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Autophagie, épigénétique et cancer

epigenetically regulated in breast cancer models

FIGURE LEGENDS

1. Autophagie, épigénétique et cancer

Même si la régulation de l’expression des gènes de l’autophagie par des modifications épigénétiques reste encore mal décrite, de nombreuses études ont récemment suggéré un lien étroit entre modifications épigénétiques et expression des gènes de l’autophagie dans les cancers. En effet, une hyperméthylation de gènes de l’autophagie, tels que BECLIN1, ULK2,

BNIP3, ou encore ATG16L2, a été reportée dans les cancers du sein (Li et al, 2010), les

glioblastomes (Shukla et al, 2014), les cancers colorectaux (Murai et al, 2005) et les leucémies myéloïdes chroniques (Dunwell et al, 2010), respectivement.

L’expression de GABARAPL1 est généralement diminuée dans les lignées de cancer du sein et la surexpression de cette protéine dans la lignée de cancer du sein MCF-7 conduit à une diminution significative de leur prolifération in vitro (Berthier et al, 2010) mais conduit également à une diminution de leur capacité à former des tumeurs in vivo (Zhang et al, 2011). De plus, une forte expression de GABARAPL1 a été montrée comme associée à un bon pronostic dans les cancers du sein (Berthier et al, 2010) et une faible expression de

GABARAPL1 est associée à un faible pronostic dans les carcinomes hépatocellulaires (Liu et al, 2014). Les résultats présentés dans la Publication I confirment ces données et montrent

une corrélation inverse entre l’expression de GABARAPL1 dans les cancers du sein et le grade des échantillons. Ces données ont également été confirmées dans une publication récente, où les auteurs montrent une diminution de l'expression de GABARAPL1 dans les cancers du sein

(Lebovitz et al, 2015). Puisqu’une étude avait montré que la diminution de l’expression de

BECLIN1 dans les cancers du sein pouvait être associée à une hyperméthylation de son

promoteur (Li et al, 2010), nous avons émis l’hypothèse que l’expression de GABARAPL1 pouvait être également régulée dans les cancers du sein par des modifications épigénétiques. Notre étude a confirmé que le promoteur de GABARAPL1 est effectivement hyperméthylé dans les tissus tumoraux et cellules cancéreuses, alors qu’il l’est très peu dans les tissus non- tumoraux et dans les cellules immortalisées mammaires MCF 10A. Nos résultats ont également montré que le promoteur de GABARAPL1 est hyperméthylé mais présente également une baisse de l’acétylation de l’histone H3, un lien entre méthylation de l’ADN et désacétylation d’histones ayant été montré auparavant (Sharma et al, 2005; Bacon et al, 2007).

L’accessibilité des facteurs de transcription au niveau du promoteur étant généralement essentielle pour permettre l’expression du gène, nous avons souhaité déterminer si cela était également le cas dans la régulation de l’expression de GABARAPL1. Nos résultats ont montré que l’expression de GABARAPL1 dans nos modèles est contrôlée par CREB-1 et que l’inhibition pharmacologique de la méthylation de l’ADN ainsi que de la désacétylation des histones facilite le recrutement de CREB-1 au niveau du promoteur de GABARAPL1. Nos données sont en accord avec celles de la littérature qui avaient décrit CREB-1 comme un activateur transcriptionnel de l’autophagie (Seok et al, 2014). En effet, l’inhibition de l’expression de CREB-1 par siRNA diminue significativement l’expression de gènes de l’autophagie, tels que ULK1, ATG5, ATG7 ou TFEB, dans des cellules hépatiques en condition de carence en nutriments et son expression a également été associée à un facteur de mauvais pronostic dans les cancers du sein (Chhabra et al, 2007). Toutes ces données suggèrent que l'effet de CREB-1 sur la régulation de l'expression des gènes de l’autophagie pourrait expliquer en partie son rôle dans les cancers.

L’utilisation de drogues ciblant les modifications épigénétiques a déjà été approuvée par la FDA (U.S. Food and Drug Administration) pour le traitement de certains cancers, tels que les lymphomes à cellules T cutanés (vorinostat, despsipeptide), les lymphomes à cellules T périphériques (belinostat), les myélomes multiples (panobinostat) ou encore les syndromes myélodysplasiques (azacytidine et décitabine) (Nervi et al, 2015). A ce jour, de nombreux essais cliniques testent l’utilisation de drogues épigénétiques dans le traitement de cancers du sein (voir Introduction, 2.6). En effet, un traitement simultané par le 5-aza-

du sein MDA-MB-231 et augmenter l’efficacité anti-tumorale du paclitaxel (Zou et al, 2011). Dans la lumière de nos résultats, l’augmentation de l’autophagie pourrait être en partie liée à l’augmentation de l’expression de GABARAPL1. De plus, il a été montré que la surexpression de GABARAPL1 dans les cellules MCF-7 permet d’augmenter le flux autophagique et d’inhiber la croissance tumorale in vivo (Zhang et al, 2011), ce qui montre que la régulation de l’autophagie est un mécanisme qui joue un rôle important dans l’agressivité des cellules cancéreuses. Nous avons montré que l’expression de GABARAPL1 est régulée de manière épigénétique dans les cancers du sein, tout comme d’autres gènes ATGs tels que BECLIN1,

ATG2B, ATG4D, ATG9A et ATG9B (Li et al, 2010; Zhang et al, 2016). Il serait intéressant

maintenant de déterminer s'il est possible de ré-induire l’expression de gènes ATGs chez des patientes à l’aide de drogues épigénétiques tels que des inhibiteurs de DNMTs ou d'HDACs. Cependant, les inhibiteurs disponibles à ce jour en essai clinique sont généralement à large spectre. En effet, ils permettent d’activer de manière non ciblée l’expression de gènes inhibés par une hyperméthylation de l’ADN mais peuvent donc favoriser la tumorigenèse ou encore augmenter l’agressivité des cellules cancéreuses en réactivant l’expression d’oncogènes ou encore provoquer une instabilité génomique due à l’hypométhylation globale de l’ADN. Par exemple, DNMT1 a été décrite comme étant impliquée dans l’inhibition de l’expression d’oncogènes et de gènes suppresseurs de tumeurs (Robert et al, 2003; Chik & Szyf, 2011) et c’est pourquoi de nombreuses équipes tentent de développer des inhibiteurs spécifiques des complexes protéiques contenant l’enzyme DNMT1 et impliqués spécifiquement dans l’inhibition de l’expression de gènes suppresseurs de tumeurs, sans inhiber les complexes DNMT1 qui jouent un rôle dans l’inhibition de l’expression d’oncogènes, afin d’éviter les effets secondaires non désirés. DNMT1 peut former de nombreux complexes avec d’autres protéines, comme les complexes DNMT1-CFP1 ou DNMT1-PCNA-UHRF1-G9a (Bostick et

al, 2007; Sharif et al, 2007; Skalnik, 2010). L’inhibition spécifique du complexe DNMT1-

PCNA-UHRF1 par un peptide spécifique induit une hypométhylation globale de l’ADN, des aberrations génétiques et la transformation tumorale de cellules du cerveau (astrocytes), du sein ou du poumon (Pacaud et al, 2014). Ce complexe n’est donc pas une cible pour le développement d’inhibiteurs spécifiques de complexes DNMT1 dans les cancers. Cependant, il a été montré que le complexe DNMT1-CFP1 peut avoir un effet anti-cancéreux. En effet, la déstabilisation par un peptide spécifique de l’interaction DNMT1-CFP1 permet de diminuer les phénotypes cancéreux in vitro et favorise in vivo l’efficacité d’une chimiothérapie, le temozolomide, dans un modèle de gliome (Cheray et al, 2014). Les mécanismes par lesquels

l’inhibition de cette interaction permet de diminuer les phénotypes cancéreux et l’efficacité du temzolomide restent cependant encore inconnus.

Il serait donc intéressant par la suite de caractériser le(s) complexe(s) qui interviennent dans la régulation épigénétique de l’expression de GABARAPL1 ainsi que d’autres gènes de l’autophagie dans les cancers du sein. Ceci dans le but de développer des inhibiteurs spécifiques et permettre la réexpression spécifique de ces gènes de l’autophagie chez les patientes présentant une baisse de leur expression. Ainsi, dans une approche de médecine personnalisée, la caractérisation des différents complexes avec des DNMTs pourrait être utilisée pour créer des inhibiteurs spécifiques et cibler les patients qui présentent des modifications de leur méthylome. L’interaction des DNMTs avec leurs partenaires spécifiques pourrait être réalisée de manière routinière chez les patientes, à partir de coupes histologiques provenant de biopsies incluses en paraffine. En effet, la technique P-LISA (Proximity-Ligation in situ assay) permet de mesurer et quantifier, par microscopie à fluorescence, l’interaction entre deux protéines distantes de 40 nm maximum, en utilisant deux anticorps primaires d’espèces différentes dirigés contres les protéines d’intérêt. Il a déjà été montré que cette technique peut être utilisée sur des coupes de tissus fixées au formol et incluses en paraffine (Aubele et al, 2010). La distinction des différents sous-groupes de cancer du sein étant réalisée à partir de marquages immunohistochimiques (Introduction,

« 1.2 »), il serait assez aisé d’effectuer en parallèle un marquage P-LISA pour cibler les

patientes qui présentent des modifications du type d’interaction avec la DNMT recherchée.