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B La radiosensibilité humaine

2) Radiosensibilité et réparation de l’ADN

La publication de la première liste des maladies génétiques radiosensibles (190) a permis de mettre en évidence le rôle essentiel de la signalisation et de la réparation de l’ADN comme facteur déterminant dans la radiosensibilité (189).

Globalement, toutes les études recherchant un lien entre réparation de l’ADN et radiosensibilité font ressortir deux voies majeures de la réparation. La première est la voie de réparation par suture non homologue (NHEJ) (191) qui peut mener à des défauts de sutures entraînant la mort cellulaire. Les défauts dans cette voie de réparation conduisent à une forte radiosensibilité. La NHEJ étant aussi impliquée dans la recombinaison V(D)J nécessaire à la formation des immunoglobulines, une forte immunodéficience peut aussi toucher les patients atteints de troubles dans cette voie de réparation.

La deuxième voie de réparation de l’ADN jouant un rôle dans la radiosensibilité est la voie de recombinaison homologue (191). Des défauts dans la HR auront un impact plus faible sur la survie cellulaire. Toutefois, un manque de contrôle de la recombinaison peut entraîner une instabilité génomique et donc une forte prédisposition aux cancers. Un dysfonctionnement de la recombinaison homologue peut aussi parfois induire une chimiosensibilité ou même une photosensibilité due à la redondance des acteurs protéiques du HR et de la conversion de dommages de bases en cassure simple brin.

77 radiosensibilité cellulaire (192, 193).

D’un point de vue moléculaire, la protéine Ku70, appartenant à la voie NHEJ joue un rôle fondamentale dans la radiocurabilité des tumeurs rectales (191). Un autre exemple a été apporté par Soderlund et al. (194) qui a démontré l’importance de l’intégrité du complexe MRN pour une bonne radiosensibilité cellulaire des tumeurs du sein. Des études récentes ont mis en évidence une association entre augmentation de l’expression de la protéine Ape1, ADN endonucléases bifonctionelles du BER et radiorésistance. A l’inverse, une diminution de l’expression de cette protéine entraîne une sensibilisation aux rayonnements ionisants des cellules des cancers colorectaux, du poumon et des ostéosarcomes (195).

Enfin, il a aussi été décrit que certains variant de XRCC1 pouvaient conférer une hyper- radiosensibilité (196, 197). Les variants de PARP1 quant à eux entraînent une radiosensibilité anormale. Une autre étude de ces SNPs (single nucleotid polymorphism) sur des patients traités en radiothérapie pour un cancer de la prostate a mis en évidence un lien entre polymorphisme et gravité des effets déterministes à long terme (198).

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Soixante-deux ans après la découverte de la structure de l’acide désoxyribonucléique (2), les nombreuses études toujours en cours démontrent plus que jamais le rôle central de cette molécule. Porteuse de l’information génétique nécessaire à la cellule pour son développement et son bon fonctionnement, la molécule d’ADN doit donc être protégée des attaques perpétuelles d’origines endogènes ou exogènes subies par l’organisme. Afin de contrer ces effets potentiellement dévastateurs, nos cellules ont développé un système de réponses aux lésions de l’ADN : la réponse aux dommages de l’ADN qui comprend l’activation des checkpoints du cycle cellulaire, la modulation de la transcription, l’apoptose et l’activation de la réparation de l’ADN. Chaque type de dommage mènera à l’activation d’une voie spécifique de réparation.

Laissant place à des dommages pouvant être convertis en mutations dans le génome, les déficiences au niveau des systèmes de réparation de l’ADN sont, bien souvent, associées à la cancérogenèse. De rares syndromes héréditaires associant forte prédisposition aux cancers et hypersensibilité tissulaire lors d’expositions a des agents génotoxiques, tels que les ultraviolets et les irradiations ionisantes, sont caractérisés par un défaut de gestion des lésions induites à I’ADN. C’est le cas de l’ataxie télangiectasie, une maladie génétique rare, se traduisant par une sensibilité extrême aux rayonnements ionisants. Causée par la mutation d’un gène clé dans la signalisation des réparations des cassures double brin de l’ADN, les cellules endommagées ne sont plus capables de restaurer leur ADN entraînant un nombre accrus de cancer.

Une autre maladie génétique rare à transmission autosomale dominante caractérisée par une hyper-radiosensibilité des cellules est le syndrome de Gorlin, aussi appelé nævomatose basocellulaire. Ce syndrome dont la prévalence est estimée à un individu sur 60000, est caractérisé par des anomalies du développement, une hyper-radiosensibilité et une prédisposition élevée à développer différents cancers dont les carcinomes basocellulaires. D’un point de vue génétique, ce syndrome est dû à une mutation du gène suppresseur de tumeur PTCH1, entraînant une activation aléatoire de la voie de signalisation sonic hedgehog, cruciale pour le développement.

L’objectif principal de ce projet de thèse est donc d’étudier l’effet de la dérégulation de la voie sonic hedgehog sur la réponse aux dommages de l’ADN afin de mieux comprendre les mécanismes cellulaires et moléculaires conduisant à une hyper-radiosensibilité et à une prédisposition élevée aux divers cancers chez les patients Gorlin.

Afin de répondre à cette question, nous avons travaillé avec des fibroblastes primaires issus de patients atteints du syndrome de Gorlin et de personnes saines. Dans un premier temps, nous avons testé les caractéristiques de résistance de ces cellules à plusieurs stress afin d’évaluer

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leurs pertinences en tant que modèle d’étude. Nous avons poursuivi ce travail par l’analyse transcriptomique de l’expression de certains gènes appartenant à la voie SHH afin de vérifier l’effet de la mutation du gène PTCH1.

Après l’étape de caractérisation du modèle, nous avons décidé d‘analyser la réponse de ces cellules à la voie de réparation des lésions oxydatives, le BER, au niveau basal et après des doses croissantes de rayonnements ionisants. L’expression des principaux gènes de cette voie sera étudiée et comparée à l’activité d’excision-resynthèse des petites lésions associées au BER. Enfin, cette voie étant notamment activée en réponse à la présence des espèces réactives de l’oxygène (ROS), nous avons décidé de tester le statut de la production de l’anion superoxyde, l’un des ROS les plus abondamment formés dans la cellule.

Dans un troisième temps, le symptôme de l’hyper-radiosensibilité étant dû la plupart du temps à des défaillances dans les systèmes de réparation des cassures double brin, nous avons décidé d’évaluer le statut de ces derniers, ainsi que du NER, dans les fibroblastes de notre étude. Nous avons donc comparé la modulation de l’expression des gènes du NHEJ, du HR et du NER entre la lignée normale et les lignées de fibroblastes Gorlin à un niveau basal et après l’application de différentes doses de rayonnements ionisants. La voie NER a aussi été analysée à l’aide d’une autre technique permettant l’étude de la réparation des dimères de pyrimidines.

D’autre part, après l’analyse des différentes voies de réparation, nous avons décidé de nous intéresser aux autres paramètres de la réponse aux dommages de l’ADN dont la signalisation des dommages ainsi que l’induction de la mort cellulaire programmée.

Enfin, une étude protéomique comparant la lignée normale à une lignée de fibroblaste Gorlin a été mené afin de comparer les différences d’expressions protéiques sans irradiations.

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