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Les 2 racines secondaires vivantes indiquées à la figure 3 ont été examinées. Il s’agit des seuls endroits étudiés qui détiennent une abondante réserve d’amidon, figures 16, et 17. La racine à la figure 16 présente environ 42 cernes de croissance, la section est traitée avec

de l’eau iodée. Il n’y avait aucun signe d’infection par le Cp visible dans cette racine.

Figure.16. La grande racine

secondaire, colorée avec de l’eau

iodée.

Figure.17. Section radiale de la deuxième racine

secondaire, colorée avec de l’eau iodée. En Haut à

gauche.

La figure 17 montre une section radiale de l’autre racine secondaire âgée de 22ans environ, elle est traitée avec de l’eau iodée. Une zone de barrage est indiquée par la flèche en 2 points, elle est associée à une ancienne blessure. Les flèches simples indiquent la zone colonisée par le Cp. Nous constatons une forte présence d’amidon, y compris dans la partie

colonisée par le Cp. La figure 18 montre une section transversale du haut de l’échantillon et

dans la partie colonisée par le Cp. Le Cp vient d’envahir le liber, le périderme n’est pas encore touché. Il n’y a aucune réaction cambiale visible.

Figure.18. Section transversale du haut de la racine en Fig.17. Le Cp a infecté le liber. Le

périderme n’est pas encore atteint. Il n’y a pas de réaction cambiale (zone de barrage,

bourrelet de recouvrement). Trait DCCF 1,1mm.

Comme pour les autres parties étudiées de cet arbre, nous notons une nette diminution de

Tableau 3. Largeur des 6 derniers cernes, mm. Grande racine, Fig.16.

DCCF 1,0 1,7 2,6 3,3 1,0 1,2 Totaux 10,8 Moyenne 1,8

EXAMEN D’UNE CHARPENTIERE

Une rondelle de circonférence de 104cm, éloignée de la zone infectée par le Cp, a été

prélevée à la base d’une charpentière à environ 10m du collet, figure 19. La rondelle est

traitée avec de l’eau iodée : en l’absence de coloration soutenue il y a très peu de réserves d’amidon. Trois blessures compartimentées sont présentes. Il s’agit probablement de

nécroses corticales, le tronc présente quelques petites nécroses corticales partiellement ou

complètement fermées. L’origine de ces nécroses n’est pas déterminée.

Le DCCF est très réduit en épaisseur par rapport aux 16 années précédentes (tableau 4) :

sur la face supérieure 0,20mm pour une moyenne de 0,76mm

sur la face inférieure 0,15mm pour une moyenne de 0,49mm.

Tableau 4. Largeur des 15 derniers cernes, mm. Face supérieure DCCF 0,20 0,35 0,45 0,80 1,05 0,85 0,30 0,35 0,55 1,45 0,75 0,60 0,85 2,60 1,70 Total 12,85 Moyenne 0,76

Figure.19. Section transversale de la base

d’une charpentière.

DISCUSSION

Le Cp mis à part, cet arbre possédait d’excellentes capacités à compartimenter suite aux ouvertures traumatiques. Dans toutes les parties observées, les zones de réaction et les

zones de barrage sont mises en place et sont performantes : le bois néoformé n’est pas

touché et les zones de réaction sont peu étendues.

En ce qui concerne le Cp, une zone de réaction se forme dans l’aubier infecté (D’Ambra et al,1977). Phénols et phénols oxydés s’accumulent au niveau de la zone de réaction alors que les thylles et les gels s’accumulent dans les vaisseaux. Ces réactions sont

probablement sollicitées par la protéïne cerato-platanine (voir Fontana 2008) formée par le

Cp comme décrite par Pazzagali et al. (1999, 2006). Les parois 2 et 3 de la zone de réaction (modèle de CODIT, Shigo et Marx, 1977) sont efficaces, elles ne semblent pas augmenter en taille en vieillissant Par contre la paroi 1 est faible. D’Ambra et al, (1997) ont observé la pénétration des thylles par les hyphes de Cp et Clerivet et El Modafar (1994) ont observé la

sénescence des thylles, probablement due aux enzymes émises par le Cp. Ces

observations permettent de comprendre la forme des colonnes, longues et étroites dans

l’aubier. Avec le temps, le nombre de colonnes augmente formant des zones étendues d’aubier dysfonctionnel.

Il y a une absence totale de formation de zone de barrage (paroi 4 du modèle de CODIT)

lorsque le Cp franchit le cambium et qu’il pénètre dans l’écorce. Il y a également une

absence totale de bourrelet de recouvrement. Le DCCF est continu entre les racines

maitresses et le bas du tronc, et probablement jusqu’à la première charpentière. Ceci permet d'avancer 2 hypothèses concernant la durée de cette pathogenèse :

1. Soit tous les symptômes observés apparaissent en 2011.

2. Soit le Cp inhibe la division normale du cambium et il n’y a pas eu de croissance secondaire depuis un certain nombre d’années, ni de génération de zones de

barrage.

A cause d'un état très avancé de l’infection par le Cp et la colonisation des racines par un cortège de champignons secondaires, la première hypothèse n’est pas plausible. En effet,

l’amplitude de la colonisation par le Cp et par champignons secondaires indique une pathogenèse qui durerait depuis une vingtaine d’années, voire plus.

Normalement, un arbre atteint par une maladie racinaire progressive présente

que pour ce platane sa croissance est relativement régulière, puis s’arrête subitement, figure

20. Le Cp semble avoir soudainement inhibé l’activité cambiale.

Figure.20. Epaisseur des cernes de croissance à la base du tronc. Echelle : mm. DCCF à droite.

Aké (1995), a mis en évidence une protéine produite par le Cp, la fimbriatane, qui inhibe la division cellulaire des cals du platane commun in vitro et in vivo. Dans ses conclusions Ake cite : « la fimbriatane est nécessairement impliquée dans la pathogenèse in vivo, au moins dans le symptôme primaire d’inhibition de l’activité de la callogénèse cicatricielle ». Aux vues

des observations présentées ici, cette molécule pourrait être à l’origine d’une inhibition cambiale dans les parties de l’arbre observées.

La question se pose : depuis combien d'années le cambium ne fonctionne-t-il plus ?

L’absence de zones de barrage et de croissance radiale rend cette tâche difficile. D’autre part, à la connaissance de l’auteur, il n’y a pas de donnée dendrochronologique concernant le platane en France permettant une étude comparative.

CONCLUSIONS

Sans aucun doute le Cp inhibe la croissance radiale et la formation de zones de barrage dans les parties étudiées de cet arbre. L'examen visuel du système racinaire indique une pathogenèse évoluant depuis au moins 20 ans. A cause de l’inhibition cambiale, l’arbre ne

pourrait pas compartimenter le pathogène de façon efficace et ne pourrait pas générer de

nouveau bois pour remplacer l’aubier rendu dysfonctionnel par le Cp. Le Cp évolue dans

l’aubier présent au moment de l’infection et l’arbre meurt à cause d’un manque d’aubier

fonctionnel. La cessation de l’activité cambiale explique l’absence des bourrelets de

recouvrement typiquement observés.

Lorsqu’un grand platane montre les premiers signes du chancre au niveau du collet et du bas du tronc, l’arbre a peut être été infecté depuis de nombreuses années. Ceci expliquerait l'irruption de la maladie sur les rives du Canal du Midi et le fait que la maladie ait été décelée

une trentaine d’années après son introduction supposée pendant la seconde Guerre mondiale.

Un seul arbre a été étudié : le même type d’étude est nécessaire sur un plus grand nombre

de sujets, accompagnée d’études dendrochronologiques sur un grand nombre d’arbres

infectés et non infectés, afin d’établir le laps de temps entre la première infection et la mort de l’arbre.

Ces études pourraient avoir des répercussions importantes pour la gestion de l’épidémie, en particulier grâce à la détection précoce des arbres infectés.

D’autre part, s’il peut être démontré que la fimbriatane est la molécule responsable de

l’inhibition cambiale, il pourrait être envisagé de bloquer son activité en introduisant une molécule antagoniste dans l’arbre de façon à permettre à la zone cambiale de fonctionner

normalement. Il est intéressant de noter que chez les individus résistants chez le platane

d’Occident, le champignon est compartimenté et un bourrelet de recouvrement est formé,

(Vigouroux, 2004). Afin de déterminer le rôle de la fimbriatane, la molécule pourrait être injectée dans des arbres sains.

REMERCIEMENTS

Madame Delphine Rousseau, technicienne à l’Atelier de l’Arbre, pour son aide tout au long

de cette étude et en particulier pour la vérification des mesures dendrochronologiques Docteur David Lonsdale pour ses commentaires et corrections de cet article.

La Mairie de Villeurbanne pour sa contribution financière et pour l’autorisation d’étudier les

platanes.

Monsieur Armand Honorat, Directeur du service des espaces verts, Mairie de Villeurbanne,

pour son soutien et pour l’organisation des travaux in situ.

Les arboristes du service des espaces verts, Mairie de Villeurbanne, pour leur aide dans

l’excavation et la dissection du platane.

BIBLOGRAPHIE

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