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Une région où le portage politique et technique du SPRO est accessoire, et l’animation locale

Partie 2. CEP et coopérations entre acteurs

2. Des dynamiques régionales SPRO/CEP nuancées

2.4. Une région où le portage politique et technique du SPRO est accessoire, et l’animation locale

Cette région est la résultante d’une fusion de deux régions qui, en 2015, avaient toutes les deux une approche territorialisée du pilotage et de la coordination d’une multiplicité d’acteurs autour des enjeux formation/emploi, puis orientation professionnelle. Le cumul de la fusion et du changement d’exécutif a ici « dynamité » ces constructions régionales préexistantes. 2016 a été une année blanche en matière d’orientation, 2017 a été consacré à l’écriture de la nouvelle conception du SPRO, et au moment de l’enquête les documents cadres du SPRO n’avaient pas été votés. Bref, aux dires des acteurs, « 18 mois viennent de s’écouler et il ne s’est à peu près rien passé ».

Les liens construits antérieurement ont été mis à mal par :

- un effet « fusion », avec des réorganisations dans les équipes du conseil régional mais aussi dans celles des partenaires, y compris les opérateurs CEP ;

- un effet « changement d’exécutif » qui a engagé des coupes budgétaires, des pertes de compétences.

« On est tellement dans notre réorganisation que l’usager final est assez loin, plus loin

qu’avant…tout est à reconstruire… c’est la limite des changements d’exécutif, là c’est un changement radical, brutal. » (témoignage recueilli au conseil régional).

Au-delà de ces réorganisations, il y a eu un changement de conception du SPRO, et les questions d’orientation ne paraissent pas rencontrer de portage politique avec la nouvelle mandature. Le conseil régional a ainsi pris le contrepied des dynamiques précédentes. L’un de nos interlocuteurs l’exprime ainsi : « territoires et partenariats sont désormais deux ‘’gros mots’’ alors qu’ils étaient les piliers ». Le cap a été mis sur le développement du numérique avec la création d’une plateforme d’orientation (portée par le nouveau Carif-Oref) qui est en cours de déploiement. La ligne du nouveau conseil régional est à rebours de ce qui se passait auparavant dans une des deux sous-régions, perçu comme « trop d’intermédiaires, trop complexe… donc finis la territorialisation, les comités stratégiques, arrêt

du financement des plateformes de sécurisation des parcours, même chose pour les contrats de développement durable ». Toute la dynamique d’animation et de coordination territoriale engagée a

été stoppée. Pour l’heure, il y aurait une logique de recomposition de la territorialisation autour du département. Le conseil régional évoque l’idée d’une animation au niveau départemental, vraisemblablement en lien avec l’Agence régionale économique, sans qu’il y ait une visibilité précise de son opérationnalité42.

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L’idée étant de limiter l’intermédiation vis-à-vis des entreprises, en créant un point d’entrée unique au niveau départemental. Un élu pilote du Conseil régional serait nommé pour chaque département.

Au moment de l’enquête, le nouveau schéma du SPRO affiche des objectifs qui articulent une déclinaison des grandes orientations nationales, une traduction de la volonté politique de l’exécutif régional (favoriser l’emploi sur les métiers en tension43, valoriser des outils numériques) et la reprise

de certaines ambitions du précédent schéma. Sur ce dernier point, le SPRO intègre les 3 niveaux du CEP44, à l’instar du précédent SPRO, ce qui permet une cohérence entre SPRO et CEP. Il s’appuie sur

une configuration resserrée du périmètre d’acteurs et seuls les opérateurs CEP assument formellement le 1er niveau45.

Ce changement de conception du SPRO est perçu par les acteurs interrogés comme étant parallèle à une évolution de la conception de l’offre de formation professionnelle. Celle-ci est en effet passée d’une logique d’achats publics pluriannuels de modules, notamment transversaux, vers une logique « former pour l’emploi » 46, avec des marchés subséquents47.

Bref, aux dires des interlocuteurs rencontrés : « avec le nouvel exécutif, on a perdu cette dynamique

de coopération très solide, même si tout le monde se connaît ». Les collaborations entre acteurs au

niveau local, si elles existent, ne sont plus assises sur un cadre institutionnel ni sur des moyens dédiés. Le SPRO n’a donc, au moment de l’enquête, qu’une animation régionale et s’appuie sur une configuration resserrée du périmètre d’acteurs où seuls les opérateurs CEP assument formellement le 1er niveau.

Au moment de l’enquête, l’animation des opérateurs CEP au niveau régional ne subsiste que dans le cadre d’un groupe technique, émanation de la commission « Orientation, mobilités et sécurisation des parcours » du CREFOP, qui a continué à travailler dans la perspective de mieux se connaitre. Mais aux dires des acteurs, la nouvelle gouvernance régionale et les échanges au sein du CREFOP n’ont pour l’heure que peu de retombées opérationnelles notamment sur la construction d’un réel travail collectif. Les opérateurs font donc « sans » et continuent de déployer leur offre de services. Ils indiquent maintenir malgré tout des interactions entre eux au niveau local, « les relations et les

collaborations territoriales existent en dépit de l’arrêt du pilotage régional » (Pôle emploi). Les

dynamiques partenariales sont souvent impulsées par le niveau national des opérateurs, mais les liens (formels ou non) se tissent vraisemblablement au niveau des territoires en réponse à des problématiques locales et à la nécessité d’assurer le maillage de l’offre de services. Ces dynamiques s’organiseraient essentiellement en bilatéral. Ceci étant, il n’y a pour l’heure que peu de visibilité globale du niveau régional sur les partenariats engagés par les opérateurs. Les prochains groupes de travail « opérateurs » doivent s’attacher à en dresser un bilan afin de repérer et mutualiser les bonnes pratiques. Le « comment travailler ensemble » au-delà des habitudes locales est une préoccupation d’actualité pour les opérateurs au niveau régional.

43L’emploi semble être la priorité de la nouvelle mandature : « s’insérer d’abord et ensuite peut-être se former ». Il y a

d’ailleurs eu des coupes sombres dans le budget formation du Conseil régional.

441er niveau SPRO : accès à un premier niveau d’information gratuite sur les métiers, les formations, les certifications, les

débouchés, en proximité et/ou en accès dématérialisé. 2ème niveau SPRO : accès à des services de conseil et d’accompagnement.

45Les autres structures ne sont plus financées par la Région, « même s’il est probable qu’ils continuent d’assumer l’accueil et qu’ils répondent au cahier des charges ».

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Nous signalons ici le développement de contrats aidés spécifiques ayant pour objectif de favoriser l'accès de publics en difficultés à des emplois disponibles avec une insertion durable dans ces emplois. En contrepartie d'une promesse d'embauche, le futur employeur peut être aidé à former un demandeur d'emploi (actions et financements). Les dossiers sont instruits par la Région, qui prend en charge la formation professionnalisante des personnes en recherche d’emploi et leur octroie le statut de stagiaire de la formation professionnelle le cas échéant (sans qu’elles soient nécessairement inscrites à Pôle emploi).

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À noter que concernant le « plan un million de formations pour les personnes en recherche d’emploi » (2016), le Conseil régional n’a pas signé, la contractualisation ne s’étant faite qu’entre l’Etat et le COPAREF. Les achats ont donc été faits directement par Pôle emploi, compensant le retrait du Conseil régional. La fin du plan en 2018 suscite une vive inquiétude au sein des réseaux d’organismes de formation professionnelle.

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Quant aux ressources collectives organisées par le conseil régional, elles reposent sur le Carif-Oref. Il faut ici signaler qu’après la fusion, le Carif-Oref a mis un an à se restructurer et a subi de nombreux départs. C’est au moment de l’enquête une institution qui « redémarre », en recomposition y compris dans ses missions (perte du volet animation des réseaux d’orientation, ciblage autour de compétences techniques informatiques et statistiques, maintien de la professionnalisation). Cet opérateur a tout particulièrement développé une plateforme orientation (à destination des publics mais aussi des conseillers), des diagnostics/référentiels métiers et des statistiques emploi-formation régionales. Pour l’heure, la demande des conseillers en matière de professionnalisation porterait aux dires du Carif- Oref sur « la posture et les besoins emploi-formation des territoires ».

2.5. Une région où le portage politique du SPRO est limité mais où se