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Le rôle de diagnostic : apport des RH dans la phase de due diligence

2.4 La phase de Due Diligence

2.4.4 Le rôle de diagnostic : apport des RH dans la phase de due diligence

Quasiment toutes les sociétés en passe d’en acquérir une autre réalisent un audit financier. Les auditeurs vérifient les postes clés comme les capitaux propres, le résultat net, le résultat d’exploitation, qui sont des critères entrant dans la valorisation de la société, quelque soit la méthode utilisée pour l’évaluation.

Elles sont moins nombreuses à demander un audit stratégique, appelé également « full audit » ou due diligence complète. Pourtant, seul l’audit stratégique permet d’évaluer le potentiel de développement et de rentabilité de la cible en étudiant l’efficacité et la pertinence de la stratégie suivie, le positionnement et la stratégie à moyen terme de l’entreprise, le profil et les compétences de l’équipe dirigeante, les perspectives présentées par le business plan, les potentialités du secteur dans lequel évolue la cible, ses parts de marché, son climat social, la compatibilité des deux cultures d’entreprises, etc.

Il est à noter qu’en l’absence de normes obligatoires, l’acquéreur négocie directement avec sa cible, l’étendue de l’investigation conduite.

C’est dans ce cadre de la due diligence stratégique qu’interviennent les RH. Le DRH et son équipe étudient l’intérêt en termes de RH et interviennent dans la valorisation de l’opération ainsi que de ses impacts sociaux sur les coûts de fonctionnement de l’entreprise. Ils veillent également à préparer la réussite de l’intégration, une fois la fus ion réalisée.

L’étude par les RH de ces problématiques se réalise par thèmes : statut collectif, statuts individuels, rémunération et conditions de travail, relations sociales, protection sociale, gestion des compétences, SIRH, modes de management.

Une analyse RH, tant quantitative que qualitative nécessite tout d’abord de se procurer, pour le diagnostic, des sources d’information les plus complètes possibles.

Une liste peut à ce titre être établie, dont les documents principaux sont les suivants : - Sources d’information sur le statut collectif : le bilan social, la convention collective

applicable, les accords d’entreprise, accord d’intéressement et de participation en vigueur, le règlement intérieur, un bulletin de paie type, etc.,

- Sources d’information sur le statut individuel et les rémunérations : les CV, contrats de travail et avenants des cadres dirigeants, et toutes autres informations concernant leurs rémunérations (dont programme de stock options), les contrats de travail et avenants des salariés expatriés, un tableau de la rémunération moyenne par catégorie de salariés, etc.,

- Sources d’information sur les conditions de travail et les relations sociales : procès- verbaux des instances représentatives du personnel, historique des relations avec l’inspecteur du travail, liste des contentieux en cours, conflits sociaux, etc.,

- Sources d’information sur la protection sociale : contrats de prévoyance retraite, information concernant les fonds de pension, comptes -rendus des contrôles des organismes sociaux de recouvrement, etc.,

- Sources d’information sur la gestion qualitative des RH (selon le temps alloué à la phase de data room) : modes et grilles d’appréciation du personnel, plans de succession, pyramide des âges, plans de préretraite éventuels, etc.,

A partir de ces documents, les intervenants RH chargés d’étudier les documents contenus dans la data room peuvent apporter une réelle expertise dans l’aspect social de cette phase de diagnostic, en se focalisant notamment sur quatre points majeurs.

2.4.4.1 L’analyse des compétences des collaborateurs de la société cible

Les RH de l’entreprise doivent établir le coût de ces compétences et déterminer à quelles qualifications correspondent les catégories : Il faut donc calculer le coût d’acquisition des compétences-clés, établir une projection des postes maintenus, supprimés ou modifiés ; connaître quelles autres ressources clés on peut retenir et quels incentives pourront être mis en œuvre.

Il faut donc analyser les compétences détenues par les collaborateurs et opérer une réflexion des politiques de développement des compétences et des pratiques de la cible.

Cette réflexion doit être orientée en vue de savoir si les ressources clés répondent bien aux attentes.

Il faut, pour cela, dénombrer le nombre de salariés et identifier leurs profils : à cette fin, l’étude du bilan social, la liste des personnes dépositaires de brevets, les plans de succession, le plan de recrutement, la répartition des effectifs par métier, le type de classification des postes, l’évolution des effectifs, les prévisions d’emploi à moyen terme, les organigrammes sont autant d’indices précieux permettant d’évaluer le modèle d’organisation RH de la société. Cette étude permet également d’envisager la complémentarité des métiers, de planifier les besoins en effectifs pour chaque fonction au sein de la future entité économique. Elle permet également de mettre en évidence les « doublons », et alimente les études d’éventuelle restructuration.

Cette phase peut également donner lieu à un audit culturel. Cependant, cet audit est très peu pratiqué alors que la dimension culturelle est un facteur clé du succès ou de l’échec de l’opération : la culture d’entreprise est considérée comme un facteur transversal plutôt qu’une question relevant de la seule fonction RH.

2.4.4.2 Le chiffrage des coûts de personnel

Il est important de chiffrer les coûts de personnel actuels et les coûts sur le long terme. Les normes internationales imposent en effet aux entreprises d’intégrer dans leurs comptes l’ensemble de leurs engagements vis-à-vis des salariés.

Les coûts de personnel immédiats sont faciles à calculer : masse salariale des 10 dernières années, politique de rémunération... Le diagnostic permet d’apprécier l’évolution et le pourcentage d’augmentation moyen annuel.

Il faut également évaluer la rentabilité des salariés : le ratio effectif/CA doit être calculé et comparé à celui du secteur d’activité. Un mauvais ratio rend une restructuration inévitable. Pour plus de précisions, une décomposition de la rémunération par catégorie de fonctions permet de calculer les impacts sur les coûts de fonctionnement de l’entreprise et de les mettre en perspective avec la politique de la société.

Le chiffrage des coûts de personnel peut avoir par ailleurs un impact sur la valorisation de la société cible et peser sur le prix d’acquisition. Intervient ici l’évaluation des engagements à long terme vis-à-vis des salariés. Par exemple, dans les pays anglo-saxons, les engagements de retraite peuvent être tellement lourds qu’ils peuvent faire échouer une acquisition.

évaluation devrait entrer en compte pour la détermination du prix d’acquisition, dans l’hypothèse où les engagements seraient d’une ampleur telle qu’ils pèseraient sur le prix de la cible.

2.4.4.3 L’évaluation chiffrée des risques sociaux individuels et collectifs

La due diligence RH nécessite d’évaluer les risques financiers liés au personnel, en distinguant les risques individuels et les risques collectifs.

Les risques individuels sont les suivants : contentieux en cours, contrats précaires susceptibles d’être requalifiés en contrats à durée indéterminée, indemnités de rupture conventionnelle, golden parachutes, coût de départ éventuel des dirigeants, coût de départ des compétences clés, et autres engagements individuels comme des primes de rétention. Bien qu’anodins de prime abord, ces risques individuels peuvent donner des éléments sur le climat social, par exemple dans l’hypothèse où de nombreux contentieux seraient en cours. Les risques collectifs permettent quant à eux d’appréhender les coûts potentiels de relations sociales difficiles. Ils sont un élément révélateur des relations sociales au sein de la cible : de nombreux conflits collectifs peuvent être source potentielle de blocage de l’opération de rapprochement, à tout le moins de discussion et de négociation.

En fournissant une analyse des risques sociaux individuels et collectifs, assortie d’une évaluation chiffrée, la fonction RH apparaît ici encore comme interlocuteur majeur de sa Direction Générale en amont de l’opération d’acquisition.

2.4.4.4 L’évaluation des coûts sociaux de rapprochement des sociétés

L’objet du diagnostic est ici de comparer les statuts sociaux des deux entreprises.

Il faut étudier la faisabilité des synergies dans le cadre du rapprochement : relations avec les partenaires sociaux, positionnement des syndicats, historique des conflits.

Les acteurs RH doivent calculer les coûts d’unification des statuts sociaux et de restructuration éventuelle. Il convient d’étudier dans le détail les écarts de statut social collectif et les coûts d’unification, pour se rendre compte des impacts financiers des éventuels projets de réorganisation. Au-delà des accords collectifs, une étude des usages est nécessaire, tant sur le plan des négociations que dans une perspective d’acceptabilité sociale de la fusion. Nous rappellerons ici qu’une fusion ne se traduit pas nécessairement par une harmonisation complète des statuts collectifs et individuels. Dans l’hypothèse où l’entreprise à l’initiative de la fusion ne dénoncerait pas les accords collectifs et autres usages de la

société cible, ceux-ci continueraient de trouver application dans le nouvel ensemble en vertu des droits individuels acquis.

Le rôle de la fonction RH durant la phase dite de due diligence (diagnostic des compétences des salariés de la cible, chiffrage des coûts de personnel, évaluation de la qualité du dialogue social, ...) est donc un rôle clé, tant dans la négociation du rachat de l’entreprise que dans la perspective de la construction et de la modélisation du nouvel ensemble.

Au cours de cette phase de diagnostic, la fonction RH joue un rôle mesurable grâce aux diverses évaluations chiffrées et aux projections futures qu’elle peut réaliser, notamment par l’évaluation des engagements à long terme de la cible.

A condition d’être impliquée en amont du rachat de la cible, la fonction RH pourra jouer un rôle tangible pour sa Direction Générale et se positionner en partenaire majeur de l’opération de rapprochement.