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DU CORPS Ŕ LE CORPS INTRUMENTALISÉ Ŕ ROUSSEAU, KANT ET L’ÉDUCATION NATURALISTE

L’éducation physique durant la Renaissance

La période dite de la Renaissance, débute en Italie et en Flandre au XIVe siècle pour s‟étendre au reste de l‟Europe jusqu‟au XVIe siècle, et marque l‟entrée de l‟Occident dans la modernité.

Qu’est-ce que la modernité’

La modernité, qu‟il serait incorrect d‟associer seulement aux bouleversements techniques, scientifiques et politiques, peut être décrite comme un mode de civilisation caractéristique, progressivement apparu en Europe occidentale avec la Renaissance, né de changements profonds de l‟organisation économique et sociale, et qui a irradié au niveau des mœurs, des modes de vie et de la quotidienneté. Associée à une vaste dynamique de changement, la modernité s‟oppose, en première instance et dans les termes d‟une identification généraliste, à la tradition.

Du point de vue de sa genèse, on peut dire que l‟on peut repérer en Europe, vers la fin du 15e siècle, la mise en œuvre et le développement d‟une structure historique et polémique de changement et de crise, qui prendra une claire physionomie à partir du 19e siècle.

La Renaissance

L‟invention de l‟imprimerie, les découvertes de Galilée inaugurent l‟humanisme moderne de la Renaissance. Les échos profonds du partage de la modernité se font tout particulièrement sentir dans le domaine religieux : par l‟avènement de la Réforme et la rupture qu‟elle inaugure pour les pays protestants, mais aussi par la répercussion sur le monde catholique (Concile de Trente).

Les 17e et 18e siècles

Pendant ces deux siècles se mettent en place les fondements philosophiques et politiques de la modernité : la pensée individualiste et rationaliste moderne dont Descartes et les Lumières sont représentatifs ; l‟Etat monarchique centralisé, avec ses techniques administratives succédant au système féodal ; les bases d‟une science physique et naturelle, qui entraînent les premiers effets d‟une technologie appliquée (mouvement dit de L‘Encyclopédie).

Culturellement, c‟est la période de la sécularisation totale des arts et des sciences, qui dégage l‟idée d‟une loi de progrès de l‟esprit humain, qui culmine chez Jean-Jacques Rousseau. Progressivement aussi, la modernité se confond avec un mode de vie, qui prend petit à petit une tonalité bourgeoise libérale qui la marquera au plan idéologique de façon durable. On peut dire, quand on s‟intéresse aux visions et aux représentations historiques du corps, qui sont d‟ailleurs toujours indexées à des visons du monde, qu‟une véritable révolution va s‟opérer avec le succès de la Renaissance et de l‟humanisme, un pont étant en quelque sorte jeté entre le Moyen Age et les Temps

Prof. Christophe Jaccoud, Centre international d’étude du sport/ Université de Neuchâtel Page 72

Modernes, pont qui semble initier un véritable renversement des valeurs qui concerne la religion, les conceptions du monde et de l‟univers, l‟enseignement, la vision du corps52 ; la Renaissance allant même d‟ailleurs accoucher des premiers éléments de ce qui deviendra progressivement une véritable gymnastique rationnelle.

Ainsi que les historiens l‟ont amplement montré, les mutations qui vont révolutionner les manières de penser à l‟âge classique, et permettre de quitter le Moyen-Âge pour la modernité, ont pour matrice les travaux de Copernic et de Galilée. Ces travaux vont permettre de passer d‟une représentation de l‟univers tributaire des lois d‟un Dieu tout-puissant, représenté sur terre par la hiérarchie ecclésiastique, à un monde dominé par les sciences et les techniques élaborées par l‟homme. Ce retournement, en même temps que l‟avènement d‟un nouveau monde épistémique, trouve ses racines dans au moins quatre causes majeures.

La première cause est la découverte du Nouveau-Monde qui a pour conséquence de faire découvrir un « ailleurs » et de conduire à se poser des questions quant à la description jusqu‟alors admise de la planète. La deuxième cause est la création, totalement originale, d‟une technique qui va permettre la diffusion rapide des connaissances et des savoirs : l‟imprimerie. La troisième cause est l‟avènement du protestantisme, religion imposant une stricte réglementation de la conduite, dans laquelle on peut discerner la volonté de dominer et de maîtriser son corps. La quatrième cause est la constitution progressive d‟une nouvelle organisation du travail, dont l‟emblème est la manufacture. Cette base matérielle est à l‟évidence multiforme, reste que, en analysant le monde de la Renaissance, on peut observer que l‟innovation majeure en terme de production s‟appelle « manufacture »53.

Ce point est important dans la mesure où la différence fondamentale entre l‟artisanat et la manufacture réside dans la nécessité de standardiser les produits et donc de fabriquer des outils plus précis, des machines moins précaires et, surtout, à augmenter autant que possible la productivité, le rendement des mécaniques et des hommes. La manufacture transforme donc profondément les techniques de production, et singulièrement les techniques laborieuses des hommes, appelant donc une « mise en ordre » des corps, une standardisation et une rationalisation des gestes et des agir corporels54.

52 « Mais avec le 16e siècle, les temps tournent. Une autre Europe s’éveille. Depuis plus d’un siècle, des paroles surprenantes s’entendent de Florence à Paris. Le retour de la raison remanie l’espace mental des hommes. L’Europe contemple de nouvelles images. En même temps qu’elle desserre la main de Dieu, elle s’instruit sur elle-même, elle s’ausculte, balise ses gouffres ; elle appareille à la découverte du monde dans toutes ses dimensions : géographie, histoire, matière, nature, cosmos. L’histoire se transforme. Le modèle biblique qui guidait le Moyen Age contredit le modèle grec. Les hommes entendent déterminer leur itinéraire sur la terre (…). Les humains pensent désormais qu’ils tiennent un rôle entre les sentences du hasard et celles de la Providence. L’histoire n’est plus la révélation hébétée des irréparables programmes de Dieu».

Gilles Lapouge ( 1984)

53 On peut rappeler qu‟en France, c‟est François Ier qui initie cette forme de production en créant la Manufacture de tapisserie de Fontainebleau. Dès le milieu du 16e siècle, il n‟est pas un prince d‟Italie qui ne fonde, à Florence, à Mantoue, à Ferrare ou à Venise une manufacture.

54 « Du 16e au 18e siècle, la manufacture constitua la forme supérieure de la production industrielle. Son originalité, par rapport au petit atelier artisanal, était de rassembler sous une direction unique un grand nombre d’ouvriers exerçant le même métier, ce qui permettait une spécialisation des tâches, une division du travail et une augmentation de la force productive (…). Dans certains cas, la manufacture groupait dans un même bâtiment plusieurs centaines d’ouvriers. La

Prof. Christophe Jaccoud, Centre international d’étude du sport/ Université de Neuchâtel Page 73 Du point de vue de la modification des conceptions relatives au corps, et plus généralement aux conceptions de la nature, une source littéraire bien connue est en mesure de nous éclairer : Rabelais (1483-1533), écrivain, philosophe et humaniste français dont la lecture des chapitres 15 à 21 de son Gargantua montre cette inflexion essentielle dans la représentation et dans la valorisation des activités corporelles. Inflexion qu‟il rend tangible par les ressources de la fiction, l‟auteur comparant, à travers la description de l‟éducation de son héros Gargantua, deux philosophies

« totales » : d'un côté, la philosophie scolastique, qui suit aveuglément les préceptes post-platoniciens, formaliste, irrationnelle, qui valorise l‟apprentissage des choses par la stricte mémorisation qui occulte le corps et la raison et, d'un autre côté, la philosophie humaniste, tournée vers la compréhension, vers l‟interprétation, mais aussi vers une redécouverte du corps.

La scolastique

Pour bien prendre la mesure de cette révolution, il faut se rappeler que la scolastique est tout à la fois une philosophie et une méthode d‟enseignement philosophique et théologique hégémonique entre le XIIe et le XVIe siècles. Elle est issue de l‟aristotélisme et de sa conception du monde et, plus précisément, de la manière dont l‟aristotélisme est revisité par l‟Eglise au 2e siècle après JC.

Elle fait office de doctrine officielle de l‟Eglise et de l‟enseignement universitaire en matière de compréhension du monde et des phénomènes physiques. La scolastique peut être décrite aussi comme la méthode qui manifeste et fonde l‟universalité du pouvoir ecclésial et pontifical. Ses racine remontent au XIIIe siècle : Anselme de Canterbury (1033-1099) s‟efforce, notamment dans son ouvrage Pourquoi Dieu s‘est fait homme d‟associer la foi et l‟intellect. Et de convaincre par des raisonnements démonstratifs autant que par le recours aux arguments d‟autorité (l‟Ecriture et les Pères de l‟Eglise) ; Abélard (1079-1142) développe, notamment dans son Sic et non, les principes de l‟argumentation dialectique. Mais la scolastique des universités du XIIIe siècle amplifie et perfectionne les méthodes de raisonnement et d‟argumentation, codifiées selon des règles admises par les communautés des maîtres. La lecture commentée des textes bibliques et d‟ouvrages servant de manuels demeure la base du travail scolastique. Il s‟agit d‟en établir le sens authentique par un examen méthodique aussi impersonnel que possible. La quaestio (alternative du type est-ce que ?) est l‟autre forme dominante de l‟activité intellectuelles : elle peut donner lieu à un débat oral (disputatio) sur un thème déterminé par le maître, ou bien faire l‟objet d‟une rédaction écrite, selon une structure quadripartite constante (autorités en faveur de la première solution, objections et autorités contraires ; thèse de l‟auteur, réponse aux objections). Outre la théologie, les méthodes scolastiques du monde universitaire s‟étendent à l‟étude du droit et à certaines disciplines en partie fondées sur la démonstration et la vérification, surtout les mathématiques, l‟étude de la nature et l‟astronomie.

La scolastique du XIIIe siècle apparaît donc comme un monument collectivement dressé à la gloire de l‟Eglise triomphante et comme l‟expression, très aboutie, de l‟idéologie consubstantielle à l‟ordre de la société chrétienne.

Scolastique, Chrétienté et philosophie médiévale : le dualisme du corps et de l’âme

manufacture de drap de Van Robais à Abbeville concentrait plus de 1500 travailleurs » (Dictionnaire encyclopédique d’histoire, Paris, Bordas, 1986).

Prof. Christophe Jaccoud, Centre international d’étude du sport/ Université de Neuchâtel Page 74 La manière dont une société pense la personne humaine constitue un aspect central de son système de représentation en même temps qu‟un révélateur de ses structures fondamentales. L‟Occident médiéval ne fait pas exception, de sorte que l‟on ne peut en comprendre les ressorts principaux sans analyser les représentations de la personne qui prévalent, et plus précisément les formes qu‟y prennent les liens entre le corps et l‟âme.

A ce propos, le monothéisme chrétien se caractérise par une évidente séparation entre l‟âme et l‟étendue, entre le spirituel et le corporel. La chrétienté médiévale affirme donc une conception duelle qui reconnaît deux entités fondamentales et fondamentalement séparées : l‟âme et le corps.

Ce dualisme postule l‟incompatibilité entre le charnel et le spirituel, conduisant à une dévalorisation du matériel, n‟accordant de positivité qu‟à un spirituel entièrement pur. La théologie médiévale, à travers un grand nombre de penseurs, offre ainsi une large palette d‟occurences de l‟énoncé suivant : l‟être humain est formé par la conjonction de la chair, périssable, et d‟une âme, entité spirituelle, incorporelle et immortelle. Cette représentation n‟est d‟ailleurs pas une innovation du christianisme et apparaît nettement dans la tradition platonicienne, qui imprègne le christianisme.

La tradition néoplatonicienne, reprise en particulier par Saint-Paul, et qui trouve sa place chez la plupart des auteurs du haut Moyen-Age, tels Boèce ou Grégoire le Grand, identifie l‟homme à son âme et considère le corps comme un vêtement transitoire, une dépouille, voire comme une prison qui entrave le libre essor de l‟âme et son cheminement vers la perfection.

Dans ce contexte, la scolastique, à son tour, propose et impose un strict dualisme du corps et de l‟esprit, pour proclamer l‟éminence absolue de l‟âme sur le corps : « le corps est un tombeau, une entrave à la pensée » disait déjà Platon 20 siècles auparavant, une instance qui empêche l‟âme de se libérer et de contempler la vérité. Et ce corps est aussi –et le message n‟est pas celui de Platon mais bien celui de l‟Eglise -le vecteur diabolique de la jouissance, de la concupiscence, c‟est en effet par le corps que le premier homme et la première femme ont pêché ; il est ce qui sépare l‟homme du divin, aussi est-il, au mieux, occulté, ignoré. Au pire opprimé et tyrannisé par la théologie, laquelle, bien évidemment, ne peut prétendre à développer une éducation physique, ou tout au moins une sensibilité à l'éducation corporelle.

En faisant retour à Rabelais et à Gargantua, on a alors une vision saisissante de ce qu‟est un enseignement scolastique à travers la description qu‟il donne des trois professeurs qui veillent sur l‟éducation de Gargantua, Maîtres Thubal, Holoferne et Josselin Bridé :

« Le premier de ces grands précepteurs commença à lui apprendre l‘alphabet pendant cinq ans et trois mois, à l‘issue desquels il pouvait le réciter à l‘endroit et à l‘envers.

Puis, pendant treize ans, six mois et deux semaines, il lui lut une grammaire latine ainsi que quelques ouvrages moraux, de politesse, et édifiants en usage dans les écoles. Tous ces ouvrages furent non seulement entendus, mais patiemment recopiés par Gargantua qui apprit ainsi à écrire.

On passa ensuite à l‘étude d‘un ouvrage de grammaire, le De Modis Significandi ainsi qu‘à la lecture de commentaires y afférents émanant de docteurs aussi célèbres qu‘ennuyeux. Cette étude ne dura pas moins de 18 ans et onze mois, à l‘issue desquels il le savait par cœur à l‘endroit, à l‘envers (…).

Enfin, avant de mourir, ce docte maître enseigna le comput (le calendrier) durant seize ans et deux mois.

Prof. Christophe Jaccoud, Centre international d’étude du sport/ Université de Neuchâtel Page 75 Cette première éducation qui dura la bagatelle de 54 ans fut suivie par celle donnée par un autre vieux tousseux, Maître Josselin Bridé, qui lui lut d‘autres savants auteurs à la lecture desquels Gargantua devint aussi sage qu‘il ne l‘était auparavant ».

Rien donc, comme on le voit, d‟un quelconque exercice physique intégré dans ce programme d‟éducation, basé sur le formalisme, la répétition et, plus encore, sur le strict respect de la tradition et de l‟autorité.

Les choses changent avec la réaction humaniste à laquelle on peut associer des noms aussi connus que ceux d‟Erasme, de Guillaume Budé, de Pic de la Mirandole, de Marsile Ficin etc, autant d‟intellectuels qui produisent des œuvres qui s‟écartent de la tradition, qui vont voir par eux-mêmes les grands textes fondateurs en les retraduisant bien souvent, vaste entreprise collective dont sortiront, par exemple, l‟astronomie héliocentrique avec Copernic, Kepler et Galilée, la naissance de l‟anatomie, le recours à l‟expérimentation, mais aussi l‟émergence d‟une nouvelle appréhension du corps. Celui-ci tel que vu et représenté par les érudits de la Renaissance n‟est alors plus systématiquement pervers, il perd son statut démoniaque, il peut même être source de plaisir, comme chez le philosophe Spinoza qui, dans son Ethique, affirme l‟unité du corps et de l‟âme, et pose clairement le postulat que le corps peut bonifier l‟âme, les pratiques physiques ou toutes sortes d‟expérimentations corporelles perdant alors leur caractère satanique55. Il y a bien alors, dans ces années, ce que Michel Foucault a nommé une « rupture épistémique globale », une révolution des esprits et des intelligences du monde, qui va notamment déboucher sur le développement d‟un courant expérimental concernant le corps, concernant le mouvement, concernant des gymnastiques rationnelles.

Pour illustrer un tel retournement, on peut faire alors, encore une fois, retour à Rabelais, puisque l‟ouvrage met en scène, après l‟épisode scolastique, le moment humaniste de l‟éducation de Gargantua. Son nouveau maître, Ponocratês, décide d‟agir à la façon d‟un médecin. Après observation des symptômes, il aboutit au diagnostic que son élève, malgré un apprentissage de plus de 50 ans, ne sait rien, ne connaît rien. Le maître décide alors de purger l‟élève, en lui extirpant de la tête les fausses vérités scolastiques, mais aussi en purifiant son corps. Dans ce nouveau cursus, Gargantua se lève à quatre heures du matin, heure matinale à laquelle on lui lit des livres édifiants.

Une fois Gargantua habillé, on lui prodigue encore trois heures de lecture. Puis viennent les exercices du corps : « il était désormais temps d‘exercer les corps comme ils avaient exercé les âmes auparavant », et ceci sous les ordres d‟un Maître qui se nomme Gymnaste : « Gargantua se desporte, et joue à la grosse balle, la faisant bondir en l‘air autant du poing que du pied ». Il apprend l‟art équestre et tous les arts guerriers, et il convient qu‟il soit à l‟aise sur n‟importe quelle monture. On lui fait encore jeter la pierre, le javelot, la hallebarde, connaître le tir à l‟arc et le maniement d‟un canon et d‟une arquebuse. Sans oublier la chasse, à tous les gibiers, la lutte, la course, la natation et l‟ensemble des activités nautiques, telles la conduite d‟un bateau. On peut

55 Comme il convient de le rappeler, « la philosophie cartésienne s’impose comme point de départ. C’est en effet Descartes qui, le premier, institue le problème du rapport entre le corps et l’esprit. Descartes considère que l’on connaît distinctement l’esprit et le corps et il en infère qu’il existe deux substances distinctes : la pensée et l’étendue (ou le corps). Spinoza, de son côté, récuse ce dualisme substantiel. Dans le cadre de l’ontologie spinoziste, la dualité substantielle n’existe pas : il n’y a qu’une substance (monisme ontologique).On peut donc assimiler le cartésianisme à une métaphysique dualiste qui pose l’existence de « deux mondes », celui de la pensée et celui de la matière »

cf. Pascale Gillot (2007), L’esprit, figures classiques et contemporaines, Paris, Editions du CNRS.

Prof. Christophe Jaccoud, Centre international d’étude du sport/ Université de Neuchâtel Page 76 remarquer encore, et le détail n‟est ni anecdotique ni même trivial, que Rabelais nous précise que lorsque Gargantua a sué, consécutivement à ces exercices corporels, « on le frottait avec du linge propre et il changeait de chemise ». Manifestation d'un véritable hygiénisme, en tout point original56.

On retiendra alors trois faits de cette révolution humaniste qui constitue à l‟évidence un maillon essentiel entre l‟âge sportif obscur et un âge présportif en voie de visibilité.

Premier fait : à travers le souci du corps, et dans ce qui constitue sans doute une dimension hygiénique, la Renaissance retrouve une préoccupation qui était perdue depuis l‟Antiquité.

Deuxième fait : la progressive contestation de la stricte frontière entre le corps et l‟âme, entre l‟esprit et l‟étendue conduit à reconnaître au corps une véritable finalité, l‟idée se faisant progressivement jour que le corps peut être conduit et orienté par un travail réfléchi. De ce point de vue, l‟œuvre de Rabelais est tout à la fois très intéressante et très emblématique dans la mesure où elle va compter au nombre des œuvres qui vont promouvoir et instituer une véritable éducation physique, complémentaire de l‟instruction intellectuelle.

Troisième fait : la Renaissance va inspirer un certain nombre de courants qui prennent le corps dans leur orbite : des courants éducatifs, des courants anatomiques (avec notamment les médecins Vésale et Ambroise Paré) et des courants qui sont à proprement parler des courants gymnastiques. On verra donc, après 1550-1560, la parution d‟une multitude d‟ouvrages sur l‟éducation et sur les pratiques corporelles qui convergent tous pour démontrer que la Renaissance marque pour l‟essentiel ce qu‟on pourrait décrire comme l‟affranchissement du corps de ses chaînes métaphysiques.

Autrement dit, un corps nouveau commence à se dessiner. Longtemps vécu sur le mode de la

Autrement dit, un corps nouveau commence à se dessiner. Longtemps vécu sur le mode de la