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Rappel des objectifs et hypothèses

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 164-175)

Problèmes de perception des distances en RA

IHM Sup. à

8.2.1.1 Rappel des objectifs et hypothèses

L’objectif de cette expérimentation est de tester et, le cas échéant, de valider le protocole qui sera utilisé dans l’expérimentation 2. En effet, avant de pouvoir tirer toute conclusion sur l’effet de la dominance oculaire et du feedback sur la perception des distances en RA, il convient de s’assurer que notre dispositif expérimental permet bien de recueillir les distances perçues par les participants. Ainsi, il est nécessaire de vérifier si notre protocole permet de distinguer des différences dans les performances d’estimation qui soient uniquement liées aux variables indépendantes du protocole 2. Pour cela, nous souhaitions comparer notre condition expérimentale de référence (RA) à une situation témoin (réel).

De plus, comme expliqué dans l’introduction, nous cherchons aussi à vérifier le type de tendance suivi par les estimations. La littérature rapporte une tendance générale à la sous-estimation des distances ainsi qu’une dégradation croissante de l’estimation avec la distance et, d’autres, rapportent même un changement de tendance autour de 23m.

Par ailleurs, afin de s’assurer que l’action de déplacement de l’objet effectuée par le sujet n’introduit pas un biais dans le protocole (feedback indirect), nous avons choisi de contrôler cet aspect. Pour cela, nous avons introduit une nouvelle variable aléatoire, « position de départ », qui peut prendre deux valeurs : proche ou éloignée. Dans le premier cas, le point de départ de l’objet se situera au niveau du marqueur (soit 3m devant le participant et 5m avant la première distance cible), et dans le deuxième cas, l’objet apparaitra à 38m du sujet, (soit 5m derrière la dernière distance cible). De plus, la vitesse de déplacement de l’objet virtuel est modifiée à chaque essai (tir aléatoire parmi cinq vitesses). De cette manière, le temps de déplacement de l’objet ne peut être un indice sur la distance, obligeant ainsi les participants à effectuer la tâche seulement par leur perception visuelle.

163 8.2.1.2 Méthode

8.2.1.2.1 Participants

Dix personnes (5 H, 5 F) ont participé bénévolement à cette expérimentation.

Elles étaient âgées de 18 à 32 ans (M =23.9) et avaient toutes une vue normale sans correction ou avec lentilles de contact. Aucune d’elles n’était familière du port de HMD ni de système de RA.

8.2.1.2.2 Matériel et tâche expérimentale

Les participants devaient effectuer une tâche de correspondance perceptuelle qui consiste à positionner un objet (soit réel, soit virtuel) jusqu'à une distance matérialisée par un repère réel. L’environnement de test est constitué d’un couloir dans lequel sont disposées cinq boîtes en carton rouges de dimension A3 portrait (297 mm x 420 mm). Chaque repère (boîte) est positionné à une des cinq distances cibles (8m, 15m, 23m, 28 m et 33m). Au début de chaque essai, l’expérimentateur indique au participant au niveau de quel repère il devra positionner l’objet. Ce dernier était assis sur une chaise à une extrémité du couloir, il déplaçait directement l’objet virtuel (condition RA) à l’aide d’une souris d’ordinateur, et déplaçait indirectement l’objet réel en indiquant à l’examinateur où le positionner (condition « réel »).

Quelle que soit la condition expérimentale, l’utilisateur perçoit l’environnement via l’utilisation d’un HMD Vuzix WRAP 920AR de type binoculaire VST présenté dans la figure suivante.

Figure 59 : Illustration du restituteur Vuzix WRAP 920AR utilisé durant l’expérimentation.

Malheureusement pour des raisons techniques, la restitution de la RA sur un seul écran n’était pas possible, par conséquent, un des deux écrans était masqué afin que le système puisse être utilisé en monoculaire (devant l’œil directeur des sujets). Ainsi, dans les deux conditions expérimentales (réel et RA), le champ de vision ainsi que la résolution de la scène perçue sont donc identiques car limités par les caractéristiques de ce restituteur. Le HMD permet l’acquisition vidéo de la scène réelle via une caméra ayant une résolution de 640x480 et la restitue sur les écrans en 1024x768.

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Dans la condition RA, l’objet affiché est une chaise de couleur noire et de dimensions (40*40*80cm). Le système de RA employé s’appuie sur une technique de recalage par reconnaissance de pattern visuel (marqueur). Ici, il s’agit d’un marqueur plat carré de 80 cm de côté et est placé au sol, 3 m devant l’utilisateur. L’objet virtuel étant recalé dans l’environnement réel dans des dimensions spatiales identiques (1m virtuel équivaut à 1m réel), la distance le séparant du participant est donc connue et exprimée en mètres. Ainsi, pour chaque essai, le système enregistre la distance égocentrique finale (Distance placée).

Dans la condition réelle, le participant indique verbalement à L’expérimentateur le déplacement de l’objet à effectuer et dans ce cas, il s’agit d’une chaise de bureau classique. Lorsque le sujet juge la position satisfaisante, l’expérimentateur place une marque au sol qui permettra ultérieurement de mesurer la distance.

8.2.1.2.3 Déroulement

Il s’agit d’un protocole mixte (interindividuel et intra-individuel), où les sujets sont répartis dans deux groupes distincts. Les sujets du groupe 1 commencent en condition « Réel » puis effectue les 40 essais en condition « RA », et inversement pour le groupe 2 (RA puis Réel). Chaque sujet effectue toutes les conditions expérimentales. Les facteurs étudiés sont 1) la nature de l’objet à positionner (réel ou augmenté), 2) et la distance cible (8m, 15m, 23m, 28 m et 33m). Les données recueillies sont les positions finales de placement qui permettent d’obtenir la distance égocentrique entre l’utilisateur et l’objet (Distance placée). De plus, le Miles test a été utilisé pour déterminer l’œil dominant des participants, et donc choisir l’œil qui sera utilisé pour l’expérimentation. Les différentes variables étudiées sont résumées dans le tableau suivant :

Erreur signée Distance cible – Distance placée, en mètres

Erreur absolue |Distance cible – Distance placée|, en mètres

Tableau 24 : Description des variables de l’expérimentation 1.

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L’ordre des essais combinant distance, point de départ et répétition (40 essais) est le fruit d’un tri aléatoire informatique s’assurant qu’il n’y a pas deux tris identiques. Par conséquent, l’ordre des essais est différent pour chaque participant.

8.2.1.3 Résultats

Compte tenu du protocole expérimental, les données recueillies ont fait l’objet d’une analyse de variance pour modèle mixte à mesures répétées (ANOVA mixed design), avec comme variable interindividuelle le groupe (1 ou 2) et comme variables intra-individuelles répétées la phase (1 ou 2), la distance (8, 15, 23, 28 ou 33) et la répétition (de 1 à 8). Les variables dépendantes utilisées ont été l’erreur signée ainsi que l’erreur absolue.

8.2.1.3.1 Effet de la distance

Les résultats de l’ANOVA effectuée indiquent un effet significatif de la distance sur les erreurs absolues (F(4.224)=10.58, p <.001) et la taille de l’effet est relativement importante (Cohen’s f=0.38). On constate une augmentation de l’erreur moyenne en fonction de la distance, ainsi qu’une augmentation de l’écart-type comme le montre la figure suivante.

Figure 60 : Effet de la distance sur l’erreur absolue moyenne.

De plus, les tests de contraste indiquent des différences significatives entre la distance 8 et 15 (F(1.224)=11.24, p<.001), entre 15 et 23 (F(1.224)=13.88, p<.001) entre 23 et 28 (F(1.224)=12.89, p<.001) et entre 28 et 33 (F(1.224)=30.38, p<.001).

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Enfin, lorsqu’on considère la distance comme une variable d’échelle, on observe une relation linéaire significative avec l’erreur absolue (F(1.224)=314.87, p<.001).

8.2.1.3.2 Effet de la condition (réel vs RA)

Les résultats n’indiquent aucun autre effet principal, la variable Groupe (F(1.224)=0.60, p=.462) ainsi que la variable phase (F(1.224)=2.06, p=.188) ne présentent pas de différences significatives. Cependant, un effet d’interaction significatif est observé entre ces deux variables groupe et phase (F(1.224)=7.71, p=.024) et une taille d’effet moyenne (Cohen’s f=0.28).

Figure 61 : Effet d’interaction entre le groupe et la phase sur l’erreur absolue.

Comme le montre la figure précédente, les phases en condition RA du groupe 1 et du groupe 2 obtiennent des erreurs absolues moyennes (resp. M=1.5, ET=2.2 et M=0.9, ET= 1.1) supérieures à celles des phases en condition réelle (resp. M=0.4, ET=0.5 et M=0.6, ET= 0.6).

Ces observations sont confirmées par les tests de contraste qui révèlent que la condition « Augmentée » est différente de la condition « Réel » (F(1.224)=

204,28, p<,001). Cet effet est illustré dans la figure suivante.

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Figure 62 : Effet de la condition (réel VS RA) sur l’erreur absolue moyenne.

Par ailleurs, les tests post hoc révèlent aussi une différence significative (F(1.224)=188.58, p<.001) entre les résultats du groupe 1 phase 2 (RA) et ceux du groupe 2 phase 1 (RA). Ces résultats indiquent que les erreurs absolues moyennes en condition RA durant la phase 2 sont significativement plus importantes que durant la phase 1. Cependant, cet effet ne se retrouve pas dans la condition « réel » (F(1.224)=2.19, p=.1406).

Cela suggère un effet de la fatigue au cours de la durée du protocole provoquant une baisse des performances des sujets durant la deuxième phase.

Cet effet s’applique uniquement à la condition RA qui semble être plus gourmande en ressources attentionnelles que la condition « réel ». Cet effet est illustré par la figure suivante, où l’on constate que l’erreur moyenne augmente plus avec la distance pour la phase 2 du groupe 1 que pour la phase 1 du groupe 2.

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Figure 63 : Effet d’interaction entre la distance, la phase et le groupe.

Par ailleurs, les tests post-hoc révèlent un effet d’interaction significatif entre les facteurs groupe, phase et distance (F(4.224)=4.35, p=0.0064) qui traduit en partie l’effet de fatigue observé sur la condition RA mais aussi un effet d’interaction entre la condition (RA ou réel) et la distance.

8.2.1.3.3 Effet d’interaction distance et condition (réel ou RA)

Hormis pour la distance « 8m », les erreurs absolues en condition RA sont significativement différentes de celles de la condition réel pour toutes les autres distances.

Distance Réel RA df F P>F

8m 0.1 0.2 1 0.96 0.3272

15m 0.3 0.7 1 6.15 0.0139

23m 0.4 1.4 1 48.61 0.0000

28m 1.0 1.4 1 15.08 0.0001

33m 0.6 2.4 1 311.25 0.0000

Tableau 25 : Résultats des contrastes entre la condition réel et RA pour chaque distance.

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Figure 64 : Comparaison de l’erreur absolue en fonction de la condition et de la distance.

Ces différences sont illustrées dans la figure ci-dessus. On constate que l’erreur absolue est systématiquement supérieure en RA pour toutes les distances et augmente avec celle-ci.

170 8.2.1.4 Discussion

Cette première expérimentation a permis de mettre en évidence un certain nombre d’éléments quant à l’effet de la réalité augmentée sur la perception des distances. Tout d’abord, l’effet de la distance sur l’augmentation de l’erreur est cohérent de ce qui est observé dans la littérature et prouve que notre protocole permet de recueillir les distances perçues par les participants.

De plus, un effet significatif de la condition a été identifié indiquant que la perception des distances en condition RA dégrade les performances des sujets.

Ici, aussi, ce constat est semblable à ce qui est décrit dans la littérature et valide une de nos hypothèses initiales. Cependant, nos résultats ne permettent pas de déterminer le type de tendance des erreurs, nous ne pouvons mettre en évidence ni de sous-estimation ni de surestimation constante durant les essais.

De plus, les valeurs des erreurs commises en RA sont assez faibles (de 0.2m à 8m à 2.4m à 33m, soit de 2.5% à 7.3% d’erreur) comparativement à certaines études dans la littérature. Il semblerait donc que les indices de profondeur utilisés dans le protocole (taille relative, hauteur dans le champ visuel, taille familière et perspective de mouvement) ont permis de limiter le biais provoqué par la RA. Ce résultat est particulièrement intéressant dans la mesure où il indique que la perception précise des distances est possible en monoculaire et donc que la stéréoscopie n’est pas indispensable pour des applications à moyenne et longue distances.

Dans cette expérimentation, un restituteur de type video see-through a été utilisé dans les deux conditions (réel et RA). Les estimations des participants durant la condition « réel » sont plutôt précises (0.1m à 8m et 0.6 à 33m soit de 1.25% à 1.8% d’erreur) indiquant que ce n’est pas le restituteur lui-même qui induit les erreurs observées dans la condition RA.

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8.2.2 Expérimentation 2

8.2.2.1 Rappel des objectifs et hypothèses

Comme indiqué dans l’introduction, nous nous intéressons ici à l’impact de la cette expérimentation et à l’instar de l’expérimentation 1, tous les sujets avaient une vue normale ou corrigée à normal avec des lentilles de contact. Ils étaient âgés de 19 à 31 ans (M=22.4) et n’étaient pas familier de l’usage de HMD ni de systèmes de RA. En outre, aucune des personnes ayant participé à l’expérimentation 1 n’a participé à cette deuxième évaluation.

8.2.2.2.2 Matériel et tâche expérimentale

Le matériel et la tâche expérimentale sont identiques au protocole précédent, une des principales différences est, qu’ici, n’ayant pas de condition « réel », tous les essais seront effectués avec un objet augmenté (une chaise virtuelle) identique à la condition « RA » de l’expérimentation précédente. La deuxième différence majeure concerne le groupe « avec feedback », qui aura l’apparition du résultat de l’essai dans l’IHM de test lors de la validation du placement. Ce feedback se présentera sous forme textuelle en indiquant numériquement l’écart entre la distance placée par les sujets et la distance cible. Par exemple, si le participant positionne l’objet 3,5m avant la cible définie, le système affichera : « Erreur : -3.5 mètres. ».

8.2.2.2.3 Déroulement

Comme dans l’expérimentation précédente, il s’agit ici aussi d’un protocole mixte (inter et intra-individuel) où les sujets sont répartis dans deux groupes de taille identique, l’un avec la condition « feedback » (Groupe 1), l’autre sans (groupe 2). De plus, l’ordre de passation des essais en condition « œil directeur » (OD) et « œil non directeur » (OnD) a été contrebalancé. Dans chaque groupe, la moitié des sujets commence en condition « OD » puis effectue les 40 essais en condition « OnD», et inversement pour l’autre moitié des participants (OnD puis OD). Cela constitue donc deux sous-groupes dans chacun des groupes principaux.

Enfin, l’ordre des essais combinant distance, point de départ et répétition (40 essais) est le fruit d’un tri aléatoire informatique s’assurant qu’il n’y a pas deux tris identiques.

172 8.2.2.3 Résultats

Compte tenu du protocole expérimental, les données recueillies ont fait l’objet d’une analyse de variance pour modèle mixte à mesures répétées (ANOVA mixed design), avec comme variables interindividuelles le groupe (1 ou 2) et l’ordre (a et b), et avec comme variables intra-individuelles répétées la phase (1 ou 2), la distance (8, 15, 23, 28 ou 33) et la répétition (de 1 à 8). La variable dépendante utilisée a été l’erreur absolue. Des tests post-hoc ont été effectués dont des tests de contraste.

8.2.2.3.1 Effet de la distance

Les résultats de l’ANOVA révèlent un effet principal significatif de la distance (F(4.1072)=74.36,p<.001) et la taille de l’effet est importante (Cohen’s f=0.62).

On constate une augmentation de l’erreur absolue moyenne en fonction de la distance, ainsi qu’une augmentation de l’écart-type comme le montre la figure suivante. Ce résultat est cohérent de ceux obtenus dans l’expérimentation précédente.

Figure 65 : Effet de la distance sur l’erreur absolue.

De plus, les tests de contraste indiquent des différences significatives entre la distance 8 et 15 (F(1.1072)=6.74, p=.0095), entre 15 et 23 (F(1.1072)=24.69, p<.001) et entre 28 et 33 (F(1.1072)=23.02, p<.001). Cependant, il n’y a pas de différence significative entre 23 et 28 (F(1.1072)=2.37, p=0.1237) Enfin, lorsqu’on considère la distance comme une variable d’échelle, on observe une relation linéaire significative avec l’erreur absolue (F(1.1072)=235.56, p<.001).

173 8.2.2.3.2 Effet de la dominance oculaire

L’effet de la dominance oculaire est exprimé dans ce protocole par l’interaction entre la variable groupe, ordre et phase. Contrairement à nos hypothèses initiales, les résultats ne montrent pas d’effet significatif de ce facteur sur les performances des sujets (F(1.1072)=1.55, p=0.2304). Par conséquent, le protocole ne permet pas de mettre en évidence un effet de la dominance oculaire sur cette tâche d’estimation des distances.

8.2.2.3.3 Effet direct du feedback visuel final

L’effet du feedback visuel final est exprimé dans le protocole par la variable

« groupe ». Cependant, contrairement à nos hypothèses de départ, la présentation de ce dernier ne semble pas apporter un gain significatif sur les performances des participants. En effet, les résultats de l’ANOVA n’indiquent aucun effet significatif du groupe (F(1.1072)=3.45,p=0.0819).

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