entre lesdits Clercs : A quoy est necessaire de pourvoir.