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B. Résultats

Dans le document Assemblage dirigé de nano-objets (Page 121-124)

Chapitre 4 : Assemblage ordonné et déterministe de molécules d’ADN uniques

III. B. Résultats

Nous ne consignerons pas dans ce manuscrit les expériences préliminaires qui nous ont permis d’établir les conditions optimales permettant d’obtenir un assemblage contrôlé jusqu’à la molécule individuelle. Ces conditions sont les suivantes : température du substrat à 25°C, vitesse de déplacement de 1 mm/sec, concentration des molécules d’ADN de 10 µg/ml, concentration de Triton X-100 de 1% v/v. Elles ne seront pas rappelées par la suite sauf si l’un de ces paramètres a été intentionnellement manipulé lors d’une expérience spécifique.

8 µm B. Sens de déplacement du ménisque A. 4 µm C. 3 µm

Figure 4. Réseau ordonné de molécules d’ADN phage lambda transférées sur une lamelle fonctionnalisée

APTES après assemblage capillaire dirigé sur timbre microstructuré sous des conditions expérimentales optimales (v=1mm/sec, T°substrat=25°C,[C]ADN=10µg/ml, [C]TritonX-100=1%v/v). (A) Image en fluorescence et histogramme des longueurs des molécules mesurées sur un même réseau. (B) Image AFM à l’air d’un réseau et image AFM à plus fort grandissement d’une molécule d’ADN unique avec le profil topographique correspondant.

La figure 4 montre les résultats que nous avons obtenus après assemblage capillaire dirigé de molécules d’ADN phage lambda sur un timbre microstructuré puis transfert sur une lamelle de verre fonctionnalisée avec une couche moléculaire d’APTES. Comme nous pouvons le voir sur l’image en fluorescence et les images AFM, nous obtenons des réseaux réguliers de molécules d’ADN peignées perpendiculairement au front d’avancée du ménisque de la solution lors de l’assemblage. Après impression, on conserve la morphologie des molécules

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correspondant à celle après assemblage. Les molécules d’ADN ont la même longueur et la même orientation, et sont positionnées de façon précise sur chaque motif. Ces réseaux peuvent être obtenus avec une bonne reproductibilité sur une étendue de plusieurs millimètres et avec un taux d’occupation des sites proche de 100%. Les images AFM de la figure 4 ont été prises à l’air, mais l’imagerie en liquide de ces échantillons est tout à fait réalisable. En effet, les molécules supportent des rinçages ultérieurs et ne sont pas déplacées, elles semblent donc être accrochées de façon robuste à la surface, probablement au travers de points d’accroche multiples le long de chaque molécule avec la surface d’APTES. Dans la figure 4c, la section mesurée montre que la hauteur des molécules est uniforme le long de chaque molécule peignée et sur différentes molécules. Les mesures effectuées sur 30 molécules nous donnent une hauteur moyenne de 1,71 nm (±0,35 nm) allant de 1,42 à 2,08 nm. Les images AFM démontrent que la hauteur mesurée est proche de la hauteur théorique d’une molécule d’ADN double-brin unique (2 nm). Nous pouvons donc dire que la technique d’assemblage capillaire nous permet d’avoir un contrôle sur les paramètres expérimentaux et par extension, un contrôle sur le nombre de molécules à assembler par rapport à la technique de Guan et Lee [32]. Cette technique nous permet de générer des réseaux de molécules d’ADN uniques de façon contrôlée et sur une large étendue.

Si nous analysons maintenant plus en détail les images en fluorescence et AFM de la figure 4, et notamment l’histogramme des longueurs des molécules mesurées sur un même réseau, nous pouvons remarquer que les molécules d’ADN sont sur-étirées par rapport à la longueur nominale. Nous mesurons sur une même zone des valeurs situées autour de 22,9 µm ± 1,9 µm mesuré sur 22 molécules différentes, avec des valeurs comprises entre 19,6 µm et 26,1 µm ce qui est bien plus important que la longueur nominale de l’ADN phage lambda (16,3 µm) [33]. L’étirement des molécules constaté au cours de ces expériences semble être assez uniforme. Dans la suite de ce paragraphe, nous proposons une interprétation qualitative de ces résultats sur la base des mécanismes de l’assemblage capillaire précédemment décrits au chapitre 2.

Schéma 3. Schéma du processus hypothétique d’assemblage des molécules d’ADN. La ligne de contact de la

solution d’ADN de recul parcourt la surface du timbre. Lorsque la ligne de contact rencontre les cavités topographiques, elle reste ancrée pendant un temps caractéristique durant lequel les pelotes d’ADN sont piégées dans les cavités puis la ligne de contact quitte le piège topographique et étire simultanément les molécules à son passage.

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Rappelons que dans notre système nous utilisons une spatule de verre montée sur un bras long flexible de façon à confiner un film mince de liquide sur le substrat. La spatule de verre est fixe et le timbre microstructuré peut être déplacé à vitesse contrôlée en utilisant la platine de translation. La combinaison des forces capillaires et des flux convectifs ayant lieu dans la solution, au voisinage de la ligne triple, sont utilisés pour confiner les molécules d’ADN diluées en solution à la surface du timbre. Les principaux paramètres de notre système qui contrôlent le processus d’assemblage sont la surface du timbre (taille et forme des motifs), la concentration macroscopique nominale des molécules d’ADN dans la solution, la vitesse de déplacement du timbre, l’angle de contact à l’interface liquide/substrat/vapeur, la température. L’assemblage se déroule donc ici directement sur la surface du timbre en PDMS microstructuré qui est hydrophobe. Sur une surface hydrophobe, l’assemblage peut être dirigé si des motifs topographiques sont prédéfinis sur la surface du substrat. La variation abrupte de la topographie au niveau des motifs occasionne un piégeage de la ligne triple. En subissant le déplacement de la platine de translation, et avec un système surfactant modulant correctement la mouillabilité de la surface, l’angle de contact est alors localement réduit pendant toute la durée du piégeage et la ligne triple présente une déformation dont l’allure dépend de la géométrie des motifs et de leur répartition sur la surface. Pendant ce temps d’ancrage caractéristique, un flux convectif de molécules d’ADN nourrit l’interface avec les molécules présentes en solution (le réservoir) et l’assemblage s’opère sélectivement dans les motifs. Ce flux lié à l’évaporation localement accrue par l’abaissement de l’angle de contact peut être modulé par la température. Le nombre de molécules assemblées dans une région spécifique dépend essentiellement du temps d’ancrage, de la concentration des molécules en solution et du taux d’évaporation. Durant le piégeage, les molécules d’ADN sont encore en solution et gardent leur forme en pelote. Pendant que le ménisque s’étire, du au mouvement de la platine, une certaine proportion d’énergie élastique est emmagasinée. Lorsque cette énergie devient supérieure à l’énergie d’ancrage, la ligne triple ou ligne de front claque de manière abrupte et retrouve sa forme initiale. L’étirement des molécules d’ADN a lieu pendant cette phase (schéma 3). Dans notre cas, une vitesse importante et une concentration adaptée ont été nécessaires pour induire le piégeage d’une molécule unique à l’intérieur de chaque cavité topographique suivi de leur étirement quasi-simultané. Nous avons testé plusieurs vitesses et plusieurs concentrations au-dessus et en-dessous des paramètres optimaux (1 mm/sec et 10 µg/ml respectivement). Nous avons observé que réduire la vitesse de la platine ou augmenter la concentration de la solution engendre la formation de cordes d’ADN composées de plusieurs molécules d’ADN peignées. Inversement, augmenter la vitesse de la platine ou réduire la concentration produit des réseaux de molécules d’ADN éparses. En effet, à 1 µg/ml et en dessous de cette concentration, le taux de remplissage du réseau commence à chuter linéairement. Il est à noter également que l’orientation des molécules d’ADN sera toujours perpendiculaire au sens de déplacement donc perpendiculaire à la ligne triple. Par conséquent, en adaptant la concentration des molécules d’ADN, la vitesse de translation de la platine, l’orientation du déplacement et la géométrie des motifs ou cavités topographiques (taille, période et répartition), il nous est possible de créer des réseaux de molécules d’ADN uniques ou des réseaux moléculaires beaucoup plus complexes.

A titre d’exemple, si nous réduisons la périodicité des motifs, nous sommes capables d’obtenir des lignes continues d’ADN sur une large étendue (1cm²) comme nous pouvons le voir sur la figure 5 ci-dessous.

122 4 µm A. 15 µm B. C. 8 µm

Figure 5. A. et B. images en fluorescence et C. image optique par contraste interférentiel en milieu liquide, de

réseaux de lignes continues d’ADN obtenus sous conditions expérimentales optimales (v=1 mm/sec, [C]ADN=10 µg/ml, T°substrat=25°C, [C]TritonX-100=1%v/v) en utilisant des timbres ayant des motifs topographiques de courte période (12 µm de période).

Dans la suite nous nous intéresserons au rôle du surfactant puis, de manière plus conséquente, au rôle de la température qui, en plus de contrôler les flux de convection au sein du liquide, peut être manipulée afin de dénaturer intentionnellement les molécules d’ADN.

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