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Le rôle pro-tumoral de l’autophagie

I). Cette classification immunohistochimique est actuellement utilisée en pratique clinique

3. Autophagie et cancers

3.2 Le rôle pro-tumoral de l’autophagie

Alors qu’une baisse de flux autophagique semble promouvoir le développement tumoral, ce mécanisme semble être nécessaire pour la survie et le maintien de l’intégrité des cellules cancéreuses. De plus, l’autophagie est induite dans des cellules transformées lorsqu’elles sont exposées à différents stress et procure aux cellules cancéreuses un avantage pour affronter ces stress, que cela soit au niveau du site primaire tumoral ou lors de la progression métastatique. Les principaux mécanismes pro-tumoraux de l’autophagie seront décrits dans les paragraphes suivants.

3.2.1 L’hypoxie

L’hypoxie tumorale résulte d’un manque de vascularisation au sein de la tumeur, qui est associée à un phénotype plus agressif, une plus grande prédisposition à former des métastases et donc à un faible pronostic. L’autophagie est induite en conditions hypoxiques en particulier dans les cellules se localisant au cœur de la tumeur et leur permet de survivre (Degenhardt et

al, 2006). L’hypoxie active le facteur de transcription HIF1, qui permet de réguler

l’expression de gènes impliqués dans l’angiogenèse, l’invasion, la résistance aux thérapies (pour une revue, voir Bertout et al, 2008), mais permet également, comme décrit précédemment en «2.2.2.1.2», de réguler positivement l’autophagie en induisant l’expression

des gènes BNIP3 et NIX (Zhang et al, 2008; Bellot et al, 2009). Les mécanismes par lesquels l’autophagie permet la survie des cellules tumorales en conditions hypoxiques restent cependant indéterminés. Il semblerait que la fonction de recyclage de l’autophagie pourrait permettre aux cellules tumorales stressées de faire face à la demande accrue en nutriments ( (pour une revue, voir Rabinowitz & White, 2010).

3.2.2 Détachement de la matrice extracellulaire

Le détachement des cellules épithéliales de la matrice extracellulaire induit leur mort par une forme d’apoptose, nommée anoïkis (Frisch & Francis, 1994). Le processus autophagique est induit dans les cellules immortalisées ou transformées par un oncogène, suite à leur détachement de la matrice, pour se protéger de l’anoïkis (Fung et al, 2008; Lock et

al, 2011). A ce jour, les mécanismes par lesquels l’autophagie favorise la survie des cellules

après leur détachement ne sont pas encore connus, mais il semble que son rôle protecteur de stress oxydant ainsi que sa capacité à synthétiser de l’énergie pourraient contribuer à la survie des cellules cancéreuses après leur détachement.

Des cultures 3D de cellules mammaires ont montré que l’autophagie est induite dans les cellules détachées et que son inhibition permet de promouvoir la mort de ces cellules (Karantza-Wadsworth et al, 2007; Fung et al, 2008). De plus, l’inhibition de l’autophagie dans des cellules de cancer du foie empêche l’apparition de métastases pulmonaires, de manière dépendante de l’anoïkis (Peng et al, 2013). Ces études montrent que l’autophagie peut permettre aux cellules cancéreuses de résister à l’anoïkis, ceci dans le but de survivre suite à leur détachement de la matrice, mais également lors de leur migration jusqu’au site métastatique éloigné (pour une revue, voir Kenific et al, 2010).

3.2.3 Transformation oncogénique

Lors de la transformation oncogénique, il est nécessaire que les cellules en cours de transformation présentent un taux basal d’autophagie, afin de répondre à l’augmentation de la demande en énergie. En effet, l’inhibition de l’autophagie dans des cellules mammaires transformées par l’oncogène RAS (les formes mutées de RAS constitutivement actives H-RAS ou K-RAS) diminue la croissance indépendante de l’ancrage des cellules tumorales (Lock et

al, 2011). De plus, l’inhibition de l’autophagie dans des cellules épithéliales mammaires

exprimant K-RAS conduit à une diminution de la capacité de ces cellules à former des colonies sur agar mou, mais également la croissance tumorale in vivo (Kim et al, 2011). De manière intéressante, l’autophagie a très peu d’effet sur la prolifération de cellules non

transformées (Lock et al, 2011). La transformation oncogénique par RAS favorise la production d’énergie et la biosynthèse de macromolécules afin de permettre une prolifération rapide et l’autophagie est un moyen de maintenir ces voies métaboliques. En effet, l’autophagie permet d’augmenter le métabolisme du glucose en facilitant la capture du glucose et le flux glycolytique (Lock et al, 2011). D’autres études montrent que l’inhibition de l’autophagie pendant la transformation par RAS est associée à une diminution de la consommation d’oxygène et une diminution du taux de certains intermédiaires du cycle de Krebs (Guo et al, 2011; Yang et al, 2011). Ces travaux montrent que l’autophagie permet aux cellules tumorales transformées par RAS de proliférer rapidement grâce, en partie, à l’augmentation de leurs capacités métaboliques. Cependant, des mutations de RAS ne sont pas présentes dans tous les cancers du sein. En effet, d’autres voies oncogéniques peuvent être activées, telles qu’HER2 ou PI3K, qui altèrent les voies métaboliques de manière similaire à RAS, afin de maintenir le phénotype transformé des cellules. Il serait donc important dans le futur d’étudier comment l’autophagie module les voies métaboliques dans les cellules de cancer du sein présentant ce type d’altérations génétiques.

3.2.4 Mort cellulaire de type II

Une activation prolongée de l’autophagie conduit à un recyclage des protéines et organites au-delà du seuil de survie, pouvant induire la mort des cellules cancéreuses déficientes en apoptose (Wang et al, 2015). Cependant, le concept de « mort autophagique » a été sujet à de nombreuses controverses. En effet, ce processus de mort a tout d’abord été décrit avec la présence d’autophagosomes (Schweichel & Merker, 1973) mais dans de nombreux cas, l’autophagie est induite par les cellules mourantes dans le but ultime de résister au stress (Boya et al, 2005). La mort autophagique est donc définie comme une mort non apoptotique, associée à une augmentation du flux autophagique dans les cellules mourantes et pouvant être évitée par l’inhibition de l’autophagie. L’induction de mort de type II dans les cellules cancéreuses pourrait ainsi devenir une stratégie thérapeutique (pour une revue, voir Eisenberg-Lerner et al, 2009).

3.2.5 Cellules souches cancéreuses

Des études récentes ont montré l’existence d’une hiérarchie au sein des tumeurs, préservée par une sous-population de cellules tumorales, appelées cellules souches cancéreuses (CSCs), douées de capacités d’auto-renouvellement et de différenciation (Clarke

métastases ou encore de résistances aux traitements (pour une revue, voir Gangemi et al, 2009). Il semblerait que le processus autophagique soit nécessaire à la survie et les capacités tumorigènes des CSCs de cancer du sein (Yue et al, 2013; Cufí et al, 2011; Gong et al, 2013). En effet, les CSCs de cancer du sein présentent un flux autophagique plus élevé que les autres cellules cancéreuses et l’inhibition de l’autophagie par l’extinction de BECLIN1dans des CSCs provenant de la lignée MCF-7, mise en culture sous forme de mammosphères, conduit à une diminution de leur capacité à former des tumeurs in vivo, alors que l’inhibition de l’autophagie augmente la capacité des cellules MCF-7 adhérentes à former des tumeurs in

vivo (Gong et al, 2013). Ces données suggèrent que l’autophagie peut avoir un rôle pro-

tumoral dans les CSCs, mais des travaux sont encore nécessaires afin d’identifier les mécanismes impliqués dans la survie des CSCs. L’utilisation d’inhibiteurs de l’autophagie pourrait alors devenir une stratégie thérapeutique très prometteuse pour sensibiliser les CSCs aux thérapies déjà existantes et réduire le risque de rechutes chez les patientes atteintes de cancer du sein.