• Aucun résultat trouvé

Les régimes de responsabilités retenus à l'égard des nouveaux intervenants

PARAGRAPHE II. La mise en cause de la responsabilité juridique des autres intervenants à

A. La responsabilité civile des nouveaux acteurs dans la mise en oeuvre des nouvelles

2. Les régimes de responsabilités retenus à l'égard des nouveaux intervenants

2.1. Le régime de responsabilité pour faute

La preuve d'une faute à l'égard du tiers à la relation de soin est nécessaire pour pouvoir engager sa responsabilité civile. La preuve de cette faute peut être facilement apportée dans le cadre de la mise en oeuvre de la télémédecine puisqu'elle peut être constituée par tout manquement aux obligations contractuelles. Par exemple, la faute du tiers technologique peut consister en "un défaut de la maintenance des outils technologiques d'information et de communication ou un défaut dans l'information des professionnels et établissement de santé dans le cadre de l'obligation de conseil renforcé"621. Dans le cadre de l'ETP, les choses sont plus complexes et il n'est pas toujours évident de déterminer une faute à l'égard de l'entourage du malade, d'un patient-expert ou d'autres patients. Dans le cadre de leur simple mission d'accompagnement, il peut sembler difficile de concevoir que ces tiers puissent effectivement causer un dommage au patient. Toutefois, il est nécessaire de s'assurer que la mission consiste uniquement en un accompagnement psychologique de l'individu malade. En effet, partant du principe que l'entourage du patient assiste aux séances éducatives et reçoit au même titre que le patient les conseils relatifs à la maladie, aux traitements et à l'hygiène de vie, on peut légitimement envisager confier à l'entourage le devoir de garantir de l'intégration des normes sanitaires dans le quotidien du patient. Par exemple, une femme dont le mari est insuffisant cardiaque ne commet-elle pas une faute en cuisinant des plats trop riches, exclus des recommandations des professionnels de santé ? Dans ce cas, le mari peut-il engager la responsabilité juridique de sa femme en vertu de l'article 1383 du code civil disposant que "chacun est responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence". Bien que cette situation apparaisse difficilement concevable en pratique, elle n'est pourtant pas à exclure. La situation se complique davantage lorsque ces tiers se voient reconnaître une mission de conseil. Tel est notamment le cas de la présence du patient-expert dans le cadre de l'ETP dont les missions restent encore aujourd'hui

620 Art. 1147 C.civ. 621

Direction Générale de l'Offre de Soins. Télémédecine et responsabilités juridiques engagées. Paris: DGOS; Mai 2012.

178

très vagues et le statut n'est encadré par aucun texte juridique. Dans cette situation, on peut imaginer que ce dernier vienne à conseiller le malade sur un aspect particulier de sa vie quotidienne (hygiène de vie, alimentation particulière, pratique d'une activité physique, etc.) et que cette information, non-conforme avec l'état de santé du patient, lui cause un préjudice. Dans tous les cas, et dans la mesure où le patient apporte la preuve d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité pouvant être établi entre cette faute et ce préjudice, l'hypothèse de la mise en cause de la responsabilité civile du tiers non-professionnel de santé semble admissible.

2.2. Les autres régimes de responsabilités envisageables

Deux hypothèses spécifiques à la mise en oeuvre de la télémédecine doivent être envisagées. D'une part, la responsabilité du producteur de dispositif de télémédecine défectueux peut être engagée directement par le patient ou indirectement en vertu de l'action récursoire reconnue au professionnel de santé ou à l'établissement de santé fournisseur dudit dispositif622. En effet, "le producteur est responsable du dommage causé par un défaut de son produit, qu'il soit ou non lié par un contrat avec la victime"623. Dans le cadre de la télémédecine, le producteur peut voir sa responsabilité réduite ou supprimée, s'il apporte la preuve que le dommage a été causé conjointement par le défaut de son produit et par la faute du patient, du professionnel ou de l'établissement624. D'autre part, les fournisseurs d'accès peuvent également voir leur responsabilité engagée à la suite d’une panne d'électricité ou de réseau Internet ayant causé un dommage au patient bénéficiant d'une prise en charge par télémédecine. Concernant la fourniture d'accès Internet, le fournisseur est tenu à une obligation de résultat selon une jurisprudence constante625,626. Par conséquent, la responsabilité civile du fournisseur peut être engagée en cas d'interruption dans la fourniture d'Internet causant un préjudice au patient ou au professionnel de santé. Le fournisseur d'accès ne peut s'exonérer de sa responsabilité qu'en apportant la preuve d'une faute du co-contractant ou d'une cause étrangère. Dans tous les cas, toute clause insérée dans un contrat de fourniture d'accès à Internet ayant pour objet d'exclure la responsabilité du fournisseur en cas de mauvais fonctionnement du service est considérée comme abusive en ce sens qu'elle exonère le fournisseur de l'obligation essentielle du

622 Loi n° 98-389 du 19 mai 1998 relative à la responsabilité du fait des produits défectueux. 623 Art. 1386-1 C.civ.

624 Art. 1386-13 C.civ. 625

Cass. Civ. 1ère. 8 novembre 2007. n°05-20.637.

179

contrat627,628. Concernant la fourniture d'accès d'électricité, les choses s'avèrent plus complexes. En effet, seules certaines entreprises ont réussi à contraindre les fournisseurs d'accès d'électricité à une obligation de résultat629. En matière de télémédecine, il n'existe actuellement aucune jurisprudence. On peut espérer, pour les patients, et pour les établissements de santé qu’ils pourront négocier contractuellement une obligation de résultat des fournisseurs d'électricité. Cependant, cette solution semble risquée pour le patient qui, n'étant pas en mesure de négocier de manière similaire, ne bénéficie que d'une obligation de moyens à charge pour lui d'apporter la preuve d'une faute du fournisseur d'électricité pour pouvoir engager sa responsabilité civile. Toutefois, il est à noter que la responsabilité du fait des produits défectueux est applicable en matière de défaillance électrique. En effet, l'électricité étant considérée comme un produit, la loi du 19 mai 1998 est applicable630. Le patient ou le professionnel de santé se voient reconnaître la possibilité d'engager la responsabilité civile du fournisseur d'électricité sous réserve d'apporter la preuve d'une défectuosité dans la fourniture de l'électricité, d'un dommage et d'un lien de causalité.

B. La responsabilité pénale des tiers non-professionnels de santé dans la

mise en pratique de l'ETP et de la télémédecine

1. La divulgation des données de santé du patient par des tiers non-professionnels de