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2-1 Recommandations internationales

2-1-1 Recommandations de la Haute Autorité de Santé (HAS) 2010

La psycho-thérapie fait partie intégrante du traitement de l'anorexie mentale et doit être intégrée à la prise en charge multidisciplinaire. Cependant la HAS (45) met en garde contre le fait qu'elle ne peut à elle seule permettre un rétablissement. Les recommandations précisent également qu'elle n'est pas toujours envisageable au début du traitement notamment hospitalier lorsque la dénutrition est importante. C'est alors la prise en charge somatique qui s'avère prioritaire avec la renutrition. Ce temps de la prise en charge ne proscrit pas l'initiation de soins psycho- thérapeutiques puisque les auteurs préconisent alors un soutien psychologique ainsi qu'un travail sur l'adhésion aux soins, soit la construction d'une alliance thérapeutique et ce, même à un stade précoce et critique de la prise en charge sur le plan somatique. Ainsi le cadre posé est celui de soins psycho-thérapeutiques indispensables, mais insuffisants s'ils sont pratiqués de façon isolée. Concernant l'organisation de ces soins en hospitalisation, comme nous l'avons exposé dans la

partie Hospitalisation programmée les recommandations de la HAS s'appuient majoritairement sur le modèle d'hospitalisation français en recommandant une contractualisation des soins avec ou sans séparation, ainsi qu'une approche groupale associée à l'approche individuelle.

La nature des approches psycho-thérapeutiques recommandées est variée et les différentes thérapies sont jugées complémentaires. Elles peuvent prendre la forme de prises en charge individuelles, groupales et/ou familiales. Les approches recommandées sont : les thérapies de soutien, les psychothérapies psychodynamiques ou d'inspiration analytique, les thérapies cognitives et comportementales et les thérapies familiales systémiques. Le choix entre ces différentes approches n'est pas lié comme on peut le voir en pratique à l'abord théorique du service ou du thérapeute mais devrait selon les auteurs tenir compte du patient, de son âge, de son entourage, de sa motivation et du stade d'évolution de la maladie. Ainsi pour les enfants et adolescents, il s'agit des thérapies familiales qui sont recommandées avec un grade B de niveau de preuve scientifique d'efficacité. Les approches motivationnelles ont un intérêt en début de prise en charge. Par ailleurs, les approches corporelles et ateliers de médiation (musico-thérapie, art- thérapie) peuvent être associés à la psychothérapie.

L'association des familles (parents, fratrie, conjoint de patients adultes) aux soins psycho- thérapeutiques est également recommandée en fonction de l'âge du patient et des dysfonctionnements familiaux, sous forme d'entretiens familiaux, d'une thérapie familiale ou de groupes de parents.

Concernant la durée de la psychothérapie, elle est généralement de plusieurs années et est recommandée durant au moins 1 an après une amélioration clinique significative.

Les soins psycho-thérapeutiques doivent permettent de remplir une série d'objectifs individuels et familiaux qui sont identiques à ceux formulés par l' APA dans ces recommandations de 2006 (68) et cités ci-dessous.

2-1-2 Recommandations de l'American Psychiatric Association (APA)

2006

Les soins psycho-thérapeutiques sont abordés dans les recommandations de l' APA (68) au chapitre « Interventions psychosociales ». De façon générale ces interventions ont les objectifs suivants :

- Aider le patient à prendre conscience de son trouble et à coopérer à sa réhabilitation physique et nutritionnelle pour réduire le risque physique.

- Aider le patient à comprendre et modifier les attitudes dysfonctionnelles liées au trouble du comportement alimentaire pour encourager le gain de poids et tendre à une alimentation équilibrée.

- Améliorer ses relations sociales et interpersonnelles.

- Traiter les éventuelles comorbidités psychiatriques, le mode de fonctionnement des personnalités pathologiques et les conflits psychiques qui contribuent à renforcer ou à maintenir les troubles du comportement alimentaire.

Comme les recommandations du NICE (69), l' APA différencie les soins appropriés en fonction du stade et de l'évolution de la maladie (la phase aiguë qui correspond à l'hospitalisation, les soins après la restauration pondérale et l'anorexie dite chronique évoluant depuis plusieurs années).

A la phase aiguë de la maladie, lors de l'initiation de la renutrition, les recommandations consistent en une approche psycho-thérapeutique individuelle favorisant l'alliance thérapeutique et utilisant des techniques de soutien, d'encouragement et de renforcement positif des efforts faits pour reprendre du poids. Pour les patients réticents au traitement, des techniques motivationnelles sont utilisables sans qu'il existe de preuves solides concernant leur efficacité. Les auteurs rappellent que lorsque la dénutrition est trop sévère, la psychothérapie seule n'est pas recommandée bien qu'établir et maintenir une relation psycho-thérapeutique soit important et que des séances pour favoriser la motivation au changement puissent être bénéfiques. Lors de la phase aiguë la psychothérapie formelle reste d'efficacité incertaine et n'est pas recommandée. Cette inefficacité peut en partie être expliquée par les traits psychopathologiques présentés par les patients très dénutris, à savoir un négativisme, une certaine rigidité et une obsesionnalité marquée ainsi que par l'atteinte cognitive. Cette dernière est parfois présente en rapport avec une atrophie corticale. Les auteurs notent que l'expérience clinique montre souvent une amélioration de l'humeur et des processus de pensée du simple fait de la renutrition. La seule psychothérapie ayant démontrée une efficacité même lors de la phase aiguë, notamment chez les enfants et adolescents, est la psychothérapie familiale qui d'après plusieurs essais contrôlés randomisés est le traitement le plus efficace pour cette population.

L'implication des parents que ce soit par une thérapie familiale ou un traitement parental différencié de celui de l'enfant a montré de meilleurs résultats que lorsque les parents ne sont pas impliqués du tout. Le rôle des parents dans la prise en charge doit être encouragée par une attitude empathique, soutenante et déculpabilisante. Pour les patients hospitalisés une prise en charge courte des parents à type de groupe de psycho-éducation a montré la même efficacité qu'une prise en charge en psychothérapie familiale plus intensive. Pour les patients suivis en ambulatoire, cette prise en charge familiale courte peut s'avérer insuffisante à long terme notamment lorsqu'il existe des dysfonctionnement familiaux et que le patient souffre de troubles obsessionnels compulsifs.

Une fois la malnutrition corrigée et le poids restauré, la mise en place d'une psychothérapie s'avère nécessaire afin de prévenir les rechutes. L'APA relève alors des objectifs précis à cette

phase du traitement :

- Aider le patient à comprendre sa maladie.

- Aider le patient à reconnaître les distorsions cognitives qui ont conduit au trouble du comportement alimentaire.

- Analyser le développement du patient, son environnement familial et social avant la maladie. - Aider le patient à repérer le fait que le trouble ait été une tentative inadaptée de réguler et faire face à ses émotions.

- Aider le patient à limiter ou éviter le risque de rechute.

- Aider le patient à trouver d'autres moyens de faire face aux problèmes de la vie et à son avenir. Pour prévenir les rechutes, les psychothérapies recommandées sont les thérapies cognitives et comportementales mais également la thérapie interpersonelle et la psychothérapie psychodynamique individuelle ou groupale. Les données de la littérature font état selon l' APA de preuves modérées d'efficacité pour ces 3 types d'approches. Pour les enfants et adolescents, c'est la psychothérapie familiale qui est recommandée avec des preuves plus significatives d'efficacité. Par ailleurs, il est recommandé que le thérapeute prenne en compte les aspects développementaux et culturels du patient ainsi que la présence d'éventuels traumatismes psychiques.

Les auteurs précisent que bien que dans les études les psychothérapies soient étudiées de façon isolée, en pratique il existe souvent un chevauchement de différentes méthodes psycho- thérapeutiques. Les auteurs déplorent le peu d'articles contrôlés randomisés évaluant l'efficacité des différentes interventions psycho-thérapeutiques.

Les thérapies non recommandées sont celles qui se focalisent sur une abstention des conduites de purge, de l'hyperactivité physique et des crises de boulimie éventuelles sans prise en charge globale. De plus la participation à des associations de patients et à leurs activités ne peuvent à elles seules être considérées comme un traitement de l'anorexie mentale et ces associations ne doivent pas se substituer aux professionnels de santé.

Pour les patients souffrant d'anorexie chronique, un dispositif de soins psycho-thérapeutiques plus intensif peut être mis en place sans que son efficacité n'ait été démontré avec un niveau de preuve suffisant. Les auteurs insistent sur le fait que la chronicité du trouble doit amener les professionnels à prendre en compte la temporalité des soins qui peut être de plusieurs années avant une amélioration. Ils doivent aussi être attentifs à leurs contre-attitudes vis à vis du patient qui peuvent être de l'ordre d'un sentiment d'impuissance, un certain découragement ou un besoin

excessif de voir changer le patient.

patients et leur famille, dans la mesure où l'expérience clinique rapporte des cas de guérison après plusieurs années de troubles sévères.

Concernant les soins qui passent par des moyens de médiation tels que les ateliers thérapeutiques, les soins d'ergothérapie et de psychomotricité, les auteurs en reconnaissent l'utilité chez les patients ayant des difficultés à exprimer leurs affects. Mais l'efficacité de ces soins reste à démontrer par des études formelles.

Pour finir les recommandations de l' APA attirent l'attention sur le fait que comme toute intervention thérapeutique les psychothérapies peuvent avoir des effets indésirables auxquels les professionnels doivent être attentifs. Il s'agit principalement d'une augmentation des <<attitudes négatives>> du patient et/ou de sa famille vis à vis du thérapeute et des professionnels de santé en général, qui peut amener à un arrêt des soins et à la réticence à reprendre un suivi. Il s'agit également du risque de perte de temps par une approche inadaptée au patient et enfin du risque d'un coût des soins importants pour des résultats peu significatifs. Afin d'éviter ces effets les auteurs recommandent d'étudier minutieusement le cas du patient et son niveau de motivation au changement avant de lui proposer l'approche thérapeutique qui lui sera la plus adaptée. Il est conseillé également d'avoir une attitude soutenante vis à vis du patient et d'être attentif à ses attitudes face au traitement proposé, de surveiller la qualité de la relation thérapeutique et de repérer les patients pour qui d'autres interventions associées ou non à la psychothérapie sont nécessaires.

2-1-3 Recommandations du National Institut for health and Clinical