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AUX RACINES DU SPORT : JEUX DU CORPS ET EXERCICES PHYSIQUES AU MOYEN-ÂGE Ŕ JOUTES ET TOURNOIS DE L’ARISTOCRATIE Ŕ JEUX DU PEUPLE Ŕ

CALCIO FIORENTINO Ŕ JEU DE PAUME Ŕ LA PACIFICATION DES MŒURS CONTRE LES ENGAGEMENTS CORPORELS

Le Moyen-Âge est une séquence historique qui commence, ainsi le veulent les conventions historiennes, au Ve siècle de notre ère, avec la chute de l‟Empire Romain d‟occident, se clôt au XVe siècle, avec les grandes découvertes. Premier constat, le Moyen Age n‟est pas sportif, tout au moins dans le sens où nous l‟avons entendu jusqu‟ici. Il n‟est pas sportif non plus dans une continuité avec ce que nous avons vu pour le monde grec par exemple. L‟éducation physique y est peu apparente avant le 10e siècle. Dans le détail, on peut dire que c‟est la crise de l‟ordre carolingien, la débâcle de cette Europe que Charlemagne avait constituée au long de son règne, et l‟insécurité permanente qui en découle sous la pression des envahisseurs Huns, Vandales et Wisigoths qui va amorcer la dynamique qui nous intéresse29.

Au 9e siècle, les Carolingiens sont à la tête d‟un empire de près d‟un million de km2. Sans langue commune ni capitale unique, rassemblant des territoires disparates, cet empire, bien que ni centralisé ni unifié, est une incontournable réalité. Il correspond grosso modo à l‟ancien Empire romain d‟occident, à la Gaule, à l‟Italie septentrionale et centrale, ainsi qu‟à la Rhénanie et au nord-est de l‟Allemagne. L‟empire est d‟autant moins centralisé que son territoire n‟est pas unifié. Il se présente plutôt comme la juxtaposition d‟espaces politiques qui vivent chacun selon leur propre règle. Dans les faits, l‟organisation administrative de l‟empire repose sur un découpage en trois zones distinctes. Le noyau central est constitué des territoires entre la Loire et le Rhin qui forment le cœur du monde franc et du pouvoir carolingien, administré par des comtes nommés par le roi et responsables devant lui. C‟est dans cet espace que réside le plus souvent le souverain. Une zone intermédiaire, constituée de différents royaumes autonomes comme l‟Aquitaine, la Bavière ou l‟Italie lombarde. Ces royaumes possèdent leur propre administration, leurs propres palais et souvent leur propre roi en la personne d‟un fils de l‟Empereur. L‟aristocratie locale, qui dispose d‟une grande partie des charges comtales dans le système carolingien est ici associée au pouvoir et autorisée à participer à une véritable vie politique.

Enfin, il faut distinguer une zone frontière constituée d‟un glacis protecteur appelé « marche », dont les responsables doivent être en en relation directe avec l‟empereur pour coordonner la défense et les opérations militaires

Geneviève Bührer-Thierry (2001), L‘Europe carolingienne, 714-888, Paris, Armand Colin.

Deux faits apparaissent en effet. En premier lieu, la valorisation des exercices physiques comme véritables conditions de survie dans un monde dans lequel les institutions de la féodalité ont été ébranlées. En second lieu, la création d‟une caste particulière d‟agents de l‟ordre, les chevaliers ;

29L‟expérience carolingienne est de courte durée. Elle se consolide et se maintient durant le règne de Louis le Pieux (814-840), mais à sa mort, la conception patrimoniale du pouvoir conduit au « Partage de Verdun », en 843, qui divise l‟Empire entre ses trois fils.

Prof. Christophe Jaccoud, Centre international d’étude du sport/ Université de Neuchâtel Page 50 création qui répond à un souci de gestion de la sécurité publique de l‟époque, et dont l‟efficacité et la compétence militaires dépendent évidemment de la vigueur et de la bravoure physiques.

Le Moyen-Âge est un temps dans lequel il importe moins d‟être savant que d‟être fort ; un temps dans lequel on pouvait être sûr d‟avoir à défendre sa vie presque quotidiennement; sorte de second âge de fer où il fallait vivre cuirassé : les nobles cuirassés de fer, les villages et les pauvres gens cuirassés de murailles30. Dans ce contexte, il n‟est guère étonnant que l‟espace vécu, parcouru concrètement par les hommes et les femmes est, dans l‟immense majorité des cas, très réduit :

« De fait, pour presque toute la population, l‘essentiel de la vie sociale s‘accomplit dans un rayon de 15 kilomètres, seule la foire locale pouvant susciter périodiquement des déplacements un peu plus amples. Il ya bien sûr des exceptions : les clercs se déplacent souvent davantage (par exemple pour se rendre au siège diocésain ou pour une mission diplomatique), de même que les aristocrates (à l‘occasion d‘une visite au château d‘un suzerain lointain, d‘expédition guerrières, de fêtes ou de tournois). Mais ceux qui se déplacent ainsi sont rares, et pour la plupart des dominés, l‘univers social ne s‘étend au-delà de la paroisse que pour englober les villages voisins, avec lesquels les relations sont en général tendues, en dépit des liens individuels et familiaux fréquents. Telle est en effet l‘aire au sein de laquelle se contractent les mariages (…) et se tissent les relations de parenté spirituelle, d‘échanges et de solidarités » (Baschet, p. 487).

Au Moyen-Âge donc, la plupart des compte-rendus des activités physiques, et des jeux, mais aussi de la chasse, ne concernent ainsi très directement que la classe des chevaliers. Seuls ceux-ci pratiquent des exercices engageant les corps.

Qui sont les chevaliers ?

« Un chevalier est un homme qui monte sur et qui possède un cheval. Dans cet usage, la bête n’est pas une bête de trait, mais un animal de guerre. Certes, l’arrivée du cheval domestique en Europe, comme flux culturel, est une affaire ancienne, puisqu’elle s’étale entre -1500 et -500, reste que, outre que l’usage courant du cheval dans les techniques agricoles n’arrivera pas avant le 13e siècle, la possession d’un cheval est rare et accompagne clairement une différentiation sociale. La possession, l’usage et la maîtrise orientée d’un cheval accompagne une différentiation sociale : il souligne à sa manière l’apparition d’un groupe d’aristocrates, vivant du prélèvement sur le rustre, et qui sont aussi très logiquement des cavaliers ou des chevaliers (equites) combattant à char ou sur monture. Les petites sociétés agricoles du néolithique étaient restées relativement égalitaires (…). Or, à partir de l’âge du bronze et du fer, et simultanément à partir de l’introduction du cheval (…), les choses changent. Un groupe de chefs apparaît, et se détache du tissu paysan. Ce groupe est riche des trésors qu’accumulent déjà la civilisation des métaux et les échanges. Il est fort aussi du prestige que lui confère la possession du cheval (…) Quoi qu’il en soit, avec des méthodes et des techniques qui varieront beaucoup selon les ethnies, les régions et les mentalités, un groupe de Dominants, qui pendant longtemps se comporteront en « hommes à cheval », place la civilisation rurale d’Occident devant un fait accompli : les paysans (…) apparaissent désormais (…) comme un groupe de Dominés ».

Emmanuel Le Roy Ladurie (1973), « La civilisation rurale », in Emmanuel Le Roy Ladurie, Le territoire de l’historien, Paris, Gallimard.

30 « Le Moyen Age offre ses souillures et fascinations, ses brutalités, et cette odeur de fauve qui montait des guerriers germains. Ni silence, ni recueillement, mais le fracas des boucliers et des longues épées, le hurlement des cortèges dans les campagnes, les lamentations des peuples, les labours dévastés et les clameurs des rois assassins », Gilles Lapouge (1978), Utopie et civilisations, Paris, Flammarion.

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La formation de l‟aristocratie médiévale est un processus complexe. On considère en général que l‟aristocratie, telle qu‟on l‟observe aux 12e et 13e siècles, est le résultat de la convergence de deux groupes sociaux distincts. En premier lieu, des grandes familles qui remontent pour certaines d‟entre elles à l‟aristocratie romano-germanique ou, plus souvent, aux grands de l‟époque carolingienne. Cette aristocratie, qui se définit par le prestige de ses origines, perpétue un modèle et un ensemble de valeurs militaires et héroïques, exprimant son ancienne participation à la défense de l‟ordre public. En second lieu, les milites, à l‟origine simples guerriers au service des châtelains et vivant dans leur proximité. Dans un premier temps, il n‟y a pas d‟équivalence entre noblesse et chevalerie, puisque de nombreux non-nobles sont armés chevaliers. Mais, peu à peu, s‟opère une fusion entre ces groupes d‟origine différente. Ainsi, l‟engouement de la noblesse pour la chevalerie devient tel, qu‟il devient de plus en plus difficile de se revendiquer noble sans être chevalier. Ainsi, et progressivement, l‟accès à la chevalerie devient-il réservé aux seuls nobles, ainsi que le démontrent l‟existence de textes (constitution de Melfi, 1231 ; constitution d‟Aragon, 1235). A mesure que s‟approfondit l‟unification du groupe chevaleresque se consolide aussi son code de valeurs, notamment exalté par les chansons de geste, telle la chanson de Roland. Les premières de ces valeurs sont la force physique, le courage et l‟habileté au combat (Gauvain), l‟honneur et la fidélité, sans oublier un solide mépris des humbles et des « intouchables » que sont les paysans et les serfs. Son éthique repose encore sur la munificence, c‟est-à-dire sur l‟accent mis sur la capacité à dépenser et à distribuer. Ainsi, s‟il faut guerroyer sans cesse, c‟est d‟abord parce qu‟il faut du butin, pour entretenir un entourage dont la générosité avec laquelle il est traité rehausse le prestige.

L‟activité principale de l‟aristocratie est donc la guerre, et son dérivé, le maintien de l‟ordre public, de même que la chasse, qui lui est strictement réservée, au titre de privilège.

La chasse au Moyen-Âge, une pratique complexe

« La chasse constitue l’une des occupations favorites au Moyen Age, qu’il s’agisse de la vénerie (…) ou de la volerie (…). La chasse est en principe libre, mais dès l’époque mérovingienne des réserves sont instituées. Dans un précepte de 697-698 Childebert III donne à Notre-Dame d’Argenteuil une forêt que ses forestiers ont jusqu’alors défendue. La réserve de chasse au sens juridique existerait donc dès cette époque (…). Certes, jusqu’à la fin du 14e siècle, les roturiers libres peuvent chasser en dehors des garennes, mais l’ordonnance du 10 janvier 1397 enlève le droit de chasse à toute personne non noble, sauf aux gens d’Eglise et aux bourgeois vivant de leurs rentes. Ainsi le droit de chasse, tout d’abord droit naturel, ensuite accessoire du droit de propriété, devient l’apanage de la souveraineté (…).

Les mérites de la chasse ont été vantés à maintes reprises : ainsi le grand fauconnier d’un calife fatimide écrit-il dans un traité de l’art de volerie rédigé vers 995 : « La chasse comporte une infinité de mérites, des plaisirs de l’âme et la dignité des honnêtes moyens de subsistance, aux multiples saveurs. Avec la chasse, on gagne l’entrain, la gaîté de cœur, les profits tangibles et cachés, l’exercice physique, l’endurance à la marche, la souplesse en selle et la prémunition contre les maladies (…) ». Quatre siècles plus tard le comte de Foix, Gaston Phébus, expose de semblables arguments en faveur de la chasse : « Tout d’abord le bon veneur ne peut commettre aucun des sept péchés mortels. En effet l’oisiveté excite, par imagination, le goût du plaisir de la chair. L’homme n’a souci que de rester en un lieu et de penser à l’orgueil, à l’avarice, à la colère, à la paresse, à la gourmandise, à la luxure ou à l’envie ; car l’homme pense plutôt au mal qu’au bien à cause de ses trois ennemis : le diable, le monde et la chair. L’imagination est maîtresse de toutes les œuvres bonnes et mauvaises que l’on accomplit. Or le bon veneur ne peut être oisif ; par conséquent il ne peut avoir mauvaise imagination, ni accomplir de vilains actes. S’il chasse, il ne pense qu’à dormir, afin d’être frais et dispos pour remplir diligemment son office. Dès l’aube il est occupé, car il doit quêter, retourner à l’assemblée, chevaucher avec ses chiens, bien huer et bien corner, requérir et redresser son cerf (…), bien écorcher la bête, lorsque celle-ci est prise, bien faire la curée, penser à souper et à se mettre à l’aise (…), enfin dormir et se reposer (…) ». La chasse serait donc profitable tant sur le plan de l’âme que du corps. Mais ce ne sont point les raisons essentielles qui poussent les hommes du Moyen Age à la pratiquer (…). La chasse constitue d’abord un loisir pour les souverains et les aristocrates (…). La cynégétique offre d’autres avantages que d’être une distraction. Elle fournit de la nourriture. Eginhard écrit que pour Charlemagne le dîner comporte normalement quatre plats, en dehors du rôti que les veneurs ont l’habitude de mettre à la broche et qui est son plat préféré (…). La chasse est liée à la

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guerre (…). Elle constitue donc un entraînement à la guerre. Eginhard semble mettre sur le même plan le fait de manier les armes les armes et de chasser (…) »

Jean Verdon (2003)

On peut observer aussi que ces exercices physiques ne sont pas pratiqués n‟importe comment, mais qu‟ils intègrent assez vite un mode pédagogique codifié et construit, en fonction d‟objectifs qui sont de deux ordres et qui mettent en relief deux logiques distinctes.

En premier lieu, il est manifeste que les exercices physiques qui se mettent en place se mettent en place en fonction d‟objectifs guerriers. Il faut entendre par là l‟idée d‟une amélioration des compétences et des performances physiques. L‟Europe n‟est pas sûre, les rapports sociaux sont violents et féroces, la compétence physique est une valeur ajoutée. Venant renforcer cette logique guerrière et martiale, le fait que l‟éthique des valeurs et des comportements des chevaliers s‟indexe assez vite, vers le début du 12e siècle environ, sur le message chrétien. Autrement dit, et parce que le chevalier protège les faibles, protège les biens et les représentants de l‟Eglise, protège et défend la civilisation chrétienne, il lui faut être fort, brave, compétent et surtout entraîné. Dans ces termes, on ne peut s‟étonner de ce que les chevaliers soient astreints à un programme planifié d‟éducation physique, d‟ailleurs commun dans l‟Europe féodale. Un tel programme définit ce que doit savoir faire un chevalier, en même temps qu‟il est fortement dépendant aussi d‟un programme moral et spirituel, la chevalerie, depuis le 10e siècle, se confondant avec l‟armée du Christ et la défense des valeurs chrétiennes. Ces programmes sont le plus souvent codifiés à travers divers codex, rédigés par des prélats et par des hommes d‟Eglise, qui formalisent au plus près ce que doit être un curriculum aristocratique.

Dans le détail, les jeunes nobles quittent leur famille vers l‟âge de 7 ans. Ils partent vivre dans le château d‟un seigneur, chez lequel ils vont commencer leur éducation chevaleresque. Durant sept années, ils sont appelés à remplir le devoir de page, qui représente le premier échelon de cette hiérarchie. A 14 ans, ils sont faits écuyers, grade qui amène le jeune homme à la proximité avec le combat et avec la valeur guerrière, l‟identification de cette excellence précise démontrant alors la valeur du vrai chevalier. Enfin, le jeune homme est adoubé, cérémonie qui marque tout à la fois la fin d‟un apprentissage, la reconnaissance d‟un statut et d‟une identité, mais aussi l‟assimilation des valeurs du groupe et la certification de compétences physiques et guerrières. L‟adoubement date de la fin du 11e siècle et se situe en général vers la Pentecôte. Il consiste en une cérémonie qui implique de grandes festivités. Le jeune chevalier reçoit alors son épée et ses armes des mains d‟un aristocrate aussi éminent que possible, qui accomplit ensuite le geste de la colée, coup violent porté sur la nuque ou l‟épaule avec la main ou avec le plat de l‟épée, rite de passage symbolisant les idéaux du groupe auquel va s‟intégrer le jeune aspirant. Le choix d‟une célébration lors d‟une importante fête du calendrier chrétien n‟est nullement hasardeux, tant il est vrai que l‟Eglise a joué un rôle capital dans la mise au point de ce rituel d‟adoubement, qui évoque, de très près, la liturgie de bénédiction. Autre empreinte chrétienne : le rituel est souvent précédé par une nuit de prière dans

Prof. Christophe Jaccoud, Centre international d’étude du sport/ Université de Neuchâtel Page 53 l‟église ; et l‟épée, avant d‟être ceinte autour de la taille de l‟adoubé, est préalablement déposée sur l‟autel et dûment bénite31.

Ce curriculum aristocratique est donc dûment formalisé, ainsi que le montre le codex, bien connu, de Johannes Rothe, prêtre d‟Eisenach, dans l‟est de l‟Allemagne, auteur, vers 1460, de ce que l‟on appelle le Ritterspiegel qui définit très précisément les Sept Arts de la chevalerie.

« Tous les Sept arts que l‘homme parfait aimera toujours sont : il doit savoir aller à cheval ; de plus, il doit savoir nager et plonger dans l‘eau ; en troisième lieu, il doit savoir bien tirer à l‘arbalète, tirer à l‘arc et exécuter un lancer ; le quatrième art détermine qu‘il doit savoir grimper ; le cinquième art exige qu‘il puisse bien jouter dans un combat ; le sixième art détermine qu‘il puisse faire de l‘escrime ; et enfin le septième art qu‘il sache servir à la table, qu‘il puisse danser, qu‘il ait les manières de la cour ».

En second lieu, autre fait d‟importance, cette prédominance des objectifs militaro-fonctionnels, a progressivement évolué en symétrie avec une progressive pacification des mœurs et une stabilité de la géopolitique, pour déboucher sur des objectifs qu‟on peut décrire alors comme davantage articulés à des logiques récréatives, et plus spécifiquement au mode de sociabilité et à la volonté de paraître de l‟élite sociale. Autrement dit, et en même temps que les sociétés se pacifient, se civilisent, se soumettent au processus de civilisation décrit par Norbert Elias, on peut constater que les manières chevaleresques évoluent, avec une inflexion assez nette vers le 13e siècle, pour gagner en raffinement ce qu‟elles perdent en force brute et en violence32.

Il est compréhensible toutefois que cette caste militaro-féodale, si attachée à la démonstration de son courage et de sa virilité, n‟allait pas renoncer d‟un coup aux pratiques la mettant en spectacle.

On peut constater ainsi qu‟elle a alors construit, en instrumentant précisément les exercices physiques et les exercices du corps, ce qu‟on pourrait décrire comme une éthique en même temps qu‟une esthétique de la distinction. Et ceci au travers de la mise en forme d‟activités certes dégagées de la guerre stricto sensu ; activités appelées toutefois à prouver et à visibiliser force et excellence sociale. D‟où l‟important développement de la chasse, de l‟équitation et, activités emblématiques

31« Le fruit accompli de cette éducation, le chevalier à la mode est ainsi dépeint par un roman du 13e siècle : ami des tournois, des danses et du jeu, bon escrimeur et assez souple pour moucher du pied une chandelle fichée au-dessus de sa tête, il savait lire et chanter à l‟église et connaissait assez des arts libéraux pour pouvoir ouvrir une école n‟importe où (…).

Enfin, le jeune homme était armé chevalier, ce qui n‟allait pas sans fêtes, de plus en plus somptueuses et coûteuses, de sorte qu‟au 14e siècle, bien des nobles ne purent en assumer les frais et restèrent toute leur vie écuyers (…). Puis l‟Eglise dégagea les grands principes qui devaient sanctifier et animer l‟emploi de la force et s‟appliqua à en pénétrer les

Enfin, le jeune homme était armé chevalier, ce qui n‟allait pas sans fêtes, de plus en plus somptueuses et coûteuses, de sorte qu‟au 14e siècle, bien des nobles ne purent en assumer les frais et restèrent toute leur vie écuyers (…). Puis l‟Eglise dégagea les grands principes qui devaient sanctifier et animer l‟emploi de la force et s‟appliqua à en pénétrer les