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DU POLYESTERURÉTHANE MAPA NON IRRADIÉ ET IRRADIÉ

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CHAPITRE IV : COMPLÉXATION DÉ L’EUROPIUM PAR

LES PRODUITS DE DÉGRADATION HYDROSOLUBLES

DU POLYESTERURÉTHANE MAPA NON IRRADIÉ ET

IRRADIÉ

SOMMAIRE

Introduction....……….………….181

1. Complexation de l’europium par l’adipate……….……….…182

1.1 Protocole expérimental………...182

1.1.1 Préparation des solutions europium-adipate………182

1.1.2 Acquisition du signal de luminescence de l’europium en présence d’adipate.………183

1.2 Résultats et discussion………...184

2. Complexation de l’europium par les produits de dégradation hydrosolubles..190

2.1 Protocoles expérimentaux………..190

2.1.1 Préparation des solutions europium-PDH……….190

2.1.2 Analyse des solutions par SLRT et spectrométrie de masse en tandem………192

2.2 Résultats et discussion………...……192

2.2.1 Effet de la dose reçue par le polymère et effet des charges et additifs………192

2.2.2 Détermination des constantes de complexation………..196

2.2.3 Identification des ligands………..203

Conclusion………...…....207

181

INTRODUCTION

En condition de stockage profond, les polymères contenus dans les colis de déchets MA-VL relâchent des produits de dégradation hydrosolubles (PDH). Il est nécessaire d’étudier l’interaction de ces produits avec les radionucléides, et plus particulièrement les actinides présents dans les colis afin d’évaluer le niveau de confinement de la radioactivité dans le site de stockage.

Deux grandeurs peuvent décrire l’influence des PDH sur les actinides : - La solubilité de ces actinides dans l’eau ;

- L’adsorption de ces actinides sur des solides (Skytte Jensen, 1980; Bourbon, 1994; Jedináková-Křižová, 1998; Keith-Roach, 2008).

Dans le cadre de cette thèse, nous avons décidé d’étudier la solubilité. La solubilité des actinides, c’est-à-dire la concentration totale dissoute dans une condition donnée, peut augmenter en présence de PDH si ces derniers sont capables de complexer les actinides. L’europium(III) peut être employé en tant qu’analogue chimique des actinides(III) incluant ainsi l’américium(III) et le curium(III) dans un contexte de stockage (le plutonium(III) intervenant plutôt en milieu acide). Son utilisation présente certains avantages : il n’est pas radioactif, il peut donc être manipulé en laboratoire conventionnel et ne génère pas de déchet nucléaire, et il est détectable par spectrofluorimétrie laser à résolution temporelle (SLRT). La SLRT permet, entre autres, d’obtenir des informations sur l’environnement chimique de l’europium et de déterminer des constantes de complexation (Plancque et al., 2003; Choppin, 2007; Binnemans, 2015; Moreau et al., 2015).

L’objectif de ce chapitre est d’étudier la complexation de l’europium(III) par les PDH du polyesteruréthane Mapa (PURm) non irradié et irradié en solution aqueuse basique. La complexation de l’europium(III) par les PDH du polyesteruréthane Estane® 5703 (PURe) sera également étudiée afin d’évaluer l’effet des charges et additifs.

D’après la caractérisation des PDH du PURm irradié et non irradié, effectuée dans le chapitre III, les PDH majoritaires relâchés en milieu basique par ce polymère non irradié et irradié quelle que soit la dose reçue jusqu’à 10 000 kGy, sont l’acide adipique et le butane-1,4-diol (BDO). L’adipate étant un di-carboxylate, cette molécule peut jouer le rôle de ligand vis-à-vis des lanthanides (Choppin et al., 1986) et donc de l’europium (Wang et al., 2000). La première étape de ce travail consiste donc à évaluer le pouvoir complexant de l’adipate. Afin d’atteindre cet objectif, une constante de complexation sera déterminée.

La seconde partie consiste à étudier le système réel, c’est-à-dire mettre en contact l’europium(III) avec les PDH présents dans les lixiviats et déterminer s’il y a une interaction ou non entre les deux entités. Dans le cas où il y a une interaction, le pouvoir complexant des PDH sera évalué et l’identification des ligands sera entreprise.

182

1. COMPLÉXATION DÉ L’ÉUROPIUM PAR

L’ADIPATÉ

Suite à la caractérisation des PDH du PURm irradié et non irradié (cf. chapitre III), il a été conclu que l’adipate et le BDO sont les produits majoritaires des lixiviats. L’adipate possède deux groupes carboxylates, ce qui lui confère un potentiel pouvoir complexant vis-à-vis de l’europium(III) (Wang et al., 2000). L’objectif de cette première partie est d’évaluer ce pouvoir complexant afin de quantifier la contribution de l’adipate lors de l’étude de l’interaction entre l’ensemble des PDH et l’europium(III).

Tout d’abord le protocole expérimental mis en place pour déterminer le pouvoir complexant de l’adipate est détaillé, suivi des résultats et d’une discussion.

1.1 P

ROTOCOLE EXPÉRIMENTAL

1.1.1 Préparation des solutions europium-adipate

Quinze solutions de concentrations différentes en acide adipique (99,5 %, Fluka) ont été préparées par pesée. La concentration la plus importante est de 0,17 mol∙kgeau-1, correspondant à la limite de solubilité de l’acide adipique (Bretti et al., 2008).

Afin de pouvoir déterminer au mieux la constante de complexation Eu(III)-adipate, les conditions suivantes ont été respectées :

- La force ionique doit être identique pour chaque solution. Afin de respecter cette condition, chaque solution contient 0,5 mol∙kgeau-1 de perchlorate de sodium (≥ 98 %, Sigma-Aldrich).

- Dans le but de comparer les spectres d’émission, la concentration en europium est constante et est égale à 10-5 mol∙kgeau-1. Cette concentration permet d’atteindre un très bon rapport signal sur bruit tout en limitant la durée d’acquisition du signal. La solution mère d’europium(III) a été préparée par dissolution de l’oxyde d’europium Eu2O3 (99,9 %, Alfa Aesar) dans une solution à 0,1 mol∙kgeau-1 d’acide perchlorique HClO4 (60 %, Fisher Scientific).

 Le pH est ajusté à 5,0 à l’aide de solutions de NaOH (99 %, Prolabo®) allant de 0,1 à 10 mol∙kgeau-1 selon la concentration d’acide adipique (voir annexe 3.5 pour la mesure du pH). L’ajout des solutions de soude ne dépasse pas 3 % du volume total de la solution. Le pH doit être suffisamment acide pour que l’europium soit sous forme Eu3+ majoritaire et suffisamment basique pour que l’adipate existe de manière notable en solution : pH 5 est un bon compromis pour obtenir ces deux conditions (Figure IV-78). Les constantes d’acidité, calculées à partir de la base de données NIST (2013), ainsi que les constantes d’hydrolyse de l’europium à force ionique nulle, sont rappelées en annexe 6.

183 Figure IV-78 - Spéciation de l'europium (à gauche) et de l’acide adipique (à droite) en solution aqueuse en fonction du pH à force ionique 0,5 mol∙kgeau-1 NaClO4 . L’acide adipique est noté AH2, l’adipate est noté A2-. Il faut

noter que l’existence de l’espèce Eu(OH)4- a été remise en cause dans la littérature (Hummel et al., 2002) et n’a pas été prise en compte pendant cette étude.

1.1.2 Acquisition du signal de luminescence de l’europium en présence d’adipate

La SLRT repose sur l’excitation sélective d’une espèce grâce à une impulsion laser puis l’observation de la luminescence émise par l’espèce lors de son retour à l’état fondamental (Wagner et Vian, 1999; Moncorgé, 2015). Le principe de la SLRT est décrit dans le chapitre I, §7.2 et Ie montage expérimental utilisé pour les analyses SLRT est détaillé en annexe 1.10. Le montage SLRT utilisé au laboratoire est un montage intégrateur. La décroissance de fluorescence peut donc être calculée comme suit :

𝐼

𝑖

= ∫

°

𝐼

𝑖

𝑒

𝜏𝑡𝑖 𝐷+𝐿

𝐷

𝑑𝑡 = 𝐼

°𝑖

𝜏

𝑖

𝑒

𝜏𝐷𝑖

(1 − 𝑒

𝜏𝐿𝑖

)

(IV-32)

avec D le délai en secondes (décalage de temps entre l’impulsion laser et le démarrage de l’acquisition du spectre d’émission), L la largeur de porte de mesure en secondes (durée de l’acquisition), i le temps de vie radiatif de l’espèce i en secondes et °

𝐼

𝑖 la luminescence initiale de l’espèce i.

Lorsque deux espèces émettent de la luminescence (une molécule organique émettant de la luminescence parasite à temps de vie courte et un lanthanide par exemple), la luminescence observée à un délai D est égale à la somme Imolécule organique+ Ilanthanide. Le délai et la largeur de porte de mesure permettent de sélectionner l’espèce à analyser si les temps de vie des espèces en solution sont suffisamment distincts (Figure IV-79).

6 8 10 12 14 0 20 40 60 80 100

Répartition (%)

pH

Eu3+ Eu(OH)2+ Eu(OH)2+ Eu(OH)3 2 4 6 8 0 20 40 60 80 100

Répartition (%

)

pH

AH

2

AH

A

2-184

Figure IV-79 - Illustration de l’acquisition du signal de luminescence par SLRT. La courbe jaune et la courbe rouge représentent deux décroissances de luminescence correspondant chacune à la molécule organique et au lanthanide respectivement. D est le délai, L est la largeur de porte de mesure et et sont les temps de vie des

espèces luminescentes. Sur ce schéma, D et L ont été choisis afin d’observer l’espèce correspondant au signal rouge.

Dans la plupart des cas, la complexation de l’europium(III) modifie son temps de vie de luminescence, initialement de l’ordre de 110 µs (Horrocks et al., 1977), suite à l’échange de molécules d’eau par un ou plusieurs ligands. L’acquisition de la décroissance de luminescence permet de calculer le temps de vie de l’europium complexé et de déterminer le nombre de complexes (cf. chapitre I, §7.2).

La décroissance du signal de luminescence émis par l’europium(III) a été observée entre 503 et 715 nm. Ce signal correspond aux transitions 5D07Fj avec j entier compris entre 0 et 4 (cf. chapitre I, §7.2 pour la description des transitions). L’acquisition débute 10 µs après l’impulsion laser afin de ne pas observer les transitions 5D17Fj de l’europium(III), dont le temps de vie est d’environ 2 µs, ni l’éventuelle luminescence émise par les ligands organiques.

Les paramètres utilisés en SLRT pour l’acquisition des spectres d’émission et des temps de vie de luminescence sont décrits en annexe 1.10.2.

1.2 R

ÉSULTATS ET DISCUSSION

Les spectres d’émission de l’europium(III) en présence de différentes concentrations en adipate sont présentés en Figure IV-80. Cette figure montre que lorsque la concentration en acide adipique augmente, l’intensité relative de la transition 5D07F2 augmente.La transition 5D07F0 apparaît lorsque l’europium(III) est en contact avec l’adipate, ce qui signifie que l’environnement de l’europium(III) n’est plus centro-symétrique (Judd, 1962; Ofelt, 1962). De plus, un décalage progressif des bandes des transitions 5D07F2 et 5D07F1 vers les longueurs d’onde plus élevées est observé. La représentation de la Figure IV-80 est normalisée à l’aire de la transition 5D07F1 dont l’aire est la moins sensible au changement de symétrie (Binnemans, 2015).

1

2

L

D

L

umi

nesc

ence

Temps

185 Figure IV-80 - Superposition des spectres d'émission de l'europium(III) pour chacune des 15 solutions préparées.

Les spectres sont normalisés à l’aire sous la bande correspondant à la transition 5D0→7F1.

L’ajustement des décroissances de luminescence aboutit à la détermination d’un seul temps de vie (un exemple est donné en annexe 7.1 et les conditions d’acquisitions sont rappelées en annexe 1.10.2). Ce résultat atteste de l’existence d’un seul complexe en solution.L’agent complexant est l’adipate noté A2- et interagit avec l’europium(III) selon la réaction de complexation suivante :

𝐸𝑢3++ 𝑛𝐴2−⇆ 𝐸𝑢𝐴𝑛(3−2𝑛) (IV-33) où n est la stœchiométrie de la réaction. Les conditions expérimentales de cette étude permettent de ne considérer que l’espèce Eu3+ en solution. Les espèces hydroxo de l’europium(III) sont négligées (cf §1.1.1 de ce chapitre).

La réaction aboutit à la constante de complexation ci-dessous :

𝛽 = [𝐸𝑢𝐴𝑛

(3−2𝑛)]

[𝐸𝑢3+][𝐴2−]𝑛 (IV-34)

L’expression du logarithme du rapport de la concentration de l’europium(III) complexé sur la concentration de l’europium(III) libre est la suivante :

𝑙𝑜𝑔10([𝐸𝑢𝐴𝑛 (3−2𝑛)] [𝐸𝑢3+] )= 𝑛𝑙𝑜𝑔10([𝐴2−])+ 𝑙𝑜𝑔10(𝛽) (IV-35) 560 580 600 620 640 660 680 700

I

no rm ali e

(u.a

.)