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5. LIXIVIATION DÉS POLYÉSTÉRURÉ THANÉS NON IRRADIÉ S

6.2 R ADIO - OXYDATION SUIVIE DE LA LIXIVIATION

6. LIXIVIATION DÉS POLYMÉ RÉS RADIO-OXYDÉ S

Nous venons de voir les mécanismes et la cinétique de lixiviation des PEsU non irradiés. Dans les conditions de stockage profond, les polymères seront au préalable radio-oxydés avant de subir une lixiviation. Ce paragraphe répertorie les résultats disponibles sur les mécanismes et la cinétique de lixiviation des polymères radio-oxydés.

À notre connaissance, très peu d’auteurs se sont intéressés à la lixiviation des polymères radio-oxydés. Ce paragraphe rassemble les résultats disponibles à ce jour, tous polymères confondus. Les études citées ci-dessous concernent des polymères radio-oxydés par des rayonnements gamma ou des électrons, jusqu’à des doses reçues de l’ordre du MGy.

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OXYDATION ET LIXIVIATION SIMULTANÉES

Tian et al. (2015) ont irradié le PURe dans de l’eau pure (eau milliQ®). La radiolyse couplée à la lixiviation fait apparaître des réticulations dans le PURe. Ces réticulations peuvent être formées à partir des radicaux hydroxyles (°OH), ces espèces très réactives étant créées lors de la radiolyse de l’eau. Les auteurs proposent le mécanisme suivant :

2 P + 2 °OH → 2 H2O + 2 P° → 2 H2O + P-P

Le taux de réticulation est plus important lorsque le polymère est irradié dans l’eau que lorsque ce même polymère est irradié sous air. De même que la radio-oxydation, la radiolyse couplée à la lixiviation du PURe accroit la compatibilité entre segments souples et rigides. L’explication est identique à celle donnée pour la radio-oxydation : la formation de réticulations rapprochant physiquement des segments de nature différente et l’augmentation de la mobilité des segments dans le polymère causée par les scissions de chaînes.

Van Loon et Hummel (1999) ont irradié deux résines échangeuses d’ions industrielles en polystyrène réticulé, saturées en solution aqueuse à 0,05 mol∙L-1 de NaOH. Les résines irradiées relâchent plus de carbone organique total (COT) et de carbone inorganique en solution que les résines non irradiées. L’oxalate est uniquement détecté dans les solutions extractantes de résines irradiées. Sa formation provient de la recombinaison de deux radicaux °COO- formés lors de la radio-oxydation des résines. Les ions oxalates représentaient 10 à 30 % du COT après irradiation.

6.2 R

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OXYDATION SUIVIE DE LA LIXIVIATION

Identification des PDH et influence des paramètres de lixiviation

Pour évaluer la résistance des matériaux sujets aux intempéries extérieures (utilisés pour les revêtements par exemple), les matériaux sont photo-oxydés puis hydrolysés. Le test réalisé par Narayan et al. (2005) sur des PEsU est le suivant : exposition du matériau aux

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rayonnements ultraviolets (UV) (pic à 330 nm) pendant quatre heures à 60°C puis à une humidité relative de 100 % pendant quatre heures à 50°C. Ces manipulations sont répétées pendant 550 heures (environ 23 jours). Narayan et al. (2005) ont mené ce test sur des PEsU aromatiques hydroxylés. Ils ont remarqué le jaunissement du matériau, surtout après 10 jours de test. Les produits colorés seraient plutôt formés lors de la photo-oxydation des segments aromatiques (Wilhelm et Gardette, 1997). Au cours du test, le matériau est devenu plus cassant. Une observation au MEB permet de montrer qu’après 23 jours de test, la surface est endommagée.

Dannoux (2007) a étudié la lixiviation d’un polyétheruréthane aromatique radio-oxydé. Différents paramètres ont été testés : température de lixiviation (40 ou 60°C), dose reçue (de 0 à 20 MGy), pH (pH 7 ou pH 10,5) et durée de lixiviation (jusqu’à 310 jours). Les lixiviations ont été réalisées sous atmosphère inerte.

L’identification des PDH relâchés après 28 jours de lixiviation en eau basique sur le polymère radio-oxydé à 1 000 kGy a été effectuée par spectrométrie de masse en tandem (MS-MS) avec une source d’ionisation par électronébuliseur (ESI pour electrospray ionization). Les résultats sont présentés Tableau I-6.

Tableau I-6 - Familles de molécules détectées par Dannoux (2007) suite à la lixiviation en eau pure d’un polyétheruréthane irradié à 1000 kGy en condition oxydante à température ambiante.

Le plus grand PDH observé possède une masse molaire de 1100 g∙mol-1. Entre 500 et 1000 kGy, la nature des PDH est identique, seule la concentration augmente avec la dose reçue. Le même effet est observé pour la température et pour le pH. Une deuxième observation a été effectuée sur l’effet du pH : le facteur d’augmentation de la concentration n’est pas le même pour toutes les familles de molécules identifiées. Par exemple, la famille I1 voit sa concentration davantage augmenter en milieu basique que les familles I2 et I3. Ainsi, la formation de certains PDH est favorisée en condition basique. Donc le pH n’influe pas uniquement sur la cinétique de lixiviation, confirmant les résultats observés pour l’hydrolyse seule (cf. §5.3).

63 La nature des PDH reste inchangée jusqu’à 10 MGy. À partir de cette dose, le mécanisme de dégradation évolue, se traduisant par une augmentation de la diversité des PDH.

L’auteur conclut qu’il n’est pas possible de donner une liste exhaustive de tous les produits de dégradation hydrosolubles du fait de la diversité des produits et de la complexité du mélange qui résulte de la radio-oxydation suivie de la lixiviation du polyuréthane (Dannoux, 2007). Colombani et al. (2009) ont quant à eux radio-oxydé jusqu’à 26 MGy puis lixivié en milieu alcalin un PVC industriel et un PVC modèle. Le PVC modèle relâche moins de COT que le PVC industriel. Dans le cas du matériau industriel, les produits relâchés seraient majoritairement issus des additifs.

La caractérisation des PDH peut être effectuée par diverses techniques analytiques. Afin de connaître la quantité de carbone organique total (COT), les lixiviats peuvent être analysées grâce à un COTmètre (Thomas et al., 1999; Bisutti et al., 2004; Visco et al., 2005; Colombani et al., 2009). Les produits de dégradation volatils ou semi-volatils peuvent être caractérisés et quantifiés par chromatographie à phase gazeuse couplée à la spectrométrie de masse (GC-MS pour gas chromatography mass spectrometry) par injection directe ou après extraction liquide-liquide ou sur phase solide (Schomburg et al., 1984; Wolska et al., 1998; Zwank et al., 2002; Lindström et al., 2004; Aeppli et al., 2008; Yu et al., 2014). Les produits de masse molaire plus importante (oligomères par exemple) sont plutôt séparés puis détectés sur chromatographie à phase liquide couplée à la spectrométrie de masse (LC-MS pour liquid chromatography mass spectrometry) dont les sources d’ionisation à pression atmosphérique sont plus douces que l’impact électronique (de Jong et al., 2001; Hakkarainen et Albertsson, 2008). La chromatographie ionique (IC pour ionic chromatography) est particulièrement adaptée pour quantifier les acides carboxyliques (Van Loon et Hummel, 1999).

La caractérisation des produits de radio-oxydation (avant lixiviation) peut être effectuée directement sur le polymère ou après extraction des produits par un solvant. Aux techniques analytiques précédemment citées peuvent s’ajouter : la mesure de luminescence, l’injection directe en spectrométrie de masse, la thermodésorption couplée à la GC-MS (TD-GC-MS), la spectroscopie infrarouge à transformée de Fourier (IRTF) (Shintani et al., 1990; Marcato et al., 1996; Spahl et al., 1998; Schwach-Abdellaoui et al., 1999; Tang et al., 2003; Hakkarainen et al., 2006; Adamus et al., 2009; Aminlashgari et Hakkarainen, 2012a; 2012b; Hakkarainen, 2012).

Cinétique

Colombani et al. (2009) ont effectué un suivi de la concentration du COT relâché dans le lixiviat en fonction de la durée de lixiviation en milieu alcalin (pH 12,7) d’un PVC radio-oxydé. Il a été conclu que ce relâchement est contrôlé par la diffusion décrite par la loi de Fick (évolution du COT en fonction de la racine carrée du temps). Les auteurs concluent également que plus la dose d’irradiation augmente, plus la concentration du COT est faible et plus la lixiviation est lente. L’explication donnée est que plus la dose augmente, plus le PVC est réticulé. Cependant, le PVC subit plus de scissions de chaînes que de réticulations lors d’une

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oxydation (Boughattas, 2014). Au vu de ce résultat, il peut être supposé que la radio-oxydation menée dans le cadre de ces travaux n’ait pas été homogène.

Dannoux (2007) a également étudié la cinétique de lixiviation d’un polyétheruréthane aromatique radio-oxydé. À différents intervalles de temps, le milieu de lixiviation est entièrement prélevé, le polymère est séché, puis le milieu est renouvelé. Dannoux a corrélé ses données expérimentales de suivi de la perte de masse en fonction du temps de lixiviation à 60°C à pH 7 et à pH 10,5.

Pour le polyétheruréthane non irradié, irradié à 500 et 1000 kGy l’évolution correspond à une courbe de type exponentielle (loi du premier ordre) :

𝛼 = 𝛼max(1 − 𝑒−𝐴𝑡) (I-20)

Avec  la perte de masse en fraction massique, 𝛼𝑚𝑎𝑥 et A des constantes et t le temps de lixiviation.

Dans ce cas, la perte de masse augmente rapidement après la mise en contact du polymère avec la solution aqueuse puis atteint un plateau de valeur 𝛼𝑚𝑎𝑥. L’auteur constate qu’il ne s’agit pas d’un réel plateau puisque la perte de masse continue d’augmenter très faiblement. Plus la dose reçue par le polymère est importante, plus la cinétique de lixiviation est rapide et plus 𝛼𝑚𝑎𝑥 est élevé. A une dose reçue fixée, 𝛼𝑚𝑎𝑥 est plus importante à pH 10,5 qu’à pH 7. 𝛼𝑚𝑎𝑥 est atteint entre 30 et 40 jours de lixiviation.

Le suivi du relâchement des segments rigides aromatiques dans l’eau a été effectué par spectroscopie UV-visible et montre que la cinétique est identique à celle de la perte de masse. Le ratio de la perte de masse des segments rigides sur la perte de masse totale indique que la solubilisation des produits de radio-oxydation issu des segments souples est plus importante que celle des produits issus des segments rigides.

La cinétique de relâchement des produits est plus rapide lorsque la température augmente. Cette constatation correspond aux observations faites sur l’hydrolyse seule (cf. §5.3).

En eau pure, plus la durée de lixiviation augmente, plus la masse molaire moyenne des PDH augmente car la diffusion des oligomères dans le polymère dépend de la longueur de chaîne. Pour les doses comprises supérieures à 1000 kGy et jusqu’à 20 MGy, la modélisation des

données expérimentales de perte de masse en fonction de la durée de lixiviation conduit à une équation du type :

𝛼 = 𝐵 × 𝑡

(1 + 𝐶 × 𝑡) (I-21)

Avec  la perte de masse en fraction massique, B et C des constantes et t le temps de lixiviation.

65 Un plateau est atteint dès dix jours de lixiviation. Plus la dose augmente, plus la cinétique est rapide et plus le plateau atteint est élevé. À partir de 10 MGy, le plateau de perte de masse maximal atteint n’évolue plus et est environ égal à 25 % de perte de masse.

Cette étude conclut que la dose reçue par le polymère est le principal paramètre influençant sur le taux de dégradation du polymère par lixiviation. L’évolution de la perte de masse maximale du polymère après lixiviation en fonction de la dose reçue est présentée sur la Figure I-20. Lorsque la dose augmente, le degré d’oxydation des molécules de dégradation augmente et leur masse molaire diminue. Ces deux processus favorisent la solubilisation des produits de dégradation dans l’eau.

Figure I-20 - Évolution du pourcentage de la perte de masse d'un polyétheruréthane aromatique radio-oxydé en fonction de la dose reçue après 55 jours de lixiviation à pH 7 (symbole cercle vide) et à pH 10,5 (symbole cercle

plein) à 60°C (Dannoux, 2007).

Peu de connaissances sont disponibles sur la lixiviation des polymères radio-oxydés. Au vu de la diversité des produits qui peuvent être formés par radio-oxydation puis par lixiviation, de nombreuses techniques analytiques sont employées afin de caractériser les PDH (COTmètre, LC-MS, GC-MS, IRTF…).

Il a été observé sur un polyétheruréthane aromatique que plus la dose d’irradiation augmente, plus le polymère est sensible à la lixiviation. Ce phénomène a été attribué à la présence des groupements oxydés formés lors de la radio-oxydation. Le mécanisme de dégradation semble se complexifier à partir de 10 MGy.

La cinétique de lixiviation d’un PVC irradié à 10 MGy a été décrite par la loi de Fick tandis que la cinétique de dégradation du polyétheruréthane aromatique est modélisée par différentes corrélations en fonction de la dose reçue. Une loi du premier ordre décrit la dégradation par lixiviation du polyétheruréthane radio-oxydé jusqu’à 1 MGy tandis qu’un ajustement mathématique des points expérimentaux décrit la dégradation pour le polymère irradié à une dose supérieure à 1 MGy.

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7. COMPLÉXATION DÉS ACTINIDÉS PAR LÉS