• Aucun résultat trouvé

Les attributs et supports géographiques souhaités pour les données de

Chapitre 1 : Des données pour répondre aux changements de paradigme des

1.2 Les données sur la mobilité dans la perspective des nouveaux besoins des

1.2.1 Les attributs et supports géographiques souhaités pour les données de

développement durable

La richesse des attributs décrivant les individus et leurs déplacements a un coût et est aussi limitée par les règles de respect de l'anonymat. Le modèle (l'archétype) des données souhaitées dans le cadre du développement durable demande néanmoins une résolution spatiale fine et un certain raffinement des variables socio-économiques collectées pour construire des profils socio-économiques pertinents. Les supports géographiques doivent être relativement précis et offrir de nombreux attributs. Nous examinons d'abord la contrainte due au choix du support.

Les besoins exprimés par les fiches outils du ministère demandent la délimitation d'aires géographiques d'analyse cohérentes, restreintes ou élargies. Or, la façon de répondre à cette question détermine en partie les exploitations qui seront faites des données car selon les périmètres choisis, les mesures des distances, des parts modales et des autres indicateurs vont varier. Dès lors, comment garantir la confiance envers les mesures à faire dans les projets d'évaluation de transport? Cela amène-t-il à reconsidérer l'approche des fiches outils ? Peut- on répondre aux besoins exprimés par un seul, éventuellement deux référentiels géographiques d'analyse, ou faut-il pouvoir redéfinir des périmètres en fonction de chaque type de problème ? Ces questions amènent à définir les outils conceptuels que sont les « supports géographiques » des données de déplacement.

Pour formaliser les déplacements d'une population dans une base de données, deux supports de l'information géographique sont utilisés.

Nous appelons support géographique une discrétisation zonale d’un référentiel continu. Il est défini par sa résolution (surface moyenne des zones élémentaires composant le support) et sa couverture24. Ainsi les caractéristiques d'un support (maillage lorsque les zones le composant

sont régulières ainsi que sa résolution) induisent le choix de l’échelle d’analyse. Une échelle peut être définie comme la dimension spatiale à laquelle les entités, les modèles ou les processus sont observés et caractérisés (Marceau, 1999). D'autres auteurs définissent la notion d’échelle par deux composants : le grain et l'ampleur(« extent ») (O’Neill et King, 1998). Le premier est l’unité spatiale minimale recueillant les observations. Le deuxième est bien la couverture totale de la zone des observations. Ces deux paramètres sont identiques à ceux utilisés pour définir un support géographique. On peut donc poser la définition d’une échelle est équivalente à celle d'un support utilisé pour découper un territoire.

La construction d’un support pour mettre en données et analyser des déplacements est une réunion de deux supports. Un premier pour les origines, un deuxième pour les destinations (illustration 8). La réunion ou produit de deux supports géographiques identiques pour

24 D’autres critères sont pris en compte pour définir un maillage. Parmi eux se trouve sa dimension (2D, 3D). Si nous raisonnons en 2 dimensions, le volume au sens de l’ampleur (étendue) du maillage est égal à son aire.

Illustration 8 : Construction d'une matrice de déplacement à l'aide de deux supports géographiques

formaliser les déplacements est une matrice origine-destination. Pour compter les déplacements entre ces zones, nous construisons en effet un tableau à double entrées. Chaque case du tableau permet alors de comptabiliser le nombre de déplacements effectués d’une zone à une autre, appelé « flux ». Avec l'illustration 8, nous remarquons que ce formalisme modifie l'information sur la géométrie des déplacements parce qu'il réduit la précision des lieux d'origine et de destination.

Nous mettons là le doigt sur un élément important de cette thèse : l'agrégation des déplacements dans une matrice de flux peut biaiser les distances des déplacements enquêtés. Il faut se demander quelles en sont les conséquences sur la mesure des distances et sur les autres indicateurs qui en découlent. Pour produire ces indicateurs avec le minimum de biais dû au support, il faut connaître la localisation des extrémités des déplacements le plus précisément possible. Concrètement, il faut connaître les lieux de résidence et d'activités à l'adresse, voire plus précisément dans le cas de très grandes parcelles, comme les grands ensembles ou certains sites industriels. Cette adresse peut être collectée par des enquêtes de terrain mais leur vérification et leur traitement sont longs et très coûteux et leur exploitation risque de ne pas respecter la règle de l'anonymat.

La collecte de données sur les déplacements s'effectue néanmoins avec difficulté sur un support de grande résolution. Un déplacement est une action éphémère. Les déplacements sont produits en très grand nombre. Les enquêtes ne font donc que collecter un petit échantillon de déplacements. Les déplacements diffèrent par leur motif, le mode utilisé ou par le moment de leur réalisation, mais la plus grande différenciation des déplacements vient de la localisation des origines et destinations qui peuvent varier presque continûment sur tout un territoire.

Une enquête statistique collecte des déplacements. Cet ensemble collecté peut être vu comme des échantillons de la mobilité d'un échantillon d'individus. Cela permet de comprendre les logiques individuelles de la mobilité. Il peut aussi être vu comme un échantillon de l'accessibilité générale à l'intérieur d'un territoire.

Vouloir que ces échantillons soient représentatifs peut conduire à des stratégies de sondage différentes, plus ou moins coûteuses et compatibles avec les budgets des autorités organisatrices de transport. Avoir un échantillon représentatif de la mobilité d'un individu demande de l'observer pendant une longue durée, ce qui augmente le prix de l'enquête pour un individu. Il devient donc difficile de constituer un échantillon d'individus socialement et

spatialement représentatif de la population d'un territoire. La représentativité de l'accessibilité d'un territoire pourra s'analyser par une matrice entre zones.

Mais plus une zone est grande et plus les comportements de mobilité en son sein sont supposés différents. Par exemple, il existe un gradient d'utilisation des transports en commun selon la distance d'accès. L'utilisation d'un zonage amène à postuler que l'écart de distance d'accès à un même point d'accès entre les observations n'existe pas ou tout du moins n'est pas significatif. Pour observer le rayon d'attraction d'une station de transport en commun il faudrait découper l'espace avec plusieurs zones de suffisamment petites tailles pour ne pas faire d'hypothèse de construction trop forte.

Par construction, l'utilisation d'un support fin amène à devoir effectuer un tirage au sort bien réparti dans l'espace pour disposer d'observations pour l'ensemble des zones du support. Les variations dans le temps ont aussi de l'importance.

Les Enquêtes Ménages-Déplacements (voir ci-dessous) représentent un compromis entre ces trois objectifs de représentativité (spatiale, sociale et individuelle) et les budgets disponibles qui privilégient les territoires des grandes agglomérations. Toutefois, en reprenant les besoins exprimés par les fiches du ministère, nous devons tendre à caractériser la demande de déplacements sur tout le territoire. Nous devons connaître les modes de transport et les profils socio-économiques permettant de comprendre les logiques des choix contraints. Nous devons abandonner le formalisme de la matrice de déplacement et traiter de fichiers de mobilité représentatifs des logiques spatiales et sociales de la mobilité comme proposé par les Enquêtes Ménages-Déplacements. Dans le paradigme de la mobilité durable les éléments à distinguer sont donc nombreux. Pour pouvoir stocker l'ensemble des informations nécessaires il convient de disposer de fichier de déplacements pondérés. Chaque ligne du fichier décrit une observation. En colonnes, nous disposons des variables décrivant : les déplacements avec des variables de localisations se référant à un support géographique, les caractéristiques socio-économiques des individus et les poids de sondage relatifs au taux d'échantillonnage. Le couple des variables de localisation peut se référer à des supports différents, par exemple un support pour les zones centrales, un autre pour les zones périphériques. Un couple de deux variables de localisations constitue ce qu'il est communément appelé un couple origine- destination qui est la formalisation géométrique la plus simple d'un déplacement. On lui adjoint des données attributaires, généralement définies comme suit.

Les données attributaires décrivant les couples origine-destination

-Un motif : Un déplacement est un moyen d'accès et pas une fin en soi. A chaque

déplacement correspond un motif. Les données de mobilité doivent renseigner sur le chaînage de ces déplacements. Autrement dit, nous devons connaître les schémas d'activités. Certaines de ces activités sont plus ou moins récurrent dans le temps et structurent l'ensemble des autres motifs de déplacements. Parmi les motifs les plus récurrents, le motif domicile-travail fera consensus pour la population des actifs (Quetelard, 2010). Il est donc intéressant de disposer de données de déplacement sur ce motif et les aménageurs peuvent prévoir grâce à elles la demande en heure de pointe.

-Les modes de transport : Comme nous l'avons vu dans la présentation des évaluations ex-

ante et ex-post, il est indispensable de disposer d'une information fine sur les parts modales des modes de transport. Dans le cadre de la mobilité durable, il faut savoir si l’utilisateur peut utiliser un mode de transport autre que la voiture personnelle. Le choix du système de transport est l'expression des contraintes d'accès aux différents lieux d'activités. Nous devons observer les distances d'accès aux points d'entrées des réseaux du système de transport (distance aux parkings, aux stations de transports en commun, aux stations d'auto-partage, aux co-voiturage). Cette connaissance des aires de rabattement nécessite de disposer d'un support suffisamment fin pour pouvoir différencier les points de génération de trafic (lieu de résidence et d'activité) et les points d'entrée aux systèmes de transport.

-La succession des trajets décrivant les itinéraires des couples origine-destination: La

connaissance de la succession des variables de localisation formalisant la géométrie des trajets est en théorie possible. Cette succession de trajets permet de coder les itinéraires des déplacements, à la condition, comme précédemment, de disposer d'un support suffisamment fin pour pouvoir bien différencier les localisations. D'un point de vue pratique les enchaînements de petits trajets (notamment à pied) composant les déplacements sont difficilement observables et donc difficiles à mettre sous forme de données. Les fiches méthodologiques précisent que les enquêtes peuvent permettre de recourir à une modélisation de trafic capable de construire ces enchaînements de trajet. Selon les règles méthodologiques en vigueur, il n'est pas nécessaire de les enquêter car trop coûteux pour l'enquêteur (Certu, 2003). Dans bien des enquêtes, nous ne connaissons pas la succession spatiale des trajets composant les déplacements, ou seulement les principaux.

-Les profils socio-économiques : Comme nous l'avons vu le fait d'agréger spatialement les

observations à l'aide d'un support de l'information géographique réduit la précision de localisation des individus. L'objet d'une analyse statistique est d'expliquer les différences de comportements de mobilité et de choix de systèmes de transport entre les individus d'une même zone. En disposant de nombreuses variables décrivant les individus nous pouvons alors essayer d'expliquer des logiques de comportements en construisant et en observant divers profils socio-économiques.

-Dates, heures de départ et d'arrivées : Pour comprendre les choix de mode de transport et

plus globalement les chaînes d'activités il est indispensable de connaître les dates mais aussi les horaires permettant de mesurer les durées des schémas d'activités. Ces informations permettent de comprendre les choix de mode de transport et les phénomènes de congestion (d'heures de pointe) ainsi que les logiques d'emploi du temps des individus dans leur ménage.

Précisions que les variables attributaires caractérisant les couples origines destinations sont présentées séparément mais ces variables sont en interdépendance : le motif, l'heure, les possibilités d'accès aux différents systèmes de transport, le profil socio- économique de la personne, l'itinéraire à parcourir sont des éléments à considérer ensemble pour expliquer la mobilité des individus. De plus, nous devons disposer de l'ensemble de ces éléments sur un support spatial suffisamment fin pour pouvoir étudier les distances d'accès au transport en commun, mais nous pouvons recourir pour cela à de la modélisation qui peut s'appuyer sur d'autres données. Et bien entendu, il est impératif de connaître ces informations pour l'ensemble de la population du territoire national.

1.2.2 Les données de déplacement produites par la