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Influence des caractéristiques l’environnement

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 67-71)

3.4 LA PERCEPTION DES DISTANCES EN REALITE VIRTUELLE ET AUGMENTEE

3.4.2 Les causes de la sous-estimation des distances

3.4.2.3 Influence des caractéristiques l’environnement

Comme l’indique l’étude décrite précédemment, le type d’environnement semble avoir une influence sur la perception des distances. En effet, le phénomène de sous-estimation constaté est plus important dans les environnements purement virtuels, même si il est aussi présent dans certaines études en RA. Même si cet effet semble apparaitre dans les différents environnements, son importance n’est pas constante aux travers des différentes études. Certaines différences dans les protocoles expérimentaux doivent donc influencer l’intensité de la sous-estimation. La majorité des études étant différentes, il est donc difficile de comparer directement leurs résultats, de façon métrique. Cependant, les tendances observées de façon récurrentes peuvent raisonnablement être considérées comme généralisables. De plus, les variations de l’importance de cet effet doivent avoir des causes identifiables dans les écarts entre les études. Autrement dit, les différences dans les paramètres utilisés peuvent potentiellement faire apparaître les facteurs influençant effectivement la sous-estimation des distances.

L’objectif de cette section est donc de comparer les approches de ces études plutôt que simplement comparer les résultats obtenus.

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Tableau 4: Erreurs normalisées moyennes de différentes études (Jones, Swan Ii, Singh, Franck, & Ellis, 2009).

Typiquement, Jones et al. (2008) n’obtiennent pas de différence significative dans la précision d’estimation des distances entre la condition RA et la condition contrôle (réelle). Cependant, ils constatent tout de même une sous-estimation importante dans la condition RV. Suite à ces résultats surprenants, les auteurs ont reproduit l’expérimentation une nouvelle fois (Jones, Swan Ii, Singh, & Ellis, 2011) afin de vérifier si l’absence inhabituelle de sous-estimation en RA était due à un effet de transfert d’une condition expérimentale à une autre, au cours de leur premier protocole intra-individuel. Ils ont donc construit, cette fois-ci, un protocole de type interindividuel. Leurs nouveaux résultats indiquent toujours une absence de sous-estimation significative en condition RA, alors qu’elle est présente en RV, mais de façon particulièrement limitée.

Cependant, les auteurs constatent une amélioration des performances des sujets au cours des essais. Il semblerait qu’il y est un effet d’apprentissage permettant aux utilisateurs d’estimer de façon plus précise la distance au fur et à mesure de l’expérimentation, mais uniquement en condition réelle et RA.

Dans ces expérimentations, les sujets n’obtenaient pas de feedback explicites de leurs actions (ou du moins de leurs performances) mais l’amélioration, au cours du temps, semblerait indiquer qu’un feedback serait fourni par un aspect non contrôlé dans le protocole.

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Au vu de ce résultat, les auteurs ont développé une nouvelle expérimentation afin de mieux cerner ces causes. En analysant plus finement leur protocole, les auteurs ont identifié deux sources possibles de feedback indirect : 1) le retour proprioceptif de la tâche de blind walking lui-même durant le retour ou 2) les informations visuelles périphériques issues d’un espace entre le HMD et le visage des sujets. Cette troisième expérimentation vise donc à comparer l’impact de ces deux aspects sur l’estimation des distances en RV en comparant deux situations différentes où chacun des facteurs est isolé. Leurs résultats indiquent clairement que ce sont les informations visuelles périphériques qui sont la source de feedback indirect influençant les performances des utilisateurs durant leurs précédentes études. En outre, ce test ayant été effectué seulement en RV, les auteurs ont ensuite cherché à vérifier si cette source de feedback ne serait pas la cause de l’absence de sous-estimation significative en RA. Ils ont donc reproduit ce troisième protocole mais cette fois-ci dans la condition RA. Finalement, une fois privées des informations visuelles périphériques, les performances des utilisateurs chutent et les résultats mettent en lumière une sous-estimation significative et importante (75.9%). Mais le résultat le plus intéressant est que cette sous-estimation apparaît aussi dans le cas réel+HMD ce qui indiquerait que c’est l’environnement visuel ambiant et non l’objet virtuel en lui-même qui influe sur la sous-estimation des distances. Cela explique que les environnements augmentés souffrent moins de ce problème de sous-estimation que les environnements purement virtuels.

On trouve dans la littérature d’autres expérimentations qui ont directement comparé l’impact de ces différents environnements sur la perception des distances. Par exemple, Swan Ii et al. (2007) ont trouvé, dans leur seconde expérimentation, un effet significatif de l’environnement sur la précision des réponses des sujets. Toutefois, dans leur protocole, les auteurs ont utilisé un HMD au champ visuel assez réduit (27°x20°) qui de plus, était fixé à un support empêchant ainsi les sujets de déplacer leur point de vue et de bénéficier de la perspective de mouvement. La combinaison de ces deux aspects a pu induire la sous-estimation des distances, constatée ici même dans la condition réelle + HMD. Ce résultat est cohérent avec ceux de Wu et al. (2005) décrits précédemment.

De même, Jerome et Witmer (2008) ont obtenu des résultats similaires en comparant l’estimation d’objet réel et virtuel dans l’environnement réel. Les sujets estiment, de façon plus précise, la distance dans la condition réelle que la condition augmentée et ont tendance à sous-estimer de façon plus importante en RA. Cependant, après une analyse plus fine de leurs résultats, les auteurs concluent que cet effet est entièrement dû aux performances des sujets féminins sur cette tâche ; résultats qui ont d’ailleurs déjà été présentés dans la section précédente (3.4.2.2).

Dans un environnement réel, la présence d’éléments physiques peut masquer la position des éléments virtuels affichés. Par conséquent, ces éléments sont perçus en superposition de ces masques naturels même si leur position est potentiellement plus éloignée.

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Cette situation de « vision à rayon X » (Xray vision) peut avoir des conséquences sur la perception des distances car un conflit entre les indices de profondeur émerge alors. En effet, l’occlusion étant l’indice majoritaire quelle que soit la distance (Cutting & Vishton, 1995), si un objet est visible devant un autre, notre système visuel l’interprète comme étant plus proche. Cet effet de l’occlusion a été étudié dans la littérature et notamment par Ellis et Bucher (1994). Dans leur expérimentation, les auteurs ont montré que la présence d’un masque physique réel (occluder) dégradait les performances des sujets dans une tâche d’estimation de la distance d’un objet virtuel. En effet, les participants avaient tendance à sous estimer la distance de l’objet virtuel et notamment lorsque l’objet masquant était dynamique (rotation). Selon les auteurs, la présence du masque a contraint les sujets à faire le point sur l’objet dynamique, impliquant ainsi une modification d’un autre indice de profondeur, la convergence oculaire. Cette expérimentation ayant été effectuée à courte distance (entre 27 et 180 cm), cet indice avait donc une influence importante sur l’estimation des distances. Ces résultats se retrouvent aussi dans Ellis et al.

(1998), où les auteurs ont trouvé que la présence d’un objet interposé augmentait la sous-estimation des distances quelle que soit la condition de visualisation (monoculaire, bi-oculaire ou stéréo). Cependant, dans l’étude de Swan Ii et al. (2005), les auteurs ont, certes, trouvé un fort effet de l’occlusion sur les performances d’estimation des distances (augmentation d’environ 44%

des erreurs), mais seulement sur les erreurs absolues et non sur les erreurs signées.

Par conséquent, les auteurs n’ont pu conclure à une amplification de la sous-estimation mais seulement à une augmentation des erreurs. Un autre résultat intéressant de cette étude concerne un effet de la proximité entre les cibles (référents réel) et les murs du lieu de l’expérimentation. Les résultats indiquent une réduction des erreurs commises lorsque les cibles sont proches des murs ainsi qu’une atténuation de l’augmentation des erreurs en fonction de la distance. Les auteurs ne proposent pas d’explication spécifique à ce constat, mais supposent que les forts indices de perspective linéaire présents dans le couloir ont dû aider les participants à estimer les distances.

Afin de vérifier cette hypothèse, les auteurs ont effectué une expérimentation supplémentaire (Livingston, M. et al., 2009) permettant de comparer l’estimation des distances en environnement intérieur (Indoor) et en environnement extérieur (outdoor). Leurs résultats indiquent une différence significative entre les deux types d’environnement avec une tendance à la sous-estimation constante en intérieur et une surestimation en extérieur ainsi qu’une augmentation plus importante de l’erreur en fonction de la distance dans cette dernière situation. Ces résultats sont contradictoires avec ceux obtenus dans les mêmes conditions expérimentales dans l’étude de Swan Ii et al. (2006) où les auteurs ont constaté une inversion dans le sens de l’erreur vers 23 m, indiquant le passage d’une sous-estimation vers une surestimation. Ce résultat unique et particulièrement intéressant sera discuté plus en détail, ultérieurement dans ce document.

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Un autre facteur de l’environnement, qui est étudié dans la littérature, concerne l’impact de la luminosité et des ombres. En effet, même si ces aspects ne sont pas considérés par Cutting (2003); (Cutting & Vishton, 1995) comme des indices de profondeurs majeurs, d’autres auteurs ont étudié leur impact sur une tâche de perception des distances. Dans l’étude de Knecht et al. (2011), les auteurs ont évalué l’effet de différents modes de rendu graphique de l’élément augmenté (un cube) en s’appuyant sur l’illumination globale et les ombres. En résumé, le but de la tâche expérimentale consistait à déplacer un cube réel sur la position du cube virtuel ou inversement. Leurs résultats n’indiquent aucun effet significatif de ces variables sur les performances des participants.

Cependant, lors des entretiens post-tests, les sujets ont indiqué s’être appuyés sur l’occlusion pour effectuer la tâche plus que sur les effets lumineux. De plus, les auteurs ont identifié un certain nombre de biais expérimentaux dans leur protocole qui pourraient expliquer l’absence de différence entre les modes. Plus globalement, l’objectif de ces recherches était d’évaluer l’intérêt du photoréalisme en RA et notamment sur l’estimation de la profondeur, ce qui conduit finalement à s’intéresser à l’impact de l’élément virtuel lui-même sur la perception de sa distance.

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 67-71)