Comme indiqué au paragraphe 4.2.2, nous avons simulé l’étape d’ensemencement cellulaire
du biomatériau idéalisé en faisant varier la vitesse moyenne du fluide au niveau de la face amont
de l’échantillon. Nous avons pour cela choisi une vitesse de0.5mm.s−1, qui correspond à un débit
d’environ 0.86ml.min−1 pour les échantillons utilisés lors des essais expérimentaux, et se situe
donc au milieu de la plage de débits testés sur ces derniers (voir chapitre 3). Les résultats de cette
simulation sont présentés sur la figure 4.15.
FIGURE 4.15 – Répartition cellulaire au sein de l’échantillon après simulation de la phase d’ensemencement pour
une vitesse moyenne d’entrée du fluide de0.5 mm.s−1. A) : Nombre de cellules ensemencées dans chaque rangée
de pores au cours du temps (intervalle de temps entre deux simulations : 2s) ; B) : Valeur de la fonctionattachle
long des parois àt= 0; C) : Répartition cellulaire après ensemencement (coupe réalisée au milieu du biomatériau) ;
D) et E) : Agrandissements des pores des rangées 1 et 2, pour lesquels une couche cellulaire est observée à la fin de
l’ensemencement.
Sur la figure 4.15.A, qui représente le nombre de cellules ensemencées dans chaque pore à
chaque pas de temps pour les différentes rangées de pores, on peut observer qu’environ81% des
cellules entrant dans le biomatériau restent dans la première rangée de pores, et17%d’entre elles
adhèrent au biomatériau au niveau de la deuxième rangée de pores, les2%restants étant transmis à
la troisième rangée. Ces observations correspondent aux résultats obtenus expérimentalement : les
coupes histologiques des échantillons ensemencés ont montré la formation d’une couche épaisse
de cellules sur la face amont des biomatériaux et une deuxième, plus mince, dans les pores situés
directement après cette face, seules quelques cellules étant parsemées dans le reste de l’échantillon.
La figure 4.15.B, représentant la fonctionattachle long des parois de l’échantillon modélisé,
permet d’expliquer ce phénomène. On peut alors distinguer deux types de parois : celles situées au
niveau de la partie amont de chaque pore, non atteignables par les cellules en raison de la direction
de l’écoulement, sur lesquelles la fonction attach est donc nulle, et celles situées au niveau de
la partie aval de ces derniers, pour lesquelles la fonction attachest supérieure à 0.85. Dans ces
conditions d’écoulement, il est donc très facile aux cellules de s’attacher à la paroi du biomatériau
dès lors qu’elles entrent en contact avec cette dernière. De plus, en raison de la structure alvéolaire
du matériau, le ratio celltrav(t) = cellent(t)× Sconn/(Sconn+Satt), qui représente la fraction
des cellules entrant dans un pore qui traversent ce dernier sans rencontrer de paroi, est inférieur
à 10%. A la fin de l’étape d’ensemencement, l’échantillon simulé, représenté en coupe sur les
figures 4.15.C, 4.15.D et 4.15.E, présente donc une distribution cellulaire très hétérogène. Pour
améliorer l’efficacité du protocole d’ensemencement sans modifier la structure du biomatériau, il
peut alors être intéressant d’augmenter le débit de fluide imposé à l’entrée de l’échantillon, et donc
la vitesse moyenne du fluide en amont de ce dernier. Nous avons ainsi réalisé plusieurs calculs, en
augmentant progressivement ce paramètre, afin d’étudier son effet sur la capacité d’adhésion des
cellules et leur progression au sein du biomatériau. Les résultats de ces tests sont présentés sur la
figure 4.16.
FIGURE 4.16 – Répartition cellulaire au sein de l’échantillon après simulation de la phase d’ensemencement, pour
différentes vitesses moyennes du fluide imposées à l’entrée de l’échantillon : nombre de cellules ensemencées dans
chaque rangée de pores au cours du temps (intervalle de temps entre deux simulations : 2s) pour une vitesse moyenne
de : A)5mm.s−1, C)7.5mm.s−1, E)8.5mm.s−1et G)10mm.s−1. Les figures B), D), F) et H) présentent la valeur
de la fonctionattachle long des parois àt= 0pour les vitesses considérées respectivement sur les figures A), C), E)
et G).
On observe alors une pénétration des cellules au sein du biomatériau d’autant plus importante
que la vitesse moyenne d’entrée du fluide dans l’échantillon est élevée. Ainsi, pour une vitesse
moyenne d’entrée du fluide de5mm.s−1(figure 4.16.A), les cellules progressent jusqu’à la sixième
rangée de pores, qui était hors d’atteinte lors des essais à0.5mm.s−1. De plus, la densité cellulaire
maximale a été déplacée de la rangée 1 vers la rangée de pores 2. Néanmoins, près de 70% des
cellules restent dans les deux premières rangées de pores, et 20% supplémentaires adhèrent aux
parois de la troisième rangée, les10%restants étant répartis de façon dégressive sur les rangées 3
à 6. Pour des vitesses d’entrée du fluide comprises entre7.5mm.s−1et8.5mm.s−1 (figures 4.16.C
et 4.16.E), on constate une forte diminution des cellules présentes dans la première rangée de pore
en fin d’ensemencement, la grande majorité des cellules se situant cette fois au niveau des rangées
2 et 3. On peut également remarquer que la différence de concentration cellulaire entre les rangées
2, 3 et 4 est moins marquée pour les tests réalisés à 8.5 mm.s−1 (figure 4.16.E). D’autre part, la
fraction transmise à la partie non modélisée de l’échantillon (rangée 7 et au-delà) augmente avec
la vitesse d’entrée du fluide, passant de0%à plus de50%quand la vitesse moyenne d’écoulement
passe de0.5mm.s−1à10mm.s−1.
Enfin, pour une vitesse moyenne d’écoulement de 10mm.s−1 (figure 4.16.G), on observe des
densités cellulaires similaires après ensemencement pour les rangées de pores 2 à 5. Cette densité
est d’ailleurs proche de la densité cellulaire théorique à atteindre pour avoir un ensemencement
cellulaire homogène dans l’échantillon. Seule la première rangée de pore n’est que très peu
colo-nisée.
Cette évolution de la répartition cellulaire au sein de l’échantillon est directement reliée au
ci-saillement induit par l’écoulement du fluide au niveau des parois,viala fonctionattach. La valeur
de cette dernière ne dépend que très peu de la rangée de pore considérée : à l’exception de ceux de
la première rangée, les pores de l’échantillon présentent des taux d’adhésion très similaires (figures
4.16.B, 4.16.D, 4.16.F et 4.16.H). Les pores de la rangée 1, situés sur la face amont de l’implant,
subissent eux des sollicitations plus importantes, d’où les faibles taux d’attachement moyens
rele-vés dans ces zones. Enfin, les zones favorables à l’adhésion cellulaire diminuent au fur et à mesure
de l’augmentation de la vitesse moyenne d’écoulement, augmentant ainsi la progression moyenne
des cellules au sein de l’échantillon.
in-tervenant lors du passage des cellules à travers les connexions entre les pores, qui ralentissent
leur progression. Ils offrent donc une estimation optimiste de la progression des cellules au sein
du biomatériau. Dans ce cas, il semble malgré tout qu’une vitesse de l’ordre de 10mm.s−1 soit
nécessaire pour ensemencer de façon homogène l’échantillon considéré. Hors, de telles vitesses
d’écoulement, vingt fois supérieures à celles utilisées lors des tests expérimentaux (voir chapitre
3), pourraient endommager les cellules. En effet, si le cisaillement évalué numériquement dans le
cadre de ce modèle reste acceptable, ce dernier ne prend pas en compte les autres formes de
solli-citations mécaniques engendrées par l’écoulement du fluide sur les cellules, qui peuvent entraîner
des déformations importantes de ces dernières, menaçant ainsi leur intégrité.
Dans le document
Rôle des phénomènes de transport dans la mise au point de stratégies thérapeutiques de réparation osseuse
(Page 152-157)