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La réduction de la part modale de la voiture dans l'évaluation des

Chapitre 1 : Des données pour répondre aux changements de paradigme des

1.1 Le changement de paradigme des politiques de mobilité et ses conséquences

1.1.2 Les nouveaux objectifs des politiques de transport : un changement de

1.1.2.2 La réduction de la part modale de la voiture dans l'évaluation des

Pour aller vers la réduction des émissions de gaz à effet de serre, la loi de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’Environnement du 3 août 2009 prévoit, en son article 13, la participation de l’État au développement de 1 500 kilomètres de voies nouvelles de transports collectifs en site propre (hors Île-de-France). Pour que ces infrastructures soient rentables, il faut les penser de manière à répondre correctement à la demande de transport dont nous venons d'identifier les contraintes et les besoins. Mais la rentabilité doit maintenant se comprendre dans le nouveau paradigme issu du Grenelle et intégrer la réduction de la part modale de la voiture émettrice de CO2, ce que nous allons

examiner maintenant.

La question des reports modaux nécessite d'analyser les multiples facettes de la mobilité et en particulier la concurrence entre les offres. Auparavant les politiques de transport s'intéressaient exclusivement à la distance-temps et à son coût. Aujourd'hui les enjeux environnementaux imposent de mesurer également l'efficacité des systèmes de transport (efficacité énergétique de la chaîne multi-modale, qualité de vie : temps d'attente, confort, confiance des individus accordée aux TC, pénibilité de la marche à pied).

L'instruction du Gouvernement du 16 juin 2014 relative à l’évaluation des projets de transport présente les nouveaux objectifs des évaluations des projets qui apparaissent comme un autre aspect du changement de paradigme.

« Le cadre général d’évaluation comporte trois volets :

– une analyse stratégique, définissant la situation existante, le scénario de référence, l’option de référence qui aurait prévalu sans le projet, les motifs à étudier l’éventualité d’agir, les objectifs du projet, les options de projet ;

– une analyse des effets des différentes options de projet, portant, de manière adaptée et proportionnée aux enjeux et effets envisageables du projet, sur les thèmes sociaux, environnementaux et économiques ;

– une synthèse, présentant les estimations sur le niveau d’atteinte des objectifs et sur les effets des différentes options de projet ; la synthèse peut être déclinée par territoire et par catégorie d’acteurs, en considérant au moins, à ce dernier titre, les usagers directs du projet de transport et les finances publiques.

Une note technique de la direction générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM) présente la méthode pour appliquer le cadre général d’évaluation, qui est complétée de fiches-outils», (Bulletin officiel, Instruction du Gouvernement du 16 juin 2014, p.219).

A l'aide des fiches-outils du référentiel d’évaluation des projets de transport cité dans l'instruction (Ministère de l’environnement, de l'énergie et de la mer, Les fiches outils du référentiel d'évaluation des projets de transport20) nous remarquons que les effets à considérer

aujourd’hui sont plus nombreux. Le ministère propose treize effets à étudier lors d'évaluation de projets. Précisons que ces fiches apportent des éléments méthodologiques pour évaluer ces effets. En ce qui concerne les données pour évaluer la demande de transport, le ministère insiste sur le fait de devoir estimer le nombre d'utilisateurs nouveaux que le projet d'aménagement induira. C'est-à-dire, pour une aire géographique donnée, il faut pouvoir connaître la part des déplacements effectués selon tel ou tel mode avant et après l'aménagement. Cet indicateur est nommé « part modale ». Cet indicateur est toujours à

19 Bulletin officiel. [En ligne] (Consultée le 28/03/2016) <http://www.bulletin-

officiel.developpement-durable.gouv.fr/fiches/BO201412/met_20140012_0100_0047.pdf> 20 Ministère de l’environnement, de l'énergie et de la mer. Les fiches outils [En ligne] (Consultée le

mettre en relation avec sa zone géographique. Les moyens présentés dans les fiches pour calculer les parts modales sont les enquêtes et la modélisation de transport. La fiche présente ces méthodes de manière très sommaire. Les modèles de transport ont comme objectif de déterminer la part modale au sein de la zone avant et après l’aménagement. Pour calibrer les modèles sur la situation avant l'aménagement on se sert de données d'enquêtes de déplacement.

Notons que les fiches précisent un fait important sur la collecte des données: « La collecte des données d'entrée des modèles est une étape qui nécessite une attention particulière puisqu’elle conditionne la qualité des résultats en sortie des modèles. Il faut toutefois noter que la collecte des données est généralement longue et fastidieuse». La fiche renvoie également à l'utilisation des données du recensement pour caler les modèles de transport.

Une fois le projet réalisé, il faut procéder à ce que le ministère appelle l'évaluation ex-post. La fiche-outil « Données à recueillir pour l'évaluation ex-post (Octobre 2014)» s’appuie sur une référence consacrée au transport sur site propre (CEREMA, 2015). Il est souhaité reproduire la chaîne de modélisation 3 à 5 ans après le projet de transport réalisé. La fiche insiste sur le fait d 'utiliser les mêmes modèles qu'ex-ante pour des soucis de cohérence. Les auteurs (non précisés) ont cru utile d'écrire : « Il est important de conserver le modèle et ses fichiers pour une réutilisation opérationnelle au moment de l’étude ex-post ». Comme si, par retour d'expérience, on avait constaté que le stockage des données numériques pouvait défaillir.

Les fiches-outils du ministère traitent seulement des transports collectifs mais nous supposons que la démarche d'évaluation est la même pour les autres types d'infrastructures. En ce qui concerne les modes doux (marche à pied et vélo) qui sont par définition les plus durables et qui maintiennent en bonne santé (Morris et Hardman, 1997), leurs utilisations doivent être favorisées par un rapprochement «des lieux de vie», des lieux de résidence et d'emploi (illustration 7).

Cet objectif peut toutefois être confronté à certaines conclusions mettant en garde sur l'hypothèse toute faite que les individus souhaitent habiter à proximité de leur lieu de travail (Korsu, 2006). Rappelons également que les localisations à atteindre sont multiples et doivent être en accord avec les besoins de chacun des membres des ménages. Il ne s'agit donc pas de connecter simplement les zones de résidence et économique à proximité par des infrastructures pédestres. Il faut faire de véritables circuits desservant au mieux l'espace optimisant l’accessibilité générale en marche à pied.

La démarche de modélisation et de simulation avant et après les aménagements de transports concerne également les aménagements pédestres, cyclables et aussi l'éléctro-mobilité, le co- voiturage et l'auto-partage qui font intervenir de nouveaux acteurs. La mise en place de ces nouveaux systèmes de transport doit être effectuée en ayant au préalable bien déterminé leurs usagers potentiels. Il faut les rentabiliser le plus rapidement possible et qu'ils soient accessibles à tous. Des éléments de connaissance sur la demande de déplacement sont donc nécessaires. Des données décrivant les aires géographiques desservies par les projets de transport doivent être disponibles pour mener à bien ces politiques de transport.

Les objectifs des évaluations ex-ante et ex-post des projets de transport donnent une place centrale à la décomposition modale des déplacements au sein des zones concernées par les projets de transport. Ces objectifs sont donc localisés et leurs indicateurs dépendent de la définition des zones d'étude. Or, comme on le verra plus loin, le périmètre choisi peut faire considérablement varier les indicateurs et leurs évolutions. Dans une autre fiche méthodologique le ministère présente les principes de définition d'une aire géographique pour Illustration 7: Rapprochement des lieux de vie (source: les ateliers du Grand Paris)

effectuer les mesures de mobilité (Ministère de l’environnement, de l'énergie et de la mer. Aires d'études21). Pour les projets de Transport en Commun Urbain (TCU), il convient de

définir deux périmètres d'études: une aire d'étude restreinte et une aire élargie. Pour le premier, les quartiers politiques de la ville desservis par le projet de transport sont données en exemple. Le deuxième type de périmètre regroupe quant à lui l'ensemble des quartiers politiques de la ville qui pourront se rabattre sur le projet de TCU et qui bénéficieront alors d'une meilleure accessibilité aux aménités. Dans le cas de parcs relais créés en bout de lignes de TCU, il faut également s’intéresser aux territoires d'origine des usagers de ces parcs. Toutefois, nous ne pouvons pas connaître les territoires d'origine des usagers des éventuels parcs relais avant leur création. Ainsi, la définition d'une aire d'étude ex-ante est souvent difficile. Il faudra faire des hypothèses pour délimiter les zones d'études en sachant que selon les découpages choisis les effectifs dénombrés ne seront pas identiques, les résultats d'analyse de mobilité seront différents. Idéalement, plusieurs aires géographiques d'analyse sont à utiliser.

La possibilité de mesurer les parts modales avant et après sur une zone définie demande à faire attention à l'information zonale dont on dispose. Un modèle de transport dit agrégé n'informe que sur des évolutions de zones émettrices ou réceptrices de trafic. Dans ce cas, les données ne renseignent pas sur les phénomènes d'adaptation des ménages. En aucun cas nous savons si ce sont les ménages qui ont changé de mode de transport ou si les évolutions des parts modales des zones sont dues au renouvellement des ménages par mouvement naturel ou migratoire. Autrement dit nous ne savons pas si les gens se sont adaptés en changeant de mode de transport, en changeant de lieu de résidence par les mécanismes de la pression foncière, en disparaissant ou en arrivant avec l'intention de pratiquer une mobilité différente. Pour en savoir plus, il nous faut alors des données sur les zones avec, si possible, des données sur les migrations résidentielles. Les aires géographiques d'analyse doivent en outre être définissables sur tout le territoire national. Cela fait une grande quantité de données à obtenir.

21 Ministère de l’environnement, de l'énergie et de la mer. Aires d'études[En ligne] (Consultée le 28/03/2016) < http://www.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/III_-