2.5. Des glissements de terrain en activité qui génèrent des
3.3.2. Précisions cartographiques par exploitation du levé LiDAR
Comme attendu, le MNT LiDAR permet, en effet, d’accéder à un niveau de précision de la morphologie
et du modelé inégalé jusqu’à présent. Ces données à haute résolution et haute précision ont permis
(Figure 3‐7) :
de cartographier la morphologie actuelle des grands glissements d’Hennequeville, du Cirque des Graves et des Fosses du Macre en précisant le modelé de détail (1/1 000ème) ;
d’affiner, compléter, voire de modifier le tracé des escarpements déjà définis lors de la première
cartographie ;
d’étudier l’évolution morphologique des versants depuis 1976 en comparant différentes sections des
deux MNT interpolés (Plan 1976 / LiDAR 2010) ;
de localiser les talwegs et les zones de bas‐fonds propices à l'accumulation d'eau ruisselée et/ou
précipitée.
Le levé aéroporté a permis de repérer une succession d’escarpements secondaires dont le
commandement varie ente 2 et 5 m. Aussi, le tracé de l’escarpement principal sur le flanc ouest du Cirque des Graves, et le flanc est des Fosses du Macre a largement été précisé. Par conséquent, la surface de la zone
instable a été ‘agrandie’ par rapport aux premières estimations. Un autre apport essentiel du LiDAR pour la
cartographie topo‐morphologique est la définition des formes mineures et des modelés caractéristiques de
l’activité ‘récente’ du glissement. Ces modelés correspondent à des fractures ouvertes à faible dénivelée ou à
la fissuration du terrain en amont du glissement. Ces indices sont largement visibles sur le MNT LiDAR.
(A) Photographie prise sur le terrain témoignant de l’importance du couvert végétal, (B) Extrait du plan topographique au 1 /2 000ème de 1976, (C) Extrait du MNT interpolé à partir des courbes de niveau du plan de 1976 et interprétation morphologique, (D) Extrait de l’orthophotographie de 2006, (E) Tracés des escarpements principaux de la première cartographie confrontés aux tracés issus de l’interprétation du LiDAR, (F) Exemple de modelé de détail interprété à partir des données LiDAR.
Figure 3‐8. Cartographie du modelé de détail à l’aide du MNT LiDAR d’un secteur très boisé et peu accessible
en partie amont du Cirque des Graves.
(1) Bâti, (2) Escarpements principaux relevés sur le terrain, (3) Rupture de pente basale, (4) Escarpements principaux mis en valeur par le levé LiDAR, (5) Rupture de pente basale.
Prenons l’exemple des figures 3‐8 et 3‐9 qui illustrent ces apports dans l'interprétation topo‐
morphologique des glissements des Fosses du Macre et du Cirque des Graves. Dans un premier temps, les
formes majeures ont été appréciées à partir des observations de terrain (Figure 3‐8A) et du plan
topographie de 1976 (Figure 3‐8B et Figure 3‐8C). Ainsi, cette figure 3‐8 met en avant un compartiment du
glissement à l’entrée du Parc des Graves qui est délimité, en amont, par une rupture de pente au pied de la
route départementale, et en aval, par un escarpement dont le commandement varie entre 12 et 13 m. Dans
un premier temps, on considère ce compartiment comme un même ensemble structural homogène et cohérent, probablement un panneau de craie au pied de l’escarpement principal qui délimite la zone stable
de la zone active. Le couvert végétal étant très dense dans cette partie du cirque (Figure 3‐8A), il a été
difficile de préciser le modelé du terrain (Figure 3‐8D). Ainsi, l'interprétation du MNT LiDAR a permis dans
un second temps, de cartographier plusieurs fractures (Figure 3‐8E et Figure 3‐8F) dont certaines qui
limitent un graben avec une dénivellation de l’ordre de 50 cm et d’autres fractures, au nord, qui mettent en
exergue le découpage ou la fragmentation régressive de ce compartiment.
3.3.3. Des entités morphologiques bien distinctes
Les glissements de terrain rotationnels‐translationnels se décomposent en plusieurs entités
morphologiques qui traduisent une dynamique variable de la masse en mouvement. D’amont en aval, la
morphologie du glissement peut être décrite comme il suit :
Les différents glissements de terrain sont délimités en amont par un escarpement principal dont le
commandement varie entre 2 m et 10 m (Figure 3‐10B‐C). Par endroit, il est précédé de fissures de traction
qui soulignent ‘l’activité’ du glissement comme à l’ouest du Cirque des Graves. Cet escarpement, s’il n’est pas
totalement colonisé par la végétation, laisse apparaître des formations superficielles. La craie est visible
lorsque les formes sont fraîches après les grandes accélérations comme en 2001 dans les Fosses du Macre.
Figure 3‐10. Escarpements principaux et secondaires remarquables dans les Fosses du Macre (A) et le Cirque
des Graves (B, C).
Sur les flancs est et ouest, l’escarpement diminue pour laisser progressivement place à des fractures
verticales ouvertes, comme au droit des Fosses du Macre (Figure 3‐10A). Ces fractures, dont le dénivelé
excède rarement quelques décimètres, disparaissent facilement sous la végétation et leurs formes sont par
endroit cachées par les formations de pente qui les recouvrent. Au droit du bourg de Villerville, les flancs est
et ouest du Cirque des Graves et des Fosses du Macre et le flanc nord du bourg sont cependant plus
vigoureux. Les escarpements majeurs ont un rejet qui avoisine les 8‐9 m de hauteur. Ici la végétation laisse
apparaître des escarpements armés de craie (flanc ouest) ou composés de formations superficielles de
remplissage (flanc est et nord) de type head riche en silex, sables et limons, liées au remplissage d’une
paléovallée sur laquelle repose le bourg (Flageollet & Helluin, 1984 ; Flageollet, 1992 ; Maquaire, 1990).
Ce dernier point sera complété en fin de ce chapitre. Les escarpements secondaires marquent le terrain
Au regard des différentes cartes topo‐morphologiques réalisées (Figure 3‐12, Figure 3‐13 et Figure 3‐14) et
de leur légende (Figure 3‐11), il semblerait que ces formes soient bien présentes sur tous les secteurs actifs
de la côte, présentant des dénivellations plus ou moins importantes variant de 2 m à plus de 10 m de
hauteur. Ces escarpements témoignent de l’évolution spatio‐temporelle du glissement ainsi que de l’intensité de son activité passée. C’est le cas du glissement du Cirque des Graves, dont la surface
topographique est très fortement marquée par la présence d’escarpements secondaires (Figure 3‐10). Ces
derniers sont liés au détachement et au basculement de compartiments du glissement lors
d’épisodes d’accélération. Ces compartiments basculés sont également et généralement marqués
par une topographie en contre‐pente (Figure 3‐3) plus ou moins accentuée selon l’intensité du
basculement, et en amont desquels se développent des mares. Ces formes sont la conséquence des
accélérations récentes (1982, 1988, 1995, 2001) ou d’une activité bien plus ancienne. En effet, certains des
escarpements étaient déjà présents sur des documents réalisés avant l’événement majeur de 1982 comme
ceux du Parc des Graves ou de la partie ouest du même cirque (Figure 3‐10A) et bien plus élevés que ceux
engendrés lors des crises récentes. Certaines zones, notamment dans la partie médiane aval du glissement
des Fosses du Macre ou en bordure de compartiment à l’est du Cirque des Grave, sont affectées par des
affaissements en grabens.
À noter également que certains de ces escarpements secondaires témoignent de la position antérieure de l’escarpement principal qui a ‘reculé’ par évolution régressive vers l’amont (Figure 3‐10B).
En effet, l’extension des cirques s’opère par à coups et par la régression de l’escarpement principal lors des
épisodes d’accélération (Maquaire, 1990). L’analyse détaillée de cette évolution sera présentée dans la
troisième partie. La topographie en gradins est certes la spécificité principale de ce type de glissement,
néanmoins, d’autres formes moins marquées apparaissent sur le corps du glissement. Il s’agit notamment
de zones de bossèlement, à l’est des Fosses du Macre, au sud du Cirque des Graves et du glissement de
Hennequeville. Une topographie accidentée qui témoigne d’une activité du glissement plus superficielle.
Enfin des coulées boueuses superficielles en aval du Cirque des Graves et d’Hennequeville se
démarquent du reste de la masse en mouvement. Ces glissements mobilisent une matrice de formations
argileuses remaniées qui transportent, jusqu’à l’estran, des blocs de craie de tailles très variables.
Figure 3‐13. Cartographie topo‐morphologique du glissement de Hennequeville (mise à jour en mars 2012).