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Répartition des récipients domestiques de collecte et de stockage des déchets solides dans les quatre départements de la région de Dakar. Rapport entre quantité de poubelles réglementaires et

Chapitre II Urgence du défi « déchets » à Dakar

Carte 5. Répartition des récipients domestiques de collecte et de stockage des déchets solides dans les quatre départements de la région de Dakar. Rapport entre quantité de poubelles réglementaires et

Carte 5. Répartition des récipients domestiques de collecte et de stockage des déchets solides dans les quatre départements de la région de Dakar. Rapport entre quantité de poubelles réglementaires et poubelles de fortune dans chaque département et selon population enquêtée.

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Il n’est d’ailleurs pas rare de voir dans les quartiers populaires, des villas cossues globalement bien entretenus et à hygiène intérieur assuré, présenter un récipient à ordures de fortune ; cela témoigne du peu d’intérêt encore accordé aux détritus.

De même, nombre de nouveaux riches à souche rurale, vont dans l’affichage des indicateurs de réussite sociale privilégier certains signes extérieurs évidents tels que la villa, la voiture, les habits raffinés, les parures, pendant que la poubelle qui trône à l’entrée sera elle constituée d’un récipient de fortune, souvent, une vieille bassine elle-même antérieurement destinée à être jetée. Cela découle de la même approche qui conduit d’autres à opter pour le paraître, sacrifiant bonne alimentation ou confort intérieur à ces indicateurs sociaux extérieurs précédemment cités.

Il arrive que ce soit cette même méprise de la matière déchue, combinée à un poids encore important des habitudes acquises, qui freine les initiatives en la matière. S’agissant des poubelles de fortune peu pratiques, on sait que ce sont généralement aux femmes, enfants et domestiques que reviennent les tâches déchets. Les responsables du foyer ne se chargeant pas directement de l’évacuation des ordures ne mesurent pas les désagréments liés à leur manutention, pas plus qu’ils n’éprouvent une gêne que l’exposition de leur contenu pourrait occasionner. Nul doute que la situation aurait probablement été différente, s’ils avaient à accomplir cette tâche personnellement.

Si un certain dédain explique donc parfois l’attribution de réceptacles de fortune aux déchets ménagers, l’acquisition ou non d’une poubelle « réglementaire » obéit très souvent à des paramètres d’ordre socioéconomiques.

On citera l’exemple de ce couple d’immigrés venu rendre visite à la famille de l’époux résidant à Pikine (Tally Boubess), et à qui la belle-fille acheta une cuve-poubelle neuve, voyant qu’elle ne disposait pas de récipient attitré pour le stockage des ordures. Quelle ne fut la surprise de l’épouse s’apercevant le lendemain que la poubelle avait changé de fonction, passant cuve de stockage d’eau potable (dans une zone aux coupures d’eau fréquentes), et la famille de reprendre ses bonnes vieilles habitudes en la matière, avec une « caisse » en carton, arguant en passant que les ordures ne méritent pas encore un tel honneur.

Compte tenu de la variabilité de la capacité de contenance des récipients de stockage domiciliaire, les ménages dakarois ont tendance à sortir autant de fois que nécessaire les poubelles avec souvent des volumes ou quantités là aussi plus ou moins réduites. Généralement de faible capacité, ces contenants ne permettent pas d’optimiser le stockage.

Ce facteur aura son importance dans l’explication des dysfonctionnements qui apparaissent à certains niveaux de la chaîne de prise en charge. Il permet ainsi de comprendre pourquoi en dépit de la collecte domiciliaire quotidienne ou bihebdomadaire dont ils disposent, la quasi-totalité des quartiers couverts par le système officiel renferment néanmoins une profusion de dépôts anarchiques. Ces derniers sont en effet aussi bien alimentés par les déchets d’activité, que par les productions de ménages recourant à des mécanismes alternatifs pour évacuer une production, postérieure au passage des bennes.

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Photos 16, 17, 18, 19. Quelques exemples de récipients utilisés pour le stockage des ordures ménagères à Dakar.

2.1.2 Prédominance du Stockage Initial Banalisé.

S’il existe à Dakar des différences assez notables au stade du conditionnement domiciliaire, la quasi-totalité de la population de l’agglomération pratique le stockage initial

banalisé, stade dés lequel tous les déchets sont mélangés ou « mis à cru »1. Cette forme de stockage s’oppose au monostockage initial que MAYSTRE défini comme le lieu d’entreposage d’une seule catégorie de déchets, procédé qui n’est présent à Dakar que pour quelques produits, et qui reste donc très isolément pratiqué.

Cette situation se justifie par l’inexistence pour la ville d’un système officiel de tri sélectif en amont, permettant une homogénéisation fusse t-elle partielle des matières. Même les tas de chutes que l’on retrouve dans certaines bennes de la ville et provenant en général des process des unités de fabrication artisanale sont souvent contaminés, les récupérateurs procédant eux-mêmes au triage des matières en « vrac ».

1

GOUHIER J, (2000). « Au delà du déchet, le territoire de qualité ». Manuel de rudologie. Presse Universitaire de Rouen et du Havre. 240

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On a vu plus haut que les immeubles d’habitation et les villas du Plateau, des zones résidentielles ou planifiées de la périphérie (Almadies, Fann, SICAP…) présentent en général un contenant réglementaire. C’est dans ces mêmes enclaves occidentales privilégiées qu’on retrouve aussi une variante du monostockage initial même si c’est uniquement pour certains types de déchets comme les journaux et revues, ou encore des bouteilles d’eau minérale et autres boissons : vins, alcool ou jus divers. C’est en effet cette frange assez aisée de la population avec une bonne proportion d’expatriés, peu adepte de l’eau potable du réseau de la SDE pour sa boisson (comme la majorité des consommateurs européens), qui est aussi généralement abonnée à divers magazines ou en achète régulièrement. Une fois vides, les bouteilles-emballages seront revendues 15-25 voir 50 FCFA l’unité dans le commerce, pour resservir au conditionnement de matières alimentaires (huile de palme) ou de détergents (crésyl).

Les piles de journaux usagés seront aussi mis de côté à la demande des gardiens d’immeubles, concierges, vigiles ou domestiques qui arrondissent ainsi leur paie en les revendant à travers divers circuits. Au même titre que la quasi-totalité des éboueurs qui sont devenus aussi récupérateurs, les agents de sécurité des hôtels, des administrations et services du tertiaire (banques, assurances…) récupèrent aussi ces matières pour les écouler soit directement auprès des gérants de Paaks. Ces paaks sont des lieux informels de transaction (vente ou achat) de matériaux ou objets déchets ; ils diffèrent des points informels de fourniture de matériaux de construction (sable marin, gravier, bois d’échafaudage etc.), qui occupent en général illégalement le domaine public (accotements ou terrains vacants).

Ces matières sont aussi revendues auprès des récupérateurs collecteurs, en quête d’objets pouvant avoir de la valeur. En dehors de ces principaux produits, les autres déchets sont soumis au stockage initial banalisé.

On retrouve donc cette même situation de stockage initial banalisé dans les zones à immeubles construits sur plusieurs niveaux et réalisés par de grosses entreprises privées ou quelques particuliers fortunés (hommes d’affaires occidentaux, libano-syriens et quelques nationaux). Ces immeubles comportent des logements de haut standing qui sont généralement loués à des personnels diplomatiques, des fonctionnaires des organisations internationales ou des cadres de sociétés florissantes. En général seules les réalisations et constructions modernes de plus de 10 étages disposent d’équipements fixes à l’intérieur de l’habitat notamment d’une colonne vide-ordures.

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Carte 6. Pratique du monostockage initial domiciliaire des déchets solides dans les quatre départements de