3.4. Approche pluridisciplinaire pour définir la structure interne
5.2.3. Techniques de suivi ‘en continu’ des déplacements
5.2.4.1. Répartition spatiale des déplacements de surface
L’analyse spatiale des mouvements mesurés repose principalement sur l’étude des vecteurs de déplacements définis à la surface. Chacun des vecteurs se caractérise par une direction X, Y (Figure 5‐8), et une composante verticale (Z).
À court terme, sur la période du 2 avril 2008 et le 25 avril 2012, les résultats des différents levés (tachéométrie et GPS) montrent (Figure 5‐9) :
des trajectoires des différents repères vers le N‐NW, qui sont conformes aux attentes, car bien
orientées dans la direction de la plus forte pente ;
des déplacements cumulés au Cirque des Graves relativement modérés mais compris dans un large
spectre entre 4 cm (borne 43)et 46 cm (borne 404) pour une moyenne 13 cm et un écart type 10 cm ;
une grande variabilité spatiale de ces déplacements d’un secteur à l’autre du glissement en relation
avec les différentes unités morphologiques.
Figure 5‐9. Vecteurs déplacements mesurés au Cirque des Graves entre le 2 avril 2008 et le 25 avril 2012.
Ainsi, dans le détail, la cinématique des déplacements sur la seule composante horizontale (le vecteur déplacement) peut être caractérisée comme suit :
dans le Parc des Graves, des déplacements compris entre 7‐8 cm (pour les bornes 59 ; 163 et 164
respectivement en amont et en bordure est du glissement) et 16 à 19 cm pour les bornes 203 ; 68 et 58 localisées en partie inférieure du versant. Dans ce même secteur, entre le 1er aout et le 31 aout 2012, les deux stations GPS enregistrent des déplacements totaux, de même ordre de grandeur, allant de 5 cm (VLRH) à 9 cm (VLRB) (Figure 5‐15) ;
au droit de la Pointe du Heurt, avec des déplacements compris entre 4‐6 cm à l’amont à 10 cm à la borne 450 ;
dans la partie centrale du glissement, des forts déplacements compris entre 18‐25 cm (bornes 401 ; 402 et 405) et 30‐46 cm (respectivement les bornes 403 et 404) ;
à l’aval, de cette partie centrale, une zone affectée par des glissements superficiels et des coulées boueuses, avec des déplacements estimés (et non mesurés) supérieurs à plus de 2 m.
La composante verticale des déplacements est la plus difficile à mesurer par dGPS ; elle reste aujourd’hui la composante pour laquelle les résultats sont les moins précis. Par conséquent, pour évaluer les valeurs d’affaissement des différents repères, on s’intéressera principalement aux cumuls enregistrés depuis 2008 et non aux valeurs relatives des différences d’altitude entre chaque levé. Les déplacements verticaux les plus importants enregistrés à cette période concernent le repère 501 pour lequel l’affaissement atteint un cumul de 9 cm. Les valeurs les plus faibles concernent le repère 163 avec un affaissement total de seulement 7 mm. Les études préalables (Maquaire, 1990) ont souligné l’importance des déplacements verticaux au niveau de l’escarpement principal ce qui explique la subsidence enregistrée au point 501 situé aux Fosses du Macre
proche de la villa du Clos Marin où une fissuration importante du bâti est remarquable (Figure 5‐10). Cependant les valeurs d’altitude enregistrées par dGPS restent très variables entre deux levés à quelques semaines d’intervalle, voire même à quelques minutes d’intervalle. Il est donc préférable d’exploiter ces données avec précaution et de privilégier les résultats obtenus par des méthodes d’acquisition plus précises, à partir notamment de stations GPS permanentes.
Figure 5‐10. Fracture mesurée à la ville du Clos Marin en 2009 et 2010.
Les vitesses moyennes annuelles calculées sur cette même période du 2 avril 2008 au 25 avril 2012 sont indiquées et spatialisées sur la figure 5‐11. Pour ce faire, il a été tenu compte de la morphologie et de la structure interne du glissement, et en particulier de l’existence des panneaux de craie qui structurent le glissement en différentes unités morphologiques décrites dans la deuxième partie du manuscrit (Lissak et
al., 2010). En effet, il a été démontré que les déplacements mesurés d’une borne‐repère implantée sur un panneau de craie, traduisaient le déplacement de l’ensemble du panneau limité, très souvent, à l’aval et à l’amont par un escarpement net (Maquaire, 1990). Ces panneaux peuvent se déplacer, différemment des uns des autres, et à des rythmes différents.
La vitesse moyenne annuelle rend mieux compte de la répartition spatiale de ces déplacements (Figure 5‐11). Les vitesses croissantes de l’amont vers l’aval s’organisent en bandes plus ou moins concentriques au dessus du ‘noyau médian’ correspondant au secteur affecté par les glissements superficiels et les coulées boueuses, ayant probablement des vitesses moyennes supérieures à 50 cm.an‐1. Juste au dessus de ce ‘noyau’, les vitesses sont comprises entre 7 et 12 cm.an‐1 (borne 404 avec une valeur supérieure à 11,3 cm par an). Ensuite, une large bande regroupe des déplacements compris entre 7 à 1,5 cm.an‐1. Enfin, la partie amont jusqu’à l’escarpement principal présente des vitesses très faibles et inférieures ou égales à 1,5 cm.an‐1 (Figure 5‐12). Cette répartition des vitesses moyennes correspond assez bien à celle proposée par Maquaire (1990) pour des déplacements plus importants mesurés en période ‘active’ intégrant la crise de 1988 : la différence étant liée aux gammes de vitesses qui s’échelonnaient entre 5 à 50 cm par an.
Notons qu’en l’absence de bornes de mesures (partie amont du Parc des Graves, …), l’examen attentif du terrain, principalement au droit des chemins, n’a pas révélé d’indices d’instabilité, sauf le long de la RD 513 avec les deux secteurs soumis à une ‘subsidence quasi‐permanente’. Ces valeurs de subsidence seront présentées en même temps que l’historique de l’évolution de l’escarpement principal sur le long terme (Chapitre 6).
Figure 5‐11. Vitesses moyennes annuelles des déplacements mesurés au Cirque des Graves entre le 2 avril 2008
et le 25 avril 2012.
Figure 5‐12. Répartition des vitesses moyennes des déplacements de surface selon une coupe schématique
(tracé de la coupe sur la figure 5‐1).
A moyen terme, il apparaît intéressant de donner les ordres de grandeur des déplacements mesurés sur les quelques bornes‐repères du réseau de surveillance initial qui ont subsisté entre 1985 et 2012, les bornes 68, 58, 203, 65, 59 et 63 pour le Parc des Graves, et les douze bornes du réseau des Fosses du Macre entre novembre 1992 et mars 2005 (Figure 5‐14).
Pour le Parc des Graves, l’analyse des courbes des déplacements cumulés en fonction du temps (Figure 5‐13) permet de montrer plusieurs spécificités de la cinématique de ce glissement, en dehors des crises majeures qui sont bien marquées sur les courbes, et que l’on analysera par la suite. Ainsi, il ressort des spécificités, déjà mises en évidence précédemment pour les déplacements court terme, à savoir :
des déplacements cumulés compris dans un large spectre entre 8,20 m (borne 68) au pied du versant
et 0,90 m (borne 63) en limite est du glissement ;
une grande variabilité spatiale de ces déplacements en relation avec les différentes unités
morphologiques ;
des déplacements qui décroissent de l’aval vers l’amont, confirmant une évolution ‘régressive’ avec un
‘amortissement’ des déplacements vers l’amont.
Figure 5‐13. Déplacements cumulés mesurés depuis 1985 dans le secteur est du Cirque des Graves (secteur du
Parc des Graves, ancien camping).
Pour les Fosses du Macre, les déplacements cumulés s’échelonnent sur une douzaine d’années de 8,70 m
(borne 7) à 4,50 m (borne 11). Des nuances doivent être apportées par rapport aux commentaires précédemment. En effet, contrairement, à ce qui a été observé aux Parc des Graves, s’il existe aussi ici
grande variabilité spatiale de ces déplacements en relation avec les différentes unités morphologiques, il est
montré que le compartiment ‘médian’ (bornes 4 ; 9 ; 6 et 7) s’est déplacé plus que le compartiment
‘basal’ (bornes 10 ; 11, 12 et 130). Ceci s’explique par l’importance des fractures ouvertes existantes entre ces
deux compartiments au début de la surveillance en 1992. Avec la crise de 2001, le compartiment ‘médian’ s’est rapproché jusqu’à ‘pousser’ le compartiment ‘basal’. Par la suite, pour l’ensemble des bornes les déplacements sont de mêmes ordres de grandeur et de quelques centimètres par an.